L'autre Rive

Depuis le début
                                    

Solveig avisa le compteur qui lui n'avait toujours pas été réparé, et secoua la tête, dépitée de ne pouvoir regarder l'aiguille tirer vers les vitesses les plus extrêmes. Cette puissance vibrait en elle, réveillant une montée d'adrénaline. Le clin d'œil d'Ensio eut raison de sa retenue et elle sortit sa tête par la fenêtre pour pousser un hurlement retentissant.
Kalej était un génie, elle le savait mieux que quiconque, sa moto ne cessait d'ailleurs de le lui rappeler.

Puis Ensio dut ralentir, et Rive se révéla à leurs regards, toute de blanc vêtue. En avance sur les saisons comme chaque année, la neige recouvrait déjà le village alors que Merath attendait encore ses premiers flocons. Petit bouge fait de pâtés de maisons, de rues commerçantes, et d'une grande simplicité, Rive avait une circonférence encore plus négligeable que Merath. Il était d'ailleurs complémentaire à leur village par biens des aspects, et les habitants se devaient régulièrement de traverser la rivière pour aller sur l'autre berge chercher au visage voisin ce qu'ils ne pouvaient trouver chez eux.

Ainsi les riveraines n'étant pas satisfaites par les deux magasins de vêtements de leur village allaient à Merath, où le choix bien que limité laissait plus de possibilités. Les merathiens bricoleurs quant à eux se devaient de traverser la rivière afin de dénicher les instruments nécessaires à leurs taches. C'était notamment pour cela que Stevy avait dû laisser son pick-up chez Kalej, puisque que Rive ne possédait aucun garage, ni de point de station essence. À l'inverse les policiers merathiens étaient rapidement limités en termes de ressources, lesquelles ne manquaient pas à Rive.

De cette façon les deux villages s'accordaient en un rythme de vie de codépendance, qui tissaient des liens d'entre-aide cordiaux voir fraternels, qui pourtant n'étaient jamais approfondis. Parce que c'était ainsi que les habitants des deux berges vivaient depuis des générations, en dépendant les uns des autres, en se côtoyant continuellement, sans jamais vraiment prendre le temps d'apprendre à se connaître.
En dépit de tout, merathiens et riverains semblaient nourrir une antique animosité entre eux, qui les empêchaient de se mélanger. Rare étaient ceux allant s'installer de l'autre côté de la rivière, et quand cela arrivait toutes relations passées semblaient ne jamais avoir existé.
Il paraissait parfois à Solveig qu'une loi avait un jour spécifié que, toutes relations n'étant pas d'ordre pratique étaient à proscrire au risque d'être bannis à perpétuité.

Ensio se gara près du commissariat de Rive, qui était beaucoup plus imposant que celui dans lequel ils travaillaient. Comme à chaque fois, Stevy sortit à leur rencontre avant même qu'ils aient eu le temps de s'extraire du véhicule. Solveig n'avait jamais réussi à percer ce mystère et l'avait mis sur le compte d'un instinct surdéveloppé, que vraisemblablement tous les riverains possédaient.

Ses dents blanches tranchant avec la couleur chocolat de sa peau, Stevy ouvrit la portière à Solveig ses yeux pétillants de malice.

- Toujours aussi séduisante Sol.

- Toujours aussi flatteur Vy.

Solveig lui fit un clin d'œil charmeur, auquel il répondit par un baiser tonique sur sa joue, son rire résonnant contre sa peau.

Stevy était un très bel homme. Grand, musclé, il possédait une joie naturelle qui l'illuminait tout entier, attirant les regards. Sa gentillesse était incommensurable, et se reflétaient dans ses yeux hétérochromes dont les paillettes de jade en constellaient le caramel chaleureux. Solveig et lui s'étaient appréciés dès le premier regard, aussi francs et fiables l'un que l'autre.
Après une accolade virile avec Ensio, il caressa avec précaution le capot de son pick-up, un sourire niais sur le visage.

- Alors comment se porte la prunelle de mes yeux ?

- Elle est comme neuve, remplie à souhait, et son entraînement intensif a porté ses fruits !

Solveig Ylgr : Empreintes d'Hiver Où les histoires vivent. Découvrez maintenant