Chapitre 7

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Pdv Maël

Je n'ose pas bouger. Il a posé quelque chose prêt de moi avant de se replier et maintenant que le temps à passé, je crois qu'il s'est endormi. J'entends sa respiration régulière. Il ne doit pas confronter ses cauchemars chaque nuit, lui. Pas comme moi. Je jette un coup d'œil dehors et j'observe ma chambre quelques secondes. C'est étonnant de la voir d'ici. Les murs noirs, les draps noir, le parquet gris foncé... Et mes grandes étagères remplies de livres. C'est l'unique morceau de ma chambre qui est coloré. Prêt de la petite table, sous la fenêtre, je sais qu'il y a un grand tableau comme dans les écoles. Au début on faisait plein de dessins avec Loann et puis le temps à passé et on à commencé à écrire. On s'est proclamés écrivains et photographes, remplissant chaque centimètre de nous incluant photos, mots, bracelets, dessins et lettres...

Ce tableau n'a pas bougé depuis un an. On a rien ajouté ni retiré parce que tu n'es plus là et que c'était toi qui le réorganisait à chaque fois. On rangeait tout dans des petites boites, sous mon lit. Il y en avait une pour chaque chose. Et tu passais des heures à tout remettre en ordre. Parfois tu ne mettais que des mots, d'autres fois ce n'était que des dessins et puis ça arrivait qu'il n'y ai plus un morceau de blanc puisque tu avais tout rempli, ne sachant pas quoi choisir. Je me détourne de cette vision et des souvenirs qui la suivent. Il n'y a personne dans les alentours. Personne sauf lui. Je ne sais plus comment il s'appelle et lui peut toujours chercher mon prénom. Il n'entendra pas ma voix de si tôt, comme tout le monde depuis ce jour. Il est affalé dans son lit, un bras ballant et un petit filet de bave s'échappant de sa bouche entrouverte. Et moi je pense encore à toi, Loann. Tu ne dormais jamais très longtemps pour la simple et bonne raison que tu étais beaucoup trop inspiré pour perdre du temps à dormir. Alors parfois je me réveillais et je t'observais écrire toute la nuit en retraçant la vie de Nietzsche, phrase par phrase. Mon regard tombe sur un petit cahier noir avec un crayon de la même couleur. Je le prends du bout des doigts après avoir vérifié que son propriétaire est toujours endormi. Il m'a écrit quelque chose ? Je tourne les pages, une à une en découvrant des calculs, des dessins ridicules ou des devoirs... Quand je tombe sur une feuille blanche, je retiens ma respiration. Je déteste les pages blanches... Je ne peux pas la laisser comme ça, sans vie. Alors j'attrape le crayon et j'écris quelques mots à son égard.

« Ne pourchasse pas le chaos sans lumière. »

Je laisse le carnet ouvert sur son bureau et je me rapproche du lit juste un instant. Je voudrais juste sentir son odeur une dernière fois. Je sais qu'elle à réussi à m'apaiser cette nuit. Elle et la chaleur qu'il m'a offert... Si je pouvais fermer les yeux chaque soir et me reposer quelques heures comme il me l'a permis... Comme avant. Comme quand Loann était toujours de ce monde.

***

Quand je me suis réveillé et que ma mère était à mes côtés, à sa place, j'ai compris que quelque chose n'allait pas. Je l'ai compris mais ce qui m'échappe, encore aujourd'hui, c'est la raison de ce saut alors que tu ne prenais pas de risques aussi important en sachant que je faisais très facilement des crises d'angoisse surtout quand il s'agissait de toi. C'est toujours le cas sauf qu'aujourd'hui, tu n'es plus là pour les calmer et cette nuit, pour la première fois depuis qu'elles ont commencés, je me suis endormis avec une chaleur apaisante sur les épaules et je crois sans pouvoir l'affirmer, que mes lèvres aussi, n'étaient plus gelées.

Il y a des mots, des regards, des étreintes comme ça... Des petites attentions capables de réchauffer un corps froid et d'insuffler un peu de vie afin de ramener à la fois espoir et âme. Il y a des caresses qui peuvent nous envoyer à ce qu'on appelle le septième ciel mais pour ma part, je m'éloigne un peu trop vite de cette réalité cruelle et ce garçon aux cheveux noirs de jais est parvenu à me sortir de mes souvenirs dans lesquels je suis constamment plongé. Je crois que c'est son souffle chaud sur ma peau qui m'a déconcentré. Je n'avais plus été aussi proche d'un jeune homme depuis un an maintenant alors forcément... Mon corps se souvient et il ne peut s'empêcher de trouver cette sensation agréable. Mais j'appartiens à Loann... !

Je m'assois sur le bord de mon lit en me mordillant la lèvre. Je n'ai jamais essayé de retenir mes larmes et ce n'est pas aujourd'hui que je vais le faire. Je ne vois pas pourquoi je devrais camoufler mes sentiments. Quand on a connu une vie aussi belle et facile que la mienne, il est difficile d'imaginer qu'on pourrait un jour sombrer et buter sur le moindre cailloux. Pourtant c'est ce qu'il s'est passé. Je n'avais jamais connu un plus grand désastre que celui de passer cinq petites heures loin de Loann et voilà que ce dernier à décider que nous ne serions plus qu'un souvenir sur les photos accrochées sur notre tableau.

Mon regard se fixe sur l'une d'entre elles. Il me portait avec un sourire resplendissant, comme toujours. Moi aussi je souriais. On venait de voler des lunettes de soleil à la supérette du coin sans nous en rendre compte. Parce que c'était comme ça, entre nous. Nous étions tellement épris l'un de l'autre que tout disparaissait. On rigolait, on jouait et on faisait des blagues à la con parce qu'on ne savait pas perdre notre sourire. Tu faisais la marelle aussi vite que possible et moi je sautais sur ton dos avant de t'ordonner de courir jusqu'à la maison. Si tu n'allais pas suffisamment vite pour moi, alors je descendais et je me mettais à courir. On se coursait jusqu'à la maison et tu t'effondrais sur mon lit avec moi avant de rassurer ta mère que tout était normal et qu'on allait parfaitement bien.

_Maël ?

Maman... Je ne veux pas affronter son faux sourire et ses belles paroles. Mes parents n'ont jamais baissé les bras. Ils sont restés forts pour moi. Ce sont les pires menteurs que je connaisse mais aussi les meilleurs et je les en remercie.

_Je peux entrer, mon cœur ?

J'ouvre la porte en plongeant dans les bras de ma mère. Elle me serre aussitôt contre son cœur en murmurant mon prénom. J'ai arrêté de compter le nombre de nuits que j'ai passé à pleurer pendant qu'elle caressait mes cheveux. Ça n'a jamais rien changé. Au départ, j'avais besoin d'une présence mais ce n'était pas celle que je cherchais et je l'ai vite compris.

_La voisine m'a proposé un dîner pour nous remercier de les avoir aider pour le déménagement. Veux-tu venir avec nous ? Ton père et moi nous y rendons. Je peux aussi te préparer un petit plat et te l'apporter dans ta chambre, si tu veux.

Je secoue rapidement la tête. J'ai besoin d'être seul. Le visage tourné vers le tableau, une larme roule sur ma joue avant que je ne rejoigne ma fenêtre. Je prends mon matériel de dessin et je fais la seule chose qui arrive à me faire tout oublier : assombrir des pages blanches. La silhouette de ma mère ne tarde pas à se poser près de moi. Elle me regarde noircir ma feuille quelques minutes en replaçant des mèches de mes cheveux derrière mon oreille avant d'embrasser mon front et de vaquer à ses propres occupations. Je t'aime maman. Je sais que tu n'as plus entendu ma voix depuis bien longtemps mais ça ne change pas ce que je ressens pour toi. Merci de veiller sur moi depuis toutes ses années.

NoyadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant