Chapitre 2 - l'Incertitude-

Depuis le début
                                    

J'ai beau être en larmes par cette demande qui me lance dans mes entrailles, comme un coup de poignard, rien que de penser à lui, je souris. Il est ma force, mon soutien, mon plus grand réconfort quand je suis au plus mal, il est souvent de bons conseils et essaye toujours de me montrer le positif quand moi, je vois tout en noir.

J'ai une peur croissante de ne plus le satisfaire, qu'il pense que notre couple est devenu une routine dans laquelle il faut mettre du piment pour la réveiller.

J'ai tellement d'amour pour lui que je ne souhaite pas le décevoir, mais d'un autre côté je ne peux pas faire quelque chose qui est contraire à mes convictions. J'aimerais comprendre à quel moment, il a pu envisager le monde du libertinage, c'est la première fois qu'il m'en parle et je pensais notre couple sur des bases solides.

C'est totalement l'inconnu me concernant, je vois de quoi on parle, mais je ne connais strictement rien à ce monde et je n'en ai jamais parlé avec personne. Rien qu'à l'idée de m'exposer nue devant d'autres hommes, d'autres femmes, me donne la nausée. J'ai toujours été très pudique, je m'enfermais dans la salle de bain, je ne montrais jamais mon nombril étant adolescente, j'essayais toujours de rester habiller chez le médecin. Le seul qui m'ait vu en tenue d'Eve, c'est Ludovic. C'est le seul qui ait caressé tous les recoins de mon corps, qui arrive à trouver les bons mots pour me faire lâcher prise, qui m'aide à me découvrir dans mes envies de jeune femme, qui aime mon corps alors que je le lui trouve tant de défaut, et surtout qui sait me dompter, enfin en partie...

Pour autant j'ai gardé une carapace qui me protège, qui me permet d'être en alerte et de savoir poser mes limites. J'ai tendance à peu exprimer mes ressentis, mes envies. J'en connais un d'ailleurs, qui n'arrête pas de me pousser à parler, à m'abandonner, à me libérer, mais c'est plus fort que moi, je suis bloquée. Surement dû à une enfance stricte, ou je ne devais jamais réclamer, ou je ne devais jamais m'exprimer, j'entends encore une voix qui me dit : « les enfants à table, ça mangent, ça ne parlent pas ». J'ai donc fonctionné au fil des années avec ce discours qui s'est ancré dans ma mémoire. Une habitude n'est jamais simple à supprimer, celle-ci est tenace. Alors dire oralement ce que je désire sexuellement, c'est ...

Et maintenant, si je devais prendre la parole, je dirais que j'ai une peur incontrôlable de son envie actuelle, que je veux comprendre ce milieu avant d'envisager une potentielle ouverture. Je veux choisir sans pour autant faire souffrir l'homme de ma vie. Je veux pouvoir dire non, si c'est trop pour moi, je ne veux pas me sentir oppresser, me sentir en danger et ne pas pouvoir agir comme je le souhaite.

J'ai tellement détesté ma première fois avec Ludovic, non pas qu'il n'ait pris le temps nécessaire pour que ce moment soit inoubliable, mais elle m'a renvoyée à beaucoup de souffrance, que je ne l'ai pas appréciée. Certaines crient de joie, d'excitation, de plaisir et satisfaction de l'avoir enfin fait, moi j'aurais plutôt crié de douleur, dû au stress, à cette put*** de carapace. Alors si je décide un jour de franchir le pas avec lui, je veux le savourer, je veux qu'il fasse parti de notre histoire d'amour sans l'envahir, juste une parenthèse dans une routine, juste une étincelle pour raviver une flamme éternelle. Je ne veux pas que ça détruise tout ce qu'on vient de construire, sinon je ne m'en remettrais pas. Ludovic est mon roc, mon pilier, ma lumière dans le noir, ma cerise sur le gâteau. Je ne sais pas si vous comprenez mais l'amour que j'ai pour lui dépasse le ciel, l'univers et tout ce qui se raccroche, il a été ma bouée au moment le plus critique de ma vie et je ne veux pas le perdre et encore moins pour une histoire de fesses.

Depuis que nous avons eu cette conversation, je me fais des films dans ma tête, je pense au sexe hard, tordu, avec des pratiques humiliantes, dégradantes, avec des femmes objets et des hommes dominants. J'en fait des cauchemars, où je suis attachée sur une croix et qu'on me fouette tellement fort que ça rougit ma peau, elle est marquée par des lacérations, par du sang. Je me réveille en sueur comme si j'avais effectué un marathon. Puis je me rends compte que mes appréhensions se libèrent dans mon sommeil et me terrifient.

Avant tout autre chose, il va falloir que je me documente sur le sujet que j'en comprenne le sens. Plus j'aurais d'information, plus je pourrai appréhender ce monde et aller à sa rencontre.

Un mois s'est écoulé depuis que Ludovic a proposé qu'on se lance dans cette nouvelle expérience, et nous n'en avons pas reparlé, je pense que ma réaction à chaud l'a déstabilisé et qu'il n'a pas osé remettre ça sur le tapis. Il va falloir que je prenne mon courage à deux mains et que je lui présente mes excuses. Il me connait bien l'inconnu me terrifie et la peur m'envoie des signaux de tout arrêter, alors parfois je suis trop excessive et au lieu d'en comprendre les raisons, je préfère dire non pour ne pas craindre de souffrir ou d'être en position de faiblesse.

Je le regarde, il est à la fenêtre, il contemple notre jardin luxuriant d'une pelouse tout juste tondue et d'arbres fleuries aux notes rosées, plus loin poussent des fraisiers, les fleurs blanches sont illuminées par le soleil, et moi j'ai la vue embuée, des larmes coulent, j'ai peur de lui parler.

- Chéri, tu pourrais venir une minute, j'aimerai te parler ?

- Oui, j'arrive.

- (Je m'approche de lui et j'effleure son bras) j'ai longuement réfléchi à ta dernière proposition, et je suis d'accord pour en apprendre davantage.

- Attends, tu me parles de quoi là ?

- Et bah du libertinage ...

- Tu as changé d'avis ? tu veux qu'on participe à une soirée libertine ?

- Non non, tu vas trop vite là, je veux d'abord en apprendre davantage et en fonction j'aviserai, je te dis juste que je ne suis pas fermée à l'idée.

- (Un léger sourire aux lèvres) d'accord, si tu veux on peut en discuter avec Loïc et Johanna, ils ont déjà pratiqué et ils pourront te parler de leurs expériences ?

- Je ne savais pas qu'ils pratiquaient. Tu me diras ce n'est pas quelque chose que l'on crie sur les toits non plus. Tu peux leur proposer qu'on se fasse une soirée tous ensemble et en fonction de la conversation, je te laisserais en parler.

- Oui mon cœur, je m'en occupe. Merci merci d'avoir pris le temps d'y réfléchir, et même si tu n'as pas changé d'avis, je vois que tu veux aller de l'avant et rien que ça je suis heureux. Merci d'être dans ma vie Victoria.

Il m'embrasse tendrement et je sens mon cœur battre la chamade, entre lui et moi c'est une explosion des sens. On ne peut pas être fâché l'un contre l'autre. On s'aime beaucoup trop pour ça. Tout d'un coup j'ai un poids qui se libère de ma poitrine, comme si j'avais laissé traîner cela trop longtemps. Pour autant je ne pourrais amorcer la conversation sur le sujet, alors je le laisserais prendre les devants et poser les questions afin que je puisse avoir toutes les réponses nécessaires. Ludovic a le don de me lire comme un livre ouvert, même quand le son de ma voix ne transperce pas. 

L'âme d'une libertineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant