L'attente

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Elles est assise sur un banc. Dans un parc. Il fait nuit. Enfin presque.

Elle sort une cigarette, la fait tourner quelques secondes dans ses doigts. Ses sourcils sont froncés, elle semble réfléchir.

Au bout de quelques minutes, elle la porte à ses lèvres, l'allume. Aussitôt, son visage se détend, ses yeux se ferment. Elle savoure la nicotine qui pénètre dans son corps, envahit ses poumons et son cerveau. Elle s'abandonne, quelques secondes. Puis, elle retire la cigarette de ses lèvres, et de nouveau, son visage reprend un air préoccupé.
Elle s'est répétée la scène cent fois dans sa tête. Cent fois, les mots qu'elle devra dire, ceux qu'elle pourrait se voir répondre. Des heures à se rassurer, puis à se remettre à stresser, à se dire qu'il fallait annuler puis à sautiller de joie dans son appartement.

Et puis là, elle y est. Et elle ne sait pas quoi faire.
Arrivée avec trente minutes d'avance, elle aurait put avoir le temps de décompresser, mais non. Son esprit si lunaire refuse de divaguer, et reste profondément ancré là, dans ce parc, sur ce banc. Elle joue à faire trembler sa jambe, histoire de se donner une contenance, mais ce n'est plus vraiment un jeu. Bientôt, son corps entier est agité de subtiles tremblements.

Les battements de son cœur sont forts, et irréguliers. Elle sent son artère battre dans son cou. Inlassablement, elle ramène sa cigarette à sa bouche, la tache de rouge. Elle regarde l'heure, trois fois par minutes. Plus que dix. Plus que dix. Plus que dix. Plus que neuf.

Il fait nuit. Pour de bon. Les dernières teintes de rose ont disparu des nuages. La lune est reine dans le ciel immense.

Cela fait deux minutes qu'elle devrait être là. Mais cela n'a pas d'importance. La cigarette est finis, la seconde aussi. Et là, devant l'immensité étoilé, elle s'apaise.

Elle s'allonge sur le banc, ferme les yeux. Elle se sent bien, seule. Seule et entière. Une plénitude étrange s'empare d'elle. Elle a oublié l'attente.

Quand une main vient ébouriffer ses cheveux, elle sursaute. Puis rit. Elle avait presque oublié pourquoi elle était là, et qui elle attendait. Presque, mais pas vraiment, sinon elle n'aurait pas était si heureuse, si sereine.

L'autre s'excuse du retard, lui demande si elle ne s'était pas endormie. Elles rient. La soirée se fait courte. Elles refont le monde sur un banc, tantôt assises, tantôt debout. Elles sont les reines, et l'obscurité vient les couvrir d'étoiles, comme un long manteau céleste qui entourerait.

Elles s'enlacent. C'est fou comme elles sont belles, c'est fou comme le monde leur appartient. Leur mains se trouvent sous une pluie de baiser, et leurs sourires s'emmêlent.

Elles sont sur un banc.

Dans un parc.

Au milieu d'une ville.
Quelque part sur une planète.

Au creux de l'univers.

Le bonheur naît à l'abri des regards.

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⏰ Last updated: Aug 20, 2021 ⏰

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Battements de coeursWhere stories live. Discover now