-Tu es un garçon perdu ?

Alex esquisse un nouveau sourire à mi-chemin entre l'embarras et la fierté.

-Oui je fais parti de l'équipage de Peter depuis ...toujours.

Il fronce les sourcils comme s'il lui était impossible de se souvenir de la date exacte.

-C'est assez délirant à croire.

Alex s'assoit au bout du lit toujours pensif. Puis il est secoué d'un rire amère, son regard traçant la ligne du bois au sol.

-Alice, je ne sais pas ce que tu as lu dans les livres. Mais oublie tout ce que tu sais sur Neverland, oublie tout ce que l'on t'a raconté sur Peter pan, les indiens, les sirènes et ...le Capitaine Cro...

-Mais quel charmant tableau, l'interrompt une voix posée et pourtant autoritaire.

Peter pénètre dans la cabane une petite fiole au liquide violacé en main. Alex cesse immédiatement la discussion que nous venions d'entamer et se lève pour saluer son chef.

-Non je t'en prie Alex, il me semble que tu allais nous apprendre des choses importantes.

Le brun déglutit, il serre ses poings le long de son corps, ses épaules s'abaissent sous le poids de la culpabilité. Il paraît soudainement plus petit et craintif, devant lui Peter s'avance pour se retrouver à sa hauteur, les deux garçons ont une carrure très similaire, presque comme deux frères.

-Tu devrais le savoir mieux que quiconque ici Alex...

Peter approche son visage de l'oreille du garçon et souffle d'une voix presque inaudible.

-..le seul à craindre et respecter sur cette île...c'est moi.

D'un geste ferme Peter pose sa main sur la nuque d'Alex, le visage baigné d'un sourire sadique qui fait courir le long de mon dos un frisson d'effroi.

-Bien sûr Peter.

Les yeux rivés sur le sol, Alex s'incline légèrement devant le blond puis quitte la cabane sans relever la tête. Me laissant seule avec cet étranger qui semble bien loin du personnage décrit dans les contes.

Sans un mot Peter se retourne vers moi, immédiatement ses yeux plongent dans les miens, le même sourire toujours collé au visage.

Il entreprend de s'assoir là où se tenait le brun quelques minutes auparavant. Entre ses mains il fait jouer la petite fiole au contenu violet, sans douter un seul instant de la faire tomber au sol.

-Alex dit vrai.

Le froid qu'inspire sa présence est le total opposé de la chaleur rassurante qu'émanait le brun avant lui.

Soudainement sortant du fond de sa gorge, il explose d'un rire sincère, aux notes délirantes. Il explose de rire les yeux grands ouverts fixant la fiole et le corps parcouru de spasmes.

-Fais attention à toi Alice, Peter Pan est un fou.

Son aveu lui provoque une nouvelle vague de rire qu'il peine à calmer. Peter semble être dans un état de transe incontrôlable qui me terrifie.

Recroquevillée sur le coin du lit, je jauge la sortie de la cabane d'un œil envieux. Si je cours, peut-être que...

-Il va falloir être bien plus maligne que cela..

Peter murmure ces quelques mots dans mon oreille et le frisson de dégoût que cela m'inspire fige mon corps de la tête aux pieds.

Fermement sa main agrippe mon cou et son visage se retrouve à quelques centimètres du mien. La peur fait monter et descendre ma poitrine rapidement. Les yeux dans les yeux nous nous regardons durant ce qui parait durer une éternité.

-Lâche-moi, articulais-je difficilement.

Rapidement sa poigne devient plus forte et l'air ne passe plus dans ma trachée.

-Peter ...tu vas me tuer...

J'accroche son avant-bras de toutes mes forces avec ma main libre mais mon geste est aussi inutile que désespéré.

 -De quelle sorte de naïveté es-tu affublée pour mourir lors de ton premier jour sur Neverland ? Tout ça à cause d'une malheureuse ..petite..chenille.

Peter prend le temps de scruter attentivement mon visage rougissant sous sa pression, il ricane puis relâche sa main d'un mouvement sec, me griffant la gorge au passage. 

Immédiatement je suis prise d'une forte toux et inspire goulûment l'air qui commençait à tant me manquer.

Sans un mot, Peter ôte le bouchon de la fiole, saisit mon menton d'une main puissante et verse la mixture violacée dans ma bouche grande ouverte.

Le goût amer qui inonde ma gorge est absolument exécrable. Je n'ai pas d'autre choix que d'avaler afin de reprendre ma respiration.

-Tu es malade ! hurlais-je en repoussant Peter avec mes pieds.

Malgré le puissant coup de pieds que je lui assène, le blond ricane et se relève en passant une main dans ses cheveux ondulés.

-J'espère que tu n'as rien contre quelques petites hallucinations Alice.

-Qu'est-ce que tu m'as fais boire ?!

Peter se dirige vers la porte. Progressivement je perds le contrôle de mes gestes et mon corps lourd retombe sur le lit. Me voilà paralysée de la tête aux pieds.

-C'est un médicament puissant de ma préparation personnelle. Mais il y a quelques effets secondaires inévitables. Essaie de ne pas sombrer dans la folie.

Impuissante je le regarde s'éloigner sans un regard en arrière. De longues secondes s'écoulent durant lesquelles je retrouve enfin mon souffle lorsqu'une ombre passe par la fenêtre, attirant mon attention. 

Des pas résonnent sur ma gauche, dans mes paupières mes yeux bougent comme des fous, je voudrais hurler, appeler à l'aide, mais aucun son ne sort de ma bouche.

Une main squelettique à la peau grisâtre agrippe le bord du lit et les vieux draps. Telle une poupée désarticulée une jeune femme se dresse au dessus de moi, ses os craquants au moindre de ses mouvement et son haleine suffocante me brûlant les narines, elle ouvre la bouche pour vomir sur mon ventre un mélange de sang et de boue. Ses cheveux emmêlés et luisants font glisser sur mes bras des algues à la texture rebutante.

J'aimerais hurler, j'aimerais pleurer et m'enfuir. Lorsque ses yeux gris, dénués de couleur et de vie croisent les miens, je sens s'enfoncer dans mon cœur la douloureuse lame du regret.

-Ma...man.

La créature m'examine minutieusement, son visage presque collé au mien. Elle n'est pas réellement ma mère, les morts ne peuvent pas revenir parmi les vivants...c'est impossible !

D'un geste lent, elle enfonce ses ongles noirâtres dans la plaie de mon bras infecté et je me sens hurler si fort au plus profond de moi-même que mon âme en personne ressent la douleur infligée par cette abomination.

Plusieurs fois elle charcute mon bras, fouille à l'intérieur et lacère le moindre petit bout de peau.

Quand soudain la douleur atteint son apogée, je n'entends plus les gémissements rauques de la bête. Une douce chaleur m'inonde et réchauffe mon dos puis mes jambes. Ma tête est aussi légère que les nuages filants sur une douce brise d'été. Mon cœur ralentit, bercé par cette chaleureuse étreinte.

-Doucement c'est fini Alice, calme-toi.

A travers mes cils, je distingue le menton d'Alex qui me serre contre lui. Son contact est doux et rassurant. La bête a disparu.

-Essaie de dormir, tu te sentiras mieux après.

Alex m'allonge sur le lit, au dehors l'éclat de la lune traverse la fenêtre et vient s'écraser sur le sol de bois.

-Je vais rester avec toi, alors dors sans crainte.

Il rabat une couverture sur mon corps endoloris. Sans même avoir le temps de le remercier je sombre dans un sommeil profond et sans rêves.



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FINI !!!!!
Ce chapitre est court j'en suis désolée ^^ mais ne vous inquiétez pas voici tout de suite le prochain chapitre !!!
N'hésitez pas à commenter et à voter !!!! <3

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