Louise et les filles me suivirent dans les escaliers, avides de potins. Je m'assis sur le lit, à côté de la valise de Noah, mal à l'aise.
— Allez, raconte !
— C'est loin, peu importe, tentai-je...
— Pourquoi tu ne m'as rien dit ? C'est arrivé quand ? insista Louise.
— C'était pendant les vacances après le lycée, le jour où mon chien est mort...
Mon secret avait le don de plomber l'ambiance.
— Quoi ? Mais, j'arrive pas à le croire... souffla Louise en s'asseyant à côté de moi.
— Comment c'est arrivé ? Je croyais que vous vous détestiez depuis l'école ? demanda Lucie.
— Il m'a trouvée à un arrêt de bus, je pleurais comme un bébé parce que je sortais de chez le véto. Et il s'est arrêté pour me proposer de me ramener. J'ai accepté. Et puis on a parlé, gentiment... Et finalement je suis allée chez lui regarder des films, je suis restée tard et voilà, je vais pas vous faire un dessin.
Je me cachais le visage dans les mains et parlais vite sans oser les regarder dans les yeux.
— J'étais sûre que ça arriverait, lança Louise.
— C'est arrivé qu'une fois, rien qu'une et ça n'arrivera plus jamais, dis-je, sûre de moi.
— Je vous trouve chou tous les deux, on sent qu'il y a une tension sexuelle de malade entre vous, délira Justine.
— N'importe quoi !
— Oh, allez, avoue qu'il est hot, on dirait un baroudeur ! Genre un Indiana Jones moderne.
— Tu te souviens que ton mec est juste en bas à côté de ton aventurier ? dis-je, faussement sérieuse.
— Je sais, j'ai choisi mon plat, mais je regarde un peu le menu, comme ça, pour le plaisir.
J'explosai de rire, le vin aidant. Les filles firent de même et on s'écroula les unes sur les autres dans le lit en manquant presque de souffle à force de rire.
Après quelques minutes à ricaner, je décidai de retourner jouer avec l'idée de me venger. Et en arrivant dans le salon, les filles derrière moi, j'attrapai mon verre et me tournai vers Noah. Il se redressa aussitôt et reposa son verre, comme s'il voulait se préparer à m'affronter. Juste avant que je ne me plante devant lui, il se frotta nerveusement la nuque en cherchant du soutien dans le regard de nos amis qui faisaient mine de nous ignorer sans être très convaincants.
— Alors, je n'ai jamais... commençai-je en faisant semblant de réfléchir sans jamais le quitter des yeux. Je n'ai jamais viré une fille de mon lit quelques minutes à peine après sa première fois.
Personne n'osa rire, même pas lui. Et il fit un petit mouvement avec son verre, comme pour me féliciter, avant de boire. Ensuite il se leva, se plaça devant moi, très, très près... Je sentis mon cœur accélérer en sentant son parfum mêlé de sueur. Noah murmura à mon oreille :
— Je n'ai jamais essayé de cacher à mes amis qu'un mec me plaisait parce que j'avais la trouille, murmura-t-il avant de quitter la pièce.
Je me sentis conne. Et, alors que tout le monde semblait passer à autre chose et se préparer à se coucher, je me servis un fond de verre pour le boire, parce que c'était la règle...