Mutante - Tome 3

By Ashayanne

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/!\ Cette histoire est la suite de Mutante Tome 1 & 2 /!\ Alors que je pensais surtout affronter les secrets... More

Chapitre 1 : Ewa
Chapitre 2-1 : Première mission
Chapitre 2-2 : Remontrances
Chapitre 3-1 : Réunion de famille
Chapitre 3-2 : Librairie
Chapitre 4 : Disparition
Chapitre 5 : Marché noir
Chapitre 6 : Crise
Chapitre 7 : Elizabeth
Chapitre 8 : Retrouvailles
Chapitre 9 : Nouvelle mission
Chapitre 10 : Contamination
Chapitre 11 : Envol
Chapitre 12 : Aller de l'avant
Chapitre 13 : Vice caché
Chapitre 14 : Adam
Chapitre 15 : Eden et Law
Chapitre 16 : Rencontre
Chapitre 17 : Conflit
Chapitre 18 : Alliance
Chapitre 19 : Prophétie
Chapitre 20 : Norvège
Chapitre 21 : Roxanne Sorn
Chapitre 22 : Affrontements
Chapitre 23 : A la belle étoile
Chapitre 24 : Puzzle
Chapitre 25 : Feu
Chapitre 26 : Brasier
Chapitre 27 : Incertitudes
Chapitre 28 : Euphorie
Chapitre 29 : Gale Raven
Chapitre 30 : Sauvetage
Chapitre 31 : Hypocrisie
Chapitre 32 : Émotions
Chapitre 33 : Pelote d'ébène
Chapitre 34 : Réveil
Chapitre 35 : Colère
Chapitre 36 : Poursuite
Chapitre 37 : Réponses
Chapitre 38 : Potion
Chapitre 39 : Chasse
Chapitre 40 : Batailles
Chapitre 41 : Rescousse
Mutante - Tome 4

Chapitre 42 : Porte de sortie (fin Tome 3)

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By Ashayanne

Miller se ressaisit en premier, marmonnant quelque chose dans l'oreillette. L'entrée par laquelle le péritio était passé s'ouvrit en grinçant. Je me faufilais dans le couloir, Miller et Jun sur les talons. La porte se ferma, nous plongeant dans le noir. 

Une bonne quantité d'énergies en réserve, j'usais du fluide. On atterrit dans une grande cage, couverte de boyaux. Le péritio était enfermé ici. La grille était levée, et personne ne patrouillait. Cette pièce, pourvue d'une seule cage, devait servir de transition pour faire entrer un Mutant. 

Je remarquais un fonctionnement similaire à celui d'Ewa. Pas étonnant, puisque Phaïp était à l'origine des deux. Les hommes me dépassèrent, m'indiquant de suivre leurs pas. On s'arrêta plusieurs fois, nous figeant au moindre signe de soldats dans le coin. 

Visiblement, ce couloir était relié à la serre qui gardait les Mutants enfermés. Pour les besoins de l'arène, Hélios ou d'autres endroits plus sinistres, un grand bâtiment avait spécialement été érigé. 

Plusieurs fois, on dut faire des haltes pour ne pas se faire repérer. Les Lumen Warrior courraient dans tous les sens. Mon évasion devait déjà être sur les lèvres de tout le monde. La parcours fut long et tumultueux. Jun et Miller assommèrent plusieurs personnes, mais toujours avec une discrétion que je ne leur connaissais pas.

Quand on finit par prendre un long escalier, je perçus enfin la lumière du jour. Elle filtrait par les fenêtres d'un vieux bâtiment, mais c'était mieux que rien, plus que ce que j'avais connu ces dernières semaines.

On continua de se faufiler, et je compris que c'était les couloirs des employés des Lumen Master. Un fumet agréable m'indiqua que nous passions à côté des cuisines. On atterrit soudainement devant une porte de service.

– Tu peux nous l'ouvrir ? demanda Jun dans son oreillette.

Miller jura. Je compris que ce n'était pas informatisé.

– Il faut qu'on la défonce à la main.

– Cette porte est trop lourde ! Même avec nos armes, on ne pourra pas ! protesta Jun en balayant l'environnement du regard. Il faudrait la puissance d'un ouragan pour l'enfoncer.

Cela me donna une idée. Ça utiliserait une immense partie de mes forces, mais ça pourrait fonctionner. Après tout, autant mettre à profit le sang que j'avais récupéré ! 

Je fis signe aux hommes de reculer. Ils se postèrent derrière moi, jetant des coups d'œil nerveux par dessus leur épaule. Je concentrais toutes mes forces. Me revint en mémoire la façon dont Eden m'avait expliqué l'utilisation naturelle du fluide. J'avais besoin de sortir. Je devais défoncer cette porte pour ça. 

Mes mains chauffèrent, donnant toute la force dont j'avais besoin pour faire plier les énergies extérieures. Même mes ailes s'émoussèrent sous l'assaut de tant de puissance. Une boule de vent si concentrée qu'elle en devint blanche se forma entre mes mains. Elle tailladait presque mes paumes par sa puissance. 

Déterminée, je la balançais contre la porte de métal. La matière plia, mais pas assez pour l'ouvrir. Je recommençais, sous les yeux ébahis de mes mentors. Ils ne s'attendaient pas à autant de puissance. 

Cependant, les expériences m'avaient fait toucher le fond de mes capacités. Je savais de quoi j'étais capable. Surtout, je n'en avais plus peur. Je pouvais y aller à pleine puissance en terrain connu. Il me fallut trois sphères de vent à pleine puissance pour arriver à défoncer le loquet. Il suffit d'un coup de pied de Jun pour finir de l'ouvrir. 

La lumière du soleil se déversa sur moi comme une onde de chaleur, et j'en fus éblouie un moment. Je ne l'avais pas vu depuis si longtemps ! 

Jun sortit prudemment en premier, vérifiant que la voie était libre. Miller passa derrière moi, m'encadrant. Il enleva sa veste, et couvrit mes épaules nues avec. Dessous, j'enroulais mes ailes autour de mon corps pour les masquer. Jun et Miller portaient toujours leurs masques, alors nous étions le convoi le plus suspect possible. 

On passa dans de petites ruelles, pour terminer par arriver dans un vieux bâtiment en reconstruction. Une fois à l'intérieur, Jun et Miller dévoilèrent leur figure. Je détaillais alors leur visage tiré et fatigué. Des cernes exprimaient le peu de sommeil qu'ils avaient eu depuis ma capture. Une femme se jeta sur moi, manquant de me renverser.

– Amy ! Ma chérie, tu es là !

Ma mère se recula, ses mains enserrant mes épaules. Elle m'examina de la tête aux pieds, ne manquant pas les traînées de sang autour de ma bouche. Encore moins les cicatrices qui me barraient le corps. 

Je lus la douleur de me voir ainsi dans ses yeux. Je refoulais mes larmes, nous n'étions pas encore sortis d'affaires. J'entendis les hommes fouiller dans un sac de sport posé plus loin. Ma mère posa une main sur ma joue, comme pour vérifier que j'étais bien réelle.

– Mon Dieu, que t'ont-ils fait ? réalisa-t-elle pour elle même.

Elle ne voulait pas le savoir. Et je ne voulais pas qu'elle le sache. C'était déjà assez douloureux comme ça. Elle prit une mèche de cheveux entre ses doigts, les yeux brillants à cause des larmes. En scrutant ma chevelure, je constatais à nouveau qu'elle avait perdu l'entièreté de sa splendeur. Non seulement au niveau de sa texture, mais aussi par son aspect terne et fade. 

Miller arriva vers moi avec une pile de vêtements, et une serviette. Il la mouilla avec une bouteille d'eau, et me la tendit. Je frottais mon visage, imbibant rapidement la serviette de rouge. Puis je saisis les habits, un simple pull noir et un pantalon de la même couleur. Ils avaient même prévu une paire de baskets, étant donné que j'étais pieds nus. 

Je m'habillais rapidement, insensible à la pudeur quand j'enlevais mon bas troué. Des tas de scientifiques avaient reluqués mon corps pendant des semaines, alors ce n'était pas ça qui allait me faire rougir. 

J'interrogeais mes proches sur la suite des événements du regard. Ils ne demandèrent pas pourquoi je n'usais pas de mes cordes vocales, semblant comprendre. Tout comme ma mère ne fut pas émue de voir du sang autour de ma bouche. Peut-être avait-elle immédiatement compris.

– Je vais les appâter avec Jun, m'expliqua-t-elle. Ton ami va lancer un signalement correspondant à ta description dans le sens opposé. On va le relayer, pendant que toi et Miller partaient vers le quartier Est.

Mon ami ? Je compris après quelques secondes qu'il s'agissait d'Adam. Miller et Jun avaient eu la sagesse de ne pas lui expliquer son identité. Pas sûre que ma mère aurait accepté de travailler avec une Ombre. Je m'inquiétais pour elle, mais elle secoua la tête.

– Ma priorité est de te faire sortir. On verra pour le reste.

Jun nous pressa, récupérant le sac de sport. Lui et ma mère sortirent en premier. Puis Miller m'entraîna dehors, une fois que j'eus enfilé un manteau noir. Je mis la capuche, dissimulant ce qui restait de mes cheveux dedans.

– Si tu n'arrives plus à marcher, surtout tu me préviens, demanda Miller.

Il passa en revue une dernière fois mon état, les sourcils froncés. Il pinça les lèvres, furax. Comme il l'avait vu, je m'étais déjà vengée de mon bourreau. On parcourut plusieurs rues, évitant celles qui grouillaient de Lumen Warrior. 

Comme lors de ma capture, on cherchait à m'encercler. Mais cette fois, Miller semblait prêt. 

Adam vérifiait les caméras de surveillance, indiquant le meilleur chemin à prendre. Je sentais l'effervescence qui animait la ville. On dut marcher un long moment avant d'atteindre notre destination. J'étais épuisée, mais je me forçais à tenir bon. Je ne pouvais pas abandonner maintenant, pas après tout ce que j'avais subi. 

Plusieurs fois, j'eus peur de me faire attraper. Les Lumen Warrior étaient sur les dents, et analysaient chaque jeune fille qu'ils croisaient. Avec l'aide d'Adam, les caméras n'étaient plus un problème. Il fallait seulement passer au nez et la barbe de tous les Lumen Warrior. J'entendis des murmures provenir de l'oreillette de Miller.

– D'accord. On sera arrivés d'ici vingt minutes.

Il poussa un soupir soulagé. Puis il se tourna vers moi, presque incrédule.

– Ça me semble irréel, mais on dirait bien que Esteban Arrano a tenu parole. Il nous aide à te faire sortir en brouillant les ordres.

Mes sourcils touchèrent presque mes cheveux. Il avait bien dit vouloir m'aider, mais j'avais perdu cet espoir quelques semaines après mon arrestation. Il n'était venu me voir qu'une seule fois pendant ma captivité, alors c'était le dernier soutien auquel je pensais. Ça cachait quelque chose. Miller confirma mes soupçons.

– Il veut que tu retrouves le Livre Z, et aussi que tu l'informes de toutes les avancées. Sinon, il organisera à nouveau ton emprisonnement.

L'enfoiré. Je serrais les poings, essayant de chasser ma colère. J'en avais déjà bien assez, l'augmenter serait dangereux. Je devais faire attention à ne pas laisser mon instinct Mutant prendre le dessus, sinon adieu la discrétion. 

Miller me conduisit à travers des ruelles mal famées, slalomant entre quelques sans-abris. Je compris à l'état des routes que nous nous approchions du quartier Est. Quasiment abandonné par les Lumen Master, cette partie de la ville regorgeait de criminels et trafics en tout genre. On avait déjà essayé de les déloger, mais ils s'étaient battus férocement et avaient gardé leur territoire. Light était comme un microscome. 

Certaines Lumières essayèrent de nous arrêter pour nous voler, mais un regard de Miller suffit à les éloigner. Je me souvins qu'il était originaire d'ici. Il avait bâti une sacrée réputation depuis, sous la tutelle de mon père pendant quelques années. 

Miller m'indiqua de garder la tête baissée, et de bien masquer mon visage. Je ne voyais que mes pieds, mais ressentais toute la désolation qui animait cet endroit. Le côté noir de Light. 

Quelqu'un essaya d'attraper mon bras, si bien que je me retournais immédiatement. J'attrapais le sien, et le tordis en un mouvement. J'entendis un craquement sinistre. Mon assaillant gémit, avant de s'enfuir. Je retenais le grognement qui menaçait de s'échapper de ma gorge. Je ne devais pas attirer l'attention. 

Miller me tira rapidement, ne me réprimandant pas sur mon acte. Nous n'avions pas le temps pour ces futilités. On s'arrêta devant une porte, appartenant à un bâtiment en apparence classique. Pourtant, l'intérieur était plus que luxueux quand nous entrâmes. 

Une jeune femme habillée un peu trop court nous accueillit, et nous accompagna. Elle nous conduisit dans une petite pièce, puis ferma la porte derrière nous. La salle était plongée dans l'obscurité, si bien que je voulus immédiatement activer le fluide. Je n'aimais pas ignorer mon environnement.

– Tu peux retirer ta capuche, m'informa Miller.

J'obéis, quand enfin la pièce fut éclairée. Une lampe vacillait au dessus de nos têtes, révélant un genre de petit salon cosy. 

Je mis plusieurs secondes à reconnaître les personnes assises en face de moi. Je restais immobile, abasourdie. J'avais l'impression qu'il s'était écoulé une dizaine d'années depuis notre dernière discussion. 

Mes meilleurs amis se levèrent, pantelants. Je n'avais pas fière allure. Lucy plaqua une main sur sa bouche, retenant ses larmes. Zéphyr passa un regard désolé sur mon corps, que je m'empressais de cacher. Ils n'avaient pas besoin de voir mon état. 

Le rouquin fut le premier à réagir, et s'avancer pour me prendre dans ses bras. Il y alla avec délicatesse, comme s'il avait peur de me casser. Je posais mes mains sur son dos, la poitrine brûlante. Ma respiration était saccadée sous mes émotions. 

Zéphyr me relâcha, et m'examina de plus près, comme pour confirmer ma présence. Il me sourit, et je lui rendis une genre de grimace. Puis tout à coup, Lucy me bondit dessus, sans se soucier de la délicatesse. Elle avait juste besoin de se prouver que j'étais bien là. Elle me serra à m'en étouffer, et laissa couler quelques larmes. 

Elle finit par se redresser, et prit mon visage entre ses mains. Elle palpa mon corps un instant, horrifiée de l'état dans lequel il était. Même avec des vêtements larges, on pouvait voir à quel point j'avais maigri. J'étais moi-même étonnée de tenir encore debout. Je pouvais dire merci au sang du bourreau. 

Zéphyr fouilla dans un sac, et me tendit une bouteille d'eau. Je l'en remerciais, et bus avidement le liquide. Je m'arrêtais une seconde, étonnée du goût clair de la boisson. Je compris que l'eau servie dans ma cellule contenait sûrement une drogue pour m'assommer. Ils avaient stoppés les injections au bout d'un petit moment. En voilà la raison. 

Mon estomac protesta sous le litre de flotte que j'avalais rapidement. Puis quelqu'un toqua à la porte. Un vieil homme, appuyé sur sa canne, nous observa tour à tour.

– Quand tu me disais vouloir faire sortir quelqu'un, je ne savais pas que c'était une Mutante, railla-t-il à l'adresse de Miller.

– On a un marché, rappela ce dernier.

– Ta somme est très généreuse, mais je doute que les Lumen Master ne puissent pas m'offrir plus.

Je serrais les poings. Ma porte de sortie était en train de se refermer progressivement. Quelqu'un entra alors à son tour, et murmura à l'oreille du vieil homme. J'enclenchais mon ouïe de Mutante.

– L'état de votre petite-fille s'est dégradé. Elle demande à vous voir.

Le vieil homme serra les mâchoires, et congédia son employé.

– Nous en discuterons dans un instant. D'ici là, trouve moi quelque chose qui vaille le coup, Will.

Il claqua la porte, et Miller se tourna vers nous.

– Ce salaud veut que je lui donne une faveur.

– Qu'est-ce que ça veut dire ? questionna Lucy.

– Que je devrais obéir à sa demande, quoi qu'il veuille.

– Comme mourir pour lui ? comprit Zéphyr.

Miller acquiesça sombrement. Non ! Il devait y avoir un autre moyen. Mon cerveau se mit en branle, jusqu'à ce que la phrase de l'employé m'interpelle. J'essayais de prononcer un mot, mais ma gorge me faisait toujours horriblement mal. Je toussais, aggravant son état. Lucy réagit immédiatement, et me demanda d'ouvrir la bouche.

– Ce sont tes cordes vocales ?

J'acquiesçais. Elle fouilla dans son sac, puis me donna un élixir.

– Ça n'est pas magique, mais ça calmera l'inflammation de ta gorge. Il vaut mieux que tu ne parles pas, me conseilla-t-elle.

J'avalais la mixture d'une traite, avant que Lucy ne me donne un papier et un crayon. Je maudissais ma dyslexie, mais réussis quand même à expliquer ma question. J'aurais aimé écrire en Scriatés, mais ils auraient mis un temps fou à décrypter.

– De ce que je sais, sa fille souffre d'une maladie incurable, répondit Miller. Elle aurait avalé un élixir empoisonné.

Mon cœur fit un bon. Qui disait élixir, disait poussière écarlate. Et donc énergies. Je jetais un regard insistant à Lucy, qui saisit mon idée.

– Amy pourrait la soigner. Ou du moins, l'aider. Comme elle l'a fait pour Gale et la sœur de Cathleen.

Miller me jeta un regard hésitant.

– Tu es sûre que ton état te le permet ?

Non, bien sûr que non. Il me faudrait des semaines avant de retrouver la forme. Cependant, il y avait un moyen pour être apte à ça pendant quelques heures. Rien qu'à l'idée, mes canines s'allongèrent douloureusement. 

Mes compagnons n'eurent pas besoin de plus d'indices pour comprendre. Le vieil homme rappliqua rapidement, un demi-sourire aux lèvres. Il était certain de se faire un joli pactole en donnant ma position aux Lumen Master. Cependant, l'inquiétude qui brillait dans son regard renforça mon idée.

– Et si on avait un moyen de sauver votre petite-fille ? avança Miller.

Le vieil homme perdit son sourire, et devint menaçant.

– Mentez-moi, et ce sera encore pire.

– C'est la vérité. Amy a soigné des personnes victimes d'élixirs. Si c'est ce qui a causé la maladie de votre petite-fille, elle peut l'aider.

– Ça ne vous coûtera rien d'essayer, renchérit Zéphyr. Tout ce qu'il faut, c'est les mettre en contact.

– Et un peu de sang de Lumière, murmura Lucy.

Le vieil homme devint colérique, pensant que l'on se moquait de lui. Il fallut un long moment avant de le convaincre. Mes jambes étaient flageolantes, ne me rassurant pas sur la suite. Lucy avait déjà le matériel pour prélever du sang. Elle me demanda quelle quantité. Je lui en indiquais le plus possible. 

Elle essaya de masquer son regard effrayé, mais n'y arriva pas. Je fermais les yeux, consciente que je devenais de plus en plus le monstre redouté. Mais c'était ce dont j'avais besoin pour ma survie. Je ne pouvais pas faire autrement.

Lucy prit le sang de Zéphyr, que je savais puissant en Giaco. Propriété de la Famille Principale. Le rouquin ne s'offusqua pas de ma demande, ce qui me rassura un peu. J'avalais rapidement le liquide sucré, appréciant de plus en plus son goût. Ça n'était pas normal. 

Mon corps réagit immédiatement sous l'afflux d'énergies, et de longs frissons me parcoururent. Le fluide chauffa à la surface de ma peau, prêt à être utilisé. Le vieil homme nous conduisit plus loin, dans une immense chambre couleur pastel. 

Au milieu trônait un grand lit au matelas épais, dans lequel une jeune fille se tournait et retournait. Une pellicule de sueur recouvrait son front, et ses yeux froncés indiquait à quel point elle souffrait. 

Je m'approchais d'elle, avant que le vieil homme ne me barre la route. Il voulait savoir ce que j'allais faire. Je demandais à Lucy de le faire à ma place.

– Juste faire un diagnostic. Amy a besoin de savoir précisément ce qui a causé sa maladie.

– Quelqu'un a essayé de l'empoisonner avec un élixir.

Il énuméra les analyses faites, notamment le fait que lui drainer du sang et en perfuser arrangeait son état. Les énergies circulant dans les veines, cela me rassura quant à mes soupçons. Je savais que le sang ingéré ne ferait effet que temporairement, je devais donc me dépêcher.

– Vous devriez sortir, suggéra Zéphyr.

– Pas question que je quitte ma petite-fille ! protesta l'homme.

– Alors n'intervenez jamais, sinon vous risquerez de la tuer, le prévint Miller.

Je n'étais pas certaine que ça pouvait rasséréner le vieil homme, mais il ne renchérit pas. Je m'asseyais près de la jeune fille, légèrement moins âgée. Je pris sa main glacée dans la mienne, contrastant avec la sueur qui perlait sur son front. Je retirais les couvertures qui l'enfouissait, lui tirant un gémissement. J'avais besoin de voir l'état de son corps. 

J'activais le fluide naturellement, et passais au diagnostic. Des énergies étrangères détruisaient petit à petit les fonctions de son corps, notamment son cœur. Mais je pouvais faire quelque chose. Il me fallut une heure pleine, et toutes mes ressources, pour l'aider. Dans mon état, je ne pouvais pas complètement la soigner. Cependant, elle souffrirait beaucoup moins. 

Après l'opération, elle se réveilla, embrumée. Le vieil homme lui bondit dessus, la cajolant de mots affectueux. Dire qu'il voulait me vendre aux Lumen Master ! 

Miller se racla la gorge, car le temps nous pressait toujours. Le vieil homme se tourna vers moi, semblant refouler le brin d'espoir qu'il venait de voir.

– Ça va rechuter ?

Je secouais la tête. Elle vivrait encore un peu malade, car il restait des énergies. Cependant, ce n'était plus aussi grave. Lucy lui expliqua la situation, ayant analysé avec attention ce que j'avais fait. 

Quand je me levais, Zéphyr dut me retenir pour que je ne m'effondre pas. Le vieil homme quitta à regret sa petite-fille, apparemment sa seule famille. Il nous guida alors à travers la maison, jusqu'à un sous-sol. On entra dans une immense pièce, dans laquelle une cuve trônait au centre.

– C'est l'un des premiers portails. Il n'est pas complètement sécurisé, et ne permet que de faire passer une personne à la fois, m'informa Miller. Son prototype n'a pas été retenu.

– Mais il fait très bien l'affaire pour les gens comme vous.

– N'importe qui peut l'emprunter ? se méfia Lucy.

Le vieil homme lança un sourire qui me fit froid dans le dos.

– Tant qu'il paie bien.

Miller poussa mon épaule pour que je m'installe dans la cuve. Ma gorge ne me faisait plus mal, mais je ne pouvais toujours pas parler sans souffrir. Je m'inquiétais pour eux.

– On passera par l'Arche, m'informa Miller. On te rejoindra, peut importe le temps que ça prendra.

Je protestais. C'était évident que les Lumen Master le chercherait pour mettre la main sur moi !

– On s'en sortira, ne t'en fais pas. En plus, Adam a un plan pour discréditer Phaïp et l'empêcher de nous arrêter.

Je plissais des yeux. Lucy s'approcha de moi, un sourire diabolique aux lèvres.

– Tu savais que la salle d'expérience possédait une caméra ? Elle n'est pas sensée être allumée, mais Adam a pu enregistrer pas mal des tortures. On montrera au monde ce qu'ils t'ont fait. Même si les gens te considèrent comme un Mutant, ça engendrera assez de confusion.

– Et Adam nous a dégoté un pass pour l'Arche. Ne t'en fais pas.

J'éprouvais une ridicule bouffée de fierté devant ce que mon compagnon avait accompli. Miller me pressa, et referma la cuve derrière moi. Le vieil homme donna plusieurs ordres, et tout se passa en un éclair. Une brume glacée entoura mes chevilles, me faisant légèrement paniquer. Je me sentais déjà vaciller à cause de la fatigue. Je n'allais pas arriver indemne si je ne résistais pas. Pourtant, je devais. 

D'un seul coup, ma respiration fut brusquement coupée. Ma vision s'obscurcit, et j'eus l'impression d'être tordue dans tous les sens. C'était désagréable au possible, mais insignifiant devant tout ce que j'avais vécu. Je pus alors enfin reprendre mon souffle, et m'écroulais à terre.

 Ma tête me lançait, comme toutes les autres parties de mon corps. Je n'arrivais plus à bouger. La téléportation avait fini de m'achever. Les soins de la jeune fille m'avaient entièrement vidée. Deux mains puissantes se posèrent sur mes épaules, et me retournèrent lentement. 

Un parfum agréable flotta, comme une brise d'océan. Les mains passèrent derrière mes jambes et mon dos. Je fus soulevée de terre, ma tête calée dans le creux du cou de l'homme. J'étais à moitié dans les vapes, et pourtant je reconnaissais ces bras. Je reconnaissais ce sentiment chaleureux de sécurité et d'amour. 

Je poussais un soupir de soulagement, le premier depuis un long moment. Je me blottis naturellement dans les bras de l'homme, paupières closes. Il marchait doucement, faisant en sorte que je ne sois pas trop ballottée. Ma main s'accrocha au t-shirt, ne le lâchant pas quand il s'assit et que mes jambes furent déposés sur une surface en cuir. Je ne voulais pas le laisser partir. 

J'entendis un bruit de moteur à l'instant ou le siège vibra, tandis que l'homme me serrait un peu plus fort. Il m'attira à lui, alors que mon corps se calait de lui même dans ses bras. Il m'entoura délicatement, comme une poupée fragile. Il déposa un baiser sur mon front, puis le sommeil me gagna.



Je ne savais pas combien de temps j'avais dormi. Sûrement assez pour qu'une guerre se soit écoulée sans que je ne m'en rende compte. La lourdeur de mes membres en était témoin. Il se passa de longues minutes avant que je ne me décide enfin à lever les paupières. Je me rendis compte que mon oreiller bougeait tout seul. Et qu'il s'agissait de la poitrine d'un homme. 

Je levais les yeux, mi-clos à cause de la lumière. Deux iris bleus se posèrent sur moi, et m'envoyèrent tout l'amour dont j'avais désespérément manqué. Les larmes me montèrent aux yeux, et je ne pus les réprimer.

– Adam, murmurai-je de ma voix éraillée.

Il m'attira un peu plus à lui, tandis que je m'accrochais désespérément à son t-shirt. Je ne me retenais pas, laissant couler à flot tous les pleurs que j'avais retenu depuis des semaines. Il caressa ma joue du bout du pouce, l'effleurant. Il avait peur de me briser, et je lui en fus reconnaissante. J'avais terriblement manqué de douceur, ce qui me fit pleurer de plus belle.

– Je suis là, Papillon, chuchota-t-il à mon oreille. Plus rien ne t'arrivera, tu es en sécurité.

Ses paroles rassurantes peinaient à m'atteindre. La preuve était que la ville la plus sûre s'était retournée contre moi. Je restais un long moment dans ses bras, profitant de cette sensation rassurante que j'avais oublié. 

J'avais peur de ce que je devrais affronter en sortant de ce lit. Ce qui m'attendait. Mon cerveau n'était cependant pas d'accord avec cette idée. Il me repassait devant les yeux tous les récents événements, surtout les plus horribles. Et le meurtre intentionnel du bourreau. 

Je ne regrettais pas. Est-ce que ça faisait de moi quelqu'un d'horrible ? Je n'en savais rien. Miller et Jun avaient été choqués en voyant ça, mais n'avaient pas émis de commentaire. 

Je finis par gigoter, essayant de retrouver contact avec mes membres ankylosés. J'avais l'impression de peser une tonne, alors que mon corps était bien trop maigre. Adam m'aida à me redresser très lentement, car le plus infime mouvement me tirait un gémissement. 

Maintenant que je pouvais respirer, toute l'adrénaline était descendue. Ne restait que la douleur d'avoir forcé sur mon corps. Surtout qu'ingurgiter une telle quantité de sang avait dû l'abîmer. Au bout de cinq minutes, je réussis à rester assise au bord du lit sans m'écrouler. Adam devait quand même me maintenir. 

Il prit une bouteille d'eau sur le chevet, et me la tendit. Il dut m'aider pour boire, mon bras étant horriblement douloureux. J'entrouvris mes lèvres desséchées, et bus avidement. Mon estomac protesta, et je compris que je devrais y aller doucement. J'essayais de parler, de m'exprimer, mais aucun son ne sortait sans douleur. Je m'inquiétais pour mes proches. 

Adam comprit, et me rassura en frottant délicatement mon bras, puis en déposant un baiser sur mon cuir chevelu. Sa douceur extrême exprimait à lui seul l'état pitoyable dans lequel j'étais.

– Et si on commençait par une douche ? proposa-t-il.

Depuis combien de temps ne m'étais-je pas lavée ? L'odeur seule de mon corps suffisait à répondre. Pourtant, Adam ne sembla pas s'en soucier. J'observais légèrement la chambre, qui était décorée modernement mais impersonnellement. Comment j'étais arrivée ici, je n'en avais aucune idée. Nul doute que les talents informatiques d'Adam y étaient pour quelque chose. 

Mon compagnon m'aida à me lever lentement, tout en me supportant. Je posais un pied devant l'autre, avant de tomber à terre. Je me serais écrasée si Adam ne m'avait pas fermement retenue. Je détestais être aussi dépendante. Le contrecoup de toutes ces expériences était conséquent. 

Je savais que le sang me ferait aussi cet effet, mais je n'avais pas douté de la honte que je ressentirais. Adam fut patient, m'aidant à chaque pas sans broncher. Dans la salle de bain, il me proposa de me laver, tant chaque mouvement était pénible simplement dans son déclenchement. 

J'avais surtout des gros problèmes d'équilibre, comme si mon corps n'appartenait pas au même espace-temps que les autres. Après avoir enlevé mes vêtements, je m'assis à terre à même le sol carrelé de la douche à l'italienne. Adam fut extrêmement léger, faisant même attention à ce que le jet d'eau ne soit pas trop fort. Je le couvais de reconnaissance, tandis qu'il me répondait par des baisers furtifs. 

Il m'enveloppa dans une serviette, avant d'aller chercher des vêtements propres. J'aperçus Caligo dans un coin, et eus un mouvement de soulagement. Je tenais à cette épée autant qu'à la prunelle de mes yeux. La tenue était confortable et moelleuse. J'en pleurerais presque, tant c'était antinomique à ce que j'avais vécu. 

Plus réveillée, j'arrivais presque à me démêler les cheveux toute seule. Les contractions douloureuses de mon estomac me rappelèrent que je devais manger pour récupérer. Adam retourna déposer les serviettes dans la salle de bain. 

Je sentis alors brusquement une présence de l'autre côté de la porte. Mon corps chauffa soudainement, tandis que mon instinct se mettait en branle. Le peigne tomba de ma main, et une raideur dans les muscles m'obligea à me redresser. Ma vue changea, prête au combat. Un grondement naquit dans ma gorge, de même que mes griffes se développaient. 

La silhouette toqua, puis ouvrit la porte. Je ne réfléchis pas, voulant me protéger, et défendre mon compagnon. Mon corps trouva une nouvelle force, et bondit sur la menace. L'homme devant moi poussa un cri effrayé, se protégeant avec ses bras. J'étais prête à lacérer sa peau, certaine qu'il me voudrait du mal. 

Deux bras forts entourèrent alors ma taille, me plaquant au sol. J'eus le souffle coupé, et un geignement sortit de ma bouche sous la douleur. Un souffle chaud caressa mon cou, alors qu'Adam me collait un peu plus contre son torse.

– C'est Law ! s'exclama-t-il, désarçonné. Il ne te fera rien !

Je grognais, cherchant à me dégager. De toute évidence, mon corps avait épuisé ses toutes dernières ressources dans le simple fait de bondir. Foutue adrénaline. Adam desserra sa prise, comprenant que je ne pouvais pas résister de toute manière. Mon instinct Mutante restait en alerte, alors que le blond aidait à me redresser. 

Un léger grognement s'échappa sans que je ne le veuille de ma bouche, menaçant Law. Je savais qui il était, et pourtant je n'arrivais pas à dégager ma méfiance. Adam murmura des mots doux, essayant de me calmer et me rassurer. 

Law ne bougea pas, attendant que je finisse de l'examiner de la tête aux pieds. Sage décision. Une jeune fille bondit alors à la suite du jeune homme, s'arrêtant juste à côté. Ses yeux verts s'écarquillèrent en voyant mon état. Je me rendis compte que mes canines et mes griffes étaient sorties. Mes yeux luisaient d'une couleur écarlate, alors je me forçais à stopper le fluide. Une larme perla au coin de mon œil.

– Ce n'est pas grave, m'assura Law en se penchant vers moi. C'est normal comme réaction après ce que tu as traversé.

Sa compréhension me surprit, d'autant que le regard peiné qu'il me lançait. Comment pouvait-il parler de mon passé comme un connaisseur ?

– Et si on allait dans le salon ? proposa Adam.

Lucy et Law sortirent, calmant mon instinct Mutant. A peine Adam eut-il bougé qu'un vertige me saisit. Il me rattrapa à nouveau, et me fit glisser dans ses bras sans sourciller. Je voulus protester, même s'il savait que je n'arrivais plus à marcher. Je me maudis de cette faiblesse. Je détestais me sentir aussi impuissante. 

Adam me souleva un peu plus haut, calant ma tête dans son cou. Je retenais ma respiration, effrayée de perdre à nouveau le contrôle. Je tentais de me calmer, et de méditer comme je l'avais appris. Je fermais les yeux, et la seconde suivante, me retrouvais dans un canapé en coin d'angle. Les mini pertes de conscience, c'était nouveau. 

J'étais emmitouflée dans un plaid, calée contre des oreillers. La chaleur d'Adam me manqua automatiquement, comme un grand vide. Law était assis de l'autre côté de la table basse, dans un fauteuil. Il me scrutait, indécis. Je formulais un « Désolé » avec mes lèvres. Il se détendit alors, rassuré. J'avais vraiment dû lui faire peur. 

J'entendis un raclement de gorge derrière moi, et me figeai automatiquement. Puis Lucy avança lentement vers moi, la même hésitation que Law sur le visage. Après ma réaction, ils étaient tous effarés. Je ne pouvais pas les blâmer. J'avais moi-même l'impression d'être extérieure à mes agissements. 

Je tentais un sourire encourageant pour Lucy, qui se révéla être une grimace maladroite. Je vis ses yeux briller sous l'émotion, et ses traits se détendre. Elle déposa alors le petit plateau qu'elle tenait sur le large accoudoir à côté de moi. Ses gestes évitaient de trop s'approcher de mon bras. Elle bégaya même sur la simple présentation du plateau.

– C'est une... une banane écrasée, euh, ça c'est un smoothie pour les vitamines, et hum, ça un élixir. Pour ta voix. J'ai essayé de concocter quelque chose en urgence, mais je te promets de trouver un remède à tes cordes vocales, jura-t-elle.

Je lui transmis toute ma reconnaissance à travers mon regard. Elle plaqua une main sur sa bouche, submergée. Notre fuite de Light était tellement pressante qu'elle avait réussi à faire la part des choses. Ce n'était plus la même chose. Zéphyr arriva à son tour dans la pièce, et me lança un sourire franc. 

Je pinçais les lèvres dans une autre grimace, n'ayant plus l'habitude de sourire vraiment. Une odeur agréable flotta à mes narines dès l'instant où Adam mit les pieds dans la pièce. J'étais devenue si sensible à sa présence. Sans aucune hésitation, il vint vers moi et s'assit à mes côtés. 

Je levais une main pour l'attirer plus proche, rassurée par sa présence. Je me blottis contre lui à nouveau. Je remarquais que mon instinct Mutant ne s'était pas éveillé avec lui. Il lui dévouait une totale confiance. C'était un indice qui m'avait poussé à accepter son marché, au début. 

Il saisit l'élixir de Lucy, et prit une paille sur le plateau pour que le boive. Lucy rongeait ses ongles, les yeux rivés sur la fiole. Je bus rapidement la potion, impatiente qu'elle fasse effet.

– Je... murmurai-je toujours de ma voix rocailleuse.

C'était horrible à entendre, mais pas douloureux. J'eus cette fois un vrai sourire envers Lucy.

– Ça marche ! croassai-je.

Elle poussa un long souffle, et s'affaissa dans le canapé d'en face.

– J'ai vraiment cru que tu étais devenue muette, quant tu as arrêté de parler, j'avais peur que ce soit irréversible ! débita-t-elle.

Arrêté de parler ? Je fronçais les sourcils, ne comprenant pas le sens. Adam se tendit à côté de moi.

– La salle où ils te conduisaient possède des caméras. J'ai réussi à avoir leurs images il y a plusieurs semaines, avoua-t-il.

Un creux abominable se forma dans mon estomac. Ils savaient ce que j'avais enduré, depuis tout ce temps ? La partie rationnelle de mon cerveau savait qu'ils avaient dû fomenter un sacré plan d'évasion. La partie émotionnelle leur en voulait de m'avoir laissé croupir là-bas si longtemps. Je pris quelques respirations, ne voulant pas que ma colère injustifiée éclate.

– On est désolé de ne pas être intervenu plus tôt, s'excusa Zéphyr. On ne pouvait pas prendre trop de risques.

J'acquiesçais, consciente que ça avait dû être une sacrée tâche. J'étais sortie de là, c'était tout ce qu'il fallait savoir. Les expériences repassaient devant mes yeux, inlassablement. Je fermais les yeux, les lèvres tremblantes. Adam caressa mon visage, compatissant.

– Je ne te laisserai plus jamais subir ça. Plus jamais, chuchota-t-il.

Je rouvris les yeux, et lui transmis tout mon amour à travers un simple regard. On n'avait pas besoin de plus. Et ça ne coûtait rien à mon corps. Mon estomac gronda d'ailleurs furieusement. Je mis quelques secondes à attraper le verre de jus de fruit, mais finis par réussir.

– Oh, désolé de t'avoir fait peur tout-à-l'heure, intervint Law en bafouillant.

Je secouais la tête.

– C'est ma faute, murmurai-je en toussant. Je... les expériences...

Les mots restèrent coincés dans ma gorge. Comment leur dire honnêtement que les expériences m'avaient rendu presque animal ? Ma réaction précédente n'était que ça. Du pur instinct animal. Ou Mutant pour être correct. Adam passa un bras autour de moi, et frotta doucement mon bras.

– Tu n'as pas besoin d'en parler. Ce que tu as vécu est traumatisant, pour n'importe qui.

Je réalisais alors qu'Adam avait suivi l'exfiltration via les caméras. Un creux se forma dans mon estomac.

– Tu as vu, croassai-je. Tu as vu ce que j'ai fait.

Je n'avais pas besoin de mentionner le meurtre du bourreau. J'avais peur de sa réaction. J'avais peur qu'il me renie, s'éloigne et ne veuille plus de moi. C'était stupide, car ce n'était pas la première fois. Mais ça avait été si bestial. Pourtant s'il se tenait là, si affectueusement, cela voulait dire qu'il ne m'en tenait pas compte.

– Ce monstre ne méritait pas moins. Tu as été clémente en lui fournissant une mort rapide. Après tout ce qu'il a fait, il aurait mérité le même traitement que toi, m'assura-t-il avec une colère brute et puissante.

En observant ses prunelles, je pouvais distinguer toute la haine qui l'animait. Il était enragé contre ces scientifiques. Cette dureté contrastait la douceur avec laquelle il me tenait.

– Phaïp ne s'en sortira pas comme ça, assura Zéphyr. Adam a des images compromettantes. Et mon père cherche sa vengeance, par n'importe quel moyen.

Je lui jetais un regard étonné, toujours sceptique quant au soutien du chef de Clan.

– Il nous a aidé pour ton évasion. Il a réussi à nous fournir un plan complet du bâtiment, et manipuler les tours de gardes. On a créé un chemin pour que vous puissiez éviter tous les Lumen Warrior.

– Miller et Jun ? m'exclamai-je, la voix éraillée.

– Toujours à Light. On n'est pas sorti en même temps, m'expliqua Lucy. Mais ils partiront dès que ça sera calmé.

– Et ma mère ? questionnai-je, le ventre noué.

– Partie se cacher, répondit Zéphyr. On sait que les Lumen Master voudront mettre la main sur elle. Elle a d'ailleurs laissé ça.

Il partit chercher un sac à dos, et me le posa sur les jambes. En fouillant l'intérieur, je découvris les faux papiers que ma mère avait fabriqué il y a longtemps, ainsi qu'une sacrée somme d'argent. Ce que Lucy et moi avions trouvé dans son bureau, juste avant la rentrée d'Hélios. Ma mère se préparait à une fuite depuis longtemps.

– Je lui ai laissé un appareil de communication, m'informa Adam. Quand elle sera en sécurité, elle t'appellera.

Je le remerciais, et rangeais la fausse carte d'identité.

– Je suis officiellement une fugitive, alors, murmurai-je.

Un frisson me parcourut. Il n'y avait pas de situation plus instable que celle-là. Je me retrouvais étrangement dans la peau de Rishi.

– Fugitive, mais dehors, me rappela Zéphyr.

– Et avec nous, renchérit Lucy.

– On ne va pas te lâcher comme ça, pouffa Law, retrouvant son humour habituel.

Les larmes me montèrent aux yeux devant leur dévouement. L'avenir m'effrayait tant ! Adam déposa un baiser sur mon crâne, avant de me serrer un peu plus contre lui. Lucy se leva, suivie par Zéphyr. Ils s'assirent à côté de mes jambes, plus du tout apeurés par mon comportement. 

Law se posta derrière le dossier, s'appuyant au dessus de moi. Leur présence effaçait presque tous mes doutes. Mes yeux croisèrent ceux d'Adam, et s'ancrèrent dans ce bleu glacé si chaleureux. 

Il prit ma main dans la sienne, et croisa nos doigts. Un frisson familier parcourut mon bras, puis mon corps entier. Mon cœur se gonfla. Le regard qu'il me lançait était profond, déterminé. Rien ne pourrait l'ébranler.

– Quoi qu'il arrive, on va l'affronter. Ensemble.


FIN TOME 3

***

Bonjour à tous ! Et oui, fin du tome 3, sur les 5 tomes de la saga. J'espère que celui-ci vous aura plu, et vous donne envie de poursuivre les aventures d'Amy & Co ! Le tome 4 arrivera très bientôt, et je souhaite que la suite vous plaise encore plus !

Je remercie chaque lecteur pour le temps qu'il prend, à lire, voter et commenter, cela signifie beaucoup pour moi. Les moindres messages que vous laissaient me motivent à continuer, et si jamais j'oublie de vous répondre, ne doutez pas que je lis tous les commentaires !

A la prochaine pour la suite des aventures de notre Mutante préférée !

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