Chapitre 48 - Le sens du devoir

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Ambroise se tenait agenouillé devant son coffre béant. Ses vêtements étaient soigneusement pliés et posés sur le lit, et le double-fond avait été ôté. Lizzie remarqua la bague de saphir, placée bien en évidence sur l'édredon. Elle se souvenait avec tant de précision de la nuit où elle lui avait été offerte.

Lorsqu'il se tourna vers elle, le visage d'Ambroise était tendu et grave. Lizzie en eut le souffle coupé. Elle ne l'avait jamais vu ainsi — si peu maître de lui.

— Que faites-vous ici ? jeta-t-elle.

Le soleil entrait timidement par la fenêtre, éclaboussant ses cheveux d'or. Ses yeux glaçants furent transpercés d'un éclat de lumière, tandis qu'il se relevait.

— Je vous avais offert une rose. Une rose éternelle. Une rose pour que vous n'oubliiez pas de rester en vie. De rester prudente.

Le ton de sa voix la déstabilisa.

Une fois sur le navire, Lizzie avait jeté la rose par-dessus bord, prise d'une impulsion de rage et de désespoir. Elle avait regretté son geste, mais les pétales rouge sang flottaient déjà sur la mer, inaccessible.

— Elle s'est envolée.

Aucune émotion ne transparut sur le visage d'Ambroise. Il avait classé l'information méthodiquement. Il avança encore. C'était pour cela qu'elle le haïssait, parfois. Juste un peu.

Il tenait son poing serré, et, lorsqu'il l'ouvrit, Lizzie aperçut la petite fiole de verre violacé dans sa paume.

— Quand ?

Son regard se figea sur elle, et elle sentit un vif malaise l'étreindre à la vue du flacon vide.

— Ce n'était pas pour moi.

— Pas pour vous ?

— Non.

— Je ne suis pas certain de comprendre.

— Jan ne m'a jamais... touchée.

Elle sentit ses joues s'empourprer. Dieux, elle détestait par-dessus tout avoir cette conversation avec cet homme.

— En êtes-vous sûre ?

— Ce sujet manquait cruellement à mon éducation, rétorqua-t-elle. Mais oui, j'en suis aussi sûre que je peux l'être.

Ambroise pinça les lèvres.

— Alors pourquoi ce flacon est-il vide ?

Lizzie repoussa les images qui l'assaillaient.

— C'était pour une amie.

Elle crut voir du soulagement apparaître dans le regard d'Ambroise. Mais il s'éteignit bien vite, pendant que ses mâchoires se crispaient et qu'une dangereuse lueur brillait dans ses prunelles.

— Êtes-vous en train de me dire que quelqu'un à Fort-Rijkdom, en plus de ce médecin dont vous me parliez et visiblement de Clervie, sait que vous maniez les poisons, Lizzie ?

Le cœur de Lizzie chavira.

— Elle est morte. Elle s'appelait Magdalene.

Sa voix se brisa légèrement, sa vision se brouilla et elle prit une inspiration tremblante pour juguler l'émotion qui venait de s'emparer d'elle.

Ambroise plaça d'autorité la fiole dans sa main. La chaleur de sa propre paume avait réchauffé le verre, mais Lizzie sentit un frisson parcourir son dos.

— Bien, fit Ambroise.

Bien.

Un simple mot.

La Lame des Bas-Royaumes / 1Opowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz