Le départ

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Le départ

De nos jours

— Chloé, tu es sûre de toi ? Tu peux encore faire demi-tour !

— J'en suis certaine.

— Je ne te comprends pas ! Pourquoi maintenant et pas il y a deux ans ou dans quatre ans ?

— Car je l'ai promis à Stephan et que j'ai eu 32 ans le mois dernier. Un an de plus dans ma misérable vie.

— Tout ça parce que tu vieillis ? s'esclaffa-t-elle.

Je soupirai, agacée.

— Pas que. Cela a juste contribué à m'ouvrir les yeux. J'en ai marre d'être la femme que je suis devenue. Depuis 6 ans, chaque jour, je me lève et me couche, tel un robot car c'est l'heure. Je n'ai aucun but. Je trouve tout terne, sans intérêt. La première année, je ne pensais pas pouvoir me relever, puis le temps a pansé les blessures jusqu'à finir par faire mon deuil. J'ai envie de rencontrer du monde, peut-être même flirter avec un homme - même si jusqu'à présent personne ne m'a procuré de frissons. D'ailleurs, je suis asociale au boulot, avec mon voisinage, même avec la boulangère. Tu es ma seule amie. Il est grand temps que je me reprenne en main. Il y a un mois, j'ai eu envie d'un meilleur avenir. Un besoin de me reconstruire, d'être aimée et aimer en retour. Je dois exploiter cet espoir. Je sens que c'est le moment d'y aller. Je pense être assez forte pour comprendre certaines choses, enfin... je l'espère. Et... et puis, je n'ai qu'une parole, je respecterai ma promesse. Qui sait, il avait peut-être raison, j'aurai probablement un déclic. La vie vaut peut-être la peine d'être vécue... sans lui. Cette excursion me permettra sans doute de me recentrer sur l'essentiel, et reprendre du plaisir dans mon quotidien.

Elle souffla, signe qu'elle saisissait, mais elle ne lâcha pas l'affaire pour autant.

— C'est dangereux là où tu vas.

— J'ai un guide.

— Tu n'es pas entraînée.

— Je suis allée à mon boulot à pieds durant un mois.

— Waouh ! 1 km aller-retour. Chloé tu bosses à deux rues de chez toi ! Te fous pas de moi !

— De toute façon, impossible de m'en empêcher : je suis déjà sur place, à l'aéroport. Ma guide arrive d'ici quinze minutes.

— Tu aurais pu au moins me le dire lorsque tu t'es décidée !

— Pour que tu m'attaches à une chaise jusqu'à la fin de mes jours ?

— C'est ce que tu mérites ! On ne prévient pas sa meilleure amie au dernier moment, par téléphone, à sept heures du mat' !

— Cécile, s'il te plaît. Je ne veux pas me disputer avant de m'en aller. Ça dure seulement huit jours, ce n'est pas comme si je partais pour toujours.

Elle marqua une pause.

— Je sais, murmura-t-elle. Sois prudente, je n'ai que toi.

— Moi aussi, je n'ai que toi.

Elle était ma seule famille. J'avais grandi en foyer et les parents de Stephan m'avaient tourné le dos après l'enterrement, prétextant que je leur rappelais leur fils.

— Dans neuf jours, je te veux chez moi ! Je mets une bouteille de champagne au frais ! On fêtera ton nouveau départ.

— Dans neuf jours, ma belle.

Rendez vous à l'infini (publié chez REINES BEAUX)Where stories live. Discover now