~ Chapitre 1 Thessa ~

Depuis le début
                                    

C'est pourtant lui qui m'a encouragé pour ce stage et maintenant il est... triste ?

La bonne blague !

Je décide de ravaler mon sarcasme parce que je sais que c'est pour mon bien. Mais quand même !

— Fais-moi une promesse, Thessa. Promets-moi qu'on se téléphonera tous les jours et qu'au moindre problème tu n'hésites pas à appeler !
— Oui, c'est promis !

Je vois un peu de soulagement sur son visage. Après une dernière caresse d'au revoir à Whisky et quelques friandises, je ferme le box en poussant le verrou dans le passant. Je rassemble mes affaires qui traînent ici et là. Tom m'aide en rapportant la selle et la bride dans la sellerie. Et nous dirigeons tous les deux dans la voiture. Une fois installés, Tom met le contact et la radio se déclenche d'elle-même sur une des chansons de Led Zeppelin : Stairway to Heaven. Il y a à peu près vingt minutes de route pour rentrer à la maison. Sur le trajet, je ne parle pas, préférant écouter la musique. J'aime m'enfermer dans ma bulle, ma bulle protectrice. J'entends vaguement mon frère chanter les paroles de la chanson.

There's a feeling I get when I look to the west
And my spirit is crying for leaving
In my thoughts I have seen rings of smoke through the trees
And the voices of those who standing looking
Ooh, it makes me wonder
Ooh, it really makes me wonder

J'essaie de m'imaginer ma vie à partir de demain, dans ce ranch. Je n'ai accepté de partir que parce que le propriétaire est une femme. Je ne connais que son prénom : Kelly. D'après le directeur, cette femme est d'une gentillesse à toute épreuve. Ça devrait suffire pour me rassurer, non ?

Oui, ça devrait.

Pourtant, j'angoisse à l'idée de me retrouver seule, sans mon frère. C'est mon pilier, sans lui, tout s'effondre.

Je suis perdue dans mes réflexions que je n'entends pas la voix de Tom.

— Excuse-moi, je n'écoutais pas. Peux-tu répéter ?
— Ouais, je vois ça, me dit-il en rigolant. Je disais que j'avais une idée pour ta dernière soirée ici. Et si l'on allait au restaurant tous les trois : maman, toi et moi. Ça te tente ?
— Euh... pourquoi pas ?

Je n'ose pas lui montrer que je suis réticente. Il sait pourtant que les endroits où il y a beaucoup de monde me stressent.

— Mais d'abord, allons terminer ta valise ! Sur ces mots, ils ouvrent la portière et il sort de la voiture.

Je le suis jusqu'au petit perron. Il insère la clé et me laisse entrer la première, comme il l'a toujours fait. Ma mère doit être encore en train de dormir après sa nuit de garde à l'hôpital. Je passe rapidement par la cuisine pour me laver les mains et me servir un verre d'eau. Je donne à mon frère s'il en veut un également. Mais il décline tout en me rejoignant.

— Qu'est-ce qu'il te reste à faire ? me demande-t-il.
— Juste à mettre mes affaires dans mes valises. Ça ne prendra pas très longtemps, je pense.
— Très bien ! Tu as bien suivi mes conseils ? Tu as fait une liste pour ne rien oublier ?
— Oui, oui, je réponds. J'ai tout noté comme tu me l'as dit. Tu pourras vérifier si tu veux.

Après avoir terminé mon verre, je le pose dans l'évier et je me dirige vers les escaliers, mon frère sur mes talons. Nous montons ensemble les marches sans faire de bruit pour ne pas réveiller notre mère. Arrivés sur le palier, nous entrons dans la première pièce à droite. Ma chambre est très simple et assez petite. Il n'y a pas de décorations aux murs, pas de posters, pas photo. En réalité, je les ai enlevées après cette nuit-là. Je la préfère ainsi, morne comme moi. Je montre à Tom mes affaires pliées sur mon lit. Je pars pour quatre mois, je dois prévoir large. Alors, il y a plusieurs pantalons, des t-shirts à manches courtes et à manches longues, quelques pulls, juste au cas où. Je n'ai d'ailleurs pas oublié les sous-vêtements, une trousse de toilette et des chaussettes et chaussures.

Mon frère quitte ma chambre pour aller chercher une valise dans le débarras et il revient quelques minutes plus tard. Ensemble, nous mettons mes vêtements dans le bagage. Une fois terminé, Tom récupère la liste en papier de mes affaires que j'ai posé sur ma table de nuit. Je sais qu'il fait cela pour mon bien, mais ça m'énerve un peu qu'il m'infantilise. Mais c'est plus fort que lui, vérifier que tout est bon pour moi le rassure. Le temps qu'il termine sa lecture, j'attrape mon sac à dos, et je commence à le remplir : livres, portefeuille, argent, chargeur de téléphone, et mes médicaments. Sous l'œil attentif de mon frère, je referme mon sac que je pose à côté de ma valise.

— Voilà, je crois que tu as tout pris, me dit Tom. Les plus importants ce sont des papiers, et tes médicaments.

Je m'assois sur le lit en hochant la tête. Il prend place à ma droite.

— Notre avion décolle à quelle heure déjà ? je lui demande.
— À 10 heures, et nous devons être à l'aéroport pour l'enregistrement vers 9 heures. Je sais que ça fait tôt, mais tu pourras te reposer dans l'avion.
— Impossible, murmuré-je, je serai trop stressée pour fermer l'œil la nuit et encore moins dans cette machine volante...
— Ne t'inquiète pas, sœurette ! Je serai avec toi le premier jour. Tout va bien se passer, d'accord ? C'est une chance que tu dois saisir.

Tom a raison, je dois réussir à avancer. Je dois plus me contenter de survivre.

Je veux vivre, bordel !

Des bruits se font entendre, suivis d'une porte qui se referme. Des pas résonnent dans le couloir. On toque à ma porte et cette dernière s'ouvre. Ma mère entre dans ma chambre et nous embrasse tous les deux avant de s'asseoir à ma gauche. Même si je ne supporte plus les contacte des autres, avec elle je les tolère.

— Ma puce, tu as terminé tes valises ? me demande-t-elle en regardant les bagages à côté de Tom
— Oui, on a fini à l'instant, réplique à ma place mon frère. D'ailleurs, maman, il se fait tard, et je voulais emmener Thessa au restaurant. Tu viens avec nous ?
— Bien sûr que je vous suis ! Je ne vais pas rater la dernière soirée de ma chérie, répond ma mère en me frottant le dos de sa main. Ce geste a toujours eu le pouvoir de me calmer.
— Comme je suis la reine de ce soir je propose italien alors. Ça vous va ? je demande.

Tous les deux acquiescent. Nous nous levons en même temps. Nous récupérons nos affaires pour un départ imminent. Nous sortons et je suis la dernière à sortir. Mon frère ferme à clé après moi. Ma mère prend le volant, Tom à l'avant, et moi derrière lui.

Et c'est parti pour l'ultime soirée de mon ancienne vie...

The Wild BrothersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant