Chapitre 1: Lyam

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L'aiguille continue de tourner mais n'avance toujours pas assez vite à mon goût. Je gratte le papier avec la mine de mon crayon de bois en prenant soin de tracer le contour de chacun des carreaux de ma feuille qui est restée blanche, d'écriture du moins. Je relève la tête vers mon professeur toujours plongé dans la passion de son cours si inspirant. La justice, en voilà une question intéressante, mais pas l'avis de personnes mortes depuis des centaines d'années qui se croient supérieur aux autres de par leur intellect. Si on en croit la théorie de l'animal machine, toutes ces idées sont complètement dépassées. Je regarde la montre de ma voisine, toujours concentrée sur le direct de Rolland Garros sur son portable caché dans sa trousse, comme la moitié de la classe. Il reste cinq minutes. Je glisse mes crayons dans mon sac et attend un peu avant de ranger mon cahier, pour paraître plus poli, je veux quand même avoir une bonne appréciation dans mon bulletin. Maddison, qui n'est pas américaine mais purement bretonne, suit le cours, seule survivante de la flemmïte aigue qui a frappé la classe.

La cloche sonne et tout le monde disparait en un claquement de doigt, trop vite pour moi qui sort le dernier malgré mes préparatifs. Maddy m'attend dehors, c'est la seule de mes amis qui est dans ma classe. Elle relève d'un coup sec la mèche de cheveu brun qui était tombée entre ses yeux et l'écran de son téléphone portable. La date fatidique approche et ce n'est pas celle des examens, elle a lieu au solstice de printemps, je ne sais pas vraiment pourquoi mais il doit y avoir des raisons culturelles ou autres idioties de ce genre. On appelle ça la Vérité, un peu comme si l'on apprenait enfin qui l'on était vraiment mais je trouve cela assez rétrogradant pour les non-spéciaux.

-C'est la semaine prochaine, je ne sais pas pourquoi je suis à ce point stressée. C'est pas comme si j'avais des chances de l'être.

J'avoue que l'on évite assez de dire le mot, spécial, ou spéciaux, ça devient lassant et limite sectaire à force et l'on n'a pas envie de donner autant d'importance aux spéciaux pour flatter leur ego surdimensionné. Il n'y a que les spéciaux qui utilise ce genre de vocabulaire, pouvant aller jusqu'à don ou pouvoir magique. On n'est toujours pas dans Harry Potter aux dernières nouvelles. En fait, il y a aussi ceux qui les critique qui parlent comme ça. C'est comme ça que ces mots sont devenus tabou. Il suffit d'un rien, c'est même pire que le racisme ou la politique. Généralement quand on part sur ces sujets-là en repas de famille, je ne mets pas longtemps avant de sortir de table.

Bref, la Vérité arrive dans sept jours très exactement, la date permet aussi de ne pas perturber les examens de fin d'année ou autres. Tout les adolescents ou jeunes adultes, comme on veut, qui ont dix-huit ans la même année passent en même temps. D'après des études scientifiques, la vérité serait à l'origine de troubles de la croissance et du comportement si elle arrive trop tôt. Enfin, c'est un peu comme une pochette surprise sauf que là, la surprise peut changer ta vie. Les reclus sont souvent mal vu, ils ont eu une spécialité que le gouvernement a jugé trop dangereuse et leur ont imposé un implant dans le poignet afin des les annihiler. S'ils n'avaient pas décidé en plus de leur faire un tatouage, une sorte de tête de mort comme sur les flacons en chimie, il ne faudrait tout de même pas qu'ils transmettent leur gène néfaste. Ils ont donc une vie plutôt seul, de plus qu'ils ne sont plus capable de faire des enfants, à cause d'une décision de l'état il y a quelques années pour éviter que ce nombre de reclus n'augmente trop jusqu'à ne plus être contrôlable. Pourtant, après cela, le tatouage est toujours là. Ils sont souvent cachés par des bracelets, des montres, car les gens peuvent se montrer cruels. Bien qu'une loi interdisant les contrôles des poignets à l'entrée des commerces soit passée il y a deux ans, les reclus continus d'être discriminés.

Donc on n'a aucune raison de stresser. De toute façon, les chances d'être un reclus sont infimes et je préfère largement être rien du tout, ce qui a de grandes chances d'arriver étant donné que personne dans ma famille n'a de capacité particulière ou de pouvoir magique. C'est aussi le cas pour Maddy, bien qu'elle espère obtenir un talent pour les avantages qu'il confère. Car, si la société se veut égalitaire, il est bien plus facile d'obtenir un bon emploi, une meilleur école lorsqu'on est spécial.

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⏰ Last updated: Sep 17, 2019 ⏰

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