Drago reprit conscience quelques heures plus tard, et pu distinguer par la fenêtre que la lune dominait à présent le ciel, éblouissant le lac de ses reflets enchanteresses. Le jeune garçon essaya de bouger d'un millimètre quand tout son corps se révolta de douleur.
« Merde... J'avais oublié à quel point ça faisait mal... », pensa-t-il rageusement, discernant, à la lumière faible des bougies, chacun de ses membres couvert de bandage.
Et c'est avec une extrême prudence qu'il tourna la tête de côté, observant l'infirmerie déserte, quand son regard s'attarda sur le lit présent juste à côté du sien, ce dernier était caché par un long rideau en satin blanc. Son cœur bondit alors dans sa poitrine, comprenant que le lit ne pouvait être occupé que par Granger. C'est alors que tout lui revint en mémoire, le conflit dans la neige, sa course dans le château, Potter lui jetant un sort à se demande. Cette journée semblait irréelle, hormis la douleur ressentie dans son corps tout entier, qui elle, était bien réelle. Le Serpentard mourrait d'envie de se lever et de découvrir le corps meurtris de la Gryffondor, se demandant quels sévices elle avait bien pu subir.
Il inspira alors profondément, dans le but de se donner du courage, et se releva lentement, ignorant les contestations brutales émises par tous ses muscles encore endoloris. Assis sur son lit, il se releva avec toute la douceur possible et fit quelques pas légers en direction du lit voisin.
D'un geste délicat, il repoussa le rideau et s'avança près de la couche. Hermione y était allongée, les yeux clos, le souffle régulier, les mains crispées sur l'oreiller, tout portait à croire qu'elle dormait, ce qui irrita le garçon. Il ne voyait aucune blessure, pas une seule trace de sang, aucun membre arraché. Pourquoi s'était-il donc infligé un Sectumsempra ? De dépit, il fit volte face, et dans sa brusquerie, fit tomber le drap qui recouvrait le corps de la jeune fille. Maudissant Poudlard et le drap en même temps, il se retourna pour le remettre en place, quand toute son imposante stature se figea. La Gryffondor portait une chemise de l'infirmerie, tout comme Drago d'ailleurs, dévoilant des traces de sang séchés sur ses cuisses, qui de toute évidence découlaient de plus haut. Le cœur au bord des lèvres, il remonta la chemise de la jeune fille, tétanisé par l'effroyable vérité qui s'imposa alors à lui.
« Ce n'est pas possible, elle n'a quand même pas été... violée... ? », se dit-il la gorge nouée.
Il fit glisser la chemise jusqu'au ventre de la jeune femme, oubliant totalement le manque d'intimité que son acte représentait, quand il constata, soulagé, que le sang s'était écoulé d'encore plus haut, et non pas de la féminité de la fille. Il continua alors son ascension plus sereinement, quand son cœur loupa un battement. Le ventre de la victime avait été estropié, de toute évidence par une arme blanche. Les diverses blessures étaient légèrement recouvertes d'un onguent, afin d'accélérer le processus de guérison. Alors qu'il allait recouvrir le corps mutilé, il observa davantage les diverses coupures présentes sur le ventre de la femme, qui ressemblaient étrangement à des lettres, et c'est avec effroi qu'il pu y lire :
<center>Sang de bourbe</center>
Tremblant de peur et de rage, le Serpentard couvrit la femme brune et s'écroula au sol, la tête entre les mains. C'était trop pour lui, toutes les terribles images de la précédente guerre surgirent dans son esprit, ponctuées de souffrance, de torture, de pleurs et de morts. Des larmes d'impuissance coulèrent le long de ses joues blêmes, les mêmes larmes qu'en 6ème année. Il pensait en avoir fini avec tout ça, et voilà qu'une fille qu'il méprisait s'était faite attaquée de la pire des façons qui soit, et si cet individu s'était attaqué à une femme qui n'était rien pour lui, hormis un exutoire, qu'allait-il advenir de sa mère ? Il fallait absolument qu'il rentre la protéger de ce Mangemort au plus vite.
- Ron... Ron...
Le grand garçon blond stoppa net ses sanglots, essuya ses quelques larmes d'un geste rude et se redressa pour examiner la Gryffondor. Cette dernière avait les paupières mi-closes, luttant contre le sommeil, la main faiblement tendue, espérant saisir celle de son ami. Drago l'observa répéter dans un doux murmure le nom de Weasley, quand il attrapa la main qu'elle lui tendait et la serra délicatement. Un léger sourire se dessina alors sur le visage de la jeune fille, puis elle ferma complètement les yeux en soupirant d'aise. Les doigts fragiles de la femme, enlacés à ceux du garçon, semblaient le brûler, comme si tout son être se consumait à ce simple contact. Il caressa du pouce le dos de la main qu'il tenait fermement, les yeux fixés sur la victime, le souffle court et l'estomac noué. Il se dit alors que cette sensation ne pouvait pas être réelle, que cette scène était même surréaliste, Drago Malefoy main dans la main avec Hermione Granger, c'était tout simplement impossible. Tout aussi improbable que le mouvement qu'il amorçait vers la chevelure brune emmêlée de son ennemie, les caressant lentement et délicatement.
Il devenait vitale qu'elle se réveille maintenant, qu'elle lui lance un regard bien mauvais et hautain, pour qu'ainsi il recouvre la raison. Parce que le fait de la voir allongée devant lui, meurtrie et fragile, ne l'aidait pas du tout à sortir de son obsession à l'égard de la lionne. Il resta dans cette position un long moment, effectuant sans discontinue les mêmes caresses dans les cheveux et sur la main de la fille, quand il ne tint plus debout, épuisé d'être resté stoïque durant des heures. Et c'est avec un déchirement étonnant, qu'il rompit le contact et s'allongea dans son propre lit, espérant que ces derniers heures n'avaient été qu'un de ses nombreux songes qui le persécutaient sans cesse. Et c'est avec soulagement, qu'il glissa dans le monde du sommeil.
<center>Je dois soigner tellement de douleurs, effacer tant de rancœur.
Certains meurent avant l'heure, pendant que mon cœur se meurt.
Je dois me décider à pardonner, pour ne plus me tourner vers le passé.
Hier encore j'étais assis sur les genoux de ma mère,
Elle me parlait, je ne comprenais rien, je souriais quand même,
Aujourd'hui tout a changé, j'ai grandi puis maintenant je ne fais que de découvrir la vie...
Je dois soigner tellement de douleurs, effacer tant de rancœur.
Certains meurent avant l'heure, pendant que mon cœur se meurt.
Je dois me décider à pardonner, pour ne plus me tourner vers le passé.
Maintenant j'ai l'impression de me diriger vers le passé,
De m'attarder sur des choses sans intérêt,
Je m'oublie, je perds le fil, de la vie, de ma vie...</center>
Drago se réveilla lentement, une douce mélodie résonnait dans son esprit sans qu'il ne puisse en saisir le sens. Les yeux toujours fermés, il sentit le soleil sur son visage et en déduisit donc que le jour s'était levé. Il perçut aussi une pression sur sa main, de toute évidence quelqu'un était à son chevet et lui tenait la main. C'est alors qu'il entendit des gens parler, un peu plus loin.
- Vraiment Hermione, si tu savais comme je suis désolé ! Si cet abruti de Malefoy ne m'avait pas stupefixé, Harry n'aurait pas eu besoin de m'accompagner chez Hagrid, et nous t'aurions suivi jusqu'au château, soupira la voix d'un garçon que Drago reconnut aussitôt.
- Ne t'en fais pas Ron, je me sens déjà mieux, murmura Hermione d'une voix faible.
- Et tu ne sais vraiment pas qui c'était ? demanda une autre voix masculine, certainement celle de Potter.
- Non, il était cagoulé, même sa voix ne me disait rien, je suis...
- Ne t'avise pas de t'excuser Hermione ! s'exclama le grand roux.
- Ron a raison. Ce n'est pas de ta faute si tu n'as pas pu te défendre, et sache que McGonagall est sur tous les fronts pour retrouver le coupable.
- J'espère qu'il sera vite arrêté..., chuchota la jeune fille. D'ailleurs, qui est-ce-qui m'a trouvé ?
- C'est Liam, mon colocataire. Une chance qu'il soit passé par là, il a du faire fuir ton agresseur sans le savoir, répondit Harry d'une voix grave.
Un long silence plana alors dans l'infirmerie, que Madame Pomfresh brisa de sa voix haut perchée.
- Il est temps d'y aller, ils ont besoin de repos, siffla-t-elle.
Des bruits de pas se firent entendre, le garçon blond reçu alors un baiser fugace sur le front avant de sentir la pression sur sa main se desserrer.
- Repose-toi bien Hermione, nous repasserons plus tard, souffla Harry.
- Et ne te tracasse pas à cause de cette histoire, McGonagall est tenace, elle ne lâchera pas l'affaire, renchérit son ami.
La porte claqua, certainement Pansy qui venait de sortir de l'infirmerie. Drago pu alors entendre les deux garçons s'éloigner du lit de la victime, quand elle interpella le rouquin d'une petite voix.
- Ron... Ron ?
- Oui ?
- Après avoir été agressée, je me suis dis que... Je me suis dis que je n'allais pas refaire la même erreur qu'il y a quatre ans...
- Que se passe-t-il ? s'enquit-il, visiblement inquiet.
- Je... Heu... Le bal ! Voudrais-tu être mon cavalier pour le bal de Noel ?
Un nouveau silence. Un petit rire. Des bruits de pas précipités.
- Bien sur Hermione, dès que tu seras remise sur pieds, je t'emmènerai danser, même si je vais me couvrir de ridicule dès que j'aurai effectué trois pas sur la piste de danse, répondit-il, la voix souriante.
Des bruits de pas. Une porte qui claque. Le silence.
Drago consentit enfin à ouvrir les yeux, et fut éblouit par la lumière présente dans la grande salle. Le bal... Comment cette fille pouvait-elle seulement penser à aller danser, alors qu'elle venait d'être agressée ? Aller danser, avec Weasmoche, drapée d'une magnifique robe en soie, tourbillonnant dans les bras de ce grand benêt roux, collée à lui... Cette simple vision révulsa le jeune homme, une sang de bourbe avec un mendiant, vraiment abject. Abject au point d'agripper le drap férocement, la gorgée nouée et la poitrine en feu.
- Tu es enfin debout ?
Le Serpentard tourna vivement la tête et aperçu la jeune fille, assise dans son lit, le teint terne, les yeux cernés, le fixant froidement. Souhaitant échapper à ce regard glacial, il cacha ses yeux de son avant-bras tout en chuchotant :
- C'était lui, n'est-ce-pas ?
- C'était lui.
- Que s'est-il passé ?
- Il m'a stupefixé alors que j'avais le dos tourné, il a sorti un poignard, le même que la dernière fois, et il m'a... Bref, pendant qu'il était en train de... Il m'a dit que comme j'étais une fille de moldu, il préférait me blesser avec une arme de moldu. Puis il m'a dit de te passer le bonjour, et qu'il te ferait bien pire.
La Gryffondor avait dit tout cela d'une voix ferme et neutre, comme si elle venait de réciter une leçon, ce qui glaça le sang du garçon. N'avait-elle donc pas de sentiments ? Ne ressentait-elle pas des émotions ? A croire qu'elle était inhumaine. Le garçon allait lui en faire part, quand son regard se posa sur elle. Assise dans son lit, comme si elle était dignement installée dans un trône, elle ne lâchait pas des yeux le mur en face d'elle, se concentrant au maximum pour ne pas faire trembler sa voix, alors que quelques larmes glissaient silencieusement le long de ses joues blêmes.
- As-tu eu peur ? demanda-t-il, la mâchoire serrée.
Hermione détacha alors son regard du mur pour croiser celui de son interlocuteur. Ses yeux brillaient, sa lèvre supérieure tremblait, ses mains ne cessaient de remonter le drap un peu plus haut sur elle.
- Il a dit qu'il aurait aimé m'entendre hurler, mais qu'il ne pouvait pas prendre le risque d'être découvert. Il a dit...
Sa voix se mit à trembler de plus belle, ses mains continuant de s'activer férocement sur le drap.
- Il a dit..., bégaya-t-elle, il a dit qu'il était déjà content de voir mes yeux de sale sang de bourbe tétanisés par la peur et la douleur...
Le corps tout entier du Serpentard se réchauffa d'un coup, et non pas de désir, mais de rage. Le jeune garçon avait envie de s'arracher les cheveux, de crier sa haine, de frapper quelqu'un, n'importe qui, et de tuer ce salopard de Mangemort, faible au point de s'en prendre à une élève alors qu'elle avait le dos tourné.
- Alors oui Malefoy... Oui, j'ai eu peur, et j'en tremble encore de terreur, conclu-t-elle, les yeux trempés de larmes, mais à l'allure férocement déterminée.
- Putain..., lâcha-il, le visage entre ses mains.
- Oui, comme tu dis, néanmoins ça ne va pas suffire à nous sortir de là, rétorqua-t-elle.
- Je croyais que cette histoire ne te concernait pas ! répliqua le garçon en l'observant à nouveau.
- Un homme a gravé sang de bourbe sur mon corps, avant de me dire de te passer le bonjour, je pense que maintenant ça me concerne aussi.
- Pourquoi tu n'as rien dis à Weaspot et McGonagall ?
- Parce que je ne veux surtout pas mêler Harry à cette histoire, pour une fois qu'un Mangemort n'en a pas après lui... Il ne doit rien savoir, admit-elle fermement. Quand au professeur McGonagall, je ne pense pas qu'elle sera d'une grande aide, après tout, la source du problème, c'est toi !
Le regard de la jeune femme se fit alors perçant. Drago pouvait y lire le mépris qu'elle ressentait à son égard, ainsi que de la rancœur à l'idée de devoir affronter un Mangemort par sa faute. Et elle avait raison. Le Serpentard lui-même ne supportait pas l'idée d'être lié à ce point à la Gryffondor, surtout après tous les signaux d'envie que lui envoyait son corps dès qu'elle s'approchait trop de lui. Passer du temps avec elle afin de résoudre ce grave problème allait être un supplice pour le garçon.
- Je vais t'aider à le retrouver et à l'arrêter, continua-t-elle, mais à une seule condition.
- Laquelle ? demanda-t-il, soupçonneux.
- Tu m'aides pour le vase !
- Tu viens d'être attaquée ! Tu ne pourrais pas arrêter avec cette histoire de coupe, merde ! pesta le Serpentard.
- C'est ça ou rien ?
- Putain... D'accord..., grommela-t-il.
Le vase, le Mangemort, les vacances... Bien trop de moments en compagnie de la lionne au goût du garçon. Alors qu'elle s'allongea pour se reposer, il repensa aux caresses qu'il lui avait donné quelques heures plus tôt, et au plaisir qu'il avait ressenti à ces gestes tendres.
- Pourquoi as-tu demandé à Harry de t'attaquer ?
Le garçon blond sursauta tout en maudissant Potter d'avoir craché le morceau.
- Je devais savoir si c'était bien le Mangemort, répondit-il, la voix la plus anodine possible.
- Tu ne pouvais pas attendre le lendemain matin ? insista-t-elle, perplexe.
- Non ! siffla-t-il brutalement, dans le but de mettre fin à cette conversation dérangeante.
Et c'est dans un silence pesant et gênant que l'étudiant s'allongea à son tour, lui tournant le dos ostensiblement, imité de peu par la jeune femme. Drago laissa alors courir son regard par-delà la fenêtre, conscient qu'il ne parviendrait pas à trouver le sommeil de sitôt. Le souvenir des marques présentes sur le corps de la Gryffondor lui revint en mémoire, accompagné du récit troublant qu'elle lui avait avoué. Alors qu'il imaginait le supplice qu'elle avait du endurer, il agrippa brutalement son propre ventre de sa main droite, laissant ses ongles s'enfoncer dans sa peau et dans l'une de ses plaies, tout en serrant de toutes ses forces. Une douleur vive se fit alors ressentir, néanmoins, il n'atténua pas la pression de sa main, devinant que sa camarade de chambre devait souffrir encore davantage.
« Par Merlin, qu'est ce que je la hais ! Pourquoi est-ce que ça doit être elle ? Il y a des dizaines d'autres sang de bourbe, mais putain, pourquoi Granger ? Je ne veux pas d'elle dans ma vie, je ne veux pas qu'il la touche encore une fois, je veux juste que cette histoire se termine et ne plus jamais lui parler » pensa-t-il farouchement, la main crispée contre son ventre.
Les minutes défilèrent lentement dans l'infirmerie, à tel point qu'au bout d'une heure, et ne parvenant toujours pas trouver le sommeil, Hermione s'extirpa sans un bruit de son lit. Une fois debout, elle fit quelques pas afin d'être sûre que ses jambes puissent soutenir son poids. Elle jeta un coup d'œil en direction du garçon allongé non loin d'elle, ce dernier lui tournait le dos, le corps figé, elle se dit qu'il devait certainement dormir. La jeune fille s'avança d'une démarche incertaine vers la salle de bain, grimaçant de douleur à chacun de ses pas. Une fois à l'intérieur, elle se dirigea vers un lavabo afin de se rafraichir avec de l'eau fraiche, quand en se relevant, elle aperçut son reflet dans la glace. Son visage était blafard, ses lèvres craquelées et son regard vide. D'un geste léger, elle souleva sa chemise et effleura du bout des doigts ses blessures. Madame Pomfresh lui avait expliqué qu'il était important de ne pas mettre de pansements dessus, dans le but de laisser l'onguent cicatriser correctement les diverses plaies.
<center>Sang de bourbe</center>
D'un geste brusque, elle lâcha sa chemise qui recouvrit à nouveau son corps. Sans pouvoir les retenir, les larmes affluèrent et se mirent à couler sans s'arrêter. La Gryffondor tremblait, frémissait de frayeur et de rage, de terreur et de colère et ne souhaitait qu'une seule chose, être chez elle, en sécurité chez ses parents. Jamais elle n'aurait pu penser que le Mangemort de la Cabane Hurlante la suivrait juste pour la faire souffrir, et comment avait-il pénétré l'enceinte du château ? Elle avait eu si peur et si mal à la fois, alors qu'elle était toute seule, dans l'incapacité de se défendre. A présent, tout son être vibrait d'effroi, l'obligeant à s'assoir à même le sol, se mordant le bras pour ne pas crier son désarroi et sa haine. Afin de ne pas réveiller le Serpentard, la jeune femme resta au sol un long moment, sanglotant silencieusement, les dents enfoncées dans sa peau pour l'empêcher de hurler.
- Ca ne t'as pas suffit ? Il faut en plus que tu te broies toi-même la peau ? lança une voix trainante derrière elle.
Drago n'avait pas réussi à trouver le sommeil, c'est pourquoi il avait entendu la jeune femme se rendre dans la salle de bain, avant de percevoir quelques sanglots discrets, ce qui l'avait poussé à se relever. L'observer alors qu'elle était en train de se mordre l'avant-bras pour ne pas crier était aussi absurde que les marques de griffures qu'il venait de s'infliger sur le ventre. Le Serpentard se dit alors, que la fille affalée dans la salle de bain, était aussi mal en point que lui.
Hermione ne se retourna pas lorsqu'elle entendit la voix morne du garçon, sachant pertinemment que celui-ci se tenait au pas de la porte, elle pouvait même imaginer son sourire goguenard déformer son visage filiforme. Elle lâcha néanmoins son bras, et pu observer quelques gouttes de sang s'en échapper, dû à sa morsure trop virulente. Son besoin de hurler et de faire du mal ne s'était pas pour autant atténué, bien au contraire. Le garçon s'approcha lentement d'elle et s'accroupit à ses côtés. Il lui prit alors le menton de sa main droite, la forçant à plonger son regard dans le sien.
- Tu es faible, susurra-t-il d'un ton neutre.
Ce n'était même pas une insulte, mais une simple constatation, c'est ainsi que le perçut Hermione, ce qui l'irrita au plus au point. Elle lui en voulait terriblement, ce garçon, cet homme à présent, était en train de gâcher sa dernière année à Poudlard, était en train de la rendre... faible. Il avait raison, à cause de lui et de ses ennuis, Hermione avait l'impression de ne plus être que le reflet d'elle-même. Son agression à Pré-au-Lard, son altercation avec le Serpentard le soir de la ronde, et l'attaque de la veille... Elle se dit alors que l'année dernière avait, certes, été plus éprouvante, davantage dangereuse, cependant, l'an dernier, elle était accompagnée de ses amis, de ses proches, de tout le monde. Alors qu'aujourd'hui, la seule personne au courant de ce secret était Drago Malefoy, ce qui augmenta encore davantage son sentiment de solitude.
Le visage toujours maintenu par Drago, elle avança sa propre main et la fit glisser lentement sur le visage du jeune homme, du front, jusqu'au menton, obligeant le Serpentard à fermer les yeux lorsqu'elle couvrit de sa paume ses paupières. Ce n'était pas une caresse, loin de là, la pression de sa main sur le visage livide de son interlocuteur était forte, dénuée de toute douceur, et tous deux en étaient conscients. A travers ce geste, la jeune femme souhaitait lui transmettre toute son amertume, c'est pourquoi elle chuchota faiblement :
- Je le suis autant que toi...
Le garçon blond rouvrit les yeux, dévoilant ainsi ses iris gris enflammés, puis relâcha le visage de l'étudiante avant de se relever et de s'en aller.
« Oui... Sauf que moi je l'ai toujours été... », pensa-t-il vivement.
Hermione ne s'attendait pas à ce qu'il se redresse paisiblement, sans un geste ou une parole de dégout parce qu'elle avait osé le toucher. La Gryffondor avait espéré le rendre fou de rage, pour qu'elle puisse à son tour y répondre et laisser exploser sa propre colère. Mais de toute évidence, il ne semblait pas vouloir combattre aujourd'hui, certainement dû à ses blessures, infligées par le Sectumsempra d'Harry. Dépitée, elle se releva à son tour et regagna l'autre pièce.
- Tu as eu de la visite ce matin, dit-elle le plus naturellement du monde, souhaitant ainsi faire oublier au garçon sa crise dans la salle de bain.
- Hum..., se contenta-t-il de répondre, fouillant tous les placards, certainement à la recherche de son uniforme.
- Toute la bande des Serpentards au grand complet, avec Pansy en tête bien sur ! railla-t-elle sans savoir pourquoi.
- Elle est passée deux fois...Quelle idiote, marmonna le jeune homme pour lui-même, continuant ses recherches.
- Pas du tout, elle n'est passée qu'une seule fois, très tôt ce matin, avec tous tes petits potes !
L'étudiant se retourna alors vers son interlocutrice, la mine perplexe.
- Elle était là ce matin, quand Weaspot était en train de te parler, et elle était seule.
- J'étais sure que tu ne dormais pas, rétorqua-t-elle le sourire en coin. Ce n'était pas Pansy, mais la fille qui m'avait ordonné de lâcher ma baguette alors que je te demandais, gentiment, de baisser la tienne, ajouta la Gryffondor d'un ton ironique.
Drago rechercha alors dans les méandres de son esprit embrumé une quelconque trace de cette fille...
- Je m'appelle Astoria Greegrass !
Ca lui revenait. Une fille de 6ème année un peu bizarre. Et cette même fille lui avait tenu la main et l'avait embrassé sur le front. Il trouva cet acte incroyablement insultant, jugeant qu'il était le seul à pouvoir décider quelle personne pouvait se montrer à ce point intime avec lui. Il réalisa alors qu'Hermione l'observait d'un regard amusé, trouvant visiblement la situation risible, ce qui enragea le fier garçon.
- Dis-moi Granger, alors comme ça on a enfin fait le premier pas ! C'est le fait d'être passé à deux doigts de la mort qui t'as donné le courage d'inviter Weasmoche au bal ? ricana le garçon.
Et c'est avec surprise qu'il vit la femme brune s'élancer vers lui le poing en avant, prête à lui assener un violent coup à la mâchoire, imitant ainsi son impétuosité de troisième année. Cependant, deux facteurs avaient changé à présent. Le premier était l'état de fatigue extrême dans lequel se trouvait la lionne, l'empêchant ainsi de concentrer toute sa force dans son poing. Et le second était l'évolution du garçon, qui à présent était plus grand, plus fort et plus rapide qu'autrefois. Et c'est donc avec un reflexe certain qu'il attrapa la main de la femme brune avant qu'elle ne l'atteigne au visage.
Mais la Gryffondor n'était pas pour autant découragée, c'est pourquoi elle leva son autre poing dans le but de l'atteindre, mais qu'il agrippa de son autre main, sans même un effort. La lionne était comme prise au piège, les poignets maintenus par Malefoy.
- Alors Granger, on abandonne ? se moqua-t-il sans même un sourire.
Puisque étrangement, le garçon n'affichait pas son éternel sourire sournois et triomphant, bien au contraire, son visage était fermé et ses yeux, dénués de toute expression, fixaient attentivement sa prisonnière. Elle tenta alors de se libérer, quand elle sentit les mains du garçon se desserrer, sans pour autant la lâcher. Il fit glisser sa paume contre celle d'Hermione, cette dernière ne parvenant pas à se décrocher du regard profond du garçon. A présent, les doigts de son ennemi s'entrelacèrent délicatement autour de ses propres doigts, sans qu'elle ne sache comme réagir.
- Allez ! C'est l'heure du repas ! Il faut bien manger pour reprendre des forces !
Les deux étudiants sursautèrent en même temps et découvrirent une Madame Pomfresh rayonnante, un plateau repas posé dans chacune de ses mains. Drago relâcha violement les mains de la Gryffondor, le regard fuyant, tout en lui crachant au visage ces quelques mots :
- Putain, tu es répugnante, tu me dégoutes...
Muette de stupeur et de colère, elle allait répliquer quand elle se rendit compte qu'elle était épuisée, son corps souhaitait certainement lui faire comprendre que ce n'était pas le moment de s'élancer vers un duel contre le Serpentard, lui intimant l'ordre de manger, de se reposer, et de reporter ce combat à plus tard. Elle du alors reconnaitre que son ventre endoloris avait raison, c'est pourquoi elle remercia chaleureusement l'infirmière avant d'entamer son déjeuner. Trop occupée à dévorer ce qui se trouvait devant elle, la lionne affamée ne remarqua pas les poings serrés et les épaules voutées de son camarade, qui lui tournait à présent le dos. Elle ne vit pas la difficulté avec laquelle il avalait péniblement sa salive. Et bien sur, elle passa à côté du fait que pour une fois, la mine blême du Serpentard, affichait une légère teinte rosée.