On se baignait malgré le fait qu'elle comme moi nous n'étions pas super à l'aise dans l'eau. C'était super. Je crois que ça faisait des années que je n'avais pas passé une telle journée. Sérieusement..

Je finis par sortir alors qu'elle voulait rester encore un peu plus longtemps. Je me rhabillai vite pour ne pas attraper froid.

J'étais sur mon téléphone, alors qu'elle surgit de nul part et s'assit sur moi, encore toute trempée.

« Et si on ne rentrait pas ?
- Quoi ?
- On s'en va pour toujours, rien que toi et moi, loin de cette réalité horrible, on ne rentre jamais et on vit heureuse toutes les deux pour toujours ! »

Je soufflai légèrement. J'en ai eu envie pendant une grande partie de mon enfance.. Mais j'avais mes marques maintenant ici, je n'avais plus envie de partir..

« Écoute, je.. J'adorerais. Surtout avec toi.
- Mais..?
- Mais on a quatorze ans, pas d'argent, ni de toit, ni de nourriture, on va juste finir par être portée disparu et on nous retrouvera et tout sera de nouveau comme avant sauf que cette fois on sera interdit de sortie 6 jours sur 7.. Ça sert à rien de s'en aller maintenant. Mais.. Dans quatre ans. Je te jure que dans quatre ans.. Je te suivrais jusqu'au bout du monde. »

Elle sourit tristement. Elle savais que j'avais raison mais c'était le genre de fille à s'en aller dans son esprit, avoir ce besoin permanent de partir si loin que l'horizon lui-même disparaîtrait. Partir, ne jamais revenir, ça sonnait comme une promesse de vie meilleure, dans sa tête. Et dans la mienne aussi, au final. Tout était génial, là bas, loin. Laisser ses problèmes au pays pour vivre heureuse, à jamais.

Mais vous savez quoi ? La réalité nous rattrape toujours, et le bonheur n'est qu'éphémère. Ce qu'on imaginait ne sera jamais réalité. En tout cas, pas éternellement. Le seul moment où on peut être heureux, en tout cas heureuses pour nous deux, c'est d'être deux, d'être ensemble à s'aimer plus que l'amour ne peut le permettre.

Mais j'ai peur. J'ai peur qu'elle ne veuille plus de moi dans quelques jours, quelques mois ou bien un petit nombre d'années. J'ai peur de ne dépendre que d'elle alors qu'elle dépendra déjà de quelqu'un d'autre.

Je l'aime. L'amour est plus fort que tout, hein ? On m'a répété ça tant de fois que ça sonne presque creux.

Je veux partir avec elle. J'ai besoin de partir avec elle.

Je me levai brusquement. Elle me regarda.

« Allons-nous en. »

Elle se leva doucement en souriant. Elle se rhabilla et elle prit son vélo, son sac à dos. Elle avait des étoiles pleins les yeux, et elle répéta doucement :

« Allons-nous en. »

Je pris mon vélo et nous nous sommes remise à pédaler. Mais cette fois, aucune douleur ne nous arrêta, on a juste.. Roulé. Roulé loin, jusqu'à que la nuit vienne se frotter à l'horizon. On levait les bras dans la nuit, aucune voiture à l'horizon. On était plus que libres, on était jeunes, flottantes et amoureuses. C'était un cocktail que rien n'arrêtait.

On aurait dit que le monde s'ouvrait à nous. Le monde, un nouveau monde, rien qu'elle et moi. Ce qu'on a formé de nos mains et de nos cœurs.

On a finit par trouver quelques tentes en plein milieu d'un champ. On y déposa nos vélos avant d'essayer de voir si des gens les logeaient.

Un petit groupe de campeurs qui devait n'avoir que deux ans de plus que nous étaient là. Ils nous accueillirent avec juste un peu de nourriture et de quoi dormir. On s'était tassé dans une tente, elle et moi, avec un garçon qui ronflait un peu trop fort pour son gabarit. On s'était endormi heureuses.

Le lendemain, je me réveillai alors qu'elle n'était plus dans la tente. Il devait être très tôt, car le jour n'était même pas levée dehors. Je sortis de là et je la vis, assise sur un rocher, les mains sur le visage, recroquevillée comme si sa vie venait d'être brisée bien plus qu'elle ne l'était déjà.

Et j'étais sûrement un peu trop insouciante à ce moment, peut-être un peu trop fatiguée aussi, sinon je pense que j'aurais fais directement un lien, juste un petit, mais là.. Je ne comprenais juste pas.

Je m'approchai d'elle doucement.

« Mon cœur..? »

Elle sanglotait. Pire que ça. Elle pleurait énormément, sans faire aucun bruit. Son visage semblait décomposé même de dos. Je posai une main sur son épaule. Elle tremblait, et pas uniquement de froid.

Je m'assis à côté d'elle. Elle se blottit contre moi. Je caressai doucement son crâne. Et à chaque fois qu'elle semblait vouloir se calmer, elle ne faisait que de pleurer un peu plus.

« On doit rentrer, Justine.. On doit rentrer..
- Qu'est ce qui s'est passé..?
- Ma mère.. Ma mère est morte.. »

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