[SKZ + HYUNSUNG]
— FLUFF, 2022.
Hyunjin avait les lèvres couleur pêche et sentait la fleur d'oranger.
En soi, il était un peu le printemps à lui tout seul ; même si ses cheveux sombres n'inspiraient point de fraîcheur, sa personne entière transpirait de douceur. C'était pas vraiment qu'il le voulait, Hwang Hyunjin était simplement né comme ça et rien ni personne ne pouvait y faire quoi que ce soit.
Au premier abord, Jisung avait été grandement impressionné. Peut être était-ce parce que le visage du jeune noiraud était si parfait qu'il s'en trouvait intimidé ? Ou alors était-ce plutôt cette facilité déconcertante qu'il avait à secouer son coeur de petit blond aux joues joufflues ?
Seungmin optait toujours pour la seconde option et Jisung fronçait les sourcils. Parce qu'il répétait sans arrêt que « Il faut vraiment que t'arrêtes d'être un abruti et de te mentir à toi même » mais le blond secouait toujours la tête, résigné à rester dans son coin avant de reposer ses yeux sur la jolie silhouette qui courait au loin.
Ça faisait 2 ou peut être 3 ans qu'ils se connaissaient. Jisung s'était vu transféré dans une nouvelle école, perdant tous ses repères ainsi que ses amis. Il regardait aux alentours, l'air confus. Il avait marché de gauche à droite, empruntant les couloirs étranges de l'enceinte avant de courir sur le long de la piste d'athlétisme et d'atterrir non loin du terrain de football.
Le jeune garçon n'avait jamais aimé le foot ; il était petit et se faisait sans cesse pousser par ses camarades bien plus grands et robustes que lui. Mais quand il eut aperçu un joli noiraud presque voler en jonglant avec le ballon rond du bout de ses pieds, il avait presque envie de se joindre au groupe, de trottiner dans leur direction et d'apprendre de la belle technique de l'autre.
Jisung s'était cependant contenté de s'assoir, d'observer de loin et admirer le beau noiraud qui riait aux éclats.
Il avait fait ça plusieurs fois, même après avoir fait la rencontre de Seungmin, son partenaire de labo en physique chimie. Il s'absentait pendant la pause déjeuner, sprintait à travers les couloirs et cherchait le garçon du regard. Jisung s'asseyait dans les gradins ou dans l'herbe — ça dépendait de son humeur — et il admirait.
Plus ces escapades se multipliaient plus il se prenait à dériver des pieds du garçon à son visage, de ses sourcils parfaitement taillés à ses lèvres pulpeuses et luisantes — portait-il du gloss ? —, de la sueur qui peignait son t shirt blanc à la courbe de son nez qui lui semblait étrangement parfaite.
C'était vraiment bizarre et Seungmin soufflait lourdement quand Jisung s'obstinait à ne pas vouloir comprendre. Le blond admirait le noiraud et c'était tout ou du moins, c'était ce dont il essayait de se persuader.
Il n'y avait rien d'étrange à penser que Hyunjin était le plus beau jeune homme sur lequel il avait posé les yeux. Quoi de plus normal que d'envier sa plastique et ses talents en football ? Son rire était adorable, gloussements rafraîchissant qui faisaient presque tourner la tête du plus petit. Et puis, jalouser les quelques filles qui lui pendaient aux bras au gré des couloirs de l'établissement n'était pas si saugrenu que cela non plus, finalement.
Seungmin lui avait doucement cogné l'arrière du crâne et marmonné d'arrêter d'être stupide parce que « j'ai déjà du mal à te supporter alors si tu pouvais éviter de faire semblant d'être aussi débile qu'aveugle, ça m'arrangerait. » et Jisung avait fait la moue tout en se frottant la tête du plat de la main.
C'était que Seungmin ne comprenait pas. Chacun pouvait admirer autrui sans pour autant ressentir quoi que ce soit à leur égard. Par exemple, Jisung avait toujours pensé que Felix, un de ses camarades dans son ancien établissement scolaire, était incroyablement joli garçon. Cependant, jamais le blond n'avait pensé à lui autrement qu'en tant qu'ami proche et il était persuadé que le brun considérait des dizaines d'autres personnes de la même façon. Mais voilà, il était impossible d'avoir ce genre de conversation avec son partenaire de labo, tout bonnement parce qu'il était persuadé d'avoir vu pile au travers du coeur — et de l'esprit — de l'à peine plus âgé. Alors Jisung s'était fait une raison et le laissait dire ce qui lui chantait à présent.
De toute façon, la plupart du temps, le décoloré était seul lors de ses contemplations. Parce Seungmin avait « mieux à faire » et d'autres amis à fréquenter, contrairement à l'autre. Et peut être que Jisung préférait ces quelques instants de répit.
Lors de ces moments là, il avait l'occasion de sortir son carnet noir et abîmé par le temps tout en sachant que personne ne pouvait y jeter un regard. Il l'ouvrait et dressait le portrait du beau footballer. Ou alors, il dessinait les scènes d'actions qui se déroulaient sous ses yeux afin de travailler son anatomie ou de s'entrainer à esquisser des poses qu'il n'avait jamais essayées auparavant.
Le lycéen dessinait à ses heures perdues et ce depuis des années. Si bien qu'il économisait toutes les pièces et billets qu'il pouvait afin de pouvoir s'offrir une tablette graphique ou quelconque autre gadget qui l'autoriserait à s'essayer à l'art numérique. Pour l'instant, il se contentait de carnets achetés en grande surface et de crayons à papiers tellement taillés qu'il était difficile de les prendre en main.
Il avait perdu l'art de vue en déménageant. Jisung n'avait plus la tête à ça et ne savait pas non plus quoi dessiner. Le jeune homme avait toujours été inspiré par les gens qui l'entouraient, que ce soit ses amis, sa famille ou des inconnus croisés au coin de la rue. Il avait cette sensibilité qui faisait qu'il trouvait de la beauté dans tout et n'importe quoi. Il considérait d'ailleurs cette facette de sa personne comme une bénédiction. Après tout, elle l'aidait beaucoup lorsqu'il s'adonnait à son passe temps favori.
C'était d'ailleurs un peu pour cela qu'il avait été déprimé en s'installant dans la ville où il résidait désormais. Non seulement devait-il tout recommencer à zéro, mais en plus, il n'avait rien pour lui changer les idées. Et ce, jusqu'à ce qu'il croise Hyunjin ce jour-là.
Peut être qu'une partie de l'admiration qu'il vouait au noiraud venait du fait qu'il l'inspirait. Jisung était trop timide pour l'appeler sa muse, mais c'était ce à quoi il s'apparentait le plus.
Le petit blond ne savait combien de fois il avait cherché Hyunjin et s'était assis au loin à l'observer aussi longtemps que l'univers lui accorderait. Il ne savait pas non plus si celui aux cheveux charbons l'avait remarqué. Certes, leurs regards s'étaient croisés à de multiples occasions, mais Jisung se savait détenteur d'un visage très peu marquant. Il n'aurait pas été étonné d'apprendre que Hyunjin ne savait rien de lui. Ils ne partageaient ni groupe d'amis, ni cours communs. Alors il était plutôt normal d'estimer qu'il n'était même pas au courant de son existence.
De toute façon, Jisung ne restait jamais assez longtemps pour qu'il ne se passe quoi que ce soit entre eux. Même si d'un coté, il avait envie de faire la connaissance du joueur de football, de l'autre, il avait peur que l'illusion s'effondre. Il était bien là, à se complaire dans l'idée de Hyunjin qu'il avait créée de toute pièce.
Malgré cela, le décoloré se surprenait tout de même à vouloir connaître la couleur préférée du plus grand ou bien entendre la tonalité de sa voix, banalités sans grand intérêt. Parfois, Jisung se demandait si c'était bien normal et si Hyunjin fantasmait les même choses. Puis il secouait la tête et revenait à lui. Il n'y avait de toute façon aucune chance qu'il l'ait remarqué, trop distrait par le ballon et les plaisanteries qu'ils se lançaient entre joueurs. En plus, vu que Jisung était souvent lui même absorbé par la mine du crayon qui caressait le papier épais de son carnet, il aurait été incapable de capter quelconque regard volé.
Pour ces raisons et bien d'autres, le blond avait tiré un trait sur l'idée de se rapprocher du noiraud. Peut être était-ce pour se protéger lui-même ou à cause de sa nature défaitiste mais il n'en était pas fâché. La seule chose qui l'attristait était le fait que ses activités observation et dessin allaient bientôt toucher à leur fin. Ça faisait des mois — des années — que le lycéen avait trouvé Hyunjin pour la première fois. Durant tout ce temps, jamais il n'avait eu l'occasion d'échanger un ou même deux mots avec le beau jeune homme (et ce n'était pas faute d'essais de la part de Seungmin). Alors il se prenait à profiter au maximum de ces derniers moments qu'il passerait à laisser courir ses yeux marrons le long de la silhouette de l'autre.
C'était d'ailleurs assez comique, la manière dont la vision de Jisung formait un tunnel dès que sa muse en pénétrait le champ. Seul Hyunjin et ses mouvements presque gracieux étaient parfaitement nets. Le reste se métamorphosait en masse floue, amorphe, qui n'intéressait que très peu l'artiste. Il ne le faisait pas exprès d'ailleurs, ses yeux faisaient tout le travail sans qu'il n'ait son mot à dire. Mais si Jisung devait être honnête, il avouerait que ça ne l'avait jamais dérangé. Et son carnet pouvait en témoigner.
Des mois s'étaient écoulés ; mois durant lesquels les croquis de Jisung devenaient de plus en plus clairs. Il aurait pu dessiner le footballer de tête tant il était habitué à ses angles et ses courbes. Mais rien ne valait ces instants qu'il passait, assis sous le magnolia près du terrain, son dos appuyé contre la cime de l'arbre et son carnet reposant sur ses cuisses. Il aimait dresser les scènes uniques qui se déroulaient sous son regard de dessinateur et écouter les voix des joueurs, surtout celle de Hyunjin.
Jisung n'était pas poète mais il avait toujours pensé que le noiraud amenait le printemps où qu'il soit. Et surtout en ce mois d'avril de leur année de terminale. La saison des bourgeons s'était faite tardive. Elle trainait les pieds, comme si la neige et le verglas de l'hiver s'accrochaient à ses chevilles. Mais Hyunjin et ses effluves de fleur d'oranger faisaient pointer le bout du nez du soleil. L'astre diurne, comme timide, léchait les joues de ceux qui s'aventuraient à l'extérieur du lycée ; ses rayons perçant au travers des fleurs du magnolia.
L'artiste voulait profiter des dernières semaines de contemplation qui lui restaient et, ce jour-là, Seungmin avait à faire avec les membres d'un de ses nombreux travaux de groupe. Alors Jisung, après avoir trouvé sa muse et ses amis, s'était assis sous l'arbre en fleur. Il avait sorti son matériel — son cahier noir et ses minuscules crayons à papier — puis levé les yeux vers l'action qui se déroulait non loin de lui.
Sans grand effort, il remarqua Hyunjin. Son corps élancé courait parmi les quelques autres jeunes hommes. Il jonglait avec le ballon d'une aisance telle qu'un fin sourire étira les lèvres sèches de celui qui l'admirait. Jisung posa la mine de son crayon contre le papier d'une des pages de son carnet et commença le croquis d'un noiraud portant un large t shirt blanc. Il le dessina avec le ballon rebondissant contre son genou levé et une étincelle de malice dans les yeux. Il esquissa ses cheveux dansant, comme si une brise printanière soufflait à leur travers, et ses doigts pianotant dans l'air frais d'avril.
Le blond s'attela à l'ombrage de ses vêtements, puis le coloriage de sa chevelure, non pas sans lever les yeux vers son modèle de temps à autres afin de s'assurer de la justesse de son dessin.
Mais Jisung n'était pas si attentif que cela, si bien que, quand il entendit une plainte provenant du groupe de jeunes, il leva brusquement la tête. Il lui fallut une minute, ou peut être deux, afin de distinguer ce qu'il se tramait en face de lui. Les garçons semblaient entourer l'un d'entre eux, comme inquiets, et Jisung ne pouvait plus distinguer Hyunjin. Il espérait que le noiraud n'était pas au centre de l'action et, malheureusement, son coeur se serra quand les jeunes hommes s'écartèrent un peu et dévoilèrent son modèle, boitant légèrement.
Même en y réfléchissant bien, l'artiste n'avait aucune idée de ce qu'il avait bien pu se passer. L'autre s'était visiblement blessé la cheville — le pied ? —, et s'écartait lentement du jeu, comme pour s'assurer que tout allait bien. Ce que Jisung savait, cependant, c'était que Hyunjin se dirigeait dans sa direction. Bien qu'il avait le pas lent au vu de sa blessure, il s'approchait à une vitesse que le blond jugea fulgurante. Peut être était-ce parce qu'il était intimidé par la venue du joueur de football, ou alors était-ce parce qu'il tenait entre ses mains des dizaines et des dizaines de dessins de ce dernier. Dessins dont le principal intéressé n'avait, bien évidemment, pas connaissance.
Leurs regards se croisèrent, Hyunjin sourit et Jisung en pâlit. À la hâte, le petit blond ferma son cahier et rassembla ses crayons, comme pour avoir l'air occupé ou juste normal.
« Hey ! » lança le nouveau venu, s'approchant avec difficulté.
Jisung ne répondit pas, la tête à l'envers et le coeur en vrac.
« Ça te dérange si je m'assois à coté de toi ? demanda Hyunjin.
– Pas du tout ! » répondit Jisung avant de s'étrangler mentalement.
Le footballer avança jusqu'à se trouver auprès du dessinateur. Avec un râle grave, il s'assit à environ un mètre de ce dernier et étendit ses longues jambes tout en grimaçant, comme si il se trouvait en proie à d'horribles crampes. Jisung ne savait que faire, ses yeux allant de son sac entrouvert dans lequel il pouvait s'empresser d'entreposer son cahier et le visage de l'autre.
Devait-il dire quelque chose ? Peut être que Hyunjin était venu à lui pour se reposer et être au calme. Lui parler serait donc contre-productif. Mais le blond avait bien envie de lui demander ce qu'il s'était passé. Après tout, c'était de Hyunjin dont il s'agissait et puis, l'artiste était de nature curieuse.
Tourmenté, Jisung mordilla l'intérieur de ses joues déjà blessé. Il avait tendance à répéter ce geste lorsqu'il se sentait anxieux, ce qui représentait environ 80% du temps quand il y réfléchissait bien. L'autre pencha sa tête vers l'arrière, laissant ses cheveux plutôt longs tomber et valser au gré du vent doux qui avait commencé à souffler dès qu'il s'était installé sous le magnolia.
Jisung ouvrit la bouche, près à poser la question qui lui dansait sur le bout de la langue et le noiraud s'éclaircit la gorge. Ce bruit fit sursauter le blond, ce que le footballer remarqua. Plantant ses yeux dans ceux, ronds, de l'autre, il s'excusa d'un chuchotement accompagné d'un sourire doux et invita Jisung à parler d'un signe de tête. Il déglutit et s'apprêta de nouveau à parler.
« C'est rien, c'est juste. Je me demandais ce qu'il t'était arrivé. » expliqua-t-il, le souffle court.
Sa muse sourit et Jisung jura que le soleil se mit à briller plus fort.
« Pas grand chose à vrai dire — il pointa les autres joueurs du doigt —, Jeongin m'a marché sur le pied alors que j'étais en train de courir. Ma cheville est partie en freestyle et ça a fait plutôt mal. »
Jisung, qui regardait ce que Hyunjin désignait du bout de son index, acquiesça tout en retournant son visage en direction du sien.
« Tu n'irais pas faire un tour à l'infirmerie ? demanda-t-il, la mine inquiète.
– J'attends d'abord de voir si ça passe. Je voudrais pas déranger qui que ce soit. » dit-il, appuyant ses propos d'un sourire, comme pour atténuer le pli qui se trouvait entre les sourcils de l'autre.
Ennuyé, Jisung acquiesça de nouveau. Que pouvait-il faire d'autre ? Il n'était pas l'ami de Hyunjin et encore moins sa mère. Il n'avait donc aucun droit de lui dicter quoi faire et se contenta alors d'observer sa cheville droite avec inquiétude. Chose que le noiraud avait dû remarquer, si bien qu'il secoua doucement la tête en prenant de nouveau la parole.
« Ne t'inquiète pas. Ça ne doit pas être grand chose, j'en ai vu des pires. »
Cette phrase ne rassura en rien le blond qui fronça encore plus les sourcils tout en encrant ses pupilles dans celles de l'autre. Que Hyunjin parle de blessures avec telle légèreté l'inquiétait. Ne prenait-il pas soin de lui ?
« Ce que j'essaie de dire, c'est : ne t'inquiète pas. Si ça me fait toujours souffrir une fois que je me lève, j'irai à l'infirmerie. Et tu m'accompagneras. dit Hyunjin.
– Comment ça je t'accompagnerai ? Je pense pas avoir accepté quoi que ce soit ! » s'écria l'autre.
Hyunjin se mit à rire et, le rouge au joues, Jisung essaya de comprendre ce qu'il avait dit de si drôle.
« Passer du temps avec moi t'horrifie autant que ça ? demanda le noiraud, hilare.
– C'est pas ce que j'ai dit. Tu m'as juste surpris ! se justifia l'artiste.
– À d'autres, on me la fait pas à moi.
– Je te le promets ! »
Jisung ne comprenait pas ce qui le mettait dans tous ses états. Il était évident que Hyunjin le taquinait, mais voilà qu'il agissait comme s'il prenait tout au premier degré. C'était probablement qu'il avait peur que Hyunjin ait vu clair dans son jeu. Était-il si évident que cela qu'il mourrait d'envie de passer du temps avec le footballer ?
« C'est juste que, puisque je t'ai souvent vu ici ou dans les gradins à nous regarder jouer, j'ai pensé que l'un d'entre nous t'intéressait. » commença le plus grand.
Jisung se pinça les lèvres et ses phalanges se serrèrent autour de son carnet.
« Tu vas me trouver présomptueux mais, j'ai pensé que c'était moi. — Hyunjin marqua une pause — Ou alors je me suis trompé. Tu voudrais peut être que je t'arrange le coup avec Jungmo ? termina-t-il.
– Non ! » s'écria Jisung.
Il ne savait ce qu'il lui avait pris de répondre de la sorte mais l'idée que Hyunjin pense qu'il s'intéressait plus à un autre que lui rendait Jisung malade. Surpris, le noiraud le dévisagea d'un air presqu'amusé. Il avait probablement de grandes capacités à socialiser puisqu'il sembla avoir tout de suite ressenti la gêne qui s'était emparée du blond. Afin de faire cette dernière s'évaporer sous les rayons de son propre soleil, Hyunjin reprit la parole.
« C'est quoi ce livre ? Tu l'as toujours avec toi. » demanda-t-il, changeant de sujet.
Jisung baissa les yeux vers le carnet qui reposait toujours contre ses cuisses. Il ne savait par où commencer et tourna autour du pot pendant quelques secondes avant de capituler.
« Je dessine un peu. C'est le cahier que j'utilise en ce moment pour mes croquis. révéla-t-il.
– Oh trop bien ! — s'émerveilla l'autre — Je peux voir ? »
Lentement, le blond serra le-dit cahier contre son torse tout en inspirant entre ses dents serrées.
« Je ne pense pas que ça va être possible. Je suis pas très bon dessinateur. » mentit-il.
Un peu déçu, Hyunjin fit mine de comprendre et regarda au loin. Il ne lâcha cependant pas l'affaire et proposa une idée.
« Tu n'es pas obligé de le montrer ici ni maintenant mais, et si tu me le montrais une autre fois ? Pas au lycée, quand on sera devenus plus proches ?
– Plus proches ? interrogea Jisung, intrigué.
– Mh. Tu sais, je te vois depuis longtemps et le fait qu'on ne se connaisse pas encore tant que ça titille ma curiosité. » expliqua-t-il.
Il avait beau essayer, Jisung ne comprenait pas et ça se voyait. Hyunjin, à l'idée de devoir en dire encore plus qu'il ne l'avait déjà fait, se mit à rougir doucement. Une couleur cramoisie rappelant le rouge des coccinelles mordit le chemin qui s'étendait de ses joues à ses oreilles et Jisung, sans le vouloir, l'imita.
« Ce que j'essaie de te dire, c'est que tu m'intéresses. Beaucoup. Et dans le sens que tu crois. Donc, si tu voulais bien me donner ton numéro de téléphone et me laisser t'inviter au cinéma ou quoi que ce soit d'autre, ça me ferait plaisir. » articula le noiraud.
Ç'aurait été mentir que de dire que Jisung était surpris. Il était encore plus que cela mais il manquait de mots pour l'expliquer. Ahuri ? Étourdi ? Oui, ça se rapprochait plus du tumulte de pensées qui hurlait dans son esprit. Hyunjin patientait, analysant les traits de son visage que Jisung savait, le trahissaient. Il déglutit bruyamment, et opina doucement du chef. Si légèrement qu'on aurait pu ne pas le voir mais Hyunjin le remarqua.
Le noiraud poussa sur un de ses bras afin de soulever son fessier de l'herbe tendre et glissa une de ses mains dans la poche arrière de son pantalon. D'un geste fluide, il extirpa son téléphone de cette poche et le déverrouilla avant de se rassoir. Ses pouces dansèrent sur le clavier.
« Jisung, c'est ça ? » demanda-t-il.
Le susnommé mima un « oui » de la tête et ne chercha pas à savoir comment sa muse connaissait son prénom. Trop de choses se bousculaient déjà dans son crâne, il n'aurait pas fallu en ajouter plus.
Au bout de quelques secondes, Hyunjin lui tendit son téléphone portable, lui intimant d'encoder son numéro dans le contact qu'il venait se créer à son nom. Ce qu'il fit, avant de le lui rendre. Le noiraud sourit de toutes ses dents en récupérant le dispositif. Sur un ton bas, il remercia l'autre avant de remettre l'objet dans sa poche et de se mettre debout.
« Merci beaucoup. Je t'appellerai. » dit-il simplement et Jisung acquiesça.
Hébété, le blond ne su que dire ni quoi faire de plus. Il ne retint pas Hyunjin quand ce dernier se mit à s'éloigner en direction du match de football qui avait continué tout au long de leur conversation. Jisung se rendit d'ailleurs compte qu'il avait complètement noyé le bruit que les jeunes hommes faisaient, s'étant uniquement concentré sur le son de la voix du noiraud et celui des branches de l'arbre qui craquaient.
C'est par la suite et en laissant son regard se perdre sur la silhouette de sa muse qu'il se surprit d'une seconde révélation. Hyunjin ne boitait plus, marchant d'un air assuré tout en usant parfaitement de ses deux jambes. Confus, Jisung appela le noiraud.
« Hyunjin ! — il s'arrêta et lui adressa un regard — Et ta cheville ?! »
L'interpellé sourit et le vent souffla à nouveau. La brise fut si forte qu'elle fit voler des pétales du magnolia, ces derniers se mettant à pleurer sur les deux lycéens. Le noiraud haussa les épaules.
« J'avais envie de te parler, mais je ne savais pas trop comment m'y prendre. » déclara-t-il avant de se remettre à marcher et rejoindre l'action du match.
Hyunjin avait les lèvres couleur pêche et sentait la fleur d'oranger.
Tout comme Jisung s'y attendait, il parlait avec assurance et jouait de ses sourcils lorsqu'il entretenait une conversation. Ce à quoi Jisung ne s'attendait pas cependant, c'était qu'il usait de stratégies dissimulées pour obtenir ce qu'il convoitait. Et même si cette facette de sa personnalité ne collait ni à l'illusion que l'artiste avait créée, ni à la saison printanière qui le définissait si bien, Jisung pensait que ça ne le rendait que plus intriguant.
Finalement, Seungmin avait peut être raison.
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