𝐖𝐡𝐨 𝐀𝐦 𝐈 ? [ INCOMPLET...

By Chocopatate

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LES PERSONNAGES NE M'APPARTIENNENT PAS, ILS SONT LA PRIOPRIETE DE YUSEI MATSUI C'était une journée tout à fai... More

Prologue
Chapitre 1 : Une journée "normale"
Chapitre 2 : Le Grand Huit
Chapitre 3 : Labyrinthe
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Chapitre 4 : Labyrinthe 2
Chapitre 5 : Je te le jure
TagUéE!
Chapitre 6 : Frayeurs
Chapitre 7 : Reveil
Chapitre 8 : Aller Mieux
Chapitre 9 : Karma Akabane
Chapitre 11 : un calme après-midi d'automne
Chapitre 12 : Éclaboussures Laiteuse et Douteuse
Chapitre 13 : Questions
Chapitre 14 : Routine
Chapitre 15: Émotion
Chapitre 16: Relation
Chapitre 17 : Discussion et divagations
Chapitre 18 : Tergiversations et Orientation
Chapitre 19 : Incompréhension
Chapitre 20 : Réflexions
Chapitre 21 : Déclaration Maladroite
Chapitre 22 (1/2) : Voix
Chapitre 22 (2/2) : Voix
Chapitre 23 : Rester
Chapitre 24 : Peur et Amour
Chapitre 25 : Déni
Cher.e.s Lecteur.ice.s
Chapitre 26 : Indifférence
Chapitre 27: Vérité Inavouée
Chapitre 28 : Chagrin Tempétueux
Chapitre 29 : Deux Cœurs Blessés
Chapitre 30 : Pleurer ou ne pas pleurer ?
Chapitre 31 : Après la pluie . . .
pitite annonce

Chapitre 10 : Nagisa Shiota

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By Chocopatate

J'ai beaucoup de mal à écrire en ce moment, désolée.

∆∆∆

- Comment te sens tu aujourd'hui ? Demanda la femme aux cheveux roux assise près de son lit.

Le garçon regardait par la fenêtre, l'air distant. En deux jours, elle n'avait pas su lui extirper beaucoup de mots. Il n'avait jamais autant parlé que la première fois où ils s'étaient vu, mais cette courte conversation ne suffisait pas pour comprendre le problème du garçon. Enfin, le supposé problème, car rien ne prouvait qu'il allait mal  - du moins aucune preuve concrète. Mineha-sensei avait froidement dit que les accès de colère étaient fréquents chez les adolescents, surtout ceux très stressés, et qu'il ne fallait pas s'inquiéter plus que cela. Il était évident que Nagisa était un garçon stressé : élève dans un collège d'élite, complexé par son apparence et apparemment moqué par ses camarades  - c'etait en tout cas ce que les deux filles qui souhaitaient lui rendre visite avaient expliqué. Aujourd'hui, elles ont eu le droit d'entrer dans sa chambre, mais le collégien n'avait pas été très réactif. Les médicaments, s'était-il justifié, et elles l'avaient cru.

- Nagisa-kun ?

Ça devait être la quatrième fois qu'elle l'appelait. Il était vraiment ailleurs.

- Oui ? Repondit-il faiblement. Je vais bien.

- Peux tu préciser ? Qu'est ce que tu ressens exactement ?

Les yeux du garçon passèrent de la fenêtre au mur.

- Je n'ai plus aussi mal que le premier jour. Rio et Kayano dont passées tout à l'heure, elles étaient de bonne humeur, comme d'habitude. Ça m'a soulagé.

- Du soulagement, je vois . . . Rien d'autre ?

- . . . Coupable.

Il avait baissé les yeux, toujours aussi honteux d'avoir fait une chose pareille. C'était le troisième jour que la jeune psychiatre essayait de comprendre ce qu'il s'était réellement passé, et il disait toujours la même chose : "j'étais en colère, et je regrette maintenant". La tristesse et la culpabilité étaient tout ce qu'elle arrivait à tirer de lui, pourtant elle était certaine qu'il y avait autre chose.

- Nagisa-kun ?

- Oui ?

- Combien de personnes sont venues te voir depuis que tu es ici ?

Elle le savait parfaitement bien, mais elle voulait voir comment il réagissait.

- Cinq.

- Cinq ?

- ... Non, quatre.

Il avait oublié que Koro-sensei était passé le voir illégalement, et que le personnel médical ne savait rien de sa venue.

- Quelqu'un d'autre est venu sans qu'on ne le sache ?

- Non . . . C'était un rêve.

- Un rêve ?

Le garçon aux cheveux bleus n'avait jamais été très doué pour mentir, mais pourtant ses mots sortirent sans qu'il n'ait eu à beaucoup y réfléchir.

- Oui . . . J'ai rêvé de mon père donc... Je pensais que... -il soupira- En vérité il n'est sûrement même pas au courant que je suis ici.

Un sourire triste tordit ses lèvres tandis qu'il fermait les yeux. La psychiatre y vit là une brèche dans laquelle s'engouffrer et qui lui permettra peut-être d'accéder aux pensées du collégien.

- Tu aimerais qu'il soit là ?

- ...Non, il se serait disputé avec ma mère et je me serais senti mal.

- Pourquoi tu te sentirais mal lorsque tes parents se disputent ? Pourquoi ils se disputeraient ?

- Parce que c'est toujours de ma faute... C'est à cause de moi qu'ils ont divorcés...

- Comment ça ?

- Ils... N'étaient pas d'accord sur certaines choses... Sur mon... Éducation . . .

Il se mordit la lèvre. Il n'allait quand même pas dire qu'aucun d'eux ne voulaient de lui ! Sa mère voulait une fille et son pere ne voulait pas d'enfants. Ils les avaient entendu une fois, juste avant le divorce : son père aurait préféré que Hiromi avorte ; il se trouvait trop jeune pour avoir un enfant.

- Tes parents se disputent souvent ?

- Actuellement non, puisqu'ils ne se voient jamais. Je déjeune juste avec mon père trois ou quatre fois dans l'année . . .

- Il n'y a pas eu de garde partagée ?

- Non... Mon père... Il dit qu'il n'a pas le temps ni l'argent de s'occuper de moi à plein temps...

- Mais encore ?

- Ça le derange.

- Quoi donc ?

- Moi.

- Tu déranges ton père ?

Le collégien hocha doucement la tête. Il était nerveux, ce sujet le mettait mal à l'aise.

- Il y a un problème avec ton père ?

- N-non... On s'entend plutôt bien . . .

- Alors pourquoi penses-tu que tu le déranges ?

- I-il... Il ne voulait pas d'enfants... Il a laissé ma garde à ma mère... Parce qu'élever un enfant n'etait pas compatible avec ses projets de carrière...

- C'est ce que tu penses ou ce qu'il t'a dit ?

- Un peu des deux... Il m'a dit qu'il ne se sentait pas capable de s'occuper d'un adolescent seul...

- Je vois . . . Et qu'en pense ta mère ?

Il se crispa.

- Hum... Elle . . . e-elle n'aime pas beaucoup mon père... Elle trouve qu'il fait une mauvaise figure paternelle. Elle dit qu'il n'aurait jamais été capable de s'occuper de moi, et que c'est une bonne chose que ce soit elle qui m'élève.

- Et qu'est ce que tu en penses, toi ?

- Oh euh... Je ne sais pas trop... Ma mère s'occupe bien de moi, et je vois mon père de temps en temps, je n'ai pas de quoi me plaindre.

- Vraiment ?

- Pardon ?

- C'est vraiment ce que tu penses ? Que les choses sont très bien comme elles sont ?

- Euh... Oui ?

Il ne fait que répéter ce que sa mère lui a dit, il n'a pas l'air convaincu de ce qu'il avance. La psychiatre avait déjà vu de nombreux cas comme ça : quand des parents se séparent, celui qui a la garde convainc son enfant que la présence de l'autre n'était pas nécessaire afin de minimiser le manque ressenti après son départ.

- Nagisa-kun, ton père ne te manques pas ?

- Eh bien... Si un peu, mais c'est normal... On ne peut pas se voir tout le temps.

- Tu aimerais qu'il soit là ?

- Où "là" ?

- Ici, à l'hôpital, dans cette chambre, pour voir comment tu vas.

- Vous... Vous avez déjà posé la question . . .

- Mais tu n'y a pas répondu.

- Si ! J'ai dit que s'il venait, ma mère -

- Je ne veux pas savoir comment ta mère réagirait, mais ce que toi tu en penserais, Nagisa-kun.

Surpris, le garçon resta muet quelques secondes. Il dévisagea la docteure aux longs cheveux orangés, ne sachant pas quoi lui répondre. Il finit par baisser les yeux et balbutier une courte phrase d'un air désolé :

- J-je ne voudrais p-pas le déranger... Il a sûrement d'autre choses à faire . . .

- Des choses plus importantes que son propre fils ?

- . . . D-du... travail ?

Akira soupira. Ce garçon avait un sacré complexe d'infériorité... Il en viendrait presque à culpabiliser de vivre ! Elle se demandait d'où venait ce problème... Etait-ce dû au manque d'attention que lui portait son père ? Non, il n'y avait pas que cela. Elle détailla le garçon du regard : petit, frêle et peu confiant. Ses longs cheveux bleus tombaient sur ses épaules, et sa peau claire était parsemée de bleus violacés et de bandages bien serrés. Son corps était mince -presque maigre- ses traits fins semblaient presque féminins, et ses mains jouaient nerveusement avec le drap tandis que son regard se perdait dans le mur.

- Est-il seulement au courant que tu es hospitalisé ?

Nagisa tourna les yeux vers celle qui lui avait posé cette question et pencha la tête sur le côté.

- Non, je ne pense pas, répondit-il après une courte réflexion.

- Personne ne le lui a dit ?

- Je ne veux pas l'inquiéter... Ma mère ne l'appelle jamais, je ne pense pas qu'elle ait envie de le voir. Ma vie n'est pas en danger donc il n'a pas à se déplacer . . .

- Mais ce n'est pas à vous de decider de cela. C'est ton père, il a le droit de savoir ce qu'il t'arrive. Ensuite, qu'il vienne ou non, c'est son choix.

- Je...

Une main se posa sur le lit dans un tintement métallique. Nagisa y vit une bague argentée ornée d'une forme mythologique. En remontant du regard le bras auquel appartenait cette main, il tomba sur le sourire bienveillant du docteur Akira.

- Nagisa-kun, tu as le droit de vouloir des choses. Chacune de tes actions n'a pas des conséquences négatives sur la vie des autres, pense un peu à toi aussi.

Le collégien ne répondit rien. Elle ne sait pas... Elle ne savait pas ce qu'il vivait quotidiennement, les problèmes auxquels il fait sans cesse face. Elle ne savait rien de lui. Je suis un poids indésirable pour tout le monde.

- Je sais ce que tu penses.

Il détourna son regard. J'en doute fortement...

- Je sais que tu penses que c'est de ta faute. Le divorce de tes parents, les blessures d'Akabane et les dégâts du parc d'attraction. Mais ce n'est pas vrai Nagisa-kun...

- Bien sûr que si !

Il avait légèrement haussé le ton, mais sa voix ne possédait pas de colère   - seulement de la tristesse et du regret.

- Nagisa-kun, si tes parents ont divorcés, c'est parce qu'ils ne s'aimaient plus. J'ai tord ?

- Non mais...

- Nagisa-kun, si tu t'es énervé contre Akabane-kun c'est parce qu'il t'avait provoqué.

- Non ! Enfin si, mais je...

- Nagisa-kun, tu es un être humain, tu le sais, n'est-ce pas ?

Il la devisagea avec incompréhension : quelle était cette question qui sortait de nulle part ? Toujours souriante, l'adulte reprit :

- Tu es un humain, tu as des sentiments et tu as le droit de les exprimer. Tu peux être triste que ton père ne soit pas à tes côtés. Tu peux être en colère contre Akabane-kun qui t'a embêté. Tu peux ne pas être toujours d'accord avec ta mère. Tu peux te sentir blessé par les remarques de tes camarades. Nagisa-kun, toutes tes émotions, il ne faut pas les garder en toi. Tu n'es pas un poids, tu es un humain. Tu as le droit d'être un peu égoïste de temps en temps.

Il ouvrit la bouche et la maintint ainsi plusieurs dizaines de secondes, incapable de formuler la moindre phrase. Il était perdu, totalement perdu. Cette femme était en train de remettre en question toute son existence et toute sa vision du monde. Il s'était toujours efforcé de causer le moins de problèmes possible... Il avait toujours eu si peur de déranger qu'il avait prit l'habitude de se faire le plus petit possible. Être égoïste n'était pas dans ses habitudes, se morfondre non plus. Il avait toujours mauvaise conscience lorsqu'il se plaignait, il se rappelait que sa vie n'était pas si terrible que cela et que ce serait insultant pour d'autres plus malheureux de ne pas apprécier sa situation.

- Nagisa-kun, tout le monde a des problèmes. Ce n'est pas en te murant dans ton silence qu'ils se régleront.

- Mais...

Hésitant, il referma la bouche, avala sa salive, réfléchit encore quelques secondes et reprit :

- Mais je vais bien... Je vis bien... Tout ça, ce ne sont pas des raisons de me plaindre.

- On a toujours des raisons de se plaindre. Certaines sont certes plus légitimes que d'autres, mais cela ne t'empêche pas d'avoir un regard critique sur ce que tu vis.

- Je... Mais il y a tellement d'autres gens qui souffrent . . . Mes larmes ont peu de valeur.

- Bien sûr qu'elles en ont, Nagisa-kun ! Chaque souffrance mérite d'être évaluée et guérie ! C'est bien de relativiser et de rationaliser, mais tu ne dois pas oublier que tu es un être subjectif avec une perception du monde bien personnelle.

- Je vis avec ma mère, elle s'occupe bien de moi. Je vois mon père, il ne m'a pas abandonné. Mes profs sont sympa, je m'entends bien avec les camarades de classe bien et, bien que mes notes ne soient pas terribles, je m'améliore. Je vais bien, docteur.

- D'accord, mais qu'est ce que tu ne me dis pas ?

- . . . Comment ça ?

- Tu m'as dit les raisons pour lesquelles ta vie n'est pas si mal. Et si maintenant tu m'expliquais ce dont tu veux te plaindre ?

- Je...

- Ne me dit pas que ta vie est parfaite, ce serait un énorme mensonge. Il y a forcément des choses qui te dérangent. Ce n'est pas parce que ça ne te vaut pas de te faire interner ou de te suicider que tu dois minimiser cela.

- . . .

- Par exemple : tu vois ton père de temps en temps, ce qui est mieux que rien, mais tu ne le vois pas tout le temps. Il n'est pas aussi présent dans ta vie que tu ne le souhaiterais. L'absence de figure paternelle est une raison de mal-être. Quoi d'autre ?

La femme le regardait droit dans les yeux, d'un regard si profond et si sérieux que cela le fit frissonner. Il se souvint de la première fois que quelqu'un l'avait regardé ainsi, la première qu'il sentit qu'on le voyait vraiment. C'était Aguri Yukimura, l'ancienne et défunte professeure de la Classe E. Son sourire joyeux et ses yeux sincères avaient perçu la profondeur de sa personne, et Nagisa avait été vraiment touché de cela. Il avait retrouvé cette attitude chez Koro-sensei et Karasuma-sensei  - bien que ce dernier sourit peu souvent. Il adorait cette sensation, ces yeux qui le faisaient sentir vivant, ce sourire qui le rendait réel. Avec cette psy aussi, il arrêtait de se sentir transparent. Alors, dans toute sa consistance, il se permit de lui répondre.

- Je n'ai pas de bonnes notes, je suis dans la pire classe en fait... Et les autres élèves se moquent tous les jours de nous à cause de ça...

Akira hocha la tête pour toute réponse, ne voulant pas interrompre le bleu.

- Et Karma... Franchement il m'énerve parfois. Si arrogant et si égoïste ! Il a toujours une idée derrière la tête, il faut se méfier de lui mais... Je suis trop naïf, et trop gentil aussi, alors à chaque fois je me fais avoir.

Il s'arrêta un court moment, puis reprit :

- Je suis faible, terriblement faible. J'aimerais tellement être plus fort... Pas que physiquement, mais aussi mentalement. Je suis incapable de dire non, incapable de me faire entendre, incapable de m'imposer ; c'est pourquoi je me fais manipuler et que je me retrouve toujours dans des situations qui ne me plaisent pas . . . Karma trouve ça amusant, lui ne fait que jouer mais moi... J'aimerais pouvoir lui dire ce que je pense de cela.

Il fronça les sourcils en prononçant ces mots, comme s'il se rappelait de souvenirs dérangeants en même temps qu'il parlait.

- De toute façon, même si je lui dis, je ne pense pas qu'il m'écouterait. Karma n'écoute personne. Si seulement il pouvait comprendre... Comprendre que je veux juste... Être à son niveau . . .

Il se mordit la lèvre, plongé dans ses réflexions. La psy l'observait et l'écoutait en silence ; il s'ouvrait enfin à elle.

- Si seulement tout le monde pouvait comprendre ce que je pense, ce que j'aimerais... Mais...

Il serra le drap dans son poing. Tant de choses le faisaient souffrir ! Comment pouvait-il exprimer cela en mots ?

- J'ai juste tellement l'impression d'être invisible, tout le temps. On m'a toujours répété de ne pas causer de problèmes aux autres, de ne pas déranger les grandes personnes, donc peut-être, enfin sûrement que, à force d'entendre cela, j'ai fini par me sentir coupable de penser ou de faire certaines choses... des choses pourtant normales... Les profs me traitaient de bon à rien à cause de mes notes, les gens de mon âge se moquent tout le temps de mon apparence, mon père me faisait me sentir indésiré, et ma mère n'est jamais satisfaite quoi que je fasse, alors . . .

Il ne finit pas sa phrase, il n'en avait pas besoin, il s'était fait comprendre.

- Quelle est ta relation avec ta mère ? demanda doucement l'adulte

Nagisa chercha ses mots, qu'était il censé répondre ? Sa mère etait sa mère, elle s'occupait de lui comme elle le devait, même si parfois elle débordait un peu...

- Ma mère, finit-il par expliquer, est une femme plutôt sévère... Elle insiste pour que j'ai de meilleures notes pour pouvoir intégrer un bon lycée et ensuite suivre les meilleures études... Je suppose que, comme tout les mères, elle veut ce qu'il y a de mieux pour moi . . .

Même si elle exagère parfois.

- Ce qu'il y a de mieux pour toi, ou pour elle ?

- Pardon ?

- Nagisa-kun, ta mère t'a-t-elle déjà demandé ce que tu voulais faire ?

- Euh... Non . . .

- Alors comment pourrait-elle savoir ce qu'il y a de mieux pour toi ?

- Parce que... Elle a déjà vécu, elle... Elle sait ce qu'il m'attend, elle sait ce qu'il me faut . . .

- Et tu es d'accord avec elle ?

- Hum... Je ne suis pas sûr d'être capable de faire ce qu'elle me demande... Je ne suis pas très fort à l'école.

Il se gratta l'arrière de la tête en forçant un sourire gêné. Ses doigts filèrent à travers ses cheveux lâchés ; il grimaça. Il n'aimait pas lorsqu'ils étaient comme ça. Kayano lui avait apporté des élastiques, où les avait-elle mis ? Il fouilla la pièce du regard pendant que la psy reprenait la parole.

- Tes notes sont la seule chose qui dérangent ta mère ?

Nagisa arrête sa recherche silencieuse mais continua de fuir le regard de la rousse. Il n'aimait pas parler de sa mère. Les souvenirs de sont cauchemar le firent frissonner. Non, pas maintenant... N'y pense pas. Il ne voulait pas s'en rappeler ; ça n'etait qu'un mauvais rêve ! Il se mordit la lèvre et tourna la tête vers la fenêtre, mais le ciel nuageux ne le détendit pas.

- Nagisa-kun, y a-t-il un problème avec ta mère ?

- Non, il n'y a aucun problème avec elle.

Son ton était trop sec, et sa réponse trop rapide ; il le savait parfaitement.

- Nagisa-kun, tu sais que tu peux me parler, n'est ce pas ?

- Il n'y a rien à dire. Juste . . .

- Juste ?

- Rien. Nous ne sommes pas d'accord sur certaines choses, c'est normal. Ma mère est sévère, et elle est parfois un peu trop... intrusive... Mais personne n'est parfait.

- Comment ça, intrusive ?

- Eh bien, elle pose des questions embarrassantes et se mêle toujours de ma vie scolaire... Elle prend des décisions sans m'en parler, et se justifie toujours en disant que c'est pour m'assurer un bel avenir. Mais en fait, elle veut juste que je suive ses rêves, que je réussisse le parcours universitaire qu'elle a toujours souhaité de faire. Et pour ça elle n'hésite pas à prendre rendez-vous avec mes professeurs   - ou même le proviseur -   à m'envoyer à des cours du soir ou à des stages de langue. Elle n'écoute pas quand je lui dit que je m'en sors plutôt bien, même si je suis dans la Classe E. Elle ne m'écoute jamais en fait, il n'y a que ce qu'elle veut qui compte.

- Et toi, tu voudrais qu'elle te lâche un peu...

- Oui. J'aimerais pouvoir traîner un peu avec mes amis après les cours sans qu'elle me harcèle de messages parce que je suis en retard et que je devrais consacrer mon temps à faire augmenter mes notes.

- Elle te surveille toujours ?

- Je ne sais pas... Parfois elle m'empêche de voir mon père parce qu'elle trouve que je passe suffisamment de temps avec lui . . . Alors que je ne le vois que 3 fois par an.

- Et tu te sens comment par rapport à cela ?

- Je ne peux rien lui dire... Elle s'occupe bien de moi, même quand mon père était encore là c'était elle qui faisait la plupart de mon éducation . . .

La femme à la chevelure flamboyante se leva lentement et se mit à marcher dans la pièce. Nagisa la suivit du regard pendant qu'elle se dirigeait vers la fenêtre. Elle l'ouvrit et un léger courant d'air rafraîchit la chambre, faisant se soulever quelques mèches des deux personnes présentes.

- Dis moi Nagisa-kun, reprit le docteur en psychiatrie, t'es tu déjà senti étranger à ton propre corps ?

- Euh . . . Oui . . . Parfois...

- As-tu déjà eu envie d'être quelqu'un d'autre ?

- Bien sûr...

- Nagisa-kun, était-ce désagréable lorsque tu as perdu le contrôle de toi-même ?

- . . . Eh bien . . . oui . . .

- Si tu souhaites être différent mais que tu n'aimes pas quand tu n'es pas toi, alors comment fait-on ? Que comptes-tu faire ?

- . . .

La question était pertinente, l'adolescent ne savait pas quoi répondre. Il ne s'était pas rendu compte du paradoxe de la chose, et maintenant il se sentait un peu idiot. Il ressemblait à ces enfants gâtés jamais satisfaits, ceux qui veulent plus que ce qu'ils ont et qui sont déçus lorsqu'ils l'obtiennent. Nagisa voulait être fort, et il l'avait été en battant Karma, mais maintenant il regrettait amèrement. C'était assez ridicule.

- Nagisa-kun, continua l'adulte, laquelle de ces parts de toi déprécies-tu le plus : celle par laquelle tu te définis, ou celle à laquelle tu ne t'identifies pas ?

Le collégien reformula l'interrogation dans sa tête : est ce que je préfère le moi qui subit les critiques des autres, ou bien la voix qui fait du mal à mes proches ?  Dit comme ça, ce n'était pas compliqué de choisir. En pur pacifiste, il était évident qu'il préférait le premier. Mais si on tournait la question autrement ? Est ce que je veux rester le Nagisa fragile qui se fait marcher sur les pieds, ou est ce que je vais laisser le Nagisa fort et violent fermer le clapet à tous ceux qui m'ont insulté ?  Ici, la seconde option était plus tentante. Il avait le pouvoir de se faire respecter... Non, de se faire craindre. Envoyer ses amis à l'hôpital n'est pas de la force ; s'il était incapable de contrôler sa colère alors il ne devrait pas la laisser dominer. Il savait se défendre grâce aux cours de Karasuma-sensei, il n'était plus si fragile. Il n'avait pas besoin de cette chose qui l'encourageait à faire couler du sang. Il ne voulait pas faire de mal, il voulait juste se faire accepter ; et ce n'est pas en tapant sur ses harceleurs qu'il y arrivera. Il préférait encore subir les coups que d'en donner, de toute façon personne ne s'en prenait à lui ces derniers temps. Seuls Rio et Karma le taquinaient parfois, mais les profs et les élèves du bâtiment principal s'étaient calmés depuis les derniers examens trimestriels.
En y réfléchissant bien, Nagisa était bien tel qu'il était. Il avait quelques soucis, comme tout adolescents, mais il n'avait pas tant besoin de changer.

Il leva les yeux vers la psychiatre qui se tenait de profil par rapports à lui. Son visage n'était même pas visible.

- Je ne veux pas être quelqu'un d'autre.

La femme se tourna vers lui et croisa son regard azur.

- Je préfères rester comme je suis.

Elle lui sourit amicalement en disant :

- Dans ce cas, reste toi-même, Nagisa-kun. Ne laisse pas les autres te définir.

Je ne suis pas sûr d'arriver à faire ça, par contre, se dit le collégien. Le docteur Akira recula de quelques pas en gardant la même expression bienveillante sur le visage.

- Souviens toi de ce que nous avons dit aujourd'hui, d'accord ? Je suis heureuse d'avoir pu parler autant avec toi. Tu n'as pas à vivre tout cela en silence, et tu n'as pas à t'en vouloir d'être comme tu es.

En parlant, elle se dirigeait vers la porte de sa chambre. Était-il déjà l'heure qu'elle s'en aille ? Nagisa n'avait pas vu le temps passer.

- Mais, Akira-sensei... Je ne sais même pas qui je suis . . .

- Regarde.

Elle designa la tablette accrochée à son lit, sur laquelle était écrit quelques informations sur le jeune garcon ; nom, prénom, âge, sexe, groupe sanguin. Après l'avoir lu rapidement, Nagisa la regarda à nouveau avec incompréhension. Elle posa la main sur la poignée et dit une dernière phrase.

- Nagisa-kun, c'est normal de se demander qui l'on est. Ce qui compte, c'est ce que tu fais de toutes ces interrogations et de leurs réponses.

Puis elle sortit de la pièce, laissant le garçon seul dans ses réflexions. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas autant cogité. Il se demandait si sa philosophie de vie était la bonne. Il avait passé quinze ans à se faire discret tout en priant pour se faire remarquer ; avait-il toujours été si paradoxal ? Il eut l'impression que oui. Mais il parvint à conclure quelque chose, et il savait qu'il n'y serait pas arrivé sans cette longue conversation avec la psychiatre. Ce n'etait pas si mal, finalement, de parler avec un professionnel . . . Il avait eu tord de penser que seuls les fous avaient besoin d'une consultation. La femme médecin avait raison, il était utile d'exprimer ses sentiments, de parler à quelqu'un. Nagisa se sentait mieux. En plus elle avait réussit à mettre le doigt sur quelque chose et il ne parvenait pas à sortir cette pensée de sa tête   - peut être parce qu'elle n'était pas mauvaise.

Si je ne sais pas encore qui je suis, cela signifie que je peux devenir qui je veux.

En tout cas, une chose était sûre : il s'appelait Nagisa Shiota, avait 15ans, vivait chez sa mère, étudiait au collège Kunigaoka, faisait 1m59, était dans un hôpital, et avait pour mission de tuer Koro-sensei avant la fin de l'année scolaire.

Un collégien, un apprenti assassin, un être humain.
Voilà qui il était.

🌙🌙🌙

SURPRISE !!!

Je me suis dit que si Karma avait son propre chapitre, alors pourquoi pas Nagisa ? Après tout, c'est lui le personnage principal, non ? Bon, OK c'est complètement con, puisque Nagisa a sa propre fanfic, mais bon voilà, c'est fait alors tant pis.
J'ai travaillé sur l'opposition des deux segments : celui de Karma était entièrement narratif tandis que celui de Nagisa est très dialogué. Akabane fait sa propre introspection de lui même en exprimant physiquement ses sentiments, alors que Shiota continue de réprimer ses émotions quand la psy lui essaie de lui faire ouvrir les yeux.

Je ne sais pas vraiment que penser de ce chapitre, j'ai bien aimé l'écrire mais je ne sais pas s'il aidera à l'avancée de l'histoire.

Bon, à la prochaine ❤️

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