Chapitre 35 - Retourner sa veste

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Sam s'empresse d'enfermer Lee. Nous l'attendons au bout du couloir, trempés à cause du système d'arrosage. Loin de m'en plaindre, je laisse la fine pluie humidifier mes lèvres si sèches et ouvre la bouche pour m'hydrater. Chaque respiration m'est douloureuse, mais ce n'est pas le moment de me plaindre. J'aurai bien le temps pour me faire soigner quand Hassan aura arrêté ce fou furieux.

Gatien me regarde avec prudence, s'attardant sur les marques de tortures laissées par le général sur mes bras et mon ventre dénudé (mon bourreau m'a débarrassé de mon tee-shirt d'un coup de couteau et je me retrouve donc en brassière). Je n'ai pas l'impression qu'il est convaincu que je sois bien moi. Je bredouille un remerciement qu'il accueille par un hochement de tête, puis je reporte mon attention sur Mei sur qui je m'appuie pour tenir debout. La pauvre va avoir le visage marqué. Je l'embrasse sur la joue et elle resserre son étreinte autour de ma taille. Je grogne de douleur et elle relâche immédiatement son geste en m'adressant un sourire triste. Au moment où Sam nous rejoint, le massage d'alerte cesse et l'eau est coupée. Je vois la panique gagner son regard.

— Vite ! nous ordonne-t-elle. Les responsables de la sécurité arrivent !

Nous nous précipitons à sa suite, mais je n'arrive pas à tenir le rythme, malgré l'aide de Mei. J'émets des sifflements contenus sous l'effet de la douleur. Purée de chiotte, quelle sensation effroyable ! J'ai l'impression que mes poumons refusent de se gonfler pour prendre de l'air. Gatien finit par nous venir en aide pour nous faire accélérer, m'arrachant un nouveau gémissement plaintif.

— Pourquoi t'a-t-il torturé si tu es bien Lily ? me demande mon ex avec froideur.

— Parce qu'il pense que j'ai des informations capitales sur les selcyns à lui donner, et aussi parce qu'il me déteste.

— Je rajouterai qu'il aime ça, grommèle Mei. Il a grave pris son pied, ce bâtard. Je suis presque sûre qu'il band...

— Je t'ai vu embrasser un de ces aliens sur la vidéo qu'il nous a montré, la coupe Gatien.

— Oui, commencé-je, gênée. En fait...

— Oh non ! crie Sam.

Devant nous, les épaisses portes coupe-feu sont hermétiquement fermées. Les petits hublots qui les composent nous permettent de voir trois soldats faisant le pied de grue de l'autre côté. Les hommes de Lee, nous apprend Gatien. Ces derniers nous regardent avec stupeur avant de filer à toutes jambes sans même essayer de nous ouvrir. Sam se met à cogner de toutes ses forces sur les parois, puis elle appuie comme une folle sur l'interphone. Un courant d'air nous informe que les ventilations ont été ouvertes au maximum. Je frissonne. Le froid, la douleur, la faim, la soif... quand ce cauchemar va-t-il se terminer ? J'entends la jeune lieutenante communiquer notre situation à son interlocuteur sans parvenir à saisir ses mots. Je comprends seulement qu'elle demande à ce que Hassan soit mis au courant. Elle compte sur la clémence de son beau-père pour nous couvrir. Mei m'aide à m'assoir contre le mur et fait de même tandis que Gatien reste debout.

— Lily ! fait Mei en me secouant. Tu m'entends ?

— Hein ? Quoi ?

— Je te disais que je m'excusais de t'avoir droguée. Lee nous a persuadés, Gatien et moi, que tu n'étais plus toi. J'ai cru mourir de chagrin.

— Oh, je comprends.

— Il faut dire que la vidéo était plutôt explicite, ajoute Gatien en revenant à la charge.

— Il est impossible de forcer la sécurité anti-feu avant cinq minutes, intervient Sam. Je ne savais pas que nous serions bloqués, désolée pour ce plan foireux. Quelqu'un viendra nous chercher, mais je ne garantis pas un bon accueil. Le capitaine voulait savoir si le Général Lee était avec nous, j'ai seulement dit qu'il nous avait menacés et que nous l'avions enfermé. Inutile de préciser qu'il a goûté à mon taser.

Corps étrangers [TERMINÉ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant