— Mais il se fout de ma gueule ! Hurlais-je presque.
— Et pas qu'un peu.
Maydi était vautré sur son lit mangeant du fromage qu'il avait volé à la cantine.
Je relis le message que j'ai reçu de Paon ce matin, ça fait bien une centaine de fois que je le relis sans vraiment comprendre pourquoi il a changé d'avis aussi vite.
[ Ne quitte pas Kaela. Et efface mon numéro. ]
J'eteind mon téléphone et soupire en me retournant vers mon ami.
— Un jour il me dit qu'on sort ensemble, un autre il me dit d'effacer son numéro, je suis quoi moi ?
— Un pigeon ? Ou un canard, au choix.
Maydi s'esclaffe de sa blague qui n'est même pas drôle.
— Je sais pas quoi faire, ça me saoule de lui courir après.
Je m'assoie à côté de lui et il en profite pour me foutre une claque derrière la tête.
— Tu veux du fromage ?
— Non merci, il est dégueulasse l'emmental.
Il hausse les épaules et remet son morceau dans sa bouche.
— Je suis pas ta mère, me dit-il, je vais pas te dire de continuer de te battre pour lui parce que je ne sais quoi. Moi je pense que tu devrais lâcher l'affaire, il sait pas ce qu'il perd.
Je n'avais pas senti ça pour quelqu'un avant lui, ou peut-être que si mais je ne m'en souviens pas. Les papillons dans le ventre juste avant qu'il descende en une bouffée de chaleur au sed de ton corps, les membres engourdis par l'envie de toujours vouloir le toucher, le désir de vouloir le toucher, la tension et l'électricité dans l'air ou même juste le fait que mon cœur bat à toute allure quand il fait un seul geste dans ma direction.
J'étais heureux d'être avec Kaela évidemment, elle m'a aidé, elle est gentille avec moi, elle me donne don amour... Mais il n'y a pas tout ça qui se déclenche en sa présence.
Je ne veux pas perdre toutes ces sensations que je ressens quand je suis avec lui.
— Normalement c'est Kaela qui se gère des histoires de cœur, je ne suis pas bien placé pour donner des conseils.
Il rigole à s'en étouffer avec son fromage qui pue.
— Mais bon, ça va être un peu compliqué pour toi. C'est quand que tu la quitte ?
Je souffle un coup.
Ça aussi c'est un grand problème, je lui ai envoyé un message pour qu'on se parle ce soir mais je ne sais plus quoi faire. Mais je sais que je la quitterai dans tous les cas, même si avec Paon ça se complique.
— Je lui parlerai après l'entraînement de 18h.
Il hoche la tête et mon alarme sonne, nous prévenant qu'il est déjà 14h. Notre pause de deux heures est déjà écoulée, alors on se lève avec toute la fatigue qu'on a.
Demain c'est le match de basket que tout le monde attend, équipe d'université professionnelle contre une autre tout autant professionnelle. Il y aura des pom pom girls, un buffet et même une mascotte pour chaque équipe.
Je gère plutôt bien le stresse d'habitude, mais plus l'année avance et plus ça devient sérieux, si un jour je veux que ça devienne mon métier il faut augmenter le niveau, on passe déjà dans les journaux et dans quelques chaînes télévisées, il ne manque plus qu'à être repéré.
On arrive et on s'installe dans l'amphithéâtre quand le professeur en face de nous nous invite à nous asseoir. C'est une prof de français, un cours obligatoire pour chaque étudiant dans cette université, elle nous attend Maydi et moi devant son bureau.
Hier on avait perdu du temps en attendant Paon devant son cours d'économie à 11h et on est arrivé en retard. Résultat on a eu un texte linéaire sur un sujet méga long, la note étant coefficient trois.
Je me lève et lui rends mon travail. Normalement c'est assez passable ce que j'ai fait, Kaela m'a un peu aidé pour comprendre.
Il y a aussi le problème des cours, j'ai des problèmes de concentrations depuis que je suis petit et donc c'est plus difficile pour moi de travailler. Au début d'année j'étais remis en question par le conseil d'administration, il se demandait si je devais être exclu ou non. J'avais complètement baissé les bras et je ne comprenais plus rien – j'étais à la ramasse et ne me concentrer plus que sur le sport. Mais on est dans une université, il ne peut pas y avoir autant de relâchement de la part d'un élève, surtout qu'ils avaient essayé de m'aider toute l'année précédente.
Mais aucun d'eux n'avait réussi, sauf une personne.
Son visage me revient en tête, avec ses cheveux dorées, ses yeux verts et son sourire timide.
Je tapote mes doigts sur la table, en temps normal ça m'aide assez pour me concentrer, mais là les mots de la prof ne s'assimile pas dans mon cerveau.
Je vois la bouche de la femme devant moi bougeait, elle dicte son cours, j'entends les mots qu'elle prononce – la phrase dite et le sens des mots – et pourtant je ne comprends pas le sens de la phrase.
Je finis par abandonner et j'enfouis mon visage dans mes bras, je regarde le profil d'un des visages présents dans cette salle avant d'observer le vent faire bouger les branches d'un arbre.
On est déjà en janvier et j'ai l'impression que Noël remonte déjà à des mois de ça.
— Ça va pas ? Chuchote Mike à ma droite, on a entraînement après, si tu veux rester dans ta-
— Non, je vais bien. J'ai juste une petite migraine.
Je me redresse et attends que le cours passe.
***
On arrive dans les vestiaires en même temps que Karel, comparé à d'habitude il n'y a pas beaucoup de bruit. Tout le monde est fatigué, il est 18h13 et mon lit est la seule chose à laquelle je pense.
— Xærcy, il manque de membre à l'entraînement.
J'enfile mon maillot après avoir mis mon t-shirt. Je suis déjà saoulé de la tournure des événements – on est à un jour du match et y'a deux crétins qui se permettent de ne pas venir alors que tout le monde subit l'entraînement ? Ça ne me dérange pas la plupart du temps, mais aujourd'hui je suis très irrité.
— Putain, soupirais-je, et qui sont ces deux abrutis ?
— Connor et Paon. Pour la défense de Connor, il est à l'infirmerie. La chimie c'est très mal passé... Par contre pour l'autre j'en sais rien. Il est nouveau il a sûrement séché.
Je range mon sac dans mon casier pendant que j'essaie de trouver une excuse pour Paon, les personnes de l'équipe savant très bien que sans justificatif lors des entraînements la veille d'un match et pour le match lui même ils frôlent l'exclusion. C'est moi après qui fait le compte-rendu à notre coach, et en ce moment même je n'ai aucune inspiration.
— C'est très professionnel, fait remarquer Karel, il se permet d'être en retard alors que beaucoup rêveraient d'entrer dans l'équipe professionnelle de l'université.
— Aussi professionnelle que tous tes manquements aux entraînements incessants. Ils ne sont certes pas obligatoires mais c'est du manque d'intégration de ta parr. Tu devrais te remettre en question avant de parler sur tes autres coéquipiers parce que celui qui juge ce qui est bon pour l'équipe c'est Xærcy et non toi, donc garde ta langue de pute pour toi Karel, intervient Maydi.
Je laisse échapper un petit rire alors que Karel reprend la parole.
— Peut-être mais je connais mon niveau au basket. Paon est juste un pourris gâté et-
— Je ne virerai personne la veille d'un match, le coupais-je, en attendant le seul pourris gâté qui mérite encore de faire ses preuves c'est toi.
Les bavardages reprennent tandis que je profite de la petite minute pour sortie mon téléphone.
[ T'es où ma blondasse ?
Je vais essayer de te couvrir mais ramène tes fesses et vite stp.]
Je souffle avant d'aller dans la partie gymnase, nos pas font un bruit qui raisonnent et ça m'en fait mal à la tête. On commence l'échauffement mais quand je vois que dehors il fait nuit, ça me démotive.
On se met en place directement, dans une trentaine de minutes il y aura tous les profs de sports qui viendront nous faire office d'adversaires pour qu'on puisse un peu mieux s'entraîner. Ils sont plus grands, ils ont pour la plupart plus de forces, ils ont été eux aussi entraînés donc ça permet d'exploiter un peu plus nos capacités.
Après, on ne connait pas l'équipe qu'on affrontera demain. On sait juste qu'elle vient des écoles supérieures de sport de l'ouest du pays, Brooksford.
Mes muscles sont en feu et enfin réveillés par la pratique. Cette sensation d'euphorie qui s'empare de mon corps et mon esprit de gagnant qui prend tout de suite le dessus. Je veux tout diriger, les emplacements, les passes, les défenses, je voudrais être partout à la fois. Je remarque plusieurs erreurs faites durant le temps donné d'entrainement libre – notamment la faute sur le nombre de pas, c'est minime mais ça compte.
Je replace tout le monde en leur indiquant leurs erreurs.
Les entraînements reprennent, la fatigue déjà présente s'empare de plus en plus de nos corps et je le vois bien.
Mais demain nous n'aurons pas cours, on aura la matinée de libre, pour nous reposer. Étant donné que nous avons choisi cette université spécialement pour le sport, c'est la matière la plus importante pour nous.
Les gradins sont déjà réservés pour les étudiants qui ont payé pour y être, des places réservées pour les quelques accompagnateurs de Brooksford et des places libres pour les premiers arrivés.
L'entraînement fini tard, tout le monde est essoufflé et on a tous plus qu'une envie : nous changer.
— Avant tout, nous interrompons notr coach, il faut savoir que ce match est très important et très particulier.
Il a le sourire aux lèvres quand il parle.
— Mes chers élèves, si vous gagnez le match contre Brooksford, vous pourrez aller jouer sur le terrain le plus connus de Chicago !
Je vois l'effet direct que ça fait : les yeux écarquillés, certains cries de stupeur et les sourires aux lèvres.
Maydi me prend par les épaules pour me ramener vers lui.
— Putain mais c'est génial ça ! Tu le savais et tu nous l'as pas dit.
Je secous directement la tête.
— Je, commençais-je coupé par mes haletations, je savais pas.
Chicago, une opportunité en or pour être reconnue par la fédération internationale de basket. Si on gagne, alors on pourra passer à la télé, nous donner plus de visibilité. Il n'y a que du bon si on gagne.
Une vague de joie mais de stresse me mange directement tout le ventre.
Tout le monde se dirige vers les vestiaires avec un soudain boost d'énergie.
Chicago. C'est pas rien.
— Bon, dit Maydi encore tout heureux, je vais partir en avance étant donné que Kaela doit t'attendre dehors. Je vais vous laisser un peu d'intimité.
Il me fait un clin d'oeil avant de s'en aller à son tour.
— Karel, salut-il finalement.
Il ne reste plus que Karel et moi dans les vestiaires. On entend le bruit des gouttes d'eau percutant le toit, un calme intense.
Je dois encore justifier l'absence de Connor et de Paon. J'allume mon téléphone pour voir si j'ai obtenu une réponse mais non.
Il ne fait aucun effort pour moi.
Mes sourcils se foncent tous seuls et je l'éteins un peu contrarié.
— Tu attends un message peut-être ?
Je ne lui réponds pas et m'empresse de ranger les affaires dans mon sac de change.
— Un rendez-vous avec Paon sous la pluie alors ? Fit-il sarcastiquement.
Mon visage bascule directement sur son regard qui ne fait que me fixer.
Je suis bien trop perturbé pour lui répondre.
— J'attendais d'être seul avec toi, car moi tu vois au moins je ne règle pas mes affaires personnelles en public.
— Et tu vas faire quoi du coup ? M'embrasser en privé ? L'harceleur que tu es me fait pitié si tu reviens sur cette histoire.
Un rictus mauvais déformé son visage.
— Je ne crois pas que tu es en position pour te la péter.
— Alors quoi ? Tu vas m'harceler à mon tour parce que je voulais fair cesser ton harcèlement.
La surprise faisait battre mon cœur. Je n'osais plus bouger.
— Oh non, tu ne comprends pas. Enfin si, justement tu comprends et tu essaies de détourner le sujet. Paon et toi, ce n'est pas si nouveau que ça.
Je lève mes sourcils et place mes mains sur mon torse.
— Moi ? Ma voix part dans les aiguës.
Je laisse échapper un début de fou rire car je commence à devenir nerveux.
Si avec ça je suis pas cramé je ne comprends pas.
— Je pense que c'est toi qui ne comprends pas très bien la situation, je ne vois absolument pas de quoi tu parles. Tu sais très bien que je sors avec Kaela et tu commences à venir me dire de la merde comme quoi je sortirais avec Paon ou je ne sais pas quoi ?
Eh bien peut-être que tu as raison, mais ça je ne l'avouerai jamais, certainement pas à lui.
— C'est exactement ce que j'insinue. Tu me prends pour un débile ?
Il me fait un clin d'oeil avant d'activer une vidéo présente sur son téléphone.
C'était à la fameuse soirée ce dimanche, quand je suis parti rejoindre Paon dans les toilettes et qu'on s'est vite fait embrassé.
On ne voit pas de têtes, en même temps il filme à travers la serrure de la porte.
On voit juste deux corps d'hommes, collés serrés comme jamais, des mains se baladant un peu partout et la position assez explicite des deux personnages.
Les jambes de Paon enroulés autour de mon bassin, me retenant tout près de lui.
Je lève les sourcils en le regardant maintenant dans les yeux alors que la vidéo tourne encore, par chance on entend pas nos voix parce que la musique bouffe tous bruits parasites, alors encore une fois j'use de mes talents pour ne pas nous foutre dans la sauce moi et lui.
— Tu pense vraiment que c'est avec ça que tu vas convaincre tout le monde de croire à ton mensonge ?
— Ce n'est pas finit, regarde.
Je rebaisse les yeux sur la fin de vidéo.
Où l'on voit clairement ma tête, je me retirais de l'emprise de Paon, avec une bosse déformant mon pantalon.
Je plisse les yeux avant de me reconcentrer pour la énième fois sur Karel.
— Ce n'est pas toi peut-être ?
Mais il y avait clairement ma tête visible.
— Tu fais quoi avec cette vidéo déjà, tu la replay tous les soirs pour te masturber dessus ou je ne sais quoi ? C'est très pervers et ça en devient presque malsain.
— Ne te mets pas en position de victime.
— Bah là je le suis un peu.
J'essaie de dédramatiser, y aller par la force ça ne marchera pas et je ne vais pas encore le menacer alors autant essayer avec de la sympathie.
— Écoute, je pense vraiment que tu devrais supprimer la vidéo. Tu sais que tu le regretteras si tu fais quelque chose avec ça et surtout...
— La tromperie c'est mal. Et je suis près à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour que plus personne ne trompe personne.
— Dit le type qui a littéralement manipulé mon frère pour qu'il sorte avec Paon et Salomé en même temps, le giga harceleur de son ex et le fouteur de merde. Enfin après moi je dis ça, je dis rien. Mais si tu ne veux pas de répercussion tu devrais supprimer cette vidéo, je te le dis en bon ami.
Il me regarde avant de souffler un coup.
— Imagine un peu, tu m'as humilié devant toutes les personnes présentent dans ce bahut, la vidéo de toi m'embrassant avant de me faire une morale à tellement circuler et circuler que même ma famille en à était au courant. Et je n'ai pas le droit de te rendre la pareille ?
— Non. Toi tu harcelais des gens. Ne soit pas plus con que ce que tu es déjà, fait une bonne action, efface la vidéo et on en reparle plus. Tu sais très bien que je pourrais faire pire que ce à quoi tu pense.
La porte des vestiaires s'ouvre sur Paon, qui est trempé de la tête au pied, le coach derrière me faisant un signe de tête de venir.
Il disparaît et referme la porte derrière lui.
Le blondinet va dans le coin à droite de moi, et je fixe encore Karel.
— Réfléchis-y bien.
— Ma main me démange, peut-être que je ne le ferais pas au niveau universitaire, mais juste pour que Kaela soit au courant. Tu veux pas que j'accélère les choses en t'aidant ?
Je me rapproche de la porte avant de l'ouvrir en grand.
Le regard curieux de Paon se dirige de Karel à moi.
— Honnêtement, c'est pitoyable. J'ai presque envie d'être ton psy.
La porte claque dans un raisonnement derrière moi et je m'approche du coach.
— Paon m'a dit qu'il avait un problème personnel, maintenant à toi de voir avec lui si c'est justifiable ou pas.
— Ouais, dis-je soudain, il me l'a dit et je lui avais répondu que y'avais pas de problèmes et tout... Mais pourquoi il ets là ?
Ma main passe dans mes cheveux derrière la tête.
Paon est juste derrière cette porte, avec Karel.
— Il a dit qu'il voulait s'entraîner.
J'hoche la tête.
— Connor était à l'infirmerie.
Il met sa main sur mon épaule avant de m'offrir un sourire.
— Chicago, tu te rends compte ?
Je souris à mon tour, un peu crispé parce que j'ai le goût amer de ma discussion précédente.
Il me donne une accolade.
— J'ai hâte, dis-je simplement.
Kaela attend devant la porte de sortie, un parapluie à la main. Je me retourne une dernière fois espérant que Karel doute la paix à Paon. On ne le voit pas sur la vidéo, donc si je peux l'en éloigner je le ferais.
— Ça va mon cœur ?
— Oh euh, ouais.
Elle ouvre le parapluie quand on se dirige dehors.
Le vent chatouille mon corps, et je frissonne au contact de la goutte qui a réussi à s'immiscer dans la protection.
La lune est pleine, elle nous offre une lumière vive et donne une atmosphère reposante.
— Tu voulais me parler ?
J'enlève toute la pression présente dans mon corps.
Je ne sais pas comment formuler ma phrase, je ne sais pas comment cacher le fait que ça fait maintenant plus d'un moi que Paon et moi on a commencé quelque chose.
Elle était là quand j'avais besoin d'elle.
Elle était gentille et attachante.
Elle m'a fait me sentir bien.
Ça a été la première amie qui m'a aidé.
C'est elle qui m'a présenté Maydi.
C'est elle qui a crû en moi.
Sa main se glisse dans la mienne.
— Dit moi juste, je comprendrais.
De la confiance et de la joie d'avoir sa présence à côté de moi.
Au final, je ne ressens plus que de l'amitié. Il y a peut-être déjà eu de l'amour dans notre relation, mais elle ne s'est pas différencié du reste.
Et j'ai aimé les années passées à côté d'elle en temps que petit copain.
Mais maintenant le secret est bien trop lourd.
— Je t'aime.
Sa main se serre autour de la mienne, et sa voix douce me répond dans un souffle :
— Moi aussi. Mais j'imagine pas comme toi.
Sa tête se baisse et elle laisse échapper un rire.
— Tu sais, reprend-t-elle voyant que je ne réponds pas, ça fait plusieurs semaines que je vois que tu ne m'aime plus comme moi je t'aime. J'attendais que tu t'en rendre compte.
— Mais tu reste tout autant importante pour moi, tu le sais ça aussi.
— Évidemment que je le sais.
Le gravier fait du bruit sous nos pieds.
Nos mains sont toujours enlacés, mais plus comme des amoureux.
— Je devais bien laisser ma place aux autres filles, j'espère juste que tu choisiras quelqu'un qui peut me faire concurrence.
— Je penche peut-être pour Salomé, blaguais-je.
Elle rigole avant de me donner une tappe sur l'épaule.
Le chemin reprend silencieux, et on arrive devant les dortoirs.
— Ça veut dire que tu n'essayeras plus de t'introduire dans ma chambre ?
— N'y croit pas, je viendrais faire une soirée pyjama avec Maydi.
Son sourire rayonne sur son visage, et j'ai peur de voir une larme y coulait.
— Tu m'en veux ?
Elle laisse un blanc entre nous avant de relever son visage.
— Tu sais, Paon m'a posé une question assez floue. Il me demandait comment je réagirais de savoir que tu me trompe avec une autre fille ou je ne sais quoi...
Je me crispe, un peu moins sûr tout d'un coup.
— Et ça m'a fait réaliser que même si tu ne m'aimais plus, je ne voulais pas non plus être la fille qu'on trompe. Je suis plutôt soulagée que tu me quitte, même si c'est toujours dur de maintenant me dire que je vais sûrement te voir avec une bimbo du bahut qui ne valent toutes pas mieux les unes que les autres.
Mon bras s'enroule autour de sa tête et je viens là serrer dans mes bras.
— Tu pus la transpiration Xærcy.
Je rigole avant de la lâcher, j'essuie sa larme au coin de l'oeil.
— Alors, apparemment demain si tu gagne tu pourras aller jouer à Chicago.
— Les rumeurs vont vite, ton pote va devenir célèbre !
Elle écarquille les yeux et lâche un rire.
— Tu t'es un peu trop vite habitué à la situation à mon goût.
Elle me tend son parapluie. Je vais devoir un peu plus marcher pour pouvoir retourner dans ma chambre, celle avec Maydi. J'ai l'impression de ne pas me sentir à ma place dans ce dortoir, même si je partais en douce chaque soirs pour aller squatter mon lit dans la chambre de Maydi, je regrette maintenant ma place dans celle de Paon.
— Appelle moi si tu vas mal.
— Tu viendras me faire un bisous pour me calmer ?
Je hausse les épaules avec un sourire aux lèvres.
C'est cette complicité que j'avais peut de perdre.
Et peut-être que Kaela pleurera toutes les larmes de son corps en appelant Maydi à 3h du mat, il fallait que ça sorte.
Et ma confiance grandit, j'ai envie de tout lui raconter pour Paon. Elle donne les meilleurs conseils, elle est à l'écoute et elle est d'une grande aide. Mais après ce qu'elle m'a dit je pense que je vais m'abstenir.
Elle ne sera sûrement jamais au courant de cette histoire.
Elle se tourne et je ne la voit plus dans le hall.
Alors je ferme le parapluie et je commence à marcher sous la pluie.
Toute la pression retombe autant que l'eau me coule sur le visage.
C'est un sentiment de vide qui s'installe, un quotidien qu'on dérange, un parasite qui s'immisce dans ma vie. Mais si ce parasite c'est Paon, alors c'est moi qui lui ouvre les portes de mon quotidien.
Mes larmes coulent sûrement, et qu'est-ce que ça fait du bien.
Il ne manque plus que Paon à mes côtés.
On aurait pu tous les deux laisser la pression retombée et être seul ensemble.
Mais il y a encore beaucoup d'explications à donner et de secrets à dévoiler si Kaela apprend pour la vidéo.