10.1 - Le campement

Depuis le début
                                    

Zora finit inexorablement par se diriger vers nous et mon cœur palpita plus vite à cause du stress. En l'observant, je n'eus plus aucune envie de le quitter. Toutes mes réflexions et mes choix se brisèrent et je perdis le courage que j'entretenais depuis des heures. De toute façon, le résultat serait le même que je le délaisse ce soir ou demain...

Mon comportement de girouette n'avait aucun sens. Mais trop de concepts s'entrechoquaient, je ne parvenais plus à les démêler. En conséquence mes idées faisaient des nœuds, m'ôtant toute cohérence dans mes décisions. Loin de se douter du tumulte qui faisait rage en moi, Zora s'approcha puis remonta mon menton d'un doigt.

— Tu as l'air épuisé.

— Je le suis, lui confiai-je. Est-ce... Est-ce qu'on peut parler au calme ?

Il fronça les sourcils. Il devait sentir ma peur, comme les prédateurs, pensai-je.

— Suis-moi.

J'obéis, serrant le sac contre moi et nous sortîmes du stand. Nous traversâmes quelques rues puis dégotâmes une assise libre sur l'une des micros-places de la ville. Celle-ci était constituée d'une fontaine où une représentation d'Elysia la montrait debout dans sa robe en lambeaux, tenant une cruche, penchée vers le sol, d'où l'eau s'écoulait. Entourée de quelques bancs, la fontaine apportait de doux clapotis à l'ambiance déjà apaisante du lieu.

Nous y prîmes place en silence, tandis que la cité grouillait de bruits lointains. Sous mes pieds, l'herbe fine fournissait un peu de fraîcheur à ce coin ombragé et tout autour de nous, des oiseaux chantaient, perchés sur les branches d'arbres fruitiers qui poussaient à divers endroits de l'oasis.

— Qu'est-ce que tu as à me partager ? s'enquit-il.

Je soupirai, découragé par la suite. Je pivotai sur le banc afin de lui parler bien en face et il se tourna un peu aussi.

— Écoute... à vrai dire, je ne sais pas trop comment débuter, alors je vais me montrer concis. Il faut qu'on arrête.

Son visage ne trahit aucune émotion. Comme il ne semblait pas vouloir prendre la parole, je m'en chargeai.

— Tu dois comprendre que... Ce qu'on expérimente, j'adore ça, avouai-je. Je souhaiterais continuer toute ma vie ! Si je pouvais m'enfuir avec toi, voyager...

Mon sourire mourut, remplacé par une amertume tenace.

— Mais je ne peux pas, repris-je. Si je te suis, Lya finira dans les quartiers sud. Elle y sera envoyée par ma faute ! Comment est-ce que je pourrais vivre en sachant ça ?

— Tu veux qu'on arrête de se voir parce que tu ne peux pas venir avec moi ? résuma-t-il d'un ton neutre.

— Si je continue à te côtoyer, je deviendrai incapable de supporter ma vie lorsque tu partiras. Tu sais, le conte que nous avons écouté à l'amphithéâtre ? Je t'avoue qu'il m'a donné une porte de sortie assez inattendue.

Cette fois, il réagit. Il fronça les sourcils de façon subtile, mais qui modifia toute la dynamique de son visage. Lui dire tout ça était inutile. De toute façon, il ne pourrait rien faire. Je devrai affronter ce mariage seul, élever ces enfants qui m'écœuraient avec une femme que je n'aimais pas. J'étais condamné à me sentir malheureux. Pourtant, formuler à voix haute ce que je prévoyais me soulageait d'un poids.

— Je comprends, déclara-t-il après un petit temps de réflexion. Dans ce cas, laisse-moi te faire une dernière proposition. Ce soir, je vais t'emmener au campement. Si tu m'accordes jusqu'à demain matin, j'accepterai la requête indécente que tu me soumets sans discuter.

Shenzi, qui s'était faite discrète depuis que nous étions arrivés au marché, sauta sur mes genoux et pleura. Elle comprenait mon sentiment de tristesse, mais je ne savais pas si elle saisissait la situation. En tout cas, elle tentait de me consoler, alors je lui souris, souhaitant me montrer sous un meilleur jour.

Mirage [MxM] [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant