«Comme je l'avais craint un peu plus tôt dans la journée, Sherlock m'avait, une fois de plus, laissée sur le banc de touche. Après avoir maltraité la porte, il était monté dans une petite voiture foncée et avait fuit la propriété. Quelques recherches me permirent de déterminer qu'il s'agissait de la voiture de Sir Henry, avant qu'il ne décide de s'approprier celle que nous avions découverte.
Je décidais donc d'appeler Holmes afin d'avoir une idée de la raison son escapade solitaire, mais quand la légère mélodie de son téléphone fit écho depuis le premier étage, je compris alors que j'avais eu un espoir vain. Je me réinstallais là où j'avais laissé mes bribes de réflexions et commençais à gribouiller sur une nouvelle feuille. La vieille dame qui m'avait apporté de quoi écrire interrompis mes essais artistiques sur ce pauvre papier blanc vers le milieu de l'après-midi pour me demander si je souhaitais boire un thé. Je refusais poliment, n'ayant pas la foi de boire une tasse d'eau chaude au léger goût de plantes.
J'entendis soudain des pneus crisser sur des graviers, et à en juger par la durée de ce crissement, c'est à dire quelques très longues secondes, je su qu'il y avait plus d'une voiture garée devant la demeure. Le cri strident de la sonnette retentit, et alors qu'elle venait de m'apporter ma boisson chaude, la gouvernante s'empressa d'aller ouvrir. Des éclats de voix, un peu de drague, et des pas bruyants et pressés plus tard, Mycroft Holmes apparu sous mes yeux, son fidèle parapluie au bras, et trois costumés à ses côtés. Il me lança un regard sévère, avant de hocher la tête, signe de salutation, et de s'inviter à la place à ma droite.
"Où est-il?"
Je haussais les épaules, reprenant le petit dessin que j'avais commencé à réaliser. Le stylo m'échappa soudainement, tiré par une main plus grande que la mienne.
"Je suis désolé de vous importuner, pendant votre petite semaine de vacances dans un endroit aussi perdu, mais je vous le redemande, où est-il?
-Je n'en ai pas la moindre idée. Il est parti il y a un bon moment déjà. Vers le début de l'après-midi je dirais. Il a dévalé les escaliers à toute vitesse avant de claquer la porte et de s'enfuir. Je pense qu'il savait que vous viendriez.
-Hmm. Il le sait toujours.
-Je pensais que vous étiez plus intelligent que lui? Vous êtes l'aîné, non?"
J'avais fait mouche. Je m'étais volontairement montrée sarcastique, dans l'idée qu'il aurait fait une trouvaille fantastique et sache où trouver le détective qui lui sert de frère.
Mais je n'eu pas la moindre réponse. Il resta dans le vide, longtemps je dirais, avant de prendre les feuilles sur la table.
"Sur quoi travaillez-vous?
-Notre enquête.
-Celle là même où il vous a mise de côté? Et où vous avez pénétré illégalement dans un centre de recherches de l'armée?
-Nous n'y sommes pas rentrés illégalement. Nous avions une carte.
-Parce qu'une usurpation d'identité, c'est légal?
-Techniquement, je n'ai pas emprunté d'identité. C'est Sherlock qui l'a fait.
-Vous êtes pire que lui!
-J'ai été présentée comme Noah, la fidèle assistante de votre frère. Ce qui n'est que la pure et simple vérité."
Il me regarda, les sourcils froncés, la tête penchée, comme son frère le fait quand il est intrigué. Tiens, je l'intrigue?
"Vous jouez avec les mots. Vous êtes comme lui" me murmura-t-il.
"Je vais le prendre comme un compliment.
-Vous ne devriez pas" il s'arrêta un instant, se reprit, plus froid. "Dites moi où il est.
-Puisque je vous dis que je n'en sais rien!"
L'horloge sonna, cinq heures trente. La gouvernante entra, un grand plateau dans les mains, une bouilloire fumante et six tasses dessus. Six tasses? Nous ne sommes que cinq, sans la compter, puisqu'elle ne prendra pas le thé avec nous. Elle déposa chaque tasse sur la table, versa de l'eau dans chacune avant d'y plonger une boule en aluminium perforée. Durant ces quelques minutes de silence lourd, Mycroft ne me lâcha pas du regard, une lueur froide et dure le parcourant, similaire à celles qui habitaient parfois celui de son cadet.
L'employée de maison s'en alla, le thé fumait et les trois hommes en costume chic s'emparèrent de leur tasse, tout comme le haut placé du gouvernement. J'étais la seule à ne pas y toucher. Mycroft m'observa encore, et finit par prendre la parole.
"Vous saviez qu'elle servirait le thé à cette heure. Vous ne me l'avez pas dit. Pourquoi?
-Aurais-je dû?
-Qu'avez vous à y gagner, Mademoiselle Leblanc? Pourquoi "
Je n'eus pas le temps de répondre, la porte du salon s'ouvrit à la volée, sur un grand brun essoufflé. Il rajusta sa chemise, salua son frère d'un signe de tête.
Depuis bientôt six mois que je le connaissais, j'avais remarqué qu'il ne ratait que rarement son thé de fin d'après-midi, même pas pendant une enquête importante, et encore moins s'il était fait maison.
"Alors Sherlock, qu'as-tu fais cet après-midi? Pourquoi as-tu laissé une aussi jolie jeune femme seule dans un si grand château?
-Des choses à faire."
Court, simple, concis, comme un crochet du droit.
"Mais encore?" insista son aîné, la réplique. "Quelles genre de choses?
-Pour une enquête" le blocage.
"Cette même enquête pendant laquelle tu as volé mon nom?" un coup sec, dans la mâchoire.
"Que fais-tu ici, très cher frère? J'aurais espéré de ne pas te voir avant cet été." brutal, dans le ventre.
-N'implique pas le repas familial dans cette histoire!" mise à terre.
-C'est toi, qui les as impliqué la dernière fois!" perte du contrôle.
-Arrête de dire des sottises, tu sais très bien que c'était à cause de ton comportement!" Un, deux.
Le ton montait entre les deux hommes, sans que les trois spectateurs ne bougent, fortement intéressés par leur tasse.
"Et puis d'abord, pourquoi tu es venu, hein? Tu n'as pas à me chaperonner! Je suis adulte, et bien plus compétent que toi pour m'en sortir!" Trois. Défaite du cadet par K.O., dixième victoire consécutive de l'aîné, invaincu depuis trois mois.
"Alors, là, c'est complètement faux. Tu es totalement dépendant, que ce soit de la pauvre Martha qui doit ranger ton appartement ou faire tes lessives, de John qui te subit depuis des années, ou de moi." intervins-je. "Alors, s'il vous plaît, calmez-vous. Merci." Fin du combat.
Il me scrutèrent, l'un confus par cette révélation à son sujet, l'autre fier d'avoir eu raison. Et ça se disait adulte. J'affichais tout de même un sourire en coin, plutôt contente de mes comparaisons entre leurs discussions froides et un match de boxe.
"Bien, maintenant, si vous me le permettez, je vais demander à mon coéquipier ce qu'il a découvert, et pourquoi il m'a laissé tomber pendant trois heures. Sherlock?
-J'ai une hypothèse. On la vérifiera ce soir comme prévu.
-Mais encore?" demanda Mycroft.
"Tu me laisses ton pass?
-Non.
-Mycroft?" demandais-je alors.
"Que puis-je faire pour vous, Mademoiselle Leblanc?
-Auriez-vous l'amabilité de me laisser vous emprunter votre laisser-passer pour pouvoir vérifier les dires de votre cadet?"
Il soupira de frustration, et de colère aussi sûrement, avant de fouiller sa poche et de me tendre une petite carte, avec son propre nom mais une photo d'un homme plus jeune. Il avait donc déjà prévu cette requête depuis son départ de Londres...»
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Euuh... Bonsoir?
Je ne vais pas vous embêter plus longtemps, mais je vais seulement vous annoncer que je n'aurais plus une publication régulière, pour des raisons évidentes : je dois bosser un maximum mes cours à la fac.
Aussi, je suis nulle en boxe, mais j'ai vu un ring dans un dessin animé et j'ai trouvé que ce serait marrant de comparer la relation Holmes ainé et cadet à un match, parce qu'au fond c'est ce qu'ils font, ils se livrent à un combat sans merci pour la gloire d'être celui qui vaincra l'autre.
En espérant que vous avez passé un bon moment à lire ce chapitre,
à la prochaine fois, date et heure indéterminées,
Votre fidèle mais irrégulière AuHasard.