Chapitre 17 - En prendre plein les mirettes

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Il faisait nuit noire quand j'ai terminé d'empiler mes livres sur la table, le long du mur. (une bibliothèque ne serait pas de refus). Je me suis allongée dans mon lit méga king size pour m'y endormir dans la minute. C'est Jafro, alias boucle d'or, qui me réveille pour m'apporter un petit déjeuner typiquement humain : de la brioche avec de la confiture. Il en profite pour me montrer le fonctionnement de la machine à boissons chaudes. Je me fais couler un substitut de café à base d'amandes torréfiées. Pas terrible.

— D'où vient cette brioche ? demandé-je.

— Houlm est notre spécialiste en gastronomie humaine, me répond mon interlocuteur en s'asseyant, croyant à tort que ma question était une invitation. Elle s'y est très vite intéressée.

— Elle ?

— C'est une domestique, une de nos rares femelles.

— Elle a choisi de glisser dans un corps masculin ?

— Non, nous avions besoin rapidement de domestiques et les premiers mois, nous n'avions intercepté que des vaisseaux militaires ne contenant que peu de femelles. Et ce sexe est bien plus sensible au glissement, les premières ont succombé, il a fallu adapter le processus. Beaucoup ont donc glissé dans des corps masculins. Mais Houlm est ravie de ce changement de sexe, elle dit se sentir mieux ainsi. Le contraire n'aurait de toute façon pas changé grand-chose.

— Oh, je vois. Ça devient compliqué à suivre. Bref, c'est donc une domestique. Ce qui explique pourquoi il n'a... elle n'a pas un corps aussi athlétique que les selcyns que j'ai pu croiser.

— Pourquoi une domestique aurait besoin de s'entraîner ? Et nous réservons le flaster aux urgences et aux castes supérieures.

— Ce n'est pas ce genre d'injustice qui a provoqué votre guerre sur Selcyon, et accessoirement la destruction de votre planète ?

— Hum. Kalen vous a raconté.

— Dans les grandes lignes. Je n'aime pas savoir que votre arme tourne en orbite autour de ma planète.

— Le canon noir n'est plus utilisable, m'assure Jafro.

— Mais votre Grand Consul a pris la peine de l'apporter jusqu'ici. Étrange.

— En effet, j'imagine qu'il ne voulait pas laisser un si terrible danger potentiel sans surveillance.

— Quelle grandeur d'âme, réponds-je avec sarcasme.

— Je ne dirais pas ça de lui... Est-ce que le chef Kalen a abordé avec vous les raisons de votre venue ici.

— Oui, et je vous conseille d'éviter le sujet si vous ne voulez pas finir avec une poule au travers de la gorge !

Jafro me regarde sans ciller. S'il attend des explications, il va rester comme ça un moment. Je mords rageusement dans ma troisième tartine (c'est tellement bon). Mon invité imposé finit par baisser le regard pour se saisir d'un biscuit dégueu. Il le mange sans émotion aucune. Mettre en bouche, mâcher, avaler, recommencer. Mais comment peut-il ingurgiter un truc pareil ? Je prends une mine dégoutée qui le fait tilter.

— Lyna, vous devriez manger du gjustre, votre système immunitaire s'en trouverait amélioré, vos cellules assainies. Ainsi, vous préviendriez l'apparition de maladies incommodantes et potentiellement létales.

— J'ai du mal à croire que ce truc immonde puisse me faire du bien, rétorqué-je, sceptique.

— Et pourtant, c'est grâce à cela que nous, les selcyns, ne tombons jamais malades. Nos chercheurs ont mis trois ans à effectuer les nouveaux réglages de l'appareil à gjustres pour créer une nourriture adaptée à nos nouveaux corps. Certains ont malheureusement péri lors des premiers essais, essentiellement des Scalts, nos domestiques et testeurs.

Corps étrangers [TERMINÉ] Unde poveștirile trăiesc. Descoperă acum