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Je ne pouvais pas dire que j'avais peur, non, j'avais bien pire que ça. Je n'étais pas seulement terrifié, j'étais carrément terrorisé. Tout ce que Maman avait dit me tournait dans la tête, sur le fait que je ne devais pas m'isoler, ou trop lire, ou être silencieux sinon les autres se moqueraient de moi. Je m'étais jusque là persuadé que tout irait bien demain, lors de mon premier jour au collège, mais ce soir, tout seul dans mon lit, ça me semblait inconcevable.

Parler à des gens m'était quasiment impossible à moins d'y être contraint, j'allais donc forcément m'isoler des autres, et ils allaient se moquer de moi. Sans parler des professeurs qui seraient beaucoup moins gentils qu'à l'école, ils se ficheraient bien de savoir si je parle ou non, et pourquoi je ne le fais pas. Il y a tellement de monde dans un collège !

Il y aurait aussi des gens bien plus vieux que moi, eux aussi ils se moqueraient de moi.

Je tournai la tête vers le miroir accroché au mur à côté de l'armoire pour m'y observer. J'y vis un petit garçon, dont les joues étaient couvertes de larmes, dont les yeux étaient bouffis, et dont les cheveux lui retombaient devant les yeux. Il était vraiment mince, trop sans doute. Même moi j'avais envie de me moquer de lui tant il faisait pitié.

C'était décidé, je ne voulais pas y aller. Si c'était pour devenir la risée de la classe, autant rester à la maison. Après tout, ils me disaient tous que lire des livres me rendaient intelligent, je n'avais pas besoin d'aller à l'école. Si seulement ça n'était pas obligatoire...

Je m'assis sur le lit, tournant le dos au miroir.

Je ne voyais pas comment ça pouvait bien se passer, ça allait être une catastrophe. Je signais pour quatre ans de souffrance, j'en étais persuadé. Ils allaient me trouver bizarre, c'était sûr. Tout cela me faisait tellement peur.

Dans mon ventre, un sentiment étrange s'installa, un mélange de vide et de terreur. Un poids vint comprimer ma poitrine m'empêchant de respirer correctement. Je respirai vite, beaucoup trop vite, et mon cœur aussi s'affolait. Il y avait une voix dans ma tête qui me hurlait que j'allais mourir, ici et maintenant, tout seul dans le noir de ma chambre, sans personne pour empêcher ça. Les sanglots se firent plus forts alors que je commençais à transpirer, et à trembler de partout.

Ce n'était pas comme d'habitude. Je me sentais vide et oppressé et en danger, comme si tout autour de moi pouvait me tuer. Les bruits de ma respiration sifflante me rendaient fou, ils résonnaient dans mes oreilles et emplissaient la pièce. J'avais besoin d'aide. Mes propres émotions étaient en train de me dévorer.

La porte de la chambre s'ouvrit, la lumière s'alluma et Papa apparut face à moi.

"Hey, Jimin, respire, il s'assit à côté de moi, tout va bien d'accord ?"

Je voulus lui répondre que non, tout n'allait pas bien, que ma vie allait devenir un véritable cauchemar à partir de demain, quand bien même elle le soit déjà depuis bientôt deux ans, mais rien ne daigna sortir. Je n'arrivais vraiment pas à respirer.

Papa m'aida à respirer plus calmement en m'imposant son propre rythme. Respirer correctement commença déjà à me rassurer.

"Qu'est-ce qui t'arrive ? Demanda-t-il une fois que je fus un peu plus calme.

- Je...J'ai tellement peur...

- De quoi as-tu peur ?

- Je veux pas y aller demain, Papa, avouai-je en recommençant à pleurer, ils vont se moquer de moi, je vais être tout seul, et ce sera les quatre pires années de ma vie.

- Je suis presque sûr que ça n'arrivera pas.

- Maman a dit que si je parlais pas aux autres, ils se moqueraient de moi... Mais je veux pas leur parler.

Past TimesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant