8 : Médicament.

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Je vous aime, Lee Jaehwan. 18 mai 1975 


Lee Jaehwan ? 18 mai 1975 ? Qu'est-ce que ça signifie ? Est-ce que c'est Jaehwan qui a écrit ce livre ? Ou bien...est-ce quelqu'un portant le même nom ? Quelqu'un de sa famille ?

– « Winwin ! » m'interrompt justement le blond. Je cache le livre sous ma couette, par réflexe, avant d'aller lui ouvrir. « Hé, ça te dit d'apprendre à jouer du piano avec moi tout à l'heure ? Je sais que Bonhwa t'a déjà proposé de jardiner mais quand t'en auras marre, ça t'dit de jouer ? » Jaehwan semble d'excellente humeur, comme si quelque chose d'incroyable était arrivé. Est-ce dû au fait que le maître se sente bien aujourd'hui ? Est-ce que les infiltrations ont réellement fini par cesser de le faire souffrir ?

– « Hum...oui. Ça s'rait cool. J'ai toujours voulu savoir jouer du piano, alors... »

– « Parfait ! J'vais faire un peu de ménage dans la bibliothèque, on aura qu'à faire ça après le déjeuner ! » explique-t-il avant de s'en aller jusqu'aux escaliers. Je m'empresse de foncer sous ma douche avant de redescendre jusqu'au jardin. Bonhwa arrache les mauvaises herbes tout autour de la terrasse tandis que le maître, lui, a pris place sur une chaise longue, près des grandes baies vitrées du salon.

– « Tenez. Vous disiez vouloir lire. » Je ne sais pas ce qui me prend, ni même pourquoi je suis là à lui tendre le livre que mon grand-père m'a envoyé. C'est comme si j'avais envie de voir sa réaction à propos de l'histoire et de son retournement de situation. Mais surtout, j'ai très envie d'avoir son avis sur le petit mot de l'auteur, écrit à la toute fin. J'ai l'infime conviction qu'il me cache quelque chose...

– « J'ai d'autres livres à lire, tu sais. » bougonne-t-il froidement, les lunettes de soleil sur le nez. Le maître l'accepte tout de même, visiblement intéressé par ma proposition. Je déguerpis promptement, le souffle rapide. Pourquoi suis-je tout à coup aussi stressé ?

– « Monsieur Park. Que voulez-vous que je fasse ? » le questionnais-je, prêt à attaquer.

– « Vous n'avez qu'à vous occuper des agust. Il faut retirer les feuilles mortes, couper celles qui ont fané et arracher les mauvaises herbes tout autour. » soumet-il gentillement. Je m'en vais donc à mes occupations, juste en face du maître...bien évidement. Même lorsque je ne m'occupe pas de lui, je dois subir sa présence oppressante. Je m'accroupis dos à lui après avoir enfilé les gants que Bonhwa m'a donné. De plus près, les agust sont encore plus belles et hypnotiques que je ne le croyais. Leur couleur verte est d'un vif que je ne saurai vraiment décrire à quel point elles me semblent éclatantes. Je repense alors à ce que m'avait dit le maître il y a de cela quelques semaines. Les agust se dirigent instinctivement vers ce dont elles ont le plus besoin. Curieux, je suis du regard la direction par laquelle elles semblent toutes être attirées aujourd'hui : le maître... Elles sont toutes, sans la moindre exception, étonnamment orientées vers le maître. Il n'y a même aucun doute là-dessus. Je me souviens du jour où nous sommes allés marcher dans la forêt pour la première fois. A ce moment-là, le maître disait que les fleurs avaient besoin de nature et que cela expliquait donc pourquoi elles étaient toutes en direction de la forêt mais...n'étaient-elles pas tout simplement dirigées vers le maître ? Lui qui se trouvait à l'entrée même de la forêt... Alors, serait-ce réellement possible de penser que ces fleurs génétiquement modifiées reconnaissent la présence du maître ? Ah, sérieusement, Sicheng... Tu dois vraiment avoir perdu la tête.

– « N'avais-je pas explicitement demandé à ce que ces foutus CD disparaissent avant le prochain ménage de la bibliothèque ? » se plaint vulgairement le maître lorsque l'éternelle musique de Céline Dion retentit jusqu'à l'extérieur. Jaehwan et ses goûts musicaux...

– « Maître. Je vous l'ai déjà expliqué. Ce ne sont pas des CD, il a téléchargé les musiques sur son portable, ce qui fait qu'il peut les avoir absolument quand il veut. » se moque gentillement Jinyoung. Je ne peux m'empêcher d'esquisser un léger sourire. Le maître n'est pas vraiment intéressé par les nouvelles technologies d'après ce que je vois ou peut-être bien qu'il n'y comprend pas grand-chose, tout simplement. Jinyoung retourne silencieusement jusqu'à sa cuisine alors que le regard de Yoongi, lui, semble se poser sur moi. Merde...il m'a surpris. Je m'empresse de reprendre mon activité bien que j'ai parfaitement conscience qu'il soit toujours en train de me détailler au loin. Il agit si bizarrement parfois... Une légère pression fait brutalement son apparition dans mon bas-ventre. Je me fige comme si un geste de plus m'amènerait à ma propre perte. Ce sentiment, je le reconnais. Ce n'est pas de la douleur, c'est cette caresse, celle qui me fait constamment perdre la tête à chaque fois que je ressens l'envie de ressentir le maître contre moi. Plus les secondes défilent et plus j'arrive à la ressentir avec précision. Mon sexe réagit instinctivement, comme si en ce moment même j'étais effleuré par les doigts de mon supérieur. Bordel, mais qu'est-ce qui m'arrive ? Ce désir inexplicable, cette volonté de plaisir qui sort de je ne sais où, n'importe quand...qu'est-ce que ça signifie ? Je me relève promptement et accours presque jusqu'à l'intérieur du château pour ne pas me faire surprendre. J'ai le sexe en érection, parfaitement tendu, ce qui n'est certainement pas normal... Je monte rapidement jusqu'à ma chambre et file directement dans ma salle de bain. J'allume l'eau de la douche et me déshabille entièrement avant de m'appuyer contre le meuble, face au miroir. Que suis-je en train de devenir à rester enfermer dans cette maison ? Je me contemple muettement, déconcerté par la personne que je vois. J'ai l'air différent, comme envieux ou terriblement désespéré de ne pas avoir ce que je convoite impétueusement. Pourquoi ? Pourquoi c'est le maître que je désirs, pourquoi maintenant, dans de telles circonstances ?

– « Sicheng... » appelle la voix du maître Min, à quelques centimètres à peine de moi. Embarrassé de me retrouver nu face à lui, je tente de trouver une solution à tout ça mais le maître s'avance vers moi, déterminé à me rendre bien plus pitoyable. Il ne pouvait pas simplement détourner le regard et sortir ? Min Yoongi me commande froidement de rester immobile tandis que ce dernier prend place derrière moi. Les joues rougies par la honte et l'appétence sexuelle qui me consume, je me contente de ne rien faire et d'attendre. De son visage imperturbable, le maître vient subtilement se coller contre mon postérieur avant de venir s'emparer de mon sexe, sans même un mot.

– « Ah, maître... » soupirais-je, partagé entre la douleur et le sentiment de nécessité. Yoongi ne bronche pas, commençant brusquement à me branler l'intimité comme si cela était plus que normal qu'il le fasse. Pourquoi est-ce aussi bon de le voir faire ça ? Je ne détache pas mes yeux du miroir, bien trop envieux de le voir à l'œuvre. Il est si...attrayant. Son expression est toujours aussi impassible pourtant j'arrive à deviner son plaisir. Il le ressent. Lui aussi ressent cette sensation étrange. Les iris de ses yeux virent féeriquement au marron, m'hypnotisant spontanément face à sa beauté surnaturelle. Il est beau, tellement beau en cet instant... Mon supérieur s'empare violemment de mes cheveux pour les tirer en arrière, ce qui m'oblige même à gémir d'excitation tellement cela m'enflamme.

– « Je comprends maintenant. Je comprends pourquoi est-ce que tu jouis de plaisir à chaque fois que tu poses la main sur moi... » J'en étais sûr. Tout comme moi, il a certainement l'impression de se faire du bien à lui lorsqu'il caresse mon pénis. Je ne suis pas fou. Il y a quelque chose d'extraordinaire qui se passe entre nous, quelque chose d'irréel, d'improbable. « Sicheng...écoute-moi bien... » prononce-t-il implacablement alors que mes jambes commencent déjà à trembler. « L'homme est un illusionniste professionnel... Il... Il fait croire que les choses sont vraies alors que la moitié des choses ne le sont pas. » Bordel mais qu'est-ce qu'il raconte ? Je suis tout simplement incapable de comprendre quoique ce soit. Je suis bien vite porté la jouissance sexuelle qu'il m'offre gratuitement. Je vais venir...je suis sur le point de connaître le point culminant... Je resserre ma poigne sur le rebord du meuble de peur de tomber et de gâcher ce moment si important à mes yeux. Continuez, continuez, bordel... Je veux que vous soyez l'unique cause de mon exaltation... « Et ce qui est faux à tes yeux, devient vrai aux miens. Parce que je connais l'ultime vérité, celle que les autres milliards d'homme penseront comme falsifiée. Ouvre ton esprit. Laisse-toi porter par chacun de tes doutes, qu'ils soient stupides...ou insensés. Ai foi en eux. » J'explose entre ses doigts, repu et épuisé par ces longues secondes qui m'ont semblé éternelle. Cet homme est la tentation en personne. Il me donne constamment envie, sans même que je ne comprenne pourquoi... La tête en arrière, posée sur l'épaule du maître, j'inspire et expire profondément. Quand j'aurai dépassé la limite du raisonnable, lorsque je finirai par vouloir de lui entièrement, à ce moment-là, ce sera certainement la fin de mon aventure dans cette maison. Si je continue sur cette voie, si je continue d'espérer en recevoir plus de lui alors je finirai certainement dehors, chassé comme un moins que rien pour ma soif immodérée que je porte à son corps. « Je veux que tu m'évites. Pour le reste de la journée, ignore-moi. Je ne veux même pas croiser ton regard. Je ne t'autorise même pas à penser à moi, Win. » termine-t-il rudement avant de déguerpir à toute vitesse. Toujours nu au beau milieu de la salle de bain, je tente de trouver une raison à ce changement de comportement soudain. Je me sens à la fois vexé et humilié. Après tout, ce n'est pas moi qui ai supplié ses gestes... Il est venu de lui-même jusqu'ici.

Comme me l'a ordonné mon supérieur, je m'exécute à l'ignorer. Même durant le déjeuner, j'ai ardemment travaillé sur moi-même pour ne pas lui porter intérêt. Ce n'était pas si difficile vu la façon dont il m'avait cruellement rabaissé alors que ma fierté était déjà au plus bas mais cela demandait tout de même une certaine concentration. Alors quand il a proposé à Bonhwa de l'accompagner en excursion dans la forêt, je me suis contenté de feindre sa méchanceté et de tenir compagnie à Jaehwan dans le petit salon, comme promis.

– « Tu connais la lettre à Élise de Beethoven ? » me demande Jaehwan, assit à mes côtés, face à l'immense orgue du maître. Je ne suis pas forcément caler musique classique. En réalité, je préfère de loin écouter du rock ou du métal, j'écoute notamment beaucoup de japonais et d'anglais.

– « Oui, je l'ai déjà joué au violon. Mais ça reste quand même beaucoup moins mélodieux qu'au piano. » J'ai passé mon enfance à jouer du violon, du violoncelle et de l'alto. Pour mes parents, c'était une tradition importante à faire perdurer. Eux aussi jouent du violon. Mon grand-père et ma grand-mère savaient également en jouer, c'est un peu comme un patrimoine familiale. Lorsque j'étais encore enfant, il arrivait que toute ma famille se réunissent pour jouer ensemble. Nous n'étions pas des génies mais le plaisir de jouer en communion y était.

– « Beethoven est l'un des compositeurs préférés du maître. Il dit souvent qu'il regrette de ne pas être né avant pour le rencontrer. » sourit mélancoliquement Jaehwan. Parfois, j'ai l'impression que Jaehwan connaît tellement bien le maître que cela en ai adorable. Même si je vois mal le maître Min échangé ses goûts musicaux aussi facilement qu'il n'y paraît, j'aimerai beaucoup avoir ce genre de conversation avec lui. Avec moi, j'ai l'impression qu'il est constamment froid et distant.

– « C'est quoi ta musique préférée ? Et ne me sort pas du Céline Dion, idiot... » riais-je pour le taquiner. Jaehwan et moi sommes très différents, je n'ai aucun doute là-dessus. Il semble très ouvert et vif d'esprit, beaucoup moins réservé que Jinyoung ou Bonhwa. Il est plus immature et spontané, comme s'il se fichait bien de ce que les autres peuvent dire ou penser de lui. C'est sûrement pour ça que je me sens en confiance avec lui. Il est le premier que je cours trouver si jamais j'ai besoin de réponse à mes questions.

– « Il y en a une que j'adorais quand j'étais plus jeune. Je l'écoutais en boucle. C'est Hold The Line de Toto. Tu connais ? Mais elle n'est pas vraiment faite pour être jouée sur un orgue... » J'imagine que les préférences musicales de Jaehwan varient beaucoup.

– « Oui, j'connais ! Et oui, c'est pas spécialement ce qui nous convient. La dernière fois...tu as parlé d'un morceau que le maître jouait souvent, c'était quelque chose comme... »

– « Passacaille en ré mineur de Dietrich Buxtehude. Elle n'est pas facile mais, je peux t'apprendre le début. Ça fera sûrement plaisir au maître. » avance-t-il tout sourire. Faire plaisir au maître ? En fait, je suis surtout curieux d'entendre à quoi cette chanson ressemble. Ce sera au moins l'une des choses que je saurai à propos de lui. Jaehwan a commencé à jouer, comme s'il avait 30 ans d'expérience derrière lui. Il est bon, incroyablement bon. Il m'a appris le début du morceau avec patience et assiduité. Quand il s'agit de piano, Jaehwan devient tout de suite beaucoup plus sérieux et charismatique. « J'vais nous chercher quelque chose à boire et vérifier que Jinyoung ne fait pas de bêtise. Il est tellement silencieux qu'cela en ai presque flippant. » plaisante-t-il avant de me laisser seul. Pour m'occuper, je décide de faire le tour de la pièce. Je regarde les photos encadrées au mur, les peintures et autres œuvres d'art contemporaine. La famille du maître devait être extrêmement riche pour qu'il ai hérité de tant de choses importantes... Je suis soudainement attiré par une peinture d'un portrait auquel je n'avais jamais vraiment fait attention. Cette femme au long cheveux brun, je la reconnais. C'est celle qui était dans mon rêve. Celle que j'appelais maman. Mon fils, Yoongi. Je t'en supplie, ne meurs pas. C'est ce que cette femme répète constamment dans mes rêves. Pourquoi... Pourquoi est-ce que je rêve d'elle ? Pourquoi s'adresse-t-elle à moi dans mes rêves comme si j'étais le maître ? « Elle est magnifique, n'est-ce pas ? » avance le blond, deux verres en main.

– « Oui... C'est la mère du maître, pas vrai ? Ils se ressemblent beaucoup. » Jaehwan me rejoint rapidement pour me tendre l'un des verres avant de sourire légèrement.

– « Le maître tenait beaucoup à elle. Ils étaient très proches. C'est lui qui a peint ce tableau...pour se souvenir d'elle. Pour ne pas l'oublier. » Le maître Min a énormément de talent. En restant admirer le tableau, on croirait presque que c'est une photographie.

– « Jaehwan... Comment est-ce qu'ils sont... »

– « Ses parents sont décédés quand il avait six ans, je crois. Un peu après qu'ils aient contacté ta grand-mère pour la maladie du maître. C'est ton grand-père et Bonhwa qui l'ont élevé. Il paraît...qu'après la mort de sa mère, le maître était dévasté. Il lui arrive de prier pour elle. Je l'entends parfois pleurer pour la revoir. Elle lui manque atrocement... » me conte Jaehwan, les yeux humides. Le maître a vraiment eu une vie difficile. Non seulement il se doit de se battre contre une maladie rare mais en plus de ça, il n'a même pas la chance d'avoir ses parents à ses côtés. Combien de fois a-t-il pleuré après eux ? Combien de fois a-t-il souhaité revenir en arrière ? Comprenant que Jaehwan est visiblement sincère dans sa réponse, je me saisi de l'opportunité qui se présente pour le questionner sur une autre femme qui occupe mes pensées depuis la veille.

– « Et...celle dont il était amoureux ? Qu'est-elle devenue ? » marmonnais-je timidement. Le blond me lance soudainement un regard noir, comme si je n'étais pas autorisé à en parler. Malgré sa surprise, Jaehwan tente de ne pas laisser transparaître son étonnement.

– « Il...il t'en a parlé ? Pourquoi ? Pourquoi...pourquoi t'en parler à toi ? » pense-t-il à voix haute. Est-ce que j'ai eu tord de lui poser la question ? Le visage presque choqué qu'il arborait se transforme rapidement en une expression de colère. « Ne pose pas de question à son sujet ! Et ne l'oblige pas à parler d'elle ! Tu veux le détruire ou quoi ? T'es pas censé être ici pour creuser son passé ou poser des questions sur sa famille ! Contente-toi de le servir avec respect au lieu de t'immiscer dans sa vie comme quelqu'un de suspect le ferait ! » m'hurle-t-il dessus, avant de déguerpir brusquement. Il bouscule Jinyoung au passage, trop furieux pour vouloir s'expliquer. Merde...mais qu'est-ce que j'ai dis ?

– « Je... » tentais-je de me défendre. Mais en réalité, je ne sais pas quoi dire. Je ne m'attendais pas à une telle réaction.

– « C'est rien. T'en fais pas. Je m'occupe de lui. » me sourit chaleureusement le brun avant de suivre son ami. Qu'est-ce que j'ai fais de mal pour mériter ça ?

Beside me |sugawinwin|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant