Pdv Blue :
Je soupire. Ma tête repose sur ma main depuis trop longtemps, j'ai mal au poignet. Tous les élèves autour de moi écoutent attentivement le cours, j'ai encore décroché. Je griffonne le même croquis depuis le début du cours. Un visage fin, des cheveux en bataille blonds, de grands yeux bleus. Je lâche mon crayon, désespérée. Je n'arrive plus à le faire. Je ne sais plus ou se trouve cette fichue ligne. Avant j'étais capable de dessiner chaque détails de son visage sans jamais avoir besoin de me référer à un quelconque dessin précédent. Inspire, Expire. Parfois j'ai l'impression que ce n'est pas automatique chez moi. Après de longues minutes, la sonnerie fini par retentir. Je range toutes mes affaires dans mon sac, à l'exception de mon téléphone qui vient de vibrer.
Aaron : On va au match ensemble, ce soir ? (Le point d'interrogation n'est là que pour la forme. Ce n'est pas une question ;) Sois prête une heure avant)
Je lève les yeux au ciel.
: C'est typiquement pour ça, que je dis que tu es toujours confiant.
Aaron : Ca veut dire oui ?
: Je croyais que ce n'était pas une question ?
- Tu parles de moi pour sourire comme ça ? Rit Elven en quittant la salle avec moi.
- En quelque sortes. Je souris.
Il fronce les sourcils, sans me poser plus de questions.
- C'est nouveau cette écharpe ? Demande-t-il.
- Euh... Elle est à Aaron. Il me l'a prêté ce matin en arrivant au lycée. J'avais pris qu'une toute petite veste pour traverser le champs jusqu'à chez lui, je ne prévoyais absolument pas de m'endormir la bas et de devoir me pointer aujourd'hui habillée de la tenue avec laquelle je suis partie hier soir.
- T'as dormi chez lui ?
- Oui. Je me suis endormie devant le film. Il m'a porté jusqu'à son lit et il est allé dormir avec sa sœur. J'ai paniqué en me réveillant. Mais je me suis calmée en réalisant que j'étais encore toute habillée et qu'il n'était pas endormi à côté de moi.
- Ça serait donc un mec bien...
- Oui !
Nous rejoignons le terrain de football. Je ne fais que l'accompagner. Ils vont s'entrainer jusqu'à dix huit heures maintenant. Ils feront une pause de deux heures durant laquelle chacun d'entre eux se mettra dans sa bulle, pour être prêt physiquement et psychologiquement. Je claque un bisou sur la joue d'Elven avant qu'il ne parte rejoindre l'équipe.
- Tu vas cartonner ce soir. J'ai confiance en toi.
- Merci princesse. Dit-il, déposant un léger bisou sur mon front.
- Bonne chance ! Je cris, alors qu'il s'éloigne.
Je ne le reverrai pas avant ce soir. Il reste à peu près cinq heures avant le match. Ça me laisse largement le temps d'aller chercher un café et de me préparer pour aller soutenir mon meilleur ami. En réalité j'appréhende cette soirée depuis que j'en connais la date. Mais il est hors de question que je m'enfuisse. Elven a besoin de moi ce soir. Quelle meilleure amie je serais si je décidais de rester cloitrer chez moi à cause d'un souvenir, aussi beau et douloureux qu'il soit. Je ne peux pas.
Pdv Aaron :
Je fronce les sourcils, appuyé contre le mur de la salle informatique. C'est ici que se trouvent les imprimantes. Matt imprime je ne sais combien d'exemplaires une phrase, sur fond blanc. Elven Champion. Mon meilleur ami est persuadé que ça l'aidera.
- Ça sort d'où ces trucs, c'est toi qui les a fait ?
- Non, c'est Mike qui avait fait ce panneau avec Blue. C'est un panneau important.
- Il est où lui d'ailleurs ? Ca fait plusieurs fois que vous parlez de lui mais personne ne l'a jamais vu. Tout ce que tu m'as dis c'est que c'est le meilleur ami d'Elven.
- Ils passaient leur vie ensemble, tous les trois.
- Ne me dis pas que c'est le mec de Blue sinon je te jure que je te frappe pour ne pas m'avoir prévenu.
- Je t'ai dis de ne pas t'embarquer dans une histoire avec elle. Et pour répondre à ta question, elle est bien célibataire, ne flippe pas.
Mon dieu, j'ai faillis faire un arrête cardiaque. Hors de question de m'intéresser à quelqu'un déjà en couple. Règle d'or.
- Le jour ou j'ai rencontré Blue j'ai cru qu'ils étaient ensembles avec Elven. Tu m'as dis que c'était impossible à cause de Mike.
- Exact.
- Pourquoi ?
- Aaron c'est pas avec moi que tu dois en parler.
- Tu crois que je vois pas que toi et Betty vous me cachez un truc ? Je la sens pas votre histoire je vais me faire avoir.
- Ce n'est pas notre histoire Aaron. C'est toi qui t'es mis là-dedans.
- Tu as dis que ce Mike me mettrait des battons dans les roues, mais pourtant c'est pas son mec. Alors explique toi.
- Parles en avec Blue.
- Et si elle refusait de me répondre ?
- Si elle refuse tu ferais mieux de t'éloigner.
- Et si je n'ai pas envie ?
- T'es amoureux ?
- Euh... j'ai pas réfléchis à la question.
- Tu fais ce que tu veux. Mais je te l'ai dis, Blue est géniale, mais elle est difficile. Tu as vraiment très peu de chances.
- Merci de m'encourager, c'est fun.
- Tu as au moins le mérite de t'accrocher. C'est admirable, de vouloir te fier à ton propre ressentis. C'est une qualité. C'est aussi un choix. Tu dois l'assumer.
Je soupire, quittant la salle. Je n'y pensais plus, mais c'est vrai que son prénom est revenu plusieurs fois. Mike. Bordel qui est ce mec ? Et pourquoi Blue n'a jamais évoqué son nom ? Est-ce que c'est lui ? Est-ce que c'est ça, la tempête dans son regard ? Est-ce que c'est lui, qui mets de la distance entre nous depuis le début ? Moi qui croyait m'être rapproché d'elle, en une seconde je me suis rendu compte que je ne sais rien.
- Betty ! Je cris en apercevant la jolie blonde au loin.
- Oh la, ça va ? T'en fais une tête ! Rit elle.
- C'est qui Mike ?
- C'est pas moi qui doit répondre.
- Bordel tout le monde le connait et personne ne veut me dire ce qu'il se passe avec lui ?
- Pourquoi tu te pose la question si subitement ?
- Matt à dit que Blue ne pourrait jamais sortir avec Elven à cause de Mike. Il a aussi dit que Blue était bien célibataire, parce que franchement, j'ai eu peur pendant quelques secondes. Mais si ce n'est pas son mec pourquoi Matt m'a dit la dernière fois qu'il me mettrait des bâtons dans les roues ?
- Personne ne peut atteindre le niveau de Mike Aaron. Et personne ne pourra jamais te parler de lui aussi bien que Blue, ou Elven.
- Ça me fait peur ce que tu dis.
- Contrairement a Matt, je ne penses pas que ton rapprochement avec Blue soit une mauvaise idée. Je trouve que tu lui corresponds. Essaie de discuter avec elle.
- J'ai l'impression que si je lui parle de mes sentiments, si je lui demande des comptes, elle va s'enfuir en courant. Elle fuit l'amour comme la peste.
- Non, ce n'est pas l'amour qu'elle fuit.
- Alors c'est vrai.
- Quoi donc ?
- C'est ta meilleure amie. Tu ne me parleras jamais.
Et tu la défendra quoi qu'il arrive.
- Toujours. Mais ça fait de moi une personne fiable pour toi. Je crois que tu peux la faire changer d'avis.
Je souris légèrement. Si j'avais une mauvaise impression de Betty au départ suite à ses approches un peu douteuses, j'ai eu le temps de me rendre compte que c'est quelqu'un de bien. Je ne sais pas combien de temps je laisserai mes questions sans réponses. Je pars toujours du principe qu'on ne peut pas forcer quelqu'un à parler. mais pour la première fois depuis que j'ai rencontré ma brunette, j'ai l'impression d'être dans la merde. sacrément dans la merde, oui. Parce que si je ressentais quelque chose pour elle et qu'elle refusait de me parler, je n'aurais d'autres solutions que de prendre mes distances. Et bordel, je n'en ai pas envie. Absolument pas. Je ne sais pas comment c'est arrivé. Elle m'a intrigué, la tension dans son corps, l'orage dans ses yeux, ce coté si vivant qu'elle porte en elle, ça m'a frappé. J'ai eu envie de savoir qui elle était, de me rapprocher. J'ai passé du temps avec elle, j'ai appris ce qu'elle aime manger, ce qu'elle aime faire. J'ai donné de ma personne pour lui faire plaisir. Je me suis attaché à ces moments privilégiés passé ensembles, à ce sourire sincère qu'elle n'affiche jamais quand nous sommes entourés d'autres personnes. Ces derniers jours j'ai eu la sensation d'être important. Suffisamment pour qu'elle traverse le champs pour venir me voir, pour qu'elle acceptes de venir au match avec moi, pour qu'elle ne râle pas en mettant mon écharpe. Suffisamment pour que je lui confie qu'Isy n'est en réalité que ma demi sœur, pour que je lui raconte les problèmes de drogue qu'elle a eu. Elle connait les moments marquants de ma vie et finalement, moi je ne sais rien d'elle.
Pdv Blue :
Il est quasiment dix huit heures quand je passe la porte de chez moi. J'ai passé un certain temps au Starbucks avec Kaelan. Il adore suivre ma vie comme si c'était une série. De mon côté, ça me libère de lui parler. Je ne lui dis pas tout, mais j'aime discuter avec lui. Je laisse mes chaussures au pied de l'escalier avant de grimper les marches rapidement pour rejoindre ma chambre. J'ai besoin d'une douche. Je me débarrasse des vêtements que je porte depuis quasiment vingt quatre heures maintenant. Il fait déjà presque nuit. Je ferme les rideaux de ma salle de bain, puis je passe sous l'eau. Je ne saurais pas dire combien de temps j'y reste. Suffisamment pour remettre toute ma vie en question, comme d'habitude. Plus le match approche, plus j'ai la boule au ventre. savoir que je m'y rend avec Aaron me rassures. Je ne suis pas certaine que ça soit vraiment une bonne chose. Plus le temps passe, plus je sens que mon cœur s'accroche à lui. Je pense à lui en permanence, même quand j'essaie de l'oublier. Parce qu'essayer d'oublier, c'est y penser tout le temps, n'est-ce pas ? Je soupire. Je suis tiraillée entre l'envie de le revoir toujours plus et l'envie de m'enfuir en courant. Plus je m'approche de lui, plus je perds une partie de moi dont je ne veux pas me séparer. Jamais. Je me dirige tout droit vers le moment où je devrai prendre une décision, ça me terrifie. J'ai beau essayer de me convaincre qu'il ne se passe rien, je ne peux pas ignorer le fait que mon cœur s'emballe à chaque fois qu'il établis un contact physique. Je ne peux pas ignorer le fait que je me sente mieux en sa présence. Je ne peux pas ignorer que je cherche en permanence la lueur dans ses yeux et ce sourire qui ne le quitte jamais. Bordel. Ne pouvait-il pas rester loin de moi, comme avant ? J'aurais préféré qu'il ne prenne jamais conscience de mon existence. Tous ces pics un peu ambiguë, ses comportement. Il flirte. Je le sais. J'ai été attirée par l'idée de devenir son ami. Pourtant il m'avait explicitement dit qu'il me ferait changer d'avis sur l'amour. Si il savait. Ce n'est pas l'amour le problème. Personne n'y croit plus que moi. Le problème, c'est lui, c'est tous les autres, c'est nous. Bien que mon visage sois mouillé, j'essuie par réflexe la larme qui coule sur ma joue du revers de la main. J'éteins l'eau, je sors, enroule une serviette autour de mon corps puis je passe devant le miroir. Je baisse les yeux vers la cicatrice qui se dessine à l'intérieur de mon bras. Je passe doucement le doigt dessus, avant de la recouvrir en enfilant un gros pull bleu électrique assez ample. Je ne prévois pas de veste, simplement ce pull, un jean mom, et une écharpe. Tout ça accompagné de la casquette de l'équipe. Je fais quand même l'effort d'appliquer un peu de mascara, du blush et étant donné qu'il me reste une demie heure, je décide de lisser mes cheveux. Ça changera un peu.
Je sursaute quand trois coups cognent contre la porte alors que j'étais concentrée sur ma dernière mèche.
- Salut Bru... oh, j'aime. C'est pour moi que tu t'apprêtes comme ça ?
Je lève les yeux au ciel.
- Plus pour Elven que pour toi.
- Ça, c'est méchant.
- C'est surtout réaliste. Attends moi là, je prends mon sac.
Je choppe un sac petit modèle dans l'armoire de l'entrée que je partage avec ma mère. J'y glisse mon téléphone, mes clefs, de quoi payer un truc à manger pour Elven après le match, puis je rejoins Aaron. Je lui fais signe de passer devant, il faut que je referme la porte. Je lui lance un regard désespéré en remarquant une fois retournée, qu'il m'attends, appuyé contre la carrosserie de sa voiture, la portière passagère ouverte.
- Rien que ça. Dis-je en entrant dans la voiture.
- Merci ça marche aussi tu sais.
- Je sais.
Je l'entends rire légèrement alors qu'il referme ma porte pour aller s'installer au volant. Il me parait bien calme ce soir. comme si pour une fois, c'était lui qui était plongé dans ses pensées.
- Ça va ? Je demande.
- Est-ce que, tu tiens à moi ?
- Oui.
Il tourne la tête vers moi, comme s'il était surpris que j'ai répondu si vite.
- Je ne sais rien de toi.
Je soupire et une phrase que mon père m'a dit un jour me revient en tête. Tu ne pourras pas être égoïste toute ta vie. Ok Blue, c'est le moment de t'exprimer et de bien choisir tes mots. Mon cœur s'emballe, comme si parlait devenait subitement un effort considérable.
- Tu te trompes. je sais que je ne m'épanche pas beaucoup sur ma vie personnelle, mais, même si ce sont de petites choses, ça m'est arrivé de te dire des choses que je n'ai jamais dites à personne.
- Comme quoi ?
- Comme, la raison pour laquelle j'ai besoin d'être seule régulièrement.
- Le rangement ?
- Oui. Le rangement.
Un léger sourire étire ses lèvres. J'angoisse de voir que sa mine triste m'a fait autant de peine, j'ai eu la sensation d'avoir besoin de le rassurer, alors je le fais, ignorant tout ce que ça peut vouloir dire.
- Quand tu es rentré chez moi la première fois et que tu as vu mes parents, je suis sûre que tu as remarqué que je n'ai pas de relation avec mon père.
- C'est vrai.
- Je sais que je suis difficile. Mais, tu en sais sur moi plus que la plupart des gens. Tu sais que Betty était ma meilleure amie et je rajouterai le fait qu'elle me manque énormément, si c'est une confession que tu voulais. Je ne m'attaches pas aux gens. J'ai pris l'habitude de les envoyer balader. Mais toi, je ne saurais pas t'expliquer pourquoi, j'ai eu l'impression que tu étais différent. tu es détaché de tout jugement et c'est qui m'a donné confiance en toi. Ne t'attends pas à ce que je te dévoile tout mon passé, il est un peu compliqué, mais sache que le simple fait de te dire tout ça là maintenant me demande un effort considérable, c'est une façon de m'ouvrir. Il faut beaucoup, beaucoup de patience pour être ami avec moi. Je suis infernale, aussi froide qu'un mur et j'en suis désolée. je ne sais pas faire autrement. C'est extrêmement difficile pour moi de parler. Tu sais, on pourrait croire que je parle beaucoup à Elven mais pas tant que ça. Pas plus qu'à toi. On se comprend c'est tout. Sans avoir besoin de mots.
Aaron sourit hoche la tête, puis démarre la voiture.
- Ne t'inquiètes pas Blue. Je ne te bousculerai pas. Et je n'ai pas non plus l'intention de t'abandonner, si c'est ça, ta crainte.
Non Aaron. Tu ne comprends pas. Ce que je crain est bien plus fort qu'une simple peur de l'abandon. J'ai peur d'atterrir. De faire face. Je ne veux pas accepter.