PDV Louis.
Automne 2016. Londres.
Par une pluvieuse après-midi.
- Mais quel temps de chiotte ! je peste en entrant dans la galerie et en repoussant la capuche de mon sweat noir déjà trempée.
- C'est clair, grommelle Oli pour acquiescer. Vivement qu'on rentre.
Et cette fois, c'est moi qui fais "oui" de la tête. Notre avion est dans quelques heures mais, avant de quitter Londres, j'ai promis à Vitallo Constanti, le "photographe des stars" de venir voir la rétrospective qui lui est consacrée.
Pour l'instant, la galerie est relativement vide. J'ai préféré passer avant que le vernissage officiel ne commence. Les discours, les cocktails et les sourires polis à la presse, ça m'emmerde.
Une hôtesse me tend un verre et je le prends avant de commencer à faire le tour de l'expo. Il n'y a pas à dire, Vitallo est doué. Je suis en train de me marrer devant une photo de Bowie sur ses chiottes quand la voix chantante du photographe italien s'élève dans mon dos.
- Louis, je suis ravi de te voir, lâche-t-il avant qu'on ne s'enlace.
Pointant du doigt le cliché que je regardais, je lui annonce que je vais certainement m'en porter acquéreur.
- Je ne t'ai pas invité pour te soutirer ton argent, rit l'Italien. Je voulais te montrer ton portrait. J'en ai fait la pièce maîtresse de la salle n°3, il explique, en me poussant doucement dans le dos pour que je le suive.
Euh effectivement.
- T'aurais dû l'imprimer en encore plus grand ! je souffle.
Je manque de m'étouffer avec mon champagne. Le cliché est immense. Plus grand que moi.
Qui voudrait de ce moi si imposant ?
- J'aurais pu, mais il faut qu'il puisse rentrer dans un salon ou une salle à coucher.
- Une chambre ? Tu penses franchement que quelqu'un va vouloir foutre ma gueule dans sa chambre ?
- C'est une très forte probabilité vue ta pose ! rit le photographe.
- Ah ouais ? je demande, mi-étonné, mi-intéressé.
Vitallo scrute mon expression et me sourit.
- Je pensais que tu serais choqué mais ça a l'air finalement de te plaire !
- Ben écoute, si je peux hanter les rêves d'un beau garçon... je rétorque en haussant les épaules.
Je lui fais un clin d'œil et je tourne les talons. Je me suis assez vu. Je préfère poursuivre mon petit tour de la galerie et Vitallo me suit en me racontant des anecdotes.
Quand on a fini avec Oli, on décide de s'éclipser discrètement alors que les premiers invités et journalistes arrivent.
Il pleut encore à verse mais heureusement, la bagnole est garée juste devant. Je m'engouffre côté passager et je tâtonne dans mes poches pour trouver mes clopes. J'en sors une et je l'apporte rapidement à mes lèvres.
Je m'apprête à l'allumer quand mon regard est attiré par une silhouette gracile qui sort du véhicule garé juste devant nous.
Le garçon porte un long manteau bleu marine qui lui arrive aux genoux et qui accentue sa taille longiligne. Il porte un jean skinny noir et des boots de la même couleur. Des boucles marron tombent en cascade sur ses épaules. Non. Ses cheveux sont plus longs encore.
Malgré la pluie, il reste planté là quelques secondes, les mains dans les poches, les yeux rivés sur la galerie éclairée. Il fronce les sourcils et fait la moue. Il n'a pas l'air d'avoir très envie d'être ici.
Il finit par contourner la voiture par l'arrière. Mais il stoppe entre son véhicule et le nôtre, juste devant notre pare-brise.
Qu'est-ce qu'il fabrique ? Il ne voit pas qu'il flotte ?
Un mec blond qui l'accompagne sort de la voiture côté conducteur et court vers la galerie. Il ouvre la porte, se retourne et attend le brun. Mais ce dernier semble complètement dans la lune.
Doucement, il lève le nez pour offrir son visage aux nuages. Les yeux fermés, il laisse la pluie recouvrir sa peau, mouiller ses cils et ses cheveux.
Au bout de deux ou trois secondes, il tire même la langue pour récolter quelques gouttes de pluie.
Le pare-brise qui me sépare de lui se recouvre rapidement de gouttelettes et c'est comme si ma vision se brouillait. Sans le quitter des yeux, je tends le bras sur ma droite pour atteindre le volant et j'enclenche l'essuie-glace.
Il est tellement dans ses pensées qu'il ne se rend même pas compte de cela.
Il est complètement barjot. Sûrement un Anglais, y'a bien qu'eux qui aiment à ce point-là la flotte. Complètement ahuri. Complè-
Quand même, ses boucles ont l'air soyeuses...
Mais qu'est-ce que je raconte bordel ? Et puis, comment je connais ce mot-là moi ?
- Bon, tu viens ? s'impatiente le blond en appelant le brun.
Mais laisse-le kiffer ce moment, bon sang !
Le jeune homme redresse sa tête en clignant des yeux, faisant battre ses cils humides. Il sort une main de sa poche et la glisse dans ses boucles pour les discipliner. Puis il regarde le type qui lui parle avant de se mouvoir en sa direction.
Non, non, t'en vas pas.
Reste.
Juste encore un peu.
Mais, déjà, la silhouette s'engouffre dans la galerie.
- Oh Tommo tu m'écoutes ?
Je tourne la tête vers mon pote assis sur le siège côté conducteur.
- Je disais : "trop chelou ce type" ! rigole Oli.
Mes yeux dévient de leur trajectoire et se posent sur l'entrée de la galerie qui se dessine derrière lui.
- Ouais trop chelou... je murmure, ma clope toujours entre mes lèvres. Mais il avait l'air mignon.
- Tommo, tu les trouves tous mignons et tu veux t'envoyer en l'air avec tous les mecs que tu croises ! rit Oli.
- Mmm... je réponds distraitement. Allez, démarre, on va bien finir par louper notre avion.
Je fais finalement jaillir la flamme de mon briquet et regarde la braise rougir au bout de ma clope.
On roule depuis environ 10 minutes quand je brise le silence.
- Ma queue n'a pas réagi quand j'ai vu le mec.
- Quel mec ?
- Le mec sous la pluie. Je-j'avais pas envie de coucher avec lui comme avec les autres. J'avais juste envie...
Je sens le regard d'Oli sur moi. J'hésite à le dire, il va se foutre de ma gueule et je suis le premier à trouver cela ridicule mais je finis par lâcher le morceau.
- ... je sais pas, de le rejoindre sous la pluie et de glisser mes doigts dans ses cheveux.
******
Août 2021. Los Angeles,
par une chaude nuit d'été.
Je jette un rapide coup d'œil à mon téléphone. 01h32. Il faut que je rentre. J'ai un avion à prendre demain pour New York. Je dois rencontrer une directrice de casting puis, de là-bas, je dois prendre un autre avion en direction de Londres.
Je débute le tournage de mon nouveau film, Sous son regard. Je vais retrouver Chris Laine, l'un de mes réalisateurs fétiches. J'adore ce type et la réciproque est vraie. À force de collaborer ensemble, il est presque comme un second père pour moi.
Je dois encore finir mes bagages. Il faut que je rentre et que j'essaie de dormir.
Mais un beau mec à la peau ébène me fixe depuis tout à l'heure en me souriant. La Molly que j'ai ingurgité maintient mon corps à 1 000 degrés et je lui rends chacun de ses regards appuyés.
Okay, ce sera donc toi pour cette nuit.
Si je me dépêche, je peux être à 2 h 30 dans mon lit, c'est amplement suffisant.
Je glisse un mot à Oli et lui montre du menton le mec en question.
Je tourne les talons et quitte la boite avec Luke. On hèle un taxi puis un autre encore. Avec mon pote, on se dit au revoir car on ne se reverra pas avant la fin du tournage dans huit semaines. Puis je m'engouffre dans le premier véhicule stationné devant la boîte.
Oli arrive quelques secondes plus tard et ouvre la portière pour passer sa tête :
- Je viens te chercher à 6 h 30. Garde ton portable en mode normal, je commencerai à t'appeler vers 5h30 pour te réveiller.
- Okay, merci bro à demain ! Bonne nuit.
- Ouais, toi aussi enfin, amuse-toi bien ! Mais à 5 h 30 Tommo !
Il se redresse et fait signe à l'inconnu du bar de monter dans le taxi. Le gars me rejoint sur la petite banquette arrière et me jette des coups d'œil furtifs et timides.
Il avait l'air beaucoup plus sûr de lui à l'intérieur, pendant qu'il était entouré de centaines de personnes et me déshabillait avec ses yeux.
Ça fait toujours ça. Ils me matent, me font du rentre dedans puis ça me fait toujours marrer de les voir se liquéfier une fois qu'ils se retrouvent seuls face à moi.
Leurs mains deviennent moites, leur pouls s'accélère sûrement, leur regard devient fuyant, ils ne savent plus trop quoi raconter. Je n'ai jamais compris comment on peut s'emballer à ce point pour un mec. Au point d'en perdre tous ses moyens.
Ils ont beau être les tops, ça m'oblige à être entreprenant, à prendre le lead. J'ai pris l'habitude et ça me va.
Comme ça, je peux le faire comme je veux, au rythme et dans la position que je veux. Je me sers d'eux pour me donner du plaisir, de toute façon, eux n'y arriveraient pas seuls.
J'ai bien essayé quelques fois de les laisser driver, mais c'est comme si la douleur m'avait anesthésié depuis la mort de Raph, je ne ressens presque rien si ce n'est pas moi qui maîtrise. Je n'arrive pas à me lâcher, à totalement m'abandonner.
- Tu t'appelles comment ? je demande en glissant une clope entre mes lèvres, pressé de l'allumer lorsqu'on sera arrivé chez moi.
- David, me répond-il.
- Okay David. Ça te va si on va chez moi ? Je dois me lever tôt demain, c'est mieux si je suis sur place.
On échange quelques banalités puis, arrivés dans mon appart, je nous sers deux whiskies. Je lui tends un verre et me rapproche de lui pour coller nos bassin.
Je lui balance alors la phrase que je sors à chaque fois que je m'apprête à coucher avec un mec.
Je l'ai trouvée il y a quelques années et je la répète maintenant toujours. Une façon de mettre une dernière fois les points sur les "i" et que personne ne se fasse d'illusion.
- Et si on passait aux choses sérieuses, c'est-à-dire, s'éclater sans rien de sérieux ?
******
- Ta gueule bordel...
Je peste contre mon portable qui n'arrête pas de sonner. Et contre cet emmerdeur d'Oli. Je veux rester au fond de mon lit. Je commençais juste à dormir.
Avec le gars, comment il s'appelle déjà ? On a fait un premier round pas mal et j'étais encore en forme pour un deuxième. Résultat : je crois qu'il était presque 4 heures quand je me suis couché. J'ignore appel sur appel mais mon pote me connait et insiste.
- Mmmallô ? je finis par grommeler en décrochant.
- Il est presque 6 heures, bouge ton cul. Si tu loupes ce vol pour New York, tu ne pourras pas ensuite rejoindre Londres...
Je m'apprête à baragouiner un truc du style : "allez tous vous faire foutre" mais Oli enchaîne :
- Tu ne veux pas décevoir Chris dès le premier jour Louis...
J'adore Chris. Ce nouveau film, c'est le projet de sa vie. Il est certain que ça va cartonner et que ça va nous mener aux Oscars. C'est son bébé. Et il me voulait à tout prix dans le casting. Il a même écrit ce rôle pour moi. Il m'a promis que je vivrais une expérience de jeu comme j'aime : quand le rôle est dur, qu'il nous pousse à aller chercher ce qu'il y a de plus noir en nous, quand il nous pousse dans nos retranchements. Non, je ne veux pas et ne peux pas le décevoir.
- C'est bon, je me lève, je lâche avant de raccrocher.
Je file rapidement à la douche pour me réveiller un peu. Dans la glace, je regarde ma gueule fatiguée et mes cheveux bien trop longs. J'ai dû les laisser pousser pour le film.
J'enfile une tenue décontractée pour les heures d'avion qui m'attendent. Je range mes dernières affaires et je rejoins le séjour.
Quand j'arrive, le gars est déjà assis dans le canapé, en train de se frotter les yeux.
- Désolé, je m'excuse, même s'il savait que je devais me lever 2 heures après qu'on s'est couché.
- T'inquiète, il me répond en défroissant son visage.
- Café ? je lui demande.
- Non merci, je compte bien me rendormir une fois chez moi, il sourit.
Je souris également. Moi, c'est bien ce que je compte faire pendant le trajet vers l'aéroport puis dans l'avion.
Il se lève encore nu et bordel, il est tellement bien bâti. Ses muscles sont saillants, parfaitement dessinés. C'est même presque trop parfait. Il est totalement imberbe, il se rase strictement partout.
Moi, j'aime quand le mec dans mon lit a de la barbe, quelques poils sur le torse, un chemin du bonheur. Lui n'a aucune imperfection, aucune ride ou grain de beauté, ou petite tâche de naissance qui le caractérise. C'est flippant comme tout est lisse.
Il se plante devant moi et glisse sa main dans mon jogging.
- Il te reste combien de temps ? il me demande.
- 7 minutes à tout casser, je réponds en matant mon portable.
Alors il se met sur ses genoux, tire sur mon pantalon et me fait une fellation dans la cuisine tandis que ma main se perd dans ses cheveux crépus.
Après tout, je ne vais pas le blâmer d'avoir un corps parfait. S'il veut s'occuper de moi comme ça, qui suis-je pour l'en empêcher ?
Quand il a terminé, il se relève et me glisse à l'oreille :
- C'est pour que tu te rappelles de moi quand tu seras à Londres. N'hésite pas à me recontacter quand tu seras de retour.
- Okay, mais je ne te promets rien, je lui réponds en souriant et en me renfroquant.
Je ne promets jamais rien.
Pendant qu'il se rhabille, j'enfile une casquette et glisse dans mes poches mon portefeuille, mon couteau et mon portable.
On se sépare quelques minutes plus tard en bas de chez moi mais, avant cela, il prend soin de m'embrasser tendrement. Je me laisse faire parce qu'il me prend par surprise mais je ne fais jamais ça, embrasser en dehors du sexe. Et bien-sûr, Oli, qui m'attend dans le taxi, n'a rien manqué de la scène.
- Bien amusé ? me demande mon pote une fois assis à ses côtés.
- Ouep, je réponds.
- Tu vas le revoir ?
- Nope, je réponds à nouveau.
- Est-ce qu'un jour tu vas te poser ? interroge Oli.
- Nope, j'ajoute en calant ma tête contre l'appuie-tête et en faisant glisser la casquette sur mes yeux pour lui faire comprendre que je veux dormir.
Quelques minutes passent mais Oli me parle à nouveau. Sa voix est basse et douce. Ça ne lui ressemble pas de prendre ce ton-là avec moi.
- Tu sais, Raph aurait voulu que tu te trouves un mec bien qui te fait vibrer.
Je ne prends même pas la peine de relever la tête.
- Aucun mec ne me fait vibrer. Aucun n'est aussi bien que lui.
- Ça fait sept ans, Louis... il murmure.
Cette fois, je relève ma casquette et regarde le rouquin.
- Tu vas vraiment me faire chier avec ça à cette heure-ci ? je demande en fronçant les sourcils. Il n'est même pas encore 7 h, j'ai encore la gueule de bois Ol !
- Okay, c'est bon je me la ferme, rétorque mon pote.
- Merci, je lâche d'un ton froid.
Je soulève doucement ma casquette pour voir qu'Oli s'est collé contre sa vitre et regarde dehors d'un air renfrogné. Je vais m'absenter pour au moins huit semaines alors je ne veux pas qu'on se quitte comme ça.
C'est alors que le bip de mon portable se fait entendre, signe que je viens de recevoir un message.
De Vlad
Hey baby, je pensais qu'on se verrait hier soir avant que tu ne partes...
Vlad, c'est le cousin de Luke que je vois de temps en temps. J'ai couché avec lui un peu plus tôt dans la semaine et on avait plus ou moins convenu de se revoir avant mon départ.
Oup's.
De Louis
Oh désolé, je me suis couché tôt ! PS : pas de petit nom, merci ! Passe une bonne journée, j't'embrasse.
Sa réponse ne se fait pas attendre.
De Vlad
Instagram est rempli de photos de toi en boîte hier soir avec mon cousin...
Fuck.
De Louis
Ok, je plaide coupable ! Désolé.
De Vlad
Va te faire foutre Louis, on sait tous les deux que tu ne l'es pas.
Je replace le téléphone dans ma poche sans prendre la peine de répondre.
Note pour moi-même : me trouver un nouveau plan cul régulier quand je serai de retour à LA.
Je fixe à nouveau mon pote et le secoue doucement pour qu'il arrête de tirer la gueule.
- Bro, t'inquiète pas, je kiffe ma vie, okay ? Et tu sais ce que j'ai petit-déjeuné ce matin ? je lui demande d'un ton coquin.
Oli tourne la tête vers moi.
- Ne me dis pas une noisette Louis...
La noisette c'est, en France, un café auquel on rajoute une touche de lait. C'est le nom qu'on a donné avec mes potes aux mecs qui me font des fellations le matin juste avant de partir tandis que je bois mon café.
Parce que j'ai remarqué qu'ils étaient nombreux à faire cela, espérant marquer mon esprit, me laisser un dernier bon souvenir, dans l'espoir que je les rappelle.
Même si je ne rappelle jamais.
C'est Luke qui a trouvé ce terme et depuis, mes potes me charrient avec ça.
- Eh ben si, une noisette ! je rigole et Oli fait la grimace.
- Comment ils peuvent faire ça à 6h du mat, à peine réveillés ? demande mon pote, incrédule.
Je hausse les épaules.
- Que veux-tu, je suis irrésistible ! je me marre et Oli lève les yeux au ciel.
******
Le lendemain soir. Londres.
Dans la voiture qui nous amène de l'aéroport à la maison où les acteurs sont censés cohabiter pendant quelques jours, Timmy se fout de ma gueule.
- J'ai cru que tu allais buter le gosse qui ne faisait que chialer, rigole-t-il.
- Franchement, il n'a pas arrêté pendant les deux ou trois dernières heures de vol, tu t'en fous, toi tu avais ton casque ! Moi je l'ai oublié chez moi hier matin ! je m'exclame, encore saoulé par toutes ces heures de vol qui ont été interminables.
- T'es pas prêt à être père ! se bidonne Tim et je lâche un "ouais" en rigolant aussi.
Si tu savais bro, si tu savais.
Je rallume mon téléphone et j'ai plusieurs textos qui m'attendent.
De Lucas
Salut BG, tu dois être arrivé sur Londres. Tu sais où me trouver si tu t'ennuies...
De Zayn
Yo ma couille ! Je me barre quelques jours à Paris mais on peut se voir la semaine prochaine si tu peux ! Merde pour le début de ton tournage. Je t'aime bro. Tu vas tout déchirer.
De inconnu
Salut Louis, je ne sais pas si tu te rappelles de moi, Paco, on s'est rencontrés chez Marielle. On avait passé un bon moment dans sa salle de bain. Je sais que t'es pas du genre à recontacter les mecs mais je suis chez elle là, dans sa salle de bain, et je pensais à toi. Je t'embrasse.
Photo.
De Ben
Hey Big bro, t'as fait un bon vol ? Je peux faire un Lyon-Londres avec les petits si t'es dispo un week-end. Et Léa me dit de te demander si on peut emmener Dimou avec nous à Disneyland en décembre. Je te laisse me rappeler.
De Chris
Dis-moi que tu es bien dans l'avion.
De inconnu
J'ai beaucoup aimé cette nuit en ta compagnie...
De Paul
Photo
Je réponds en fonction des priorités.
À Chris
Je ne suis pas dans l'avion... Je suis dans la bagnole en direction de la baraque que t'as loué pour notre "week-end d'intégration" ! On peut se voir un peu avant le briefing lundi ? J'ai quelques idées pour Tom, je voulais te les soumettre.
À Ben
Hey p'tit Brother ! Je viens d'atterrir. On doit nous donner nos plannings de tournage ce lundi. Je te tiens au courant mais j'ai hâte de vous voir. J'en parle à Estelle pour Disney mais ça devrait le faire ouais. Dimou sera fou de joie. PS : ramène du fromage quand tu viendras. J'ai trop envie de bleu et de comté.
À Zayn
Ah ben d'accord, tu te barres au moment où j'arrive ! Enjoy pour Paris. Pauvres petites Françaises encore innocentes et qui n'ont pas encore croisé ta route ! Je t'aime grand fou.
Je me remets sur le message de Lucas.
J'ai rencontré ce mec la dernière fois que je suis venu à Londres. Je l'ai ramené à mon hôtel. Je crois que c'était plutôt bien mais je devais être encore défoncé. Pourquoi pas le revoir. Cela s'envisage si jamais je me fais chier sur le plateau et que je ne trouve pas un seul mec qui m'intéresse.
À Lucas
Hey BG, j'atterris tout juste. Tu veux bien m'envoyer une photo de toi pour me rafraîchir la mémoire ?
Moins d'une minute après, je reçois un nude de lui. C'est vrai qu'il était bien foutu ce p'tit blond.
De Lucas
Alors ça te plaît toujours ? Tu veux bien m'en envoyer une toi aussi trésor ?
De Louis
Ça me plaît ouais ! Laisse-moi le temps d'arriver tranquille, je t'en enverrai une dans la soirée... PS : tu le sais, pas de petit nom.
Je décide d'ignorer les autres messages dont le nude de Paul, un gars qui s'obstine.
Mon frère me répond 30 minutes plus tard en me posant des questions alors, plutôt que de lui écrire, je décide de l'appeler. Pour une fois qu'il n'y a pas trop de décalage horaire entre nous, autant en profiter. Je suis encore au téléphone lorsqu'on arrive et qu'on sort les bagages de la voiture.
À un moment, Tim a fait des grands yeux parce qu'on parlait de Vadim et qu'il a compris que j'avais un fils. Je lui ai fait un clin-d'œil puis j'ai mis mon doigt sur ma bouche pour lui signifier de garder le secret. J'ai confiance en lui, on se connaît depuis longtemps.
On s'avance dans l'allée gravillonnée et je laisse Tim passer devant. Il ouvre la porte et me jette un rapide coup d'œil. Je lui fais un petit geste pour lui dire que j'arrive le temps de finir mon coup de fil. Alors le New Yorkais rabat la porte sans la fermer complètement et je pose ma main sur la poignée, prêt à le suivre.
- Je dois te laisser, je t'appelle demain ou après-demain et on essaie de se voir. Bonne soirée, je dis à Ben juste avant de raccrocher.
Et, à mon tour, j'entre dans la maison.
Ils se tiennent déjà tous là, certains debout et d'autres assis. Je tends la main à Miles, qui se tient le plus près de la porte et je vois que l'Américain est un peu étonné.
J'oublie souvent qu'eux se saluent plutôt avec une embrassade et une tape dans le dos. Mais maintenant que j'ai commencé ainsi, je continue avec les autres pour ne pas faire de différence.
Mon regard croise celui de Sebastian Stan tandis que je serre sa main dans un geste viril.
Mmm, pas mal. Certainement hétéro mais pas mal du tout...
Je m'éloigne de Seb pour saluer le prochain mais mon cerveau est déjà empli de pensées coquines.
Je ferais bien fait de toi mon quatre heures. Lucas, désolé mais s'il y a moyen de moyenner avec ce gars-là, je ne suis pas près de te recontacter ! Franchement, je suis sûr qu'on pourrait bien s'amuser lui et -
Waouh. Je, euh. Waouh.
Pourquoi j'ai l'impression de manquer de souffle tout à coup ? C'est quoi ces yeux putain ? Me regarde pas comme ça. Arrête ça tout de suite.
Fais quelque chose Tommo, ne reste pas planté là comme un con parce qu'Harry Styles te fait un regard de tombeur. Tends-lui ta putain de main.
Quand nos peaux entrent en contact, un frisson parcourt ma colonne vertébrale.
Réagis !
- Hey, ça va ? je lâche rapidement.
- Hey... il me répond d'une voix rauque et chaude.
Je ne sais même pas s'il a dit quelque chose d'autre. Je n'écoute pas. Toute mon attention est focalisée sur la fossette qui vient d'apparaître sans crier gare tandis qu'il me sourit en coin.
Alerte danger ! Barre-toi, Tommo, éloigne-toi de la pop star.
Je m'éloigne rapidement et pars saluer Eddie avant de tirer la première chaise que je trouve.
Je souffle un grand coup.
Bordel. C'était quoi ça ?
Encore confus, j'enlève ma casquette le temps de frotter mon crâne puis je la remets.
-Bon qu'est-ce qu'on boit ?
Je balaie la salle des yeux et passe d'un gars à l'autre pour occuper mon regard qui n'a qu'une seule envie : se poser sur Harry et ne plus bouger de là.
Je sens ses yeux sur moi. Et tandis que Miles m'apporte un verre et me sers un whisky, je ne pense désormais plus qu'à cela : que le garçon aux yeux verts magnifiques me regarde.
Je me trouve dans son viseur, et, pour la première fois, je ressens la totale : mains moites, cœur qui refuse de décélérer, souffle coupé, cette impression de ne plus savoir parler, d'être empoté et cette chaleur, cette putain de chaleur qui me vient de l'intérieur.
Fuck.
******
Cinq jours plus tard.
J'ai interdiction d'approcher Harry.
Ce soir, on bouffe tous ensemble et on a invité notre réalisateur à la maison. La soirée est plus qu'arrosée et on est tous légèrement bourrés. Depuis une heure, on chante à tue-tête.
Avec Timothée, on vient de faire Amsterdam, bras dessus bras dessous. Je levais mon verre dans les airs et on se balançait de gauche à droite. Puis Harry et Eddie nous ont remplacés pour chanter une chanson de Queen. Harry s'est saisi de sa guitare et nous a montré un aperçu de la bête de scène qu'il est.
C'est la première fois qu'il jouait devant nous. Hier, alors que j'étais couché dans mon lit, je l'ai entendu gratter dans sa chambre un petit air que je ne connaissais pas. Je pense qu'il est en train de l'inventer car il jouait et rejouait encore les mêmes accords, en en rajoutant au fur et à mesure des nouveaux. Je me suis endormi bercé par cette douce mélodie.
Ce soir, bien que vêtu d'un simple short de sport et d'un t-shirt, il nous a bluffés. Mes yeux étaient d'abord concentrés sur ses doigts qui dansaient sur les cordes. Puis ils ont lentement dévié sur ses longues jambes bronzées et musclées et sur ses petits tatouages aux genoux et aux chevilles.
J'ai eu envie de mordiller ces chevilles-là. J'ai eu envie de faire d'Harry mon quatre heures.
Puis il a éclaté de rire et sa fossette s'est tellement creusée que j'ai pris la décision sur le champ : je vais en faire mon quatre heure. C'était décidé. Ce mec finira dans mon lit avant la fin de la semaine.
Mais c'était sans compter sur Chris, qui m'a choppé un peu plus tard dans la soirée, pendant que je fumais dehors.
- Ça va ?
- Ouais super !
- Tu sais que le rôle va être difficile ?
- Oui t'inquiète Chris, je vais me donner à fond.
- Je le sais Louis, ce n'est pas pour cela que je dis ça. Je sais que tu vas tout déchirer. Mais ce rôle est dur, dans le sens "noir", tortueux, alors fais attention à toi. Je te connais Tommo, une fois que tu seras à fond, tu vas plonger corps et âme dans Tom, tu vas aller vers le très sombre et moi, je vais sûrement t'y pousser. Alors, c'est absurde que ce soit moi qui te dise cela mais s'il te plaît, ne m'écoute pas à 100 %, ne vas pas trop loin. Fais en sorte de pouvoir revenir.
- T'en fais pas pour moi. Je plongerai juste assez pour que tu gagnes l'Oscar !
- Haha, fais attention à toi surtout. Allez viens dans mes bras ! Ah et une dernière chose Louis : pas touche à Harry !
- Qu-quoi ?
- J'ai vu comme tu le regardais ce soir. Mais t'oublies ça. Tu te rappelles, sur le dernier tournage, comme c'était la merde quand tu as baisé et rejeté Alan ?
Ouais je m'en souviens. Les derniers jours de tournage ont été un enfer. Il refusait de me parler.
Ils sont chiants aussi, moi, je suis toujours clair : je ne m'attache pas. Mais régulièrement, ils espèrent me faire changer d'avis et je ne comprends même pas pourquoi. Je me comporte comme un vrai connard.
- Je refuse de revivre ça, surtout qu'avec Harry, vous allez avoir beaucoup de scènes ensemble, jusqu'à la toute fin du tournage. Il y a trop d'enjeu là. Et puis tu verras, c'est un mec génial, j'ai eu un coup de cœur pour lui quand on l'a fait auditionner puis que j'ai mangé avec lui. Ne lui fais pas de coup de pute.
- Je croyais que c'était moi ton coup de cœur ?
- Tommo, change pas de sujet. Ne t'approche pas d'Harry, okay ?
- Okay Chris mais quand je serai chiant parce que j'aurai pas baisé, faudra pas te plaindre.
- T'es toujours chiant Louis ! Et je suis sûr que tu sauras te rabattre sur d'autres pauvres types qui vont se faire briser le cœur. En attendant, t'approche pas du British. Et de personne d'autre du casting !
Je viens de me faire sermoner par Chris et je me rassieds à table en faisant la tronche. Je racle nerveusement l'étiquette sur ma bière. J'ai horreur qu'on m'interdise des choses. Ça a tendance à me pousser à faire l'inverse de ce qu'on me dit.
- Ça va Louis ? me demande Harry, assis en face de moi.
Ça commence bien. Comment rester zen quand il me parle comme ça ?
Je lui souris et acquiesce.
Ouais, ça va. Je n'ai pas le droit de t'approcher et la seule chose dont j'ai envie, c'est justement ça. À part ça, tout baigne. Si tu pouvais du coup être un peu moins sexy, ça m'arrangerait.
Je finis ma bière d'un trait et attrape mon téléphone pour envoyer un message.
De Louis
Hey, tu veux bien me renvoyer une photo de toi ?
De Lucas
Attends deux secondes, je suis en soirée, je m'éclipse aux toilettes. J'attends toujours la tienne...
Photo.
De Louis
Mmm sexy... Bouge surtout pas, je monte dans ma chambre et je t'appelle en visio.
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Tournage, semaine 2.
Franchement, c'est un supplice. Je veux bien me tenir à bonne distance mais qu'il arrête d'être aussi mignon.
Tiens, là, par exemple, il est assis devant son thé, à moitié endormi.
Moi, j'ai horreur quand mes cheveux sont décoiffés. Les siens sont un putain de bordel et c'est trop bandant. J'ai envie de glisser mes doigts dans ses boucles. Elles ont l'air soyeuses.
Mais qu'est-ce que je raconte bordel ?
Moi, Tommo, c'est d'ordinaire dans des boxers que j'ai envie de glisser ma main.
J'ai l'impression qu'il m'a hypnotisé.
Fait chier.
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Tournage, semaine 3
De tous les mecs dans l'univers, il a fallu que je tombe sur la bande la plus tactile qui existe. Que ce soit Seb, Tim, Harry ou Miles, il faut toujours qu'ils te câlinent, te serrent dans leurs bras, passent leur bras autour de tes épaules, se posent en se calant contre toi...
Au début, ça me faisait bizarre mais maintenant, je commence à m'y habituer. Et c'est même plutôt agréable.
Plus le tournage devient exigent pour moi, plus j'apprécie cette proximité, cette complicité entre nous tous. Ça m'ancre dans la réalité parce que, lorsque mes rôles sont trop forts, j'ai parfois du mal à me reconnecter au monde réel quand les caméras arrêtent de tourner.
Et bon, je dois l'avouer, ça me permet d'approcher Harry sans éveiller de soupçons.
J'en profite un peu mais ça reste sage, je ne l'étreins pas comme je le voudrais. Faut pas déconner.
D'abord, il a une copine. Ensuite, j'évite de trop le câliner car, clairement, je crois que si je le prenais dans mes bras, je ne lâcherais pas avant de l'avoir fait jouir en expirant mon prénom.
Je sais que je n'ai pas le droit de l'approcher. Pour plusieurs raisons et qu'elles sont toutes valables. Mais ce n'est pas toujours facile.
Alors j'avoue que, parfois, je laisse traîner ma main un peu trop longtemps sur son épaule ou dans le bas de son dos. J'aime sentir sa musculature sous mes doigts.
Et puis, c'est drôle parce que je sais qu'il me matte tout le temps. Je l'ai remarqué et il m'a avoué lui-même qu'il était fan de moi. Mais quand j'approche et que je le touche comme ça, ses yeux me fuient à chaque fois.
Je l'intimide et je sais qu'il se livre à un combat intérieur. Il voudrait céder mais il ne le doit pas. J'avoue que ça me plait de le faire un peu paniquer.
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Tournage, semaine 4.
- Tu ne comprends pas, c'est pire maintenant que je le sais ! C'est une torture putain ce tournage.
Assis sur la balançoire, je tire sur le joint et le fais passer à Seb qui rigole devant mon désarroi.
Cet après-midi et en début de soirée, on a tourné les scènes de sexe avec Harry. Alors que j'ai tout le temps envie de lui sauter dessus, j'espérais décharger un peu de ma frustration tout en jouant.
Mais c'est mort.
Parce que maintenant, je sais.
Je sais que sa peau est douce et chaude.
Je sais que ses lèvres sont charnues et qu'il embrasse bien.
Je sais qu'il a un tatouage en haut de la cuisse et qu'elle est assez musclée pour faire un bon oreiller.
Je sais que ses mains arrivent à recouvrir mes fesses.
Je sais le goût qu'il a.
Je sais à quel point son regard peut me déstabiliser.
Je sais tout ça.
C'est beaucoup.
Et je sais que je voudrais en savoir plus encore.
Jusqu'à présent, ça me faisait rire de le faire un peu paniquer mais maintenant, c'est moi qui panique aussi.
Parce que, pendant qu'on était dans ce lit, Harry n'a pas détourné son regard. Cette fois, il m'a regardé fixement. Ses yeux étaient si proches des miens. Ils ont fini par me faire chavirer.
Comme jeté par-dessus bord.
C'était abyssal.
Une chute sans fin.
Sans que je ne sache ce qu'il y avait tout au fond. Ce qui m'attendait. Des bras ? Une énorme plaque de béton sur laquelle j'allais me crasher ?
Je tire nerveusement sur le joint.
Je ne suis pas un habitué de ces choses-là mais je suis assez lucide pour le reconnaître : je suis en train de tomber pour Harry.
C'est puissant. C'est même violent comme c'est puissant.
Mais comme Harry, je mène un combat intérieur. Une lutte acharnée pour stopper cette folie avant que ça n'aille trop loin et que quelqu'un n'en ressorte blessé.
Je n'ai pas le droit de tomber pour lui. J'appartiens à Raphaël. Je n'ai pas le droit de séduire Harry. Il appartient à sa copine.
Je n'ai pas le droit de lui gâcher sa vie.
Pourquoi ? Pour ensuite lui dire : "ah, désolé, mais je n'ai rien à t'offrir donc tu n'aurais pas dû quitter ta meuf".
Je dois remettre de la distance entre nous. Et porter un masque.
Bienvenue dans la Comedia Dell'arte !
Je suis Louis et je ne ressens rien quand on est à table et que tu attrapes mon biceps avec tes mains avant de poser ta tête sur mon épaule. Rien !
Ça ne m'a fait ni chaud ni froid quand j'ai ouvert la porte de la salle de bain et que j'ai manqué de te percuter alors que tu ne portais qu'une serviette nouée à ta taille.
Je ne ressens rien non plus lorsque tu me demandes de t'apprendre tout ce que je sais sur le vin et que tu m'écoutes vraiment parce que ce n'est pas juste une excuse pour qu'on couche ensemble mais parce que tu t'intéresse vraiment aux choses qui m'intéressent.
Et ça m'a laissé de marbre quand tu m'as enlevé ce petit fil coincé dans mes cils puis que tu m'as fait un petit bisou sur la joue avant de te retourner et de partir les mains derrière ton dos. Non ta candeur ne m'a pas laissé tout penaud tandis que Seb se foutait de ma gueule. Ce n'était pas moi, le type qui a rougi.
- Tu sais que je peux te faire penser à autre chose, au moins pendant un petit moment ?
Seb me sort de mes pensées. Avec son pied, il caresse mon mollet.
- Un mot et je m'occupe de toi beauté. Ça te ferait du bien de combler ta frustration, je te l'ai déjà dit.
Je souris en continuant à fumer.
- Merci pour la proposition, je vais y réfléchir.
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Le jour du gratin/mousse au chocolat. (Harry a interrompu Louis et Johnny puis demandé à Louis d'arrêter de le séduire).
J'ai couché avec Seb et j'ai pensé au bouclé.
J'ai couché avec le pote du bouclé, et j'ai pensé au bouclé.
J'allais recoucher ce soir avec le gars et le bouclé a débarqué.
Bordel mais fous-moi la paix !
Tu es un ange et c'est un enfer !
Je peste en fumant à la fenêtre de ma chambre. Johnny est parti, Seb est parti et ne reste que ma colère orientée vers une seule chose : ces boucles qui m'obsèdent à présent et que je n'ai encore jamais touchées.
Je rêve de les saisir à pleines mains tandis que sa bouche s'occupe de moi.
Je suis en colère Harry. Parce que ce soir tu m'as demandé de garder mes distances mais putain c'est toi qui a déboulé dans ma vie, dans ma tête, et qui est en train d'y foutre un bordel monstre.
Moi je me tiens droit 99% du temps. Mais ouais, il y a 1% du temps où je me laisse aller et je te drague un peu.
1% ce n'est rien par rapport à tout ce que je pourrais faire. Tout ce que je voudrais faire. Tu es la tentation même. Je me sens tellement faible à ton contact.
Et tu es toi-même un petit diable. Je te vois venir chercher ce 1% de faiblesse.
Tu aimes quand je te regarde comme si j'allais te croquer, tu veux que ma main s'attarde sur tes épaules, tu viens chercher ma présence.
Tu cherches à ce que le 1% devienne 2 puis 3 puis 10%... Et après tu dis que je t'allume.
On dirait que tu veux me rendre fou de toi. Et putain mais tu vas y arriver si tu continues.
En plus de ce que tu fais consciemment, il y a tout ce que tu fais sans même t'en rendre compte. Quand tu chantonnes le soir pendant que je cuisine avec Mary, quand tes yeux doux se posent avec bienveillance sur moi, quand tu te balades en boxer dans la maison, quand tu ris, quand tu danses, quand je t'écoute à travers le mur jouer de la guitare jusqu'à ce que je m'endorme...
Une putain de tentation ambulante.
Mon putain de point faible.
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Le lendemain.
- Bon écoute Tommo, je ne sais pas ce que t'as mais on va la refaire parce que t'es pas dedans du tout, déplore le réalisateur.
Je frotte mon visage mais je me fais enguirlander parce que je suis maquillé et que ça va tout gâcher. Du coup ça m'énerve et ça me donne encore plus envie de frotter mon visage.
- Putain mais vous me faites tous chier ! je gueule contre le réalisateur et la maquilleuse.
Celle-ci sursaute et je culpabilise. Un sentiment qui m'est en ce moment très familier.
- Pardon, je suis un peu fatigué, je m'excuse.
Un peu fatigué et un peu saoulé aussi parce que la copine d'Harry a déboulé ce matin ou dans la nuit. Je n'en sais rien et je m'en fous en fait, le résultat est le même : le bouclé m'a demandé d'arrêter de le draguer et il a retrouvé sa meuf.
Ma journée est déjà horrible comme ça et la scène qu'on tourne en ce moment est particulièrement difficile.
- T'es censé avoir perdu Léo putain. Il est mort. C'est fini, et c'est à cause de toi. Tu sais ce que ça veut dire "chialer comme si ton cœur se déchirait" ? demande Chris.
Je sais ce que ça veut dire. J'ai vécu ça deux fois. Et les gens qui disent que ça se passe au niveau du cœur n'ont clairement jamais connu chose pareille.
Cette douleur là, c'est dans le creux du bide qu'elle vient se loger. Elle te déchire les entrailles. Elle t'éviscère et te laisse crever sur place.
Je sais que je vais devoir aller chercher dans mes souvenirs cette sensation, froide et violente, si je veux enfin arriver à faire ma prise.
Mais je sais aussi que c'était les deux pires moments de ma vie et je n'ai pas trop envie d'en raviver le souvenir.
Ça me fait toujours déprimer ces conneries. Ça, plus le rôle de Tom qui est difficile, plus Harry et sa copine... Aujourd'hui, je me sens fébrile.
On recommence la prise une ou deux fois, et je sors enfin l'émotion que le réalisateur venait chercher.
Me voilà libéré de mes obligations jusqu'à demain. Mais la perspective de rentrer à la maison ne me plait pas. Parce que ce soir, Harry ne jouera pas de la guitare dans sa chambre. Parce qu'il ne sera pas disponible pour me faire oublier la douleur que j'ai ravivée et qui tord mes boyaux depuis tout à l'heure
Non, il vont sûrement s'envoyer en l'air et je refuse d'entendre cela.
Je me commande donc un taxi sans même repasser par la maison. Celui-ci arrive 15 minutes plus tard et je lui demande de m'emmener sur Londres.
Dans le véhicule, j'envoie un texto.
De Louis
Dispo aujourd'hui ?
Pendant que j'attends la réponse de Lucas, je me perds dans mes plus noires pensées. Tout s'emmêle entre Tom, Raphaël, Harry et Léo. Tout me semble si confus. J'ai besoin de boire et de disparaître.
De Louis
Oublie mon message, changement de programme. À plus.
- En fait, conduisez-moi à l'aéroport, je demande subitement au chauffeur.
J'atterris à Paris en début d'après-midi. Dans le jet privé que j'ai réservé, j'ai avalé whiskies sur whiskies. Si bien que, lorsque je foule le sol français, je manque de m'étaler sur le tarmac et j'ai vaguement conscience de ce que je fabrique.
J'arrive toutefois à me jeter dans un taxi qui me conduit à Vernon, une commune à 1 h 20 de Paris. En sortant de la bagnole, j'hume l'air de la campagne normande et ça me remet un peu les idées claires. Mais ça ne va pas durer car la bouteille de whisky que j'ai emporté avec moi va rapidement être vidée.
J'ai demandé au taxi de m'arrêter en centre-ville et je préfère continuer à pied. Je marche dans les ruelles d'un pas mal assuré, les décors autour de moi tanguant fortement. Je passe le pont enjambant la Seine et j'aperçois le vieux moulin au loin. Je continue et pénètre dans le cimetière.
Il me faut un peu me concentrer pour trouver la tombe de Raphaël, je n'y étais jamais revenu depuis son accident. Je n'ai jamais ressenti le besoin de venir me recueillir sur sa tombe.
Je le fais vivre dans mon cœur, où il est l'unique locataire. Le seul à avoir le double des clés.
Quand j'arrive devant son emplacement, mes yeux se posent sur l'inscription comportant son nom, son prénom, ses dates de naissance et de mort en lettres dorées. Des fleurs fraîches remplissent un vase. Certainement sa maman. Et je me rends compte que, moi, je suis venu les mains vides.
Alors je m'approche, à peu près au niveau de ce qui doit être sa tête, je fais couler quelques gouttes de whisky.
- Simul et Singulis cariño, je lâche avant d'apporter le goulot à ma bouche et de boire une grande rasade.
- Simul et singulis, je répète dans un murmure comme si lui me répondait.
J'ai toujours trouvé ça bizarre, de parler à une pierre tombale. Mais là, je suis complètement bourré et ça me semble naturel.
- Tu sais comment je suis venu jusqu'ici ? Taxi-jet-taxi. Eh ouais, je gagne maintenant assez d'oseille pour faire ce genre de conneries, je me marre en m'asseyant sur le rebord froid en marbre mais je dois m'y reprendre parce que je me suis à moitié affalé.
- Tu te rappelles quand on se partageait le petit clic-clac chez Pierre avant que je tourne mon premier film et que je touche mon premier cachet ? On n'avait pas un rond pour vivre à Paris mais on s'en foutait parce qu'on venait de se rencontrer et qu'on pouvait vivre d'amour et d'eau fraîche.
Je souris doucement, les souvenirs de cette époque me revenant en tête. Mais, tout aussi lentement, mon sourire s'efface pour laisser place à la mélancolie et la tristesse.
- Si je suis là, c'est pour te dire quelque chose. Je suis désolé, je suis tellement désolé, faut que tu me croies amour...
C'est ça que je suis venu faire : m'excuser. Parce que j'ai merdé. Tellement merdé qu'il fallait que je vienne lui dire.
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Août 2013. Paris.
Par une chaude après-midi.
Mon bras autour de sa taille, le sien autour de mon cou, Raph et moi marchons sur les pavés parisiens avec ce sentiment de toute puissance que dégagent souvent les gens qui s'aiment.
On a passé une partie de la journée à faire l'amour et là, on se rend à Bastille pour boire des verres avec des amis.
- Si je meurs, je t'autorise à refaire ta vie, je réponds à Raph, qui vient de me poser la question. Mais que si tu sors avec un mec plus moche et plus nul que moi, comme ça nos amis diront : "Ouais il est cool le nouveau mec de Raph mais Louis était vachement mieux".
- Okay, de toute façon, je ne trouverai personne de mieux que toi !
On s'embrasse tout en marchant et on se sourit lorsque nos lèvres se séparent.
- Moi, si je meurs, je t'interdis de refaire ta vie cariño ! Ce sera moi et juste moi à jamais ! plaisante Raph.
- Oh, je ne vous savais pas aussi égoïste ! je rétorque, choqué.
- Quoi ? C'est égoïste de te vouloir que pour moi pour toujours ?
Raph prend sa voix de théâtre et s'éloigne pour monter sur un petit muret.
- C'est égoïste, monsieur - il fait maintenant de grands gestes avec sa main gauche, la droite posée sur le cœur - de vouloir que tu ne te souviennes que de mes bras, que de mon odeur, que de ma voix...
Il saute du muret pour s'accrocher maintenant à un lampadaire.
Une mamie qui promène avec son chien sursaute devant sa fougue et lui jette un regard noir. Raphaël l'ignore.
Il se tient à une main et tend son corps dans le vide en me fixant. Il n'a d'yeux que pour moi.
- C'est trop demander que de vouloir que tu ne te rappelles que de mon rire ?
Il rit en forçant le trait et, moi, ça me fait rire pour de vrai.
Alors je grimpe à mon tour sur le candélabre pour me hisser à sa hauteur sous le regard ahuri de la mamie. Comme lui, je m'accroche à une main et je me penche du même coté que lui. Et moi aussi, j'y vais de ma petite interprétation théâtrale.
- Oui, monsieur, c'est absolument égoïste, mais divinement romantique ! Laissez-moi vous embrasser pour sceller cette promesse que je vous fais ce jour, de vous rester fidèle à jamais...
Alors je pivote un peu pour que nos lèvres se rencontrent et on s'embrasse sous les rayons du soleil. On a l'air de deux idiots suspendus à un vieux lampadaire mais on sourit tandis que nos lèvres ne font qu'un.
- J'ai soif, on y va ? je finis par demander à bout de souffle.
- Amour, encore un peu de tes lèvres, me réclame Raph alors je reprends mon souffle et je les lui offre bien volontiers.
Comment pouvait-on savoir que tu exploserais ta voiture contre un platane, sur une route départementale entre Vernon et Paris, moins de 10 mois après cette conversation ?
On avait 22 ans et on se croyait éternels.
Je sais que, ce jour-là, nous plaisantions et que nous flirtions ensemble, avec nos mots et nos lèvres. Je sais qu'une telle promesse, faite alors que nous n'étions que des enfants, n'est pas censée tenir face aux épreuves de la vie. Que personne, même pas lui, ne me jugera si je ne la respectais pas.
Mais demeure le souvenir, vivace, de cette chaude après-midi où nous nous sommes tant aimés dans les rues de Paris.
Et cela fait sept ans que je suis bloqué dans cet espace-temps.
Aujourd'hui je suis seul. Et je me sens seul.
Mais pour l'heure, je ne m'en rends même pas compte. Je me complais dans cette situation, je fais tout pour rester bloqué.
C'est Harry qui me fera ouvrir les yeux bien plus tard, à force de patience et de douceur. C'est lui qui m'aidera à briser cette promesse qui a fini par m'enfermer. Il me montrera qu'il existe, dans le présent, un endroit sûr où je peux aimer et être aimé, sans oublier le passé.
Pour l'heure, je suis juste un mec paumé et bourré, qui culpabilise et s'apprête à confesser sa faute à son copain.
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- Je suis désolé, je suis tellement désolé, faut que tu me croies amour... je lâche en buvant une nouvelle gorgée de whisky. Je te jure que je fais tout pour m'en souvenir mais j'ai beau essayer, ça ne vient plus. Je dois me l'avouer, te l'avouer à toi aussi... Je ne me souviens plus de ton rire.
J'éclate en sanglots, enfouissant ma tête dans mes genoux.
J'adorais son rire putain, je sais qu'il était contagieux et me faisait rire à chaque fois. Il me provoquait cette petite sensation étrange dans le ventre. Je me sens tellement mal d'avoir perdu cela. J'ai l'impression de le trahir lui et sa mémoire.
J'essuie mes larmes mais d'autres reviennent de plus belle. De la morve coule de mon nez. Je ne suis qu'une loque. Et je me sens tellement mal.
- Je suis désolé, je-j'ai rien fait. Je te jure que je ne l'ai pas cherché. Je-je sais pas pourquoi c'est son rire à lui que j'entends maintenant.
Je tape avec ma paume de main sur mon front, je tape et je tape encore, de plus en plus fort, jusqu'à ce qu'un cri de rage remplace mes larmes.
- Arghhhh fait chier !!!
Je m'en suis rendu compte dans le taxi qui me menait à Londres. Je n'entends plus le rire de Raph.
C'est la petite musique d'Harry que j'entends maintenant dans mon oreille.
Au départ, j'étais attiré par son physique. C'est à son corps, à ses lèvres, à ses yeux, que je pensais quand il m'arrivait de me toucher le soir dans mon lit. Mais désormais, sa voix hante mes oreilles.
Sa voix quand il chante, quand il parle, quand il crie parce que je lui pince les côtes. Je l'entends aussi murmurer "Lou..." quand je m'apprête à jouir.
Et quand je pense à un rire, c'est le sien que j'entends au plus profond de moi.
Le rire du bouclé qui me fait rire et qui me fait quelque chose dans le bide.
- Je-Je ne sais pas comment c'est arrivé cariño. Je vais mettre fin à tout ça, faut que ça s'arrête, je dis devant Raph.
Je n'ose même pas dire "je te le promets" car, même bourré, je ne suis pas certain d'y arriver. Mais il faut que j'essaie.
Car je flippe qu'après son rire, ce soit le visage de Raphaël que j'oublie.
Ce dernier est greffé derrière mes paupières depuis toutes ces années. Il me suffit de fermer les yeux pour le voir. Alors que pour me représenter Harry mentalement, je dois diriger mes pensées vers lui.
Mais déjà, j'ai plus de mal à me souvenir de la couleur des yeux de Raphaël tant ceux du bouclé frappent mon esprit, s'invitent dans ma mémoire et aussi mon cœur.
Plus Harry prend de la place, plus j'ai l'impression de perdre mon copain et je ne suis pas prêt.
Je reste un moment à pleurer sur mon sort, à répéter que je m'excuse et à boire et boire encore.
La nuit est déjà bien tombée lorsqu'épuisé et minable, je toque chez les parents de Raph.
C'est sa mère qui m'ouvre et elle m'attire directement contre elle, sans poser de questions. On s'est perdus de vue depuis l'enterrement, j'ai décliné leurs invitations pour les fêtes, les anniversaires de Raphaël ou pour les messes anniversaire. Je n'ai plus répondu aux coups de fil. J'ai filé à Los Angeles après leur avoir fait livrer toutes les affaires de Raph. Mais sa mère fait comme si elle n'avait rien à me reprocher. Comme si je n'avais pas disparu
Elle me fait un thé et on parle peu. On n'a pas besoin de ça. Puis elle me propose de dormir sur le canapé ou dans la chambre de son fils et je choisis son lit parce que c'est toujours là qu'on a dormi tous les deux quand on venait ici.
Rien a bougé dans la pièce et je pleure à nouveau devant les photos qui s'étalent sur les murs. Des images de lui et de nous beaucoup, au début de notre relation, avant que nous ne vivions ensemble.
Je me couche exténué dans les habits de Raphaël que j'ai trouvé dans son placard, avec le cœur au bord du précipice.
C'est la première fois que je me sens déchiré entre deux hommes, entre le passé et le présent.
Et tandis que je tremble de trouille, tandis que cette peur irréfléchie de l'oubli et de la trahison consume mon être, je m'endors en pensant à Raphaël, que j'essayais de retrouver en venant ici ; mais aussi en pensant à Harry, que j'essayais de fuir.
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Je suis reparti de Vernon le lendemain midi. J'ai refait le trajet inverse jusqu'à Londres, prenant soin d'éviter tous les appels et messages des copains. Je n'ai pas souhaité rentrer tout de suite. Cela voulait dire revoir Harry et sa copine.
J'ai marché dans Londres, caché sous mon sweat à capuche, et j'ai poussé la porte d'un tatoueur. Je sais que le rôle de Tom Wagner est en train de changer ma vie, pour le travail qu'il me demande, pour l'engagement que c'est, pour sa difficulté. Mais aussi parce que, grâce à lui, plein de nouvelles personnes sont entrées dans ma vie, une en particulier. Je sais qu'il y aura un avant et un après ce film dans ma carrière et dans ma vie certainement aussi.
Le tatouage réalisé, je me suis rendu chez une connaissance pour acheter de quoi me mettre bien. Tant qu'à revoir Harry ce soir en rentrant, autant être complètement stone pour m'anesthésier jusqu'à demain matin.
Maintenant, je suis dans un bar plutôt branché et comme hier, j'enchaîne verre sur verre après m'être fait deux lignes dans les chiottes.
Je suis tranquille, en train de parler avec le serveur quand un groupe de jeunes s'approche du comptoir. Ils me demandent des photos et autographes et je me prête au jeu parce qu'ils ont l'air cool et puis je suis trop déchiré pour vraiment réfléchir.
- Comment il est, Harry Styles, en vrai ? demande l'une des filles.
- Putain de beau, je réponds en regardant mon verre et elle et ses potes explosent de rire.
Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ?
- Okay, ouais, je suis complètement d'accord avec ça ! rit-elle. Mais, il est sympa j'espère ? J'veux dire, il est aussi sympa en vrai que ce qu'il dégage à la télé ?
Oh, c'est ça que tu voulais savoir.
- Ouais, très. Très très sympa. Après est-ce qu'il est aussi sympa que ce qu'il est beau ? J'en sais rien. Parce qu'il est quand même putain de trop beau !
Mais ferme ta gueule Tommo putain.
- Oh oh, tease un mec du groupe. Vous êtes ensemble ?
- Non, haha, je ris en essayant de faire bonne figure. Je plaisantais bien-sûr. Harry est très sympathique et lui et moi, on est juste de bons potes.
- Tu peux le dire que c'est une tarlouze comme toi mais toi, au moins tu le fais pas, alors que lui il s'habille comme une fille...
La voix provient de derrière moi et je me retourne pour faire face à un gros con en maillot de rugby.
Putain d'homophobe bourrin et décérébré fini au pipi.
Le groupe de jeunes proteste contre ce type mais je les calme en me levant et en avançant vers lui.
C'est à moi de régler ça. Je suis haut et je me sens putain de puissant.
- Je me doute que tu rêverais de te faire prendre par lui ou par moi mais désolé, t'es un trop gros trou du cul. Tu vois j't'explique, quand c'est trop étiré, et ben c'est comme baiser une bouée. Ça sert à rien. On aurait beau s'y mettre tous les deux, ça ne suffirait pas. Toi, c'est au moins 20 bites qu'il faut pour un trou de balle pareil alors avec tes copains du rugby ça fait déjà 14, plus nous, 16, mais tu vois c'est toujours pas suffisant...
Ses deux mains sont tout à coup sur mon polo et il me saisit fermement en grognant tel le bœuf qu'il est pour me plaquer contre le premier mur qu'il trouve.
Les gamins commencent à gueuler d'inquiétude mais moi j'ai de la rage qui coule dans mes veines et je provoque le type davantage. Je veux qu'il frappe le premier pour pouvoir le frapper d'avoir insulté Harry.
- Houlà sans préliminaire mon cochon ! Tu veux me prendre contre ce mur ou c'est moi qui commence ?
Il s'apprête à me cogner mais j'arrive à esquiver par je ne sais quel miracle vu la coordination approximative de mes mouvements et c'est moi qui lui assène un coup de poing phénoménal dans la tronche, explosant son arcade.
Le gros con trébuche et je me jette sur lui pour le terminer malgré le sang qui lui coule déjà sur le visage.
Mais je sens subitement plusieurs mains sur moi et des marrons qui commencent à pleuvoir. Je rends coup pour coup en frappant à l'aveugle mais ils sont je ne sais pas combien sur moi et je finis par m'effondrer.
Ça ne les arrête pas et ils y vont maintenant à coups de pieds, jusqu'à ce que des videurs interviennent.
Pour la 3e fois en moins de 2 minutes, on m'agrippe par le polo et, je me fais virer de la boîte manu militari. Les jeunes sont alors plusieurs à sortir pendant que moi et le groupe de rugbymen on s'insulte copieusement dans nos langues respectives.
- Je suis désolée, c'est de ma faute, je n'aurais pas dû parler d'Harry, sanglote la jeune fille. C'est à cause de ça qu'il s'en sont pris à toi.
Alors j'oublie les abrutis qui continuent à brailler de l'autre côté de la route et à me provoquer et je sèche vivement les larmes de la fille.
- Ne t'excuse jamais pour avoir pensé à Harry et avoir voulu parler de lui. Il mérite que le monde entier parle de lui, okay ? je lui dis en souriant mais je m'aperçois que ma lèvre me fait un mal de chien et qu'elle est sûrement fendue.
C'est à ce moment-là que je remarque que des clients ont dégainé leurs portables et qu'il y a aussi un ou deux paparazzi. Les images vont très vite être en ligne.
Je prends alors conscience que c'est la merde. Je suis bourré, défoncé, couvert de sang et je viens de me faire sortir par des videurs. J'ai disparu pendant 36 heures et j'ai fait perdre à Chris une journée de tournage. Il va me tuer. Et mon agent va me tuer. Et les gars vont me tuer.
Est-ce qu'Harry va me tuer ? Ou, trop occupé à embrasser sa copine, il ne s'est même pas rendu compte de mon absence ?
Je hèle un taxi et m'y engouffre avant de prévenir Seb que j'arrive et que je préfère ne pas croiser le British.
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J'attends sagement dans la salle de bain que Seb remonte. Il est parti parler à Chris qui vient de faire irruption dans la maison pour me défoncer.
Je n'écoute pas franchement ce qu'ils se disent mais j'entends que ça gueule.
Moi je contemple le pansement qui recouvre ma brûlure et je joue avec les petits fils qui pendent. Il va falloir le refaire. Mais si j'appelle Harry, il va me voir comme ça.
- Lou...
Je crois au départ que ça se passe dans ma tête mais en levant les yeux vers la porte, je m'aperçois qu'Harry vient de me rejoindre.
Je suis bien trop KO pour protester contre sa venue. Et honnêtement, je suis content de le voir.
Sa main vient se poser sur mon menton et il me fait redresser la tête. Ses yeux inquiets passent sur mes blessures.
Vue sa tronche, ça ne doit pas être beau à voir.
- Bouge-pas, il m'ordonne.
De toute façon, je ne compte pas bouger d'ici. Je crois que je vais dormir sur ce tapis tellement j'ai mal partout.
Il récupère sa propre serviette de bain qu'il mouille sous l'eau chaude. Il se plante à nouveau devant moi et me demande de me relever.
Je serre les dents pour ne pas lui montrer que ça m'est difficile et il commence à essuyer le sang séché sur mon visage.
Quand il passe sur ma lèvre ouverte, je grimace et mes deux mains saisissent en réflexe son avant-bras pour qu'il arrête ça.
Alors Harry fronce les sourcils et rend ses gestes encore plus doux. Il reste concentré sur mes blessures et ça me va très bien si nos regards ne se croisent pas.
Je ne veux pas lire la déception ou le dégoût dans ses yeux. Y voir de l'inquiétude me fait déjà culpabiliser.
Et allez, encore ce sentiment. Je culpabilise pour Raph, je culpabilise pour Haz. Je culpabilise et moi ? Moi, putain, j'veux quoi ?
Je ne me rends pas compte que mes mains sont toujours agrippées à son bras. Je suis trop occupé à regarder la boucle qui pend dans le vide près de son front pendant qu'il penche sa tête pour me soigner.
Je ne sais pas si c'est la drogue ou quoi, mais je me sens lucide. Plus conscient que jamais. Je sais que, malgré ma fuite en avant et mon absence, mes doigts brûlent d'envie de tracer librement leur chemin au milieu de ces boucles folles.
C'est ça que je veux. Vérifier par moi-même si ses cheveux sont aussi soyeux que je l'imagine.
Je sais que tout cela est ridicule et mal. Que beaucoup de monde compte sur moi. Chris, Raph, Harry. Et que je dois continuer à bien me tenir.
Mais si je m'écoutais moi, c'est ce que je ferais. Mes doigts repousseraient cette mèche rebelle. Je sourirais à ce geste et ça rouvrirait certainement la plaie sur ma lèvre. Et mon sang laisserait comme une petite empreinte rouge sur les lèvres d'Harry et partout où ma bouche se poserait.
L'embrasser me ferait mal.
Mais le regarder sans pouvoir le faire, c'est ça le véritable enfer.
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J-3 avant la fin du tournage.
Franchement, je mériterais une médaille pour avoir survécu à ce rôle et à ces huit semaines en présence du bouclé.
J'ignore comment j'ai fait ces deux choses. Tom Wagner a bien failli avoir ma peau. Harry aussi.
Il y a une dizaine de jours, on s'est embrassés. Enfin, je l'ai embrassé puis on s'est embrassés et il s'est caressé et il a joui, sa bouche tout contre mes lèvres.
Depuis, je suis à nouveau en panique. Pas pour cela non, ça c'était super.
Mais tandis qu'on échangeait ce baiser torride, mes mains ont filé dans ses cheveux.
Et bordel, c'était encore plus doux que ce je pensais.
Je voudrais recommencer.
Rester à bonne distance devient un véritable supplice surtout que ce french kiss a comme réveillé le British. Je sais que ça a fait tomber ses dernières réticences, que ça a annihilé son cas de conscience.
Il se posera toutes ces questions de morale quand il rentrera chez lui. Pour le moment, il veut plus. Il veut que je vienne à lui.
Je sais aussi que notre complicité lui manque. Car forcément, on rigole moins et on se parle moins.
C'est moi qui reste distant pour éviter que ça ne dérape. Mais hier, il m'a engueulé. Il m'a reproché de décider pour nous deux au lieu de laisser les choses se faire. Puis il m'a embrassé violemment et trois orgasmes dans mon lit n'ont pas suffit à me faire oublier la puissance de ce baiser.
C'était comme un aperçu, de sa force, de son désir et tout ce qu'il pourrait me faire si j'approchais.
Et ce soir, mes pas m'ont conduit jusqu'à sa porte.
Je toque trois petits coups et il me dit d'entrer.
Harry est en train de faire ses bagages. Dans trois jours, on se sépare tous.
Il me parle de la scène qu'on doit tourner demain, la dernière nous concernant. Il se redresse pour faire comme il a l'habitude de faire maintenant : réciter une partie de son texte devant moi et attendre mon retour.
Je souris en voyant les progrès qu'il a faits en huit semaines et, surtout, la confiance en lui qu'il a prise.
Il termine sa longue réplique et s'écrie "Talaaaa !" en écartant les bras comme pour dire "fin du spectacle".
- Alors ?
Comme d'habitude, il me demande mon avis mais cette fois, je n'ai pas envie de parler cinéma.
Tout bascule en une seconde.
Une seconde durant laquelle sa fossette apparaît tandis qu'une boucle indisciplinée retombe sur son front.
Alors j'envoie tout valser.
Chris, Raphaël, Harry et sa meuf. Ma trouille, ma mauvaise conscience, ma culpabilité.
Je n'écoute que la mécanique du cœur qui me pousse à réduire la distance qui me sépare de son cou.
J'ignore pourquoi le premier geste que je fais, c'est de lécher sa peau à cet endroit là avant d'y poser mes lèvres. Mais j'ai littéralement envie de le goûter à nouveau.
Je suis en roue libre. Cette fois, tous mes garde-fous ont pété. Seul Harry peut défaire ce que je suis en train de faire.
- Arrête-moi, je murmure en mordillant son cou tandis que mes doigts commencent à déboutonner sa chemise.
- Harry, dis-moi stop.
Ma phrase n'est accueillie que par du silence. Je lui offre une nouvelle porte de sortie. Je sais que si on continue, il ne pourra plus se passer de moi alors que je n'ai rien à lui offrir.
Haz, ne soit pas idiot, repousse-moi maintenant si tu ne veux pas souffrir plus tard.
- J'ai trop envie mais on ne devrait pas faire ça, je le mets en garde tout en ouvrant tous les boutons un à un.
Je suis un mauvais garçon. S'il s'attache, il va souffrir et notre amitié va en payer le prix. S'il rentre tranquillement chez sa copine après ça, il devra vivre avec ce qu'il a fait et je sais qu'il est bien trop gentil et intègre pour bien le vivre.
Mais Harry reste mutique et n'interfère pas entre moi et son corps.
Il nous laisse gérer ça.
Je le pousse sur le lit et m'installe à califourchon sur son bassin. Mes mains filent sur son torse et la sensation est différente que sur le plateau.
Là, ce n'est pas du cinéma. C'est le vrai Harry qui frissonne sous mes doigts et contracte ses abdos parce que ça le chatouille. Là je suis sûr qu'il ne joue pas.
Je souffle pour me canaliser, je me sens bouillonnant, brouillon.
Calme-toi bon sang !
Mais bordel, je le veux. Maintenant qu'il est sous moi, je me rends compte à quel point je voulais ce moment.
J'ai faim de lui et ma bouche suit rapidement mes mains, échouant dans son cou, sur son pec, le long de son sternum.
C'est quand j'approche de ses côtes qu'il tressaute et ça me fait sourire alors je décide de le mordiller là. Rapidement, ma morsure se transforme en suçon.
Je mets quelques secondes à réaliser que je suis en train de le marquer alors qu'il rentre chez lui dans quelques jours.
Je redresse la tête et nos regards se croisent.
- Haz, arrête-moi avant que j'aille trop loin...
Je le supplie avec mes yeux. Mais pour toute réponse, Harry me fait juste un petit "non" de la tête.
Haz, si je te touche, on n'arrivera plus à s'arrêter tant qu'on n'aura pas couché ensemble. Et peut-être qu'après, on n'arrivera même plus à s'arrêter. Est-ce que t'as conscience de cela ?
Vu le petit sourire que tu me fais, évidemment que t'en as conscience. Ça se voit que tu veux déjà plus. Tu ne sais pas dans quoi tu t'embarques mais tes désirs sont des ordres.
Alors je replonge sur sa peau chaude et j'aspire un peu plus fort pour lui laisser une vraie marque. Mes mains, elles, déboutonnent son jean de façon affamée et j'en plonge rapidement une dans son boxer pour le caresser.
J'observe sa réaction et ses deux billes vertes me fixent avant de ployer sous le plaisir et de rouler vers le fond de ses paupières. Ses yeux maintenant fermés, je regarde son visage qui réagit à mesure que je lui fais du bien.
Mais subitement, il saisit mon poignet et je suspends mon geste.
Merde, il veut que j'arrête, il regrette déjà.
Harry inspire un grand coup et il finit par poser sa main sur la mienne pour m'inciter à reprendre. Alors je continue à profiter du spectacle de sa beauté. Heureusement que la lumière est allumée, je peux m'apercevoir qu'il est encore plus beau quand le plaisir le traverse de part en part.
Ses joues légèrement rosées, sa bouche légèrement entrouverte. Ses brefs sourires qu'il fait tandis qu'il prend son pied, faisant apparaître sa fossette quelques secondes par-ci, quelques secondes par là.
Oh pourquoi est-ce que je n'ai pas fait ça dès le premier soir ? Si je n'avais pas voulu être un type bien, j'aurais pu recommencer tout au long de ces huit semaines. J'aurais fini par connaître tout ce qu'il aime pour pouvoir lui faire encore et encore. Ma gentillesse me perdra putain.
- T'es beau, regarde-moi, je lui murmure penché sur lui.
Harry ouvre les yeux et c'est comme si on se retrouvait à nouveau dans ce lit pendant le tournage. Nos visages sont si près que nos yeux ne peuvent pas s'éviter.
Alors on plonge dans le regard de l'autre et ce qui se passe là est au moins aussi fort que ce qu'il se passe sous son jean.
On n'a pas besoin de parler, on revit à cet instant les huit semaines qui viennent de s'écouler. C'était frustrant mais grisant. C'était sage mais intense à la fois. C'était long et en même temps si rapide.
C'était soudain, inattendu, flippant mais ça en valait la peine.
Ça valait le coup de ne pas te sauter dessus dès le départ, avant de m'être attaché à toi.
Certains diraient que nous sommes fous de craquer maintenant alors qu'on va se séparer.
Que quelques secondes d'orgasme ne sont rien par rapport à huit semaines d'efforts et la vie de couple qui t'attend à Londres.
Mais tu viens de jouir sous mes caresses et j'ai posé ma main sur ta bouche pour étouffer tes jolis gémissements tandis que tu me regardais, choqué par la violence de ton orgasme. Et rien que ça, ça valait la peine de tout foutre en l'air à trois jours de la fin.
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Par une pluvieuse journée d'octobre.
Jour de départ.
Dire que Miles et Tim nous ont gâché notre première fois est un doux euphémisme. C'était d'ailleurs peut-être la seule occasion qu'on n'aura jamais et il a fallu qu'ils viennent nous emmerder.
J'étais dans la salle de bain en train de chercher des capotes et je n'ai même pas eu le temps de retourner à la chambre pour prévenir Harry qu'ils arrivaient.
À les entendre rire, je comprends qu'ils n'ont pas dû tomber sur Hazzaconda. Ouf.
Bon ben, il faut s'y résoudre, notre séance de sexe est tombée à l'eau. Harry et moi on n'aura même pas eu le temps de nous envoyer en l'air avant de nous quitter.
Mais c'est peut-être pas plus mal en fait car je ne suis pas sûr que j'aurais pu, à la fin, me détacher de son corps.
Je retrouve les garçons et reste dans l'encadrement de la porte tandis qu'ils se chamaillent tous les trois. Tout à coup, Haz se redresse dans le lit, en tenue d'Adam. Miles et Tim s'enfuient sans demander leur reste.
Debout sur le lit, Harry me regarde haletant. Les garçons lui ont envoyé de la flotte sur le visage. Ses boucles sont trempées et l'eau ruisselle sur son corps.
J'observe la scène et j'ai comme un sentiment de déjà vu.
Harry me sourit et j'apporte mes mains devant moi pour prendre une photo mentale de cette scène.
Est-ce que je sais, à ce moment là, que cette image va se fixer derrière mes paupières et qu'elle va remplacer, sans que je ne puisse rien y faire, celle de Raphaël ?
Non. Ça, je m'en rendrais compte quand je serai chez moi, à des milliers de kilomètres de lui.
Est-ce que je sais que je combattrais, pendant des mois, ces sentiments pour éviter de trahir mon premier amour, et pour éviter de nous faire souffrir avec Harry ?
Non. Pour l'instant je crois encore que je maîtrise les choses et que rien ne changera dans ma vie.
Est-ce que je sais que je suis en train de regarder le futur homme de ma vie ?
Non.
Bien sûr que non.
À ce moment là, je crois que plus jamais je ne vais le revoir nu. Et qu'on va juste redevenir des potes.
Alors, avant de le quitter, je mémorise, une dernière fois, l'image.
Celle d'un bouclé aux cheveux mouillés, qui me regarde avec ses yeux si clairs, et qui vient de me réveiller.