Emménagement

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28 juillet 2035.

Je me tourne. Mes jambes s'emmêlent dans mes draps alors que mes bras ramènent un oreiller contre mon torse. Mon bâillement résonne et mes paupières papillonnent contre ma volonté. Je voudrais seulement me rendormir et comater ici toute la journée.

La chaleur de mon lit. Le silence de la pièce. La solitude de l'appartement. Je suis trop bien. J'ai la sensation d'être sur un petit nuage doré. Je comprends les personnes qui refusent de vivre avec quelqu'un d'autre. Parfois, nous ne sommes jamais aussi bien que tout seul.

Pourtant, la sonnette retentit, me faisant sursauter dans mon lit. Je me mets sur le dos et observe un instant le plafond. Mon cerveau doit se chauffer avant que je réalise que je suis seul. Certes, c'est agréable mais cela veut dire qu'il n'y aura personne d'autre pour aller ouvrir cette fichue porte.

Je grogne et me redresse au moment où des coups frappent la porte d'entrée. Je réussis à m'emparer de mon portable tout en sortant de mon royaume. Je me précipite dans les escaliers et saute même les dernières marches mais le regrette dans la seconde.

Mon corps n'est pas encore en état de marche. Je me tords bien entendu la cheville puis me prend dans le mollet le coin d'un banc que quelqu'un – moi – a mal rangé hier soir après avoir bossé sur la table. Je sautille sur place tout en me tenant la jambe blessée en essayant de ne pas pleurer de douleur.

Les coups reprennent, me faisant lever les yeux au ciel. Les gens n'ont donc aucune compassion pour moi, un samedi matin. Je boite jusqu'à la porte tout en criant :

— J'arrive, j'arrive !

Une grimace de souffrance sur les traits, je déverrouille la porte et l'ouvre prêt à râler auprès de la personne qui ose me lever aussi tôt. Cependant, je me retrouve abasourdi, la bouche ouverte et les yeux exorbités quand je réalise qu'Iven se trouve en face de moi, son sac sur le dos et deux bagages à ses pieds.

Mes neurones ont du mal à comprendre ce qu'il fait là, ce que je fabrique là, comment nous sommes censés agir. Son regard balaie mon corps de haut en bas, de bas en haut. Un fin sourire que je qualifierais de coquin étire ses lèvres fines.

— Je m'attendais pas à un tel accueil !

Lentement. Très lentement. Je baisse la tête sur moi-même, anxieux par ce que je vais découvrir. Torse nu et boxer. Mais le must reste mon érection matinale. Je ferme les yeux et me maudis intérieurement. La douleur de ma cheville n'est rien par rapport à la honte qui m'envahit.

Mon esprit prend une seconde pour me sermonner, de m'être levé sans me cacher un minimum. Derrière cette porte, à la place d'Iven, ça aurait pu être le propriétaire ou une voisine. Dans ce cas, ça aurait été bien pire. Alors je prends une profonde inspiration en me répétant que ce n'est qu'un mec, mon nouveau coloc' et que lui aussi en a, donc je n'ai pas à rougir des réactions mécaniques de ma traitre de queue.

— Que veux-tu ! Je sais très bien recevoir, lancé-je, sans réfléchir au possible double sens de ma phrase.

Tandis qu'il a un léger rire, je me décale, un bras tendu sur le côté pour lui signifier d'entrer. Il ne se fait pas prier et glisse ses sacs à l'intérieur.

— Tu n'as que ça ?

Sans prendre la peine de me répondre, il ressort pour revenir avec une valisette en bois et une toile protégée par un drap blanc. Je fronce les sourcils en essayant d'imaginer comment il a pu tout porter depuis son ancien logement jusqu'ici. Mais il est trop tôt pour une telle réflexion.

— Je te l'ai dit, j'ai pas grand-chose, me dit-il finalement. Juste le strict nécessaire.

Maintenant que toutes ses affaires sont dans la pièce à vivre, nous nous fixons puis je me rends compte que je dois fermer la porte et agir comme un être humain tout ce qu'il y a de normal. Je m'exécute dans la seconde mais la deuxième partie de ma mission est un véritable désastre lorsqu'il remonte la manche de son t-shirt. Mes yeux détaillent les traits géométriques qui se promènent sur sa peau.

stay with me. - idy 5Où les histoires vivent. Découvrez maintenant