Problème majeur d'une addiction d'alcool, remise sur le tapis.
Il avait déserté, emporté quelques affaires, dans son sac, comme si, depuis le départ, son inconscient avait monté ce stratagème, et qu'au final, quoi qu'il aurait pu se passer, il aurait fini par filer.
Problème massif de repoussement de soi, lui en tout cas, était à son pic dominant, et moi si bas, affluais vers lui, sans comprendre pourquoi.
La nuit, passée à attendre, ne trouvant pas le courage de monter dormir. Il vagabondait, errait dans les ruelles sombres, vers Paname sûrement, là où son porc-agréable-à-regarder l'emmènerait, et que lui, pauvre imbécile, le suivrait. Aucune explication, à proprement donné n'aurait pu conjurer un tel retournement de situation, un tel revirement de personnalité. La définition du parasite, à éradiquer, connu malheureusement par mon système nerveux, s'était alors libéré, et je souhaitais me persuader, qu'il n'était pas comme lui, qu'il n'était pas comme ça.
Avais-je seulement raison de croire en son innocence, en sa bonne volonté, en sa parfaite nature ?
Personne alors ne m'a susurré une réponse.
Lorsqu'il est entré, dérapant nerveusement, en tanguant vers l'entrée, l'idée qu'il finisse toutes ses soirées à oublier ses tourments m'avait traversé. Comment alors aurais-je pu être à ses yeux un quelconque tourment ? Lui qui, n'en avait rien à faire de moi, de mon couple, de ma foutue vie, ou de notre misérable connexion unilatérale. Pourquoi alors s'était-il décidé à prendre ses jambes à son cou, sans aucune raison apparente ?
Pourquoi Rayane ?
Mais la vérité était là, il comptait pour moi. Et moi, pauvre idiote, m'inquiétais pour lui. Alors que Rayane, s'était-il juste une fois inquiété de mon triste sort ? N'avait-il jamais pensé qu'il n'avait pas été unique dans ce monde à souffrir, que toutes les épreuves traversées, sont communes à une multitude d'individus au demeurant inconnues ? Avait-il seulement tenté de sortir de sa zone de confort ? Avait-il essayé de me comprendre, comme moi, je m'évertuais à le faire ?
Rayane agissait de façon totalement égoïste et unilatérale. Il ne pouvait comprendre ce que moi j'avais traversé, puisqu'en réalité, il ne s'en était jamais inquiété.
'' - Putain Rayane j'étais morte d'inquiétude ! '' et rien dans cette pièce en cet instant précis n'était plus vrai que cette exclamative. J'avais eu peur, j'avais eu même franchement la frousse, qu'il ne fasse une mauvaise rencontre, lui et sa malchance perpétuelle. Mes pieds m'avaient approché de lui, jusqu'à que mes pieds nus frottent ses baskets blanches, et qu'il fut obligé de baisser la tête, pour diriger ses pupilles verdâtres vers moi.
'' - Où t'étais encore tiré Bensetti ? J'ai failli mourir six fois en vingt-quatre heures. '' et moi, et mon petit espoir de recoller les morceaux, pensions à juste titre qu'avouer la stricte vérité aiderait dans cette démarche, plus qu'audacieuse. Mais la route s'écarta brusquement de sous mes pieds, quand ses sourcils se froncèrent et que lui, presque plus alcoolisé, renversait notre barque de stupide semblant de relation, en un coup de rame contre l'eau du destin. Il nous fit tanguer, fort, rien que pour nous renverser.
Lui était sec, et moi trempée.
'' - Qu'est-ce-que tu fou ? T'es pas avec ton mec ? '' et sa claque indirecte atterrit en plein entre mes deux yeux, parallèlement à l'épiderme de ma peau, qui symboliquement se mit à brûler. Je cru un instant rougir, il s'en était rien ; j'avais honte.
Mais sa réaction me prit au vif, sur le qui vive, parce qu'il n'avait jamais été si violent, jamais si semblable avec mon passé. En en cet instant, il me méprisait, peut-être autant que je haïssais Marc.
'' - Pourquoi tu fais le connard avec moi ? Pourquoi tu fais ça, alors que t'es pas comme ça ? '' il se redressa, passa sa main dans ses cheveux trempés, puis d'un ton nonchalant, enchaîna sa répartie.
'' - Peut-être que tu me connaissais pas réellement. '' je refusais de le croire, je m'interdisais d'accepter l'hypothèse qu'il fusse aussi mauvais que son image reflétait en cet instant. Nous étions tous deux en colère, et lui, tout comme moi, avions des choses à nous reprocher.
'' - Je suis rien pour toi, et t'es rien pour moi. Fin de l'histoire. '' fin de l'histoire ?
Il avait dit être capable de faire une exception pour moi, une entorse à la règle de non-exclusivité. Il m'avait menti, tout autant que moi, je l'avais fait. Pour la simple ambition de le voir rester, de perpétuer à capturer mes rêves inconsciemment. Rayane, n'avait eu qu'une seule idée en tête, qu'une seule envie, depuis son premier jour ici.
Et ça n'avait rien, rien à voir avec une quelconque partie romantique.
'' - C'est vraiment ça que tu penses ? '' j'aurais voulu lui conjurer qu'il n'en était rien, qu'il avait toutes les cartes en main. Mais ça aurait été mentir, une fois encore. Il recula d'un demi-pas, son filet de protection tentant apparemment de s'activer malgré les paramètres défectueux de l'alcool.
'' - J'aimerais même que rien ne soit arrivé. J'aurais pas à vivre avec ça sur la conscience ! '' une partie de moi, venait de perdre vie.
'' - T'es vraiment sérieux ? '' j'avais encore l'infime espoir ridicule, ridicule, qu'il avoue, qu'il s'agissait d'une mauvaise plaisanterie. Et que lui comme moi, pouvions repartir sur des bases plus seines.
Il n'en était rien, évidemment.
'' - Je regrette même qu'on se soit rencontré si tu veux tout savoir. '' alors sa voix devint blanche, ne transmettant plus aucune chaleur, aucune émotion, et lui, tout comme moi venait de s'éteindre. J'eus l'immonde envie de le rouler, de la même façon qu'il m'avait entubé, que nous avons été hypocrites, l'un envers l'autre. Quitte à mentir pour se protéger, autant que ce soit jusqu'au bout. Autant défendre une cause utile, qui, même si ne s'avérait pas vrai, pouvait distraire, un instant déjà.
'' - Ça tombe bien alors. J'aurais aucun remord devant l'autel. '' même si ma vie, à elle seule était un remord en réglementation singulière. Tout n'était qu'un tissu de mensonge, agrémenté d'une dose particulière de remord personnelle. Il n'avait pas conscience de ce que moi aussi j'ai dû traverser. Il n'avait pas conscience qu'en réalité, lui non plus, ne me connaissait pas réellement. Mais par dessus tout, il ignorait que sa présence dans ma vie, n'aurait effectivement pas dû exister.
Il était temps de mettre un terme à cette mascarade.
-+-
Je n'avais rien pris.
Et dans ce sac encore ouvert, ne reposait que l'équivalent d'une journée à l'école de danse. Aurais-je fait cela dans le but qu'il n'y voit que du feu ? Qu'il ne sache pas à quelle date je rentrerais. Celle-là même que j'ignorais encore. Le sac balancé sur l'épaule, d'une façon nonchalante, je parvenais, force contre ma poitrine, et yeux rivés au sol sordide, à déjouer son regard, à faire croire à mon esprit, qu'il n'était pas.
Dans l'étrange connerie humaine dans laquelle nous évoluons quotidiennement, questions et réponses s'entrechoquent, sans jamais réellement se rencontrer et encore moins se compléter. La relation humaine lie les gens, sans vraiment les faire évoluer, sans vraiment les amener à les connaître. Et deux immenses chapitres de nos vies respectives, à Rayane et moi, mériteraient d'être ailées dans notre appartement, rien que pour abattre les doutes visant à nous nuire. Et le fil d'Ariane, peu extensible, ma tête pria pour qu'il cède à l'envolé dans les airs.
En réalité, ce voyage de la rédemption n'était autre qu'un échappatoire particulier, et avancé par mon amant lui-même. Alexis, urgemment appelé à Londres la nuit dernière, m'avait annoncé son départ, d'une durée minimale de cinq jours. Au moins cent vingt heures sans Rayane, juste autant pour parvenir à railler de mon disque dur, tout nous liant, tout nous détruisant. A faire, ce qu'il était parvenu à entreprendre, sans aucune difficulté particulière.
Mais le temps n'effacera rien, j'en savais quelque chose. Ces cent vingt heures de tranquillité n'étaient qu'une ruse à mon propre subconscient, un pied-de-nez à tout ce qui me tient la cheville. Cet immense cadenas, sans clé, perdu dans les démons les plus lointains, expliquait certainement la couleur toujours plus obscure de mes pupilles.
Mes démons, cachés derrière une mèche rebelle de mes cheveux, je vins alors la ramener aux autres, créer un groupe, rien que pour m'en composer un nouveau. Le mien me manquait affreusement.
Le voyage, synonyme d'excursion amoureuse pour Alexis relevait d'un test tout conforme à l'éloignement d'une personne chère pour moi. Et j'espérais sincèrement, que mon esprit, ne demeurait pas à Paris, dans ce duplex, entre les deux chambres, et la salle de bain. Sur ce foutu pallier. Il fallait que je sois entièrement ici. Je devais réapprendre à vivre sans Rayane, et à faire semblant, comme je l'ai toujours fait.
Parce que c'est comme ça, que ça devait se passer.
Les portes de l'aéroport s'ouvrèrent, moi, traînant sur mon dos, le petit sac ridicule m'accompagnant. Alexis se trouvait déjà sur place, appelé la veille pour l'urgence qui visiblement ne pouvait attendre l'heure du jour. Les quelques personnes encore présentes, en cette heure particulièrement inhabituelle, me fixaient, me dévisageaient. Les photos occultant la carrière laissée dernière moi, ma passion retirée, à cause de cet immense enfoiré.
Je me surpris à penser que Rayane n'aurait pas la chance de me voir partir, que ça ne se passerait pas ainsi, et que quoi qu'il arrive désormais, je ne voulais plus me battre. J'aurais réellement voulu cesser les disputes, mais je ne savais comment faire. La compréhension de cet être humain était loin d'être évidente pour mes cellules nerveuses. Lui, chancelait parfois, sans réellement tomber, et sa carapace, ne semblait pouvoir éclater. Un événement, un sentiment, quoi que ce soit, l'en empêchait. Et visiblement, Rayane n'aurait pu relâcher ses efforts maintenant, qu'il était intouchable, en sécurité.
Une sorte de maniaque du contrôle à la beauté fatale, dont personne ne peut s'empêcher de désirer. Moi, je n'ai pu. Il était impensable de savoir le fond de ses pensées, pas tant qu'il en aurait décidé autrement. Il était une bulle impénétrable, et son cœur, bien à l'abri derrière du béton armé, n'attendait certainement qu'à être pénétré, même s'il convenait de l'inverse. Trois femmes, lui avaient retiré sa dignité, trois femmes lui avaient retiré le peu de confiance, le peu de droit qu'il accordait à son prochain. Et les suivantes alors, n'attendront rien en retour, sinon feront face à son mur de froideur, à son mur armé, contrôlé, et maîtrisé à la perfection.
Moi j'ai prit ce mur.
Mon unique bagage enregistré, j'attrapais mon téléphone, mes écouteurs, de quoi m'occuper, durant les prochaines heures. J'embarquais dans ce qui ressemblait à mon enfer personnel. Tous les souvenirs des aéroports me rappelaient inlassablement les décisions, m'ayant forcé à venir m'installer ici. La France n'étant pas mon premier choix, mais D'pendance, ayant reçu l'offre d'une tournée nationale française, aucun membre de la troupe n'avait semblé hésité. Tous sauf moi.
L'Europe, n'était aucunement évocateur de souvenirs heureux dans ma triste enfance. Je ne parvenais à imaginer un pays où l'on pouvait vivre heureux, où je pourrais m'y plaire.
C'était sans compter alors tous les extras que j'avais occulté, Paris et ses champs, Paris et ses monuments, Perpignan, Nice et leur climat, la Normandie, la côte ouest, pour les vagues, plus hautes encore que moi-même.
La France était devenue ce qui paraissait être une terre d'adoption, où toutes les villes nous avaient attendu, remercié, salué, applaudit. En cette époque ancestrale, j'avais vécu un rêve éveillé, accompagnée de toutes les personnes les plus chères à mon cœur, mes meilleurs amis, mon amant, même ma maman avait fait le déplacement.
La France avait réuni tous ceux que j'aimais. Mais soudainement, tout s'était effondré, tout s'était auto-détruit, les claques, les disputes, la séparation, finissant alors à son apogée avec la mort de Nadège. Pouvait-on m'en vouloir, de n'avoir eu aucune envie de vivre, aucune suggestion à continuer ? Puisque plus rien ne me retenait.
Et puis j'ai rencontré Alexis, celui qui s'est à nouveau occupé de moi, celui, si différent de tout ce dont j'avais désormais une peur effroyable. Alexis est ma planche de salut, le seul à avoir été là dans tous les pires événements de ma vie. Dans la succession, dans la progression, jusqu'alors il me force à intégrer l'école de danse.
'' - Tu verras tu vas rencontrer de nouvelles personnes ça te fera du bien. Je suis sûr que tu vas t'y plaire. '' et aussi impensable que cela puisse paraître, il ne s'était pas trompé. Calia et Sol faisaient désormais partie de ma vie, deux nouvelles amies, ne m'ayant jamais jugé, jamais empêcher d'être celle que je souhaitais.
-+-
Alexis me tendait les bras, de l'autre bout de l'aéroport, cheveux dans le courant d'air anglais, jean et t-shirt assortis, sa présence n'était en rien comparable avec... Merde. J'eus envie de me retourner une claque en plein milieu du hall. Tout en marchant, je relevais mes cheveux en un chignon défait. Mes baskets claquaient sur le sol carrelé, me dirigeant vers la seule personne de cet univers à m'aimer au-delà de l'impensable.
'' - Mon ange. '' je lui sautais dans les bras tout en l'embrassant, il m'avait manqué, et notre relation s'en était dégradée. Je ne parvenais toujours pas à entretenir une relation aussi partagée que la notre, pour la simple et bonne raison, que ma volonté avait été absorbée, et qu'à présent il le subissait. J'aurais voulu changer, j'aurais réellement souhaité être la parfaite petite amie, celle qu'il méritait, parce qu'il était parfait.
Mais encore une fois, mon esprit était perdu ailleurs, dans ce qui me semblait être un duplex au parquet grinçant, dans une chambre au matelas usé, digne des hôpitaux publics, où les lits se changent et s'inversent, sans que personne ne s'en préoccupe. Je me sentais telle une patiente en attente d'une opération à cœur ouvert, où quiconque pouvait me tuer. S'il le désirait, toutes les conneries auraient un impact réel.
Lorsque Alexis me redéposa sur le sol, mon cœur manqua des battements, lui était loin, et moi ici. J'étais perdue, réellement, et cela n'aurait pas dû arriver, il ne le méritait pas.
'' - Viens, je vais te montrer chez nous. '' il posa son bras par-dessus mes épaules, comme il l'avait fait, bourré. Je roulais des yeux tout en attendant avec mon partenaire un taxi. Mon sac sur l'épaule semblait ne peser pas plus lourd qu'une plume. Il ne semblait contenir le poids de la culpabilité immense m'habitant.
'' - A quelle heure dois-tu partir travailler ?
- Cet après-midi, nous avons tout le temps. '' j'aurais aimé que ces quelques heures suffisent à retracer une lignée nouvelle dans ma destiné, qui pour le moment était toute tracée.
J'étais liée, que je le veuille où non, à Rayane.
———
Oye oye.
Je reviens après mon voyage à Rome avec ce chapitre, j'espère qu'il vous plaît !
Voilà où était Denitsa durant sa semaine de disparition...