Encore une nouvelle journée qui s'annonce similaire à toutes les autres depuis des semaines maintenant.
Je me lève complètement courbaturé, c'est le résultat d'être resté éveillé si tard après un match de champion's league avec les gars.
Mais j'en avais besoin je crois, de décompresser et de penser à autre chose en passant du temps mes amis que je vois de moins en moins ces temps-ci. Ça m'a fait beaucoup de bien de savoir qu'ils n'ont pas changé d'un iota et sont toujours aussi cons, pour mon plus grand divertissement.
Évidemment je n'ai pas pu échapper aux questions indiscrètes de ces messieurs qui ne savaient rien de toute cette histoire en dehors de mon frère de tous les jours. J'ai donc dû omettre sciemment certains détails mais leur ai en gros annoncé que je comptais divorcer de ma femme pour lui permettre de soi-disant rencontrer un homme qui l'aimera et la respectera à sa juste valeur. Même si j'émets toujours un doute quant au fait qu'il aime vraiment Ibti et sera à mesure de s'occuper d'elle et surtout de pourvoir à tous ses besoins notamment financiers sans avoir recours à l'illégalité. Mais c'est lui qu'elle aime et il m'a surtout assuré qu'il avait arrêté de faire la merde mais j'en doute fort.
Ils m'ont tous traité d'idiot déjà, et tous se sont rangé du côté d'Ozan en me disant que c'était la pire décision que je pouvais prendre. Ils soutenaient qu'Ibti m'aimait malgré tout ce que j'avais bien pu lui faire et que je regretterais sans doute toute ma vie cette décision de me séparer d'elle alors que je l'aime comme un fou. Et je leur aurait tenu le même discours si les rôles étaient inversés, mais il ne peuvent pas me comprendre.
Et ces idiots que je ne pensais pas pouvoir raisonner aussi sagement avaient raison, c'est avec regret que j'ai pris une telle décision mais j'ai l'impression que personne ne voit que c'est justement parce que je l'aime que je la laisse partir. Pour moi c'est la plus grande preuve que je peux donner à Ibti de mon amour. La laisser être heureuse avec un homme qu'elle aime et réciproquement.
Même s'il faut avouer que ça me tue. Ça me tue que ce soit mon petit frère et encore plus qu'il ait pu l'avoir tout en essayant de me faire du mal à moi.
Pourtant on a discuté et je me suis excusé, excuses qu'il semblait avoir accepté du bout des lèvres. Je ne pensais pas que ce qu'il y avait entre Marya et lui était si sérieux et j'ai fini par en payer les frais et comprendre moi-même pourquoi il l'aimait. Faut dire qu'elle mérite une telle vengeance mais pas au détriment d'une âme si belle et innocente qu'est Ibti.
Mais est pris qui croyait prendre alors maintenant je sais qu'il assumera ses actes comme il le dit et prendra soin de ma femme.
Mon ex femme.
Ils trouvent que le délai que j'accorde à cette histoire est parfait parce que le temps que ma tante s'en remette, il peut se passer beaucoup de choses et mon couple peut se rabibocher et ainsi envoyer aux oubliettes cette folie de divorce. Mais non désolé pour eux.
Je descends à la cuisine me faire un bon café, je prends mon temps aujourd'hui. Je me suis levé avec une telle flemme. Je vais mettre ça sur le compte de la fatigue ou de l'agacement. Mais il ne s'agit pas de me rendre a l'hôpital, ma tante n'a absolument rien à voir avec tout ça.
Je suis juste soulé, je commence à en avoir un peu marre de ma routine. C'est-à-dire passer à l'hôpital et essayer de travailler de là-bas, faire un tour rapide au bureau, écouter les sermons interminables de mon meilleur ami et esquiver ma mère ainsi que ses sorcières de filles, faire des allers retours au pressing mais plus maintenant chez le traiteur car Diya se charge de me faire à manger depuis quelques jours. Bref c'est la joie.
- qu'est-ce que tu me veux d'aussi bon matin? Demandai-je quand j'ouvre ma porte d'entrée
- c'est toi qui m'a demandé de passer, dit-il en me rappelant que je lui avais effectivement envoyé hier un message poussé par les gars qui m'ont demandé d'en finir au plus vite avec les histoires qui concernent mon frère.
Je leur ai exposé pourquoi je comptais me débarrasser d'une chose qui m'a tenu en laisse longtemps et laisser l'entreprise de mon père entre les mains de mon jeune frère qui a eu finalement la même formation que moi et serait à même de prendre le relai une fois que je lâcherais l'affaire.
Ce petit morveux je le sais, s'est toujours senti dans mon ombre. Et pour éviter ce genre de conflits inutiles et dévastateurs entre frères, j'ai toujours effacé tout fossé qui puisse exister entre nous. Et ce, même si nos parents n'arrangeaient pas les choses en marquant clairement des préférences.
Je ne m'explique pas non plus pourquoi j'ai tenu à connaître cette fille géniale pour laquelle il allait "devenir riche de lui-même et aller s'installer en Europe". J'ignore comment j'ai fini par l'apprécier et m'attacher. Mais finalement n'est-elle pas celle qui a fait un choix?
Enfin bon.
- alors fait le vite car je n'ai pas beaucoup de temps à t'accorder, ajoute t'il en s'installant dans un fauteuil et se débarrassant sur la table basse de son téléphone et de son trousseau de clés dont le porte clé en forme de cœur porte la photo de ma femme. Voilà de quoi me remettre les idées bien en place.
- je ne vais pas te prendre trop de temps ne t'en fais pas, dis-je en lui demandant de m'excuser un moment et d'aller rapidement dans la cuisine pour téléphoner et demander à Shela de rapidement se ramener avec les documents.
Je prends alors le temps de monter me doucher et me préparer pour une longue journée qui ne débute pas de la meilleure des manières.
Je descends ensuite rejoindre le jeune homme qui s'est mis à son aise et en est déjà, si j'en crois au niveau de liquide que contient la nouvelle bouteille qu'il a ouvert, à son troisième verre.
- je crois que tu m'as fait venir ici pour te foutre de ma gueule, dit-il une fois que je suis installé face à lui
- je ne t'ai pas fait déplacer pour ça parce que crois-moi rester dans la même pièce que toi ne m'enchante pas
- alors? Fait-il avec un sourire narquois, désolé de ne pas te demander ce que tu veux boire puisque tu es chez toi
- fais-toi plaisir
- et dis-moi une chose, pourquoi tu ne l'as pas encore répudié?
- et en quoi est-ce que c'est tes oignons?
- en ce que tu m'empêches d'épouser la femme que j'aime, lâche t'il en me faisant serrer mes doigts en poing contre moi pour m'éviter de faire une bêtise et de le frapper à l'en tuer
- tu as brûlé toutes les étapes en couchant avec elle alors qu'elle était encore liée à moi devant Dieu alors tu peux bien continuer en attendant encore non? Lui dis-je dans un petit sourire de contenance alors que ces mots sortent de ma bouche pour s'attaquer à mon propre cœur
- je ne peux plus me contenter de ça, crache t'il excédé et posant son verre dans un grand bruit, je ne veux plus qu'on ait à cacher notre amour
- personne ne vous demande de cacher quoi que ce soit
- allez arrête de faire l'idiot, dit-il très agacé, tu sais bien que c'est impossible de faire éclater au grand jour cette histoire sans que les choses n'aient été faites dans les règles de l'art
- pour des gens sans scrupule tels que vous c'est plutôt étonnant de t'entendre parler de faire les choses dans les règles, lui répondis-je moqueur
- rigole autant que tu veux et sache que si tu retardes les choses pour nous embêter, ça ne fera que te perdre du temps et de l'énergie à essayer d'empêcher quelque chose de déjà scellé c'est-à-dire l'amour qu'il y a entre ma future femme Ibtissam et moi
- n'empêche qu'elle portera toujours le même nom de famille et ça fera toujours penser à moi avant tout mais bon vent à vous, et surtout sache que contrairement à toi et au reste de ta famille je ne laisserai pas passer mes problèmes personnels avant la santé de ma tante. Alors patientez encore un peu et d'ici là personne ne vous retient de vivre comme vous le sentez, lâchai-je d'une traite sans savoir pourquoi j'ai été pris d'un tel élan mais sans en regretter un traitre mot
- Ibti n'est plus ton problème, mets-toi ça dans la tête et le plus vite sera le mieux pour tout le monde
- maintenant que tout ça est dit, dis-je en ignorant ses mots, je t'ai fait venir pour te dire que je te laisse l'entreprise.
Mon petit frère ne me répond rien pendant quelques secondes et part dans un bruyant éclat de rire. Il en perd même une larme et se calme quelques instants après. Je le regarde tout se temps d'un œil ennuyé mais surtout triste d'avoir à en arriver là parce que oui, je compte bien couper totalement les ponts avec lui et par ricochet sa future femme. Ça me ferait trop de mal de les voir et surtout les fréquenter du fait que malheureusement je partage encore une mère et des sœurs avec Karim. Du moins, je ferai en sorte de m'éloigner d'eux et d'essayer d'oublier celle qui ne sera bientôt plus que souvenirs et moments appartenant au passé.
- tu t'es levé d'un bon matin et tu t'es dit qu'il fallait que je te prenne tout ce qui te rend le plus fier puisque j'ai réussi à te prendre Ibti c'est ça? Fait-il en repartant de plus bel en hilarité. Vas-y petit frère continue de me dépouiller, pourquoi t'arrêtes tu en si bon chemin? Poursuit-il rieur en essayant sans doute de m'imiter, la prochaine étape c'est la maison? Je peux avoir dès maintenant les clés?
- je le fais car que par cet acte je marque la fin de toute fraternité et existante entre nous, crachai-je dans un anglais sec en essayant par ce changement de langue et mon ton de lui transmettre tout le sérieux et la gravité de mes propos; je ne veux plus avoir à faire avec toi ni avec les nombreux chantages de notre mère parce que crois-le ou non Karim, si ta mère n'avait pas proféré de menaces principalement par rapport à notre tante à propos de cette entreprise jamais je n'aurais accepté d'épouser Ibti. Finalement tu vas avoir ce que tu as toujours voulu et elle aussi. Je vous laisserai vivre votre vie et poursuivrai tranquillement la mienne sans aucune contrainte
- c'est quoi l'entourloupe? Demande t'il tout à coup sérieux, qu'est-ce que tu gagnes à faire ça?
- je te l'ai déjà dit tout à l'heure frangin, je me débarrasse de vous et je m'assure surtout que tu aies les moyens de prendre soin de Ibti en toute légalité. Lui répondis-je en ponctuant sur le dernier mot pour bien lui faire comprendre le message
- rassure-toi Kam je te répète que je ne trempe plus dans ces choses là. J'ai décidé de faire les choses bien avec Ibti et j'y travaille depuis longtemps, me dit-il dans un regard suffisant et défiant
- alors tout est dit.
Je me lève et vais ouvrir la porte à mon amie qui arrive au bon moment et évidemment me tire la tronche. Elle me fait une tirade sur le fait qu'elle déteste que j'ai toujours à régler mes affaires d'aussi bon matin et qu'elle a besoin d'un café. Je la laisse donc s'installer au salon et vais lui servir cette tasse.
Une fois chose faite, je les invite autour de la table à manger pour plus de confort, m'installe et nous nous mettons à discuter et procéder à la signature des documents.
Je constate que mon petit frère mesure ce qui se déroule sous ses yeux mais semble méfiant. Il demande alors un moment pour lire et relire certaines clauses. Ce que nous lui laissons faire, et il faut avouer que cela me rassure sur le fait qu'il n'est pas aussi idiot qu'il ne le laisse paraître et fera un bon dirigeant.
Finalement au bout de deux horribles heures pour mon amie et plus pour moi, tous les documents sont signés et mon avocate se chargera de la suite.
- c'est ici que je te dit au revoir Karim, lui dis-je en lui serrant la main, j'aurais aimé que les choses se passent autrement mais...-
- ce qui est fait est fait, me coupe t-il en retirant sa main de la mienne, j'ai obtenu et même plus ce que je voulais mais je ne t'ai jamais vraiment détesté Kam. À plus.
Je le regarde s'en aller et passer le pas de la porte en soupirant d'agacement. Mon amie et avocate s'installe près de moi sans mot dire. J'apprécie le fait qu'elle respecte ce moment où je n'ai absolument rien à dire, mais il fait bien finir par la remercier d'être toujours présente à toute heure pour moi.
- mais c'est normal Kam je suis ton amie, dit-elle en me sourient sincèrement, je suis vraiment désolée pour ce qui t'arrive
- il me fallait tôt ou tard payer pour les erreurs que j'ai commises, lui répondis je en lui rendant un sourire moins joyeux, et surtout ne t'en fais pas pour moi
- oh que si je m'en ferai toujours pour toi mais je sais que tu es aussi un battant et tu t'accroches plus que n'importe quel panda sur son bambou
- c'est quoi cette comparaison stupide? Fais-je en éclatant de rire, ah franchement tu es toujours aussi nulle pour ça
- oui mais je t'emmerde aussi, dit-elle en me tirant la langue et me faisant encore plus rire
- c'est pas tout ça mais on a encore du travail
- ah ouais? Demande t'elle en fronçant les sourcils, tu vas me payer une sacrée fortune pour mes honoraires toi j'adore ça!
- fausse amie, lui lançai-je avant d'aller chercher les autres documents à l'honneur cette fois-ci.
Nous nous y mettons et travaillons depuis pas mal de temps avant que je ne sente mon ventre gronder. Mon amie suggère une pause sandwich et va s'assurer que ma cuisine dispose de tous les éléments pour nous en faire. Je la remercie et continue mes lectures.
Quelques instants après, on frappe à la porte et je vais ouvrir pour me retrouver devant ma jeune cousine que j'ai complètement négligé aujourd'hui.
- Bonjour Kam, dit-Elle en me faisant la bise
- salut Diya, je suis vraiment désolé de ne pas t'avoir appelé
- tu avais sans doute énormément de choses à faire
- assez oui, lui répondis-je en la débarrassant du sac de courses qu'elle tenait. Tu veux boire un truc?
- de l'eau bien fraîche s'il te plaît
- je t'apporte ça tout de suite, lui dis-je en allant à la cuisine et faisant chier l'avocate en lui demandant de ranger pour moi les courses.
Je rejoins ensuite le salon où la jeune dame m'attends en étant sur son téléphone.
Elle me remercie quand je lui pose l'eau et se désaltère à souhait.
Nous échangeons quelques instants avant que Shela ne nous rejoigne à son tour avec les sandwichs préparés.
- ah salut Diya, fait-elle en posant le plateau sur la table basse, ça va?
- oui bien et toi? Répond poliment ma cousine qui cache assez bien sa surprise de la voir ici
- moi aussi ça va merci, je suis juste épuisée à cause de ton idiot de cousin
- et pourquoi ça?
- ce gars m'exploite trop et se prend pour mon propriétaire à me faire venir chez lui à des heures où les gens normaux dorment encore
- tu n'exagères pas trop la situation là? Lui demandai-je faussement hoqué alors que le regard de la nouvelle arrivante se fait gêné
- euh si vous voulez je peux repasser plus tard je me rendais à la clinique de toute façon, dit-elle en joignant le geste à la parole mais je la retiens
- tu ne déranges pas du tout t'inquiètes Diya, et toi tu vas arrêter de raconter de la merde parce que tes honoraires de merde me coûtent la peau des fesses alors tiens bien ta bouche ou je cherche de ce pas un autre avocat
- essaie si tu trouves quelqu'un qui accepte de travailler d'aussi tôt et chez son client qui plus est, en lui faisant même un bon repas pour supporter la charge de travail. Et en plus je vais continuer tout ce boulot toute seule parce que tu vas te rendre à l'hôpital petit ingrat
- c'est ça ferme la, mange et remets-toi au travail. Vas-y Diya mange avec nous, m'adressai-je à la concernée en lui avançant son assiette devant elle
- ou peut-être tu as prévu de manger ce plat que tu as apporté? Demande Shela qui se lèche les doigts, ça a l'air super bon en plus
- non c'est pour le dîner, répond ma cousine qui accepte bien un bout de sandwich
- de toute façon Diya a raison nous on va devoir y aller
- tu me laisses travailler ici? C'est hors de question que je traverse la ville pour me rendre au cabinet
- tant que tu ne fais pas brûler la maison tu peux travailler d'ici
- bravo la confiance, fait théâtralement cette dernière en se levant et portant son assiette pour aller bouder je ne sais où.
Quand j'en ai terminé, je vais rapidement me laver les mains et prendre mes clés de voiture ainsi que mon porte-feuille avant que nous y allions. Diya me fait une remarque sur un porte-clés qu'elle trouve mignon et qui me fait fort soupirer car je sais bien à qui il appartient. Heureusement que je ne serai pas là car il va se rendre compte qu'il l'a oublié ici et reviendra le chercher. Moi je n'aurai pas à revoir sa tête.
Nous prenons donc le chemin de la clinique et le trajet me paraît plus court que la normale, à cause de l'habitude je suppose. Diya reste silencieuse et moi je ne dis rien non plus.
Quand nous y sommes, j'ai la chance de tomber sur le médecin qui s'occupe de ma tante et c'est avec joie que j'entends la bonne nouvelle qu'il a pour nous.
- le muscle cardiaque affecté était si altéré que nous avons dû la plonger comme vous le savez déjà dans un coma artificiel, de peur que cela conduise à un AVC et dans son état nous n'aurions pas pu la sauver. Mais maintenant les choses se sont stabilisés de sorte qu'il nous est maintenant possible de l'opérer et nous espérons que cela se fasse dans l'immédiat
- alors ne perdons pas de temps docteur, lui dis-je pressé face à son regard satisfait
- alors suivez moi.