Chapitre 30 - Je te parie une pyramide

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La chaise à côté de Risae racla contre le sol, et un corps tomba dessus.

Jiho avait un air sombre sur le visage, et il s'empressa de le cacher dans ses bras qu'il avait repliés sur son bureau. Elle l'observa un instant avant d'essayer de se remettre à son travail, mais son attitude la laissait perplexe.

Il était arrivé dix minutes plus tôt, enjoué et sautillant, alors elle ne comprenait pas ce changement d'humeur. Après un moment, quand elle réalisa qu'il n'avait toujours pas bougé, elle posa son crayon et soupira.

— Qu'est-ce qu'il se passe ?

— Rien.

Elle eut un sourire narquois. Bah voyons.

— Accouche.

— Y a rien, j'te dis.

— Tu étais comme un enfant à qui on aurait offert le meilleur jouet du monde, et là tu déprimes comme si tu venais de rater un examen. Tu t'es fait envoyer balader ?

— Non.

— Alors quel est le problème ?

— J'ai pas de problème.

Elle roula des yeux.

— Très bien, garde tout pour toi et explose. Je ne vais pas passer la nuit ici donc si tu veux parler, c'est maintenant.

Elle s'étira puis reprit son stylo. Jiho ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit.

Le matin même, dès qu'il avait quitté l'hôtel, il s'était empressé de partir pour le temple de Louxor. Il l'avait visité en quelques heures, et un coup de fatigue lui tombant soudain dessus, il s'était assis par terre près de l'emplacement d'un ancien bâtiment aujourd'hui disparu car il n'avait pas souhaité déserter le site immédiatement. Il avait fermé les yeux et avait levé son visage vers le ciel, les rayons chauds du soleil traversant ses paupières.

Il était resté ainsi un moment, laissant son esprit vagabonder. Puis, il avait baissé la tête, avait attendu que sa vision redevienne normale, et avait sorti son matériel de travail de son sac.

Il s'était rapidement rendu compte, au fil de sa lecture, que l'endroit cité dans le texte était sans doute celui où il se trouvait à ce moment même : le logement des prêtres.

Il avait continué de traduire ce qu'il pouvait, avait essayé d'interpréter les mots cachés, et après avoir terminé, un étrange sentiment l'avait envahi. Il avait rangé ses affaires et avait quitté l'enceinte du temple, puis il avait traversé la route encombrée avant de rejoindre le bord du Nil. Il s'était approché au maximum des embarcadères où étaient accrochés de petites motorboats ou de gros bateaux de croisière. Il avait laissé ses yeux parcourir le paysage devant lui, chaque arbre de l'autre côté du fleuve, chaque navire, chaque vague...

C'était ici.

C'était ici qu'il avait reçu son nom. Pourquoi le fait d'apprendre une chose aussi... futile, parmi tout ce qu'ils avaient découvert, le touchait-il autant ? Les gens se moqueraient de détails comme celui-là, voire de l'histoire elle-même. Ils s'intéresseraient uniquement au prince, fils supposé d'Akhenaton, et c'était tout. Ils se ficheraient du récit conté dans ces papyrus, ils ne la prendraient pas au sérieux, et même si c'était le cas, ils n'en retiendraient que les éléments les plus importants. Mais le prêtre, tout le monde s'en ficherait.

Toutefois, tout ça touchait énormément Jiho. Il s'était attaché à ces individus qui avaient vécu il y avait plusieurs millénaires de cela. Lire leur histoire et l'écrire dans sa langue lui donnait presque le sentiment d'être lui-même l'auteur d'un roman. Il avait presque l'impression que ces personnages étaient les siens, qu'il les connaissait mieux que quiconque.

ʟ'ᴀᴜʀᴏʀᴇ ᴅ'ᴀᴘᴏᴘʜɪꜱOù les histoires vivent. Découvrez maintenant