Je porte mon index droit à la bouche et le lèche du bout de la langue afin de récupérer la glace à la pistache et au chocolat qui fond doucement de mon cône glacé. Bien entendu, comme une gosse, je n'ai pas pu résister à croquer le bout du cône avant de finir la crème glacée à l'intérieur. Nous marchons dans le centre-ville de Soho en ce début de soirée avec Charlie. La rue est bruyante. Normale pour un samedi soir en plein cœur de Manhattan. Les gens profitent, se détendent, s'amusent. Il faut dire que le beau temps de ces derniers jours encourage à profiter au maximum du week-end qui commence. Je ne peux pas dire que cela m'avait manqué. Je n'avais pas trop l'occasion de sortir les soirs, sauf pour aller au cinéma ou au restaurant, néanmoins à vingt-deux heures, je devais être rentrée me sentant coupable d'être trop longtemps séparé de ma petite luciole d'amour.
- Les filles. Charlie! Joy!
Il me semble reconnaître le timbre de la voix qui nous appelle. Nous, nous retournons et nous avons la surprise non de voir la personne qui nous à interpellé, mais de voir la magnifique Amarok noire, rouler doucement à nos côtés. La même qui était dans le parking de la résidence où réside Chris. Charlie blêmit. Hé oui ma belle, tu as abimé la voiture des pères de ton ancien petit ami.
- Jolie voiture! dis-je en souriant de toutes mes dents à ma sœur.
- Merci, dit Alexander en conduisant. Où allez-vous? Vous-voulez que l'on vous dépose ?
- Non c'est bon, on ne compte pas rentrer dans l'immédiat, dit ma sœur mal à l'aise.
Je me délecte de sa gêne. J'ai bien envie d'être très vilaine. Je me retiens à contre cœur pour le moment. Ce n'est que partie remise. Ça lui apprendra à abîmer cette petite merveille, non mais!
- Vous allez faire quoi? nous demande Ekemona, en se penchant sur sa portière.
Je me stoppe les forçant à se stopper eux-même une cinquantaine de centimètres devant nous. Les klaxonnes se déchaînent sur eux. Tu bloques un peu la circulation Alex. Je me dirige vers lui et me mets sur la pointe des pieds pour essayer d'être à sa hauteur mais la voiture est haute. Oui elle est haute, je ne suis pas petite. Je le regarde droit dans les yeux en souriant.
- Tout ce que je dis ne sera pas retenu contre moi Ô grand policier brun et ténébreux?
Il sourit de toutes ses dents avec Alexander. Je ne saurais dire lequel des deux à le plus de charme. C'est si injuste que deux hommes si magnifiques soient mariés. La conversation intéresse Chacha qui n'est plus du tout mal à l'aise, mais amusée de mon comportement de petite fille espiègle. Finalement c'est peut-être moi qui suis petite. Charlie, n'a pas besoin de se mettre sur la pointe des pieds et elle ne porte pas de talons ...
- Faut voir jeune fille. Je peux peut-être faire en sorte de ne rien retenir contre vous et fermer les yeux.
- Je n'en reviens pas. Flic corrompu va! lui dit son époux.
- Nous allons sortir, séduire des hommes et les violer toute la nuit. Ensuite, nous les hypnotiserons pour qu'ils puissent tout oublier.
Il se met à rire de bon cœur avec son époux. Eh oui, ils n'ont plus les deux adolescentes devant eux, mais deux femmes. Elles n'ont plus peur, ni honte de faire certaines allusions. Ils ne seraient pas gays, je tenterais bien une nuit avec eux. Mais voilà ils sont gays et mariés... Ô, joie...
- Tu ne comptes pas les violer? me demande faussement choquée Charlie.
Je reconnais le langage corporel de ma sœur. Sa façon de me regarder et de maintenir ses mains veut faire croire qu'elle est outrée de mon attitude mais en réalité elle me dit jouons et continuons à les titiller un peu. Je me mordille la lèvre en les reluquant sans gêne et grossièrement pour faire croire que je réfléchis vraiment à cette possibilité.
- Non, vu leurs âges, ils sont périmés. Ils appartiennent à l'époque du crétacé, ce serait comme utiliser un os.
Tout le sérieux que nous avons tenté de garder en nous avec ma jumelle, s'effondre lorsque nous voyons le regard outré des deux hommes. Bon, j'avoue que j'y ai été un peu fort sur ce coup, mais c'était spontané.
- Ils ne savent plus s'amuser à cet âge-là. dit-elle pour nuancer mes propos.
Je regarde l'heure sur mon téléphone. Il est bientôt vingt-deux heures dix. Je ne peux m'empêcher d'en rajouter une couche. C'est la saint Ekemona et Alexander réunis ce soir. Un magnifique combo pour nous deux.
- Les garçons, vous devriez déjà être au lit, non ? À cette heure-ci quand on a la quarantaine, il faut savoir prendre soin de soi. Vous allez avoir la tête défraîchis lundi au travail.
- Je suis choqué de votre comportement, mes demoiselles. s'exprime Alex. Surtout de toi Joy. Je te voyais si prude, si... innocente. Un ange quasiment!
- Mais je suis un ange déchu, Alexander. On vient juste de me couper les ailes. dis-je en me retournant sur moi-même de façon sensuelle pour montrer qu'elles ont disparu.
- Il y a des fessées qui se perdent, dit Ekemona avec un sourire charmeur.
- Oui mais tu ne peux plus! dit Charlie pour le narguer en lui tirant la langue comme une sale gosse.
- Je suis un flic corrompu d'après mon mari, donc ce sera votre parole contre la notre. Montez dans la voiture, on va vous ramener chez vous avant que vous fassiez de grosses bêtises et que je sois obligé de jouer de mes relations pour vous sortir de prison.
Je fais signe à Ekemona d'approcher son oreille pour que je lui chuchote doucement un secret coquin. Il joue le jeu et son époux tend l'oreille lui aussi.
-Tu sais la fessée à notre âge c'est plutôt un plaisir qu'une punition... Ça donne envie d'aller plus loin. Je ne suis pas certaine que tu sois prête à partager avec ton époux. Je l'embrasse tendrement sur la joue en regardant son époux dans les yeux. Ses poils piquent, mais c'est plutôt agréable.
Il n'a aucune réaction, tout comme Alex. Ils nous contemplent seulement. Je pense que l'information a dû mal à se frayer un chemin jusqu'au cerveau et que tout a bugué comme un vieux PC. Cette page ne répond pas, voulez-vous attendre ou fermer la page? 401 not found error.
- Bonne soirée messieurs. dis-je en souriant et partant sans attendre une suite de leur part.
Je ne peux pas marcher assez vite pour fuir, mais j'arrive à prendre un rythme et tenter de mettre une distance non négligeable entre eux et nous. Merde qu'est-ce que je viens de faire ? putain d'hormones et envie de plaire! Que dirait tante Lydia en me voyant agir ainsi ? C'est bon tu n'es pas une servante, puis tu ne peux plus avoir d'enfant... Je me surprends à chercher ce que je pourrais être, si ça existait vraiment une situation de ce genre. Une Martha sûrement. Non, bien sûr que non, je serais une femme de commandant, non mais ho! Mais, avec ma chance... Je finirais chez Jezebel et je devrais satisfaire un manchot! pouaaaa.
- Je ne sais pas ce que tu lui as dit, mais franchement, Bravo petite sœur, tu l'as achevé. Tu aurais dû voir ses pupilles se dilater.
Je lui souris puis lui prends le bras pour continuer de marcher, ne voulant pas dévoiler ce que je viens de dire en notre nom à toutes les deux aux deux hommes. Nous choisissons au hasard un club que nous ne connaissons pas. " le Soho Club", ils ne se sont pas foulé pour trouver le nom du club. Nous sommes dans le quartier de Soho, ils ont juste ajouté le mot club. Une affiche sur la devanture nous prévient que ce sera une soirée spéciale année 70/80/90. Ça ne devrait pas être trop mal. Charlie est un peu réticente, mais je lui promets que nous allons bien nous amuser. Je la tire par la main et la fait pénétrer de force à l'intérieur de l'établissement. La musique Heart of glass de Blondie s'amplifie une fois que nous arrivons dans la salle. Il y a déjà un peu de monde mais sans excès et la piste de danse est quasiment déserte. Sûrement qu'il est encore un peu tôt.
Nous ne cherchons pas à nous asseoir à une table mais directement au comptoir. Ne seront-ils jamais capables de faire des comptoirs et des tabourets à la taille des 1m65 ? Non parce que, toujours devoir grimper sur un tabouret mais sans toucher le sol, et toucher de la pointe des pieds la barre du tabouret prévu à cet effet, je n'aime pas ça.
- Ce n'est pas le meilleur morceau de Blondie, critique Charlie.
- Le positif, ça ne peut pas être pire que le début de soirée que nous venons de vivre.
- Ah mais carrément, numéro un directement dans le top trois des pires soirées de notre existence. Au fait, pourquoi tu as mis du temps avec Christopher ce soir ? Vous faisiez quoi?
Je grimace. Je ne veux pas me souvenir de ça. Je dois vraiment oublier cet homme, ça ne rime à rien et c'est perdu d'avance. Je devrais essayer de garder un lien correct avec lui sans pour autant consommer le lien. Allez, Joy! fait revenir la peste qui est en toi afin d'écraser ton côté sensible. Protège-toi, nom de Dieu!
- Attends le gala chère sœur, avant de lui décerner la pole position. Je suis très maladroite et ne l'oublie pas. dis-je pour changer de sujet et cela fonctionne à la perfection.
- Oh my god! Je t'en supplie Joy, ne fait rien pour nous faire honte s'il te plaît. Ne tombe pas, ne râle pas, ne soit pas spontanée...
- En gros tu me dis que je ne suis ni sortable, ni convenable ? demande-je en plissant les yeux, prête à feuler et sortir les griffes.
Je ferme les yeux quelques secondes en prenant une forte inspiration en essayant de chasser les images que j'ai en tête et qui pourraient arriver par maladresse. La musique change et je me prends un coup de coude dans les côtés.
- Put...ré! Charlie arrête de faire ça! Je te l'ai dit un million de fois.
- Regarde à onze heures.
Mes yeux cherchent à onze heures une ou des personnes que je suis censée connaître. Je doute un instant et me visualise une horloge. C'est bon je l'ai. Oh non... Les deux hommes nous ont repérés et viennent vers nous.
- Vous êtes sérieux ? demande Charlie. Vous n'êtes pas censé être rentré et au lit à cette heure-ci ?
Alexander et Ekemona viennent s'asseoir chacun à un de nos côtés. Alexander est allée se poser à côté de ma sœur et son époux vient s'asseoir à ma gauche. Je lève la tête pour pouvoir affronter son regard. Il croise ses bras sur le comptoir et y dépose son menton dessus en se moquant gentiment de ma hauteur je suppose.
- Qu'est-ce que je vous sers ? demande la barmaid.
- Que prenez-vous les filles? demande Alex.
- Une pina colada, répond ma sœur sans aucune hésitation.
J'ai bien envie de choisir comme elle, mais j'ai bien peur de ne pas pouvoir le supporter. Quel était le nom de la bière que j'ai pris hier? Je n'ai jamais su retenir les noms des alcools et encore moins les bières. Une rousse ? Non une blonde je crois...
- Un coca pour la petite. ordonne Ekemona en me désignant du doigt.
- Non, mais oh !
Je suis sidéré qu'il choisisse à ma place. Je n'ai pas de mot et du coup la femme pense que c'est vraiment ma commande. Ma sœur rigole comme mimi Geignarde en voyant ma tête dépitée. Ils choisissent tous les deux des whiskys sans glaçons.
- De ce dont je me souviens, tu ne tiens pas l'alcool, Joy.
- Pfff, tes infos dates de cinq ans Ekemona! Faut te mettre à la page maintenant. Il y a eu de l'évolution depuis ce temps-là. dis-je en soufflant bruyamment.
- Tu sais que souffler n'est pas poli, me dit Alexander en se penchant pour me regarder.
Je le fixe dans les yeux et le tchip pour seule réponse. Un Tchip magnifique, que j'aimerais faire aussi bien quand on m'énerve vraiment. Un son qui glisse en douceur sur la longueur qui veut dire en gros:" je t'emmerde" ou montre qu'on n'est pas content. Selon les pays, il a une interprétation plus ou moins différente. Il est métisse et comprend ce que cela veut dire. Il me fait les gros yeux.
- Nous réglerons ça plus tard, Joy.
Je vais pour ouvrir la bouche, mais Charlie me coupe la parole pour ne pas aggraver mon cas.
- Bon vous allez nous dire pourquoi vous nous suivez? questionne ma moitié en prenant son cocktail lorsqu'elle est servie.
Mon coca à l'air ridicule en regardant les verres des autres. Une rondelle de citron vert est accrochée à mon vert. Je la retire, je déteste ça dans les boissons. Mes glaçons s'entrechoquent. Je crois que je n'ai jamais vu autant de glaçons dans un verre, si bien que juste un quart des trente-trois centilitres de la bouteille qui remplissent mon verre. Je boude intérieurement mais pas longtemps. Lorsque j'entends I Just want to make love d'Etta James mon âme s'anime et a envie de danser. Cependant, je me retiens légèrement. Juste mes hanches ondulent sur mon tabouret avec le haut de mon corps qui ne peut s'empêcher de bouger.
- Nous voulions savoir où vous alliez. La dernière fois, il nous aura fallu cinq ans pour vous retrouver.
- Vous nous avez pas retrouvés à proprement parler, Charlie a fait une boulette en ne masquant pas son numéro.
Je sirote un peu, pour éviter d'être trop spontané. Bon peut-être, je dis bien peut-être que je digère mal le "un coca pour la petite" et que j'envoie des piques. Etta James envoie plus de décibels pour que mon mode boudage s'évapore entièrement.
- Tu marques un point Joy. dit Alex. en prenant une gorgée de son breuvage ambré.
- Bon, parlez-nous un peu de vous deux, dis-je pour changer de sujet. C'est comment de ne plus avoir d'enfant à la maison?
- Calme et reposant mais au vu de nos journées, ça ne nous fait pas de mal. Nous les voyons chaque dimanche midi pour le repas. C'est une tradition. Explique le beau métis aux yeux verts.
- Et vous comment ça se passe en France ? demande le géant à ma gauche.
Je souris en repensant à notre vie à Savigny sur Orge. Certes c'est en Essonne, au sud en dessous de paris en région parisienne, mais nous y sommes bien. Nous avons un travail en or qui nous plaît, un toit, de quoi nous entretenir et nous distraire et une famille tout près de nous. Ma princesse est bilingue mais répondra en français même si nous lui parlons en anglais. Un enfant pour qu'il s'exprime bien dans une autre langue doit parler sa langue maternelle, d'après les enseignants. J'ai immédiatement parlé les deux langues avec Léna. Le français est à mon cœur aussi sa langue maternelle, la langue de son pays. Elle se doit de le parler à merveille.
- Et toi Joy, comment as-tu rencontré ta petite amie ?
Mince, je n'écoutais plus la discussion étant prise dans mes pensées.
- Je... euh... c'est compliqué.
Je sirote à nouveau une gorgée et maudissant toujours ma sœur.
- Quelques mois après notre arrivée, au cinéma. répond Charlie à ma place.
- Vous aviez été voir quels films ? demande Alex.
Bravo Charlie! Je ne sais pas mentir et surtout je ne sais pas du tout quels films sont sortis il y a cinq ans.
- Je ne me souviens plus. dis-je pour plus de sécurité.
- Étrange... généralement, on se souvient des premières fois.
- Eh bien pas moi ! Je ne m'attache pas à ce genre de détail.
J'ai chaud, signe indéniable d'un léger stress qui arrive. Je suis inconfortable sur ce tabouret et j'ai vite mes fesses endolories. Avoir un derrière rebondi et charnu ne devrait-il pas m'aider à être mieux installé théoriquement ? Voyant mon inconfort, les hommes décident de nous rendre à une petite table dans le coin avec une petite banquette en arrondi autour en guise de siège. Je suis la première à y aller et à m'asseoir. Il n'y a rien à dire, c'est bien plus confortable. Charlie arrive avec une Pina Colada en plus.
- Tiens, tu vas en avoir besoin pour te lâcher un peu. me dit-elle en français pour ne pas être comprise.
- Que Dieu te bénisse!
Je finis mon soda d'une traite en repoussant le verre comme si c'était un intrus dans ma sphère privée. Ce soir, je me lâche ! Je ne serais pas la Joy qui est maman, mais la femme célibataire et qui n'a à répondre à aucune responsabilité ce soir ni demain.
- Joy, je pense que ce n'est pas très raisonnable.
Je regarde Alexander droit dans les yeux et commence à siroter une gorgée de mon cocktail alcoolisé.
- Le but de ce soir est de ne pas être raisonnable. De toute façon comme tu es là, je ne risque rien pas vrai ?
Le bruit d'une allumette que l'on gratte contre le carton d'emballage et de la poudre qui s'enflamme retentit dans les hauts-parleurs.
🎶I'm crazy like fool, what about it Daddy Cool ? 🎶
Je chante tout en leur adressant le message subtil que nous quatre seulement pouvons comprendre. Je bois une autre gorgée, puis j'enlève ma veste que je dépose grossièrement sur la banquette. J'enjambe Ekemona de façon assez sexy et provocante qui fait légèrement remonter ma jupe. Si au début c'était juste pour bien positionner ma cheville, je sais que l' alcool commence déjà à me monter à la tête. j'en profite pour être un brin provocatrice. Ses mains se posent d'elle-même, naturellement sur mes hanches quelques secondes avant de les retirer aussitôt en regardant son époux.
Je m'avance sur la piste de danse et me laisse aller au rythme de la musique. Je ferme les yeux et me laisse aller complètement. Je ne l'avais pas fait depuis une éternité. Je me laisse envahir par la musique et mon corps s'est comment exprimer ce qu'il perçoit. Ma présence doit encourager les autres puisque la piste de danse se remplit petit à petit. Un flash lumineux me fait regarder en direction de notre table. Grrr je vais la tuer! Elle ose me filmer pendant que je me laisse aller. Je lui fais signe de l'index de venir me rejoindre. D'un geste de tête négatif, elle rejette mon invitation. Tant pis pour toi, tu devras supporter les hommes et leurs interrogations. Mademoiselle continue de filmer et jubile de pouvoir rassembler des preuves pour notre famille en France j'en suis certaine. Elle le fera de manière subtile en publiant les vidéos sur ses réseaux sociaux à tous les coups avec pour légende:" un miracle est arrivé, Johana n'a pas le nez dans un bouquin ni dans un magazine de jeux"!
La musique change. Dès les premières notes, la plupart des personnes ici présentent reconnaissent le morceau qui passe: la Lambada de Kaoma. La danse devient forcément plus sensuelle et sexy. Les femmes sont plus présentes autour de moi. Personne ne peut résister à se repousser dessus. Je souris en voyant un crocodile faire son sketch sur le dancefloor comme si c'était une compétition pour avoir le plus d'hommes qui font les paons devant nous. Un crocodile est l'expression que l'on utilise avec Chacha pour désigner les femmes peu vêtues, maquillées à outrance et qui compte embarquer un homme le soir après lui avoir fait casquer les consommations au bar. Je souris et continue de danser en faisant parcourir mes mains sur mon corps et balançant ma tête doucement de droite à gauche. Je danse pour moi et ne prête pas attention aux personnes qui se mettent devant moi en espérant que je leur accorde une danse. Des mains viennent encercler ma taille, puis un torse se colle dans mon dos. Il sent fort le parfum. Une odeur pas franchement agréable. Je suis difficile en parfum mais là on dirait qu'il a fait tomber l'eau de cologne de sa grand-mère sur ses vêtements. Je me retourne. Je le repousse gentiment. Il ne m'intéresse pas et on ne se colle pas à moi sans mon consentement. Il tente de se rapprocher à nouveau et je le repousse une nouvelle fois. Cette fois-ci, je mets des paroles sur mes gestes. "Non, merci. Je ne suis pas intéressée". Il tente de négocier en tendant ses mains vers moi pensant qu'irrémédiablement que ça va suffire à me faire flancher. Je sens des mains m'envelopper les bras et hume le parfum discret Aqua Di Gio, d'Armani que porte Alexander. Il se maintient contre mon dos en me surplombant et me protégeant d'un chromosome XY qui ne comprend pas la signification du mot non. Il se penche par-dessus mon épaule. Son visage contre ma tête, ses lèvres délicates sur ma tempe droite comme pour marquer son territoire qui est le sien pour me protéger, ses grandes paluches descendent sur ma taille en tout bien tout honneur pour jouer le protecteur.
- Elle est déjà accompagnée. Dit-il pour le faire partir.
- Vous n'avez pas vraiment l'air d'être ensemble pourtant. déclare-t-il pour seule intention de provoquer celui qui me maintient contre lui.
- Ton avis m'importe peu, cette femme est à moi et je n'ai pas a te le prouver.
Le mec qui doit bien faire la même taille qu'Alex, le regarde puis me toise pour savoir si ce que nous affirmons est vrai. Je n'ai pas peur, je sais que je ne risque rien avec les pères de Joshua, toutefois, je n'aimerais pas qu'une dispute ou pire, une bagarre éclate par ma faute. Je renforce et approuve les propos du métissé en prenant ses mains afin qu'elles viennent encercler ma taille. J'ondule contre son corps et profite de la situation sans pour autant vouloir coucher avec lui. Quoique... Il rentre dans mon jeu. L'inconnu hoche la tête, résolu. La hyène se rabat sur un crocodile déjà bien torché sur la piste de danse.
La tension redescend un peu. Nous profitons d'être l'un contre l'autre pour continuer à jouer un peu le jeu et dissuader l'inconnu de revenir à la charge. Jamais je n'aurais pensé que le père de Josh avait le rythme dans la peau. Nous dansons comme des amants sur Careless whisper de George Michael, sous les yeux de son époux et de ma sœur qui est hilare à nous filmer. Nous maîtrisons les pas et les gestes sensuels sur cette musique et pendant un moment, je me revois danser avec Lenny. C'est un agréable souvenir même si nous ne pourrons plus jamais nous entendre. Je ne veux garder que les bons souvenirs de cette relation. Je ne comprends pas pourquoi j'ai attendu aussi longtemps pour m'amuser à nouveau. Je devrais peut-être songer à reprendre la danse avec ma sœur à notre retour.
Nous sommes face à notre table et je me déhanche un peu plus contre l'époux d'Ekemona en regardant celui-là droit dans les yeux. Mon corps ondulant contre celui de son époux. Formant des vagues entre mes fesses sur son entrejambe, ma tête écrasée contre le haut de sa poitrine, une de mes mains est captive de la sienne contre mon ventre au niveau de mon nombril tandis que la seconde est libre de ses mouvements et vient s'agripper à sa nuque. Son souffle tiède vient s'abattre contre l'épiderme nuque.
- Comment penses-tu que réagira Helena, en te voyant si proche d'un homme ?
Je souris. Si seulement il savait qui elle est vraiment pour moi.
- Je ne lui appartiens pas, Alex. Nous sommes libres de nos mouvements.
Je sens son visage bouger contre moi, son souffle chaud plus présent. Il laisse plusieurs secondes avant d'argumenter à nouveau.
- Si je comprends bien, si je décide d'aller plus loin avec toi, elle n'aurait pas son mot à dire.
Je sens que l'alcool fait de plus en plus d'effet sur ma façon d'agir et mes réactions commencent à être plus lentes. Je pose ma tête contre la clavicule d'Alex pour le regarder dans les yeux et mon fessier vient lui faire dû rentre dedans avec un hochement de tête pour simple réponse. Nous ne coucherons pas ensemble, mais nous pouvons nous amuser un peu.
- Ça ne te ressemble pas Joy, Je te connais et tout sonne faux.
- Alors ne me croit pas. Concrètement, Qu'est-ce que ça va changer dans ta vie de savoir si je suis oui ou non hétéro ou bisexuelle ? Rien du tout. Dansons et profitons de l'instant présent. Dans moins de dix jours, je repars chez moi, Alexander. Pour être sincère, tu es un très bon cavalier et je ne pense pas que nous aurons l'occasion de danser à nouveau ensemble avant un bon moment.
Je l'embrasse sur la joue et lui sourit. Il me sourit, mais je vois bien que ça fulmine dans sa tête. Il veut savoir la vérité ou alors prend conscience que nous ne sommes pas de retour, juste de passage. C'est avec toute l'espièglerie dont je suis capable, que je me retourne et examine de nouveau son homme. Finalement je l'appelle de la même façon que je l'ai fait un peu plus tôt avec ma sœur. Lui ne se fait pas prier. Il finit son verre d'une traite et nous rejoint. Je continue mon collé serré contre son époux sans briser notre regard. Ekemona me retourne directement contre lui pour que je fasse de même mais cette fois-ci c'est avec son époux que le regard est brûlant. Je joue le jeu. Mon Dieu... Joy, tu as le diable en toi. Leurs corps me serrent un peu plus, il fait de plus en plus chaud. L'alcool fait son effet, néanmoins, je ne peux pas lui mettre tout sur le dos. Je vais aller droit en enfer sans passer par la case départ. Je cherche un contact oculaire avec Chacha. Elle est en pleine discussion avec un homme. Je lève la tête et constate que les deux hommes sont en train de flirter. Je tente de m'exfiltrer d'entre leurs corps, tenir la chandelle n'est pas vraiment mon délire. Une pression me retient par la taille. Ekemona, me ramène contre eux.
- Tu ne bouges pas, le jeune de tout à l'heure n'attends que ça. dit-il dans le creux de mon oreille.
Je ne cherche pas à voir s'il me dit la vérité ou non, je le crois tout simplement. j'acquiesce et ne peux m'empêcher de chercher à savoir si ma sœur va bien.
- Ne t'inquiète pas pour Charlie, nous la surveillons aussi, m'annonce Alex.
Je ne peux m'empêcher de vouloir le constater par moi-même. Effectivement elle va bien et elle est même tactile avec le mec. Notre regard se croise. Nous, nous sourions en étant mal à l'aise en même temps. La chaleur envahit mes joues et pourtant je n'ai pas honte.
- Donc, je dois jouer votre petite amie, pourtant à part être prise en sandwich et vous voir roucouler comme deux pigeons prêts à s'accoupler, quelle est mon utilité? dis-je avec une petite moue boudeuse.
Ma réaction provoque une hilarité. Je renforce ma moue boudeuse et tchip sans vraiment le vouloir. Enfin, je crois. En tout les cas ça n'échappe pas aux oreilles du métissé. Ses doigts relèvent mon menton. Nos yeux entrent en contact. Son époux me maintient contre lui en encerclant ma taille et posant son menton contre mon épaule.
- Je pense que tu viens de t'attirer les foudres du docteur Smith-Anderson petite.
- Oh vraiment?
Je détourne ma tête afin de croiser le regard d'Ekemona et m'en amuser.
- Vraiment. m'affirme-t-il avec un sourire ravageur.
- Je vois.. Qu'est-ce qu'il va me faire le docteur Smith- Anderson?
Les doigts qui étaient toujours positionnés sous le bas de mon visage, me ramènent face à leur propriétaire. celui-ci me dévore du regard sans forcément être tendre. Je crois que j'ai peut-être, je dis bien peut-être ou éventuellement été un peu trop inconsciente et audacieuse face à ses deux beaux hommes. Non, tu deviens pompette tout simplement, tu as la carte joker de l'excuse.
- Le docteur va devoir sévir, si la petite peste continue à me chauffer et me chercher.
J'éclate de rire et lui pince la joue comme le ferait une grand-mère gaga.
- Tu es trop chou quand tu fais le coq qui bombe le torse, je te prendrais presque pour Charlie le coq! Pas ma sœur hein! d'ailleurs, je vais aller la rejoindre, je vous laisse roucouler les amoureux.
Il va falloir que je m'hydrate à nouveau avec le fameux cocktail pour oser aller plus loin dans mes limites et oublier définitivement Christopher cette nuit. Je retourne m'asseoir auprès de ma sœur qui elle est sans voix et m'observe avec des yeux ronds
-Qu'avez-vous fait de ma sœur? Vade rétro satanas, pinata colada. Euh je veux dire pina colada. dit-elle en repoussant involontairement le mec qui l'accompagnait.
- Toi aussi, tu commences à être pompette Chacha. dis-je en rigolant.
- Oui mais je suis à mon deuxième cocktail moi.
Je finis mon verre et je n'ai pas besoin d'un second pour être complètement torché. Je le suis déjà. Je ne fais que rire avec ma sœur et les pères de Joshua. Je perds petit à petit toute notion du temps et je ne suis pas la seule. Lorsque la musique de Tito y Tarantula, After Dark, défile après plusieurs musiques, je me prends pour Salma Hayek dans le film From dusk till dawn. Sauf que je n'ai pas son physique.
Le reste de la soirée devient un peu flou. Aucun de nous quatre marche correctement à cent pour cent. Combien de verre avons-nous pris en plus ? Je ne sais pas.
- On vous ramène les filles ? Demande Alex.
- Je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée vue notre état, dit son époux.
Je sens que je vais bientôt régurgiter tout ce que je n'aurais pas dû consommer. Je me sens extrêmement mal d'un coup et m'adosse à l'Amarok. J'ai froid.
- Redresses-toi Joy! Il y a une patrouille de flics. Me dit ma sœur en rigolant.
- Fait chier. Prenez l'air normal. Gueule Ekemona.
- Ne gueule pas comme ça, j'ai mal à la tête! Dis-je en sentant les frissons me parcourir tout le corps.
La voiture de police s'arrête à notre niveau. Deux agents de police nous regardent et cherchent à savoir ce que nous fabriquons.
- Tout va bien messieurs dames ? Demande l'agent de police.
- Impeccable! Dit Alex.
- Super! affirme Ekemona en faisant signe du pouce.
- Top moumoute! Dis ma sœur.
- Je crois que je vais mourir, dis-je en me tordant de douleur.
J'entends vaguement un putain et un râlement. Une porte de voiture, puis une deuxième qui s'ouvrent. Je vois l'ombre d'un pantalon en uniforme devant moi. Ho, ho... Je vais me faire tuer par mes camarades.
- Contrôle d'identités, montrez-nous vos papiers! exige l'officier.
Je ne sais pas du tout où j'ai mis mes papiers, je pense que c'est ma sœur qui a ma pochette. Ah non, c'est Alexander qui l'a. Ils regardent nos cartes et nous éclairent de leurs lampes torches pour voir si c'est bien notre visage qui correspondent aux photos. Je ne sais pas du tout ce qui se passe. Mes paupières deviennent lourdes. Je sens mon estomac se resserrer. Oh non, pitié pas ça.
- Il y en a pour longtemps ? On voudrait rentrer. s'impatiente ma sœur.
- Baissez d'un ton mademoiselle, vous, vous adressez à des officiers.
- Sinon quoi ? Tu vas me faire quoi ? dis-je en français en imitant l'accent Ivoirien d'une de mes collègues que j'adore et qui a le sang chaud quand on la provoque et comme elle, je ponctue la phrase avec un énorme tchip.
Charlie comprend tout de suite la référence et nous partons dans un fou rire que nous ne pouvons arrêter malgré les mises en garde des officiers.
- Joy! Charlie! Tente de nous raisonner Ekemona avec une voix que nous connaissons que trop bien. Celle où si jamais à trois vous n'avez pas écouté, vous êtes puni dans la minute.
- Vous devez bien être éméché aussi messieurs pour ne pas nommer vos deux amies par leur bon prénom. Nous avons Charlotte Bouvier et à priori sa sœur Johana Bouvier. Je pense qu'au vu de la situation vous êtes tous les quatre sous l'emprise de l'alcool, nous n'avons pas besoin d'un test pour le confirmer.
- Bon, on embarque tout le monde. Appelle une patrouille pour nous venir en main forte, nous n'avons pas assez de place. ordonne son coéquipier.
Je devrais être mortifiée avec Charlie et à la place nous sommes toujours pliés en deux sur le bitume à attendre notre carrosse pour nous emmener à notre palace pour le reste de la nuit.
- Mademoiselle veuillez vous levez.
Je ne sais pas si on s'adresse à moi ou non. La voix est vraiment lointaine. On me prend par le bras et on me lève en douceur. Je n'ai le temps de repousser personne et sens mon estomac se purger de lui-même sur des chaussures et un uniforme. Je suis morte...