Héritage

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Kenza, tremblante, peinait à ne pasrenverser le contenu des mugs qu'elle tenait dans ses mains. Ellearriva pourtant jusqu'au canapé sans faire de dégât, et se glissavite sous la couverture sous laquelle sa mère était déjàemmitouflée.
- Merci beaucoup mon ange.
La télé étaitallumée, et s'est à peine si sa mère l'avait attendu pour lancerleur épisode. Cette série, plutôt prenante mais un peu quelconque,serait gravé dans leur mémoire, car elle rythma cet hiverexceptionnel. La neige tombait depuis des semaines, et le temps luimême semblait s'être gelé.
Le générique était tout justepassé que le téléphone de Kenza vibra timidement. Elle s'ensaisit, pour ne plus le lâcher. Son regard passait d'un écran àl'autre, ses doigts tapotait, et un sourire illuminait ses yeux àchaque nouvelle vibrations.
L'épisode se termina, sur unterrible suspens. Cette série maniait si bien cet art, s'en étaitpresque cruel. Pourtant, Farida, sa mère, appuya sur pause.
-Maman ?

-Tu es bien distraite ma fille.
Kenza rougit, confuse. Elle détourna le regard, elle et sa mèreétait très proche, et c'était leur moment, elle se sentait un peuhonteuse de ne pas l'avoir respecté et s'attendait à se faireréprimander.
Mais un grand sourire éclaira le visage de Faridaqui lui dit :
- Allez, je sais bien que tu peux pas garderun secret. Dit moi tout, comment il s'appelle ?

Kenza bafouilla, sourit timidement,avant de prendre un air plus grave. Ce fut au tour de Farida d'êtreconfuse.

-Ma chérie ? Qu'est ce qu'il y a ?

Les yeux d'Kenza s'embuèrent delarmes. Elle plongea la tete sous la couette, et se remis àtrembler, mais ce n'était plus le froid. Sa mère l'attira contre sapoitrine, et lui caressa les cheveux,tout en dissimulant le troubleque lui provoquait les sanglots étouffes de son enfant.
Kenzafinit par se redresser, frotta ses yeux rougit, puis les yeux rivésvers le sol, déclara :

C'est pas il maman. C'est une fille.
L'étonnement traversa le visage de Farida, vite remplacé par unsourire tendre. Elle posa la main sur celle d'Kenza.
- Oh !Et bien, comment elle s'appelle ?
Kenza se tourna vers mère,surprise. Un coktail d'émotion la traversa, herissant tous les poilsde son corps, et l'insant d'après, elle était de nouveaux dans lesbras de sa mère, le visage couvert de larmes.
- Tu n'es pasobligée de me raconter tout ça. Mais, si tu veux, j'ai une histoirepour toi.
Et, sous les yeux ébahit d'Kenza, Farida lesplongèrent toutes les deux dans ses souvenirs.

Farida avait23 ans. Elle était serveuse dans un bar, au grand damn de sesparents, dont elle avait quitté la maison un an plus tôt. Ellen'avait pas vraiment de projet, elle se laissait un peu porter par lecourt des choses. Elle était pluôt heureuse, mais elle s'ennuyaitun peu dans sa vie, rythmée principalement par le travail.
Elle avait l'habitude des hommes, qui venant le soir prendre desbières après le travail, la dragué plus que lourdement. C'étaittous un peu les mêmes, ils l'agaçaient, même les plus sutiles etdélicat d'entre eux ne méritaient pas un seul de ses regards, pouravoir eu l'affront de croire qu'il lui arrivait à la cheville.
Et puis, il y a eu Olivier.
Évidement, il ne valait pas mieuxque les autres. Mais il ne venait pas avec ses collègues. Il passaitavec sa sœur, Marie, qui elle sortait de son travail d'aidesoignante, et l'emmenait boire un café. Elle aussi soupirait sousles remarques salaces de son frère, tout en jetant des souriresemplis de compassion à Farida.
Au fil des jours, il sembla àFarida qu'il n'y avait pas que de la compassion dans ses sourires.Marie avait toujours un mot gentil pour elle, la traitait comme uneamie, et il lui arrivait se surprendre son regard sur elle alorsqu'elle servait des clients à l'autre bout du bar.
Alors ce jouroù Olivier l'invita au restaurant, quelle ne fut pas sa surprise des'entendre répondre oui, quand Marie mentionna l'idée de lesacommpagner. Et, à son grand désarroie, elle cru remarquer lesjoues roses et le sourire enjoué de cette dernière.

Confinement 1 - HéritageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant