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Adriana arriva en fin de journée et après avoir discuté avec sa mère sur la localisation de la tombe de leur proche, elle était partie se coucher pour ignorer la peine grignotant son cœur. L'énième dispute avec Mirko l'avait heurtée sincèrement et si cela devait être leurs adieux, il était certain qu'elle regrettait ne pas s'être simplement tue. Malgré ses pensées anxieuses, elle s'endormit rapidement et tôt. Ce fut sa mère qui la réveilla quelques heures plus tard, le téléphone de la maison contre son épaule et un sourire gêné sur les lèvres.

« Désolée de te réveiller, Adi. » Elle s'approcha tandis que la brune s'étirait de tout son long. « Un appel pour toi. Ça a l'air important, la... personne... la personne a lourdement insisté. »

« Elle t'a dit qui c'était ? »

Elle secoua la tête tout en tendant le combiné. Adriana se redressa et le prit tout en attendant que sa mère parte pour répondre. Elle le mît à son oreille et entendit un souffle lourd de l'autre côté. Son cœur battant la chamade, elle n'arrivait à retenir son effroi. L'idée que Beto l'ait retrouvé était une crainte qui la tenait éveillée la nuit. Avec la colère de Mirko, peut-être l'avait il vendu à son frère. Elle ferma les paupières tout en se concentrant sur sa respiration pour se calmer. Finalement, elle sentit l'adrénaline couler dans ses veines, la gelant elle et ses émotions.

« Allo ? »

Elle sentit sa cage thoracique s'ouvrir alors qu'elle reconnaissait la voix de Mirko. « C'est moi. »

« Pou... Est-ce que ça va ? » Elle s'installa au bord de son lit, ses pieds nus jouant avec le tapis. L'angoisse avait laissé place au calme plein. Lui, était assis contre la tôle du hangar, une cigarette entre les lèvres et du sang recouvrant ses mains. Il ne répondit pas, espérant qu'elle parlerait pour lui. « Je suis rentrée. Je suis dans ma chambre. Et, c'est vraiment la mienne parce que ma mère l'a décoré pour moi, pendant plusieurs années. D'ailleurs, je crois qu'elle a eu peur que je ne revienne aujourd'hui parce qu'elle avait vraiment l'air... soulagée de me voir arriver toute à l'heure. »

« Je la comprends. » Sa voix était enrouée de n'avoir que crié depuis qu'elle avait pris son bus.

« Comment ça ? »

« Tu veux bien continuer de parler, s'il te plaît. »

Il leva la tête pour regarder les étoiles, espérant y voir un signe de sa mère ou de Léo. Toutefois, il n'y avait ici que la pollution de l'air et l'odeur nauséabonde d'un corps brûlé. Lorsque ses hommes l'avaient appelé pour le prévenir qu'ils avaient trouvé un homme aux trafiquants, il s'était précipité pour les rejoindre. Après l'avoir fait parler, il l'avait torturé comme il l'avait été. Puis, il y avait mis le feu, espérant le faire goûter à l'enfer, à cet au-delà qu'il méritait. Malgré la nausée et le dégoût, Mirko était resté jusqu'à ce que les flammes n'aient plus rien pour se nourrir.

« Dis-moi n'importe quoi. »

« Je... » Elle releva son menton pour regarder les alentours, cherchant une idée de sujet. « J'suis désolée pour ce que j'ai dit toute l'heure. J'en pensais pas un mot, j'étais seulement en colère contre ton silence. Tu fais tout le temps ça, te renfermer et me repousser, mais tu n'as rien à perdre avec moi alors tu ne devrais pas. Tu n'as pas besoin de mettre de barrières avec moi. » Elle se laissa retomber contre son matelas pour regarder le plafond, y imaginant son visage. « J'étais honnête quand je t'ai dit être soulagée de te voir en vie mais je suis triste que ça se termine ainsi. Après tout ce qu'on a vécu, j'espérais qu'on ne terminerait pas comme deux ennemis. »

« T'es pas mon ennemie. »

« Tu m'as traité comme tel. »

« Tu te trompes. » Elle voulait rétorquer mais Mirko était décidé à mettre un point au clair. « Je ne voulais pas du café ensemble seulement parce que c'était dangereux pour toi, que tu sois vue avec moi. Comme je voulais que tu partes au plus vite pour la même raison. Je ne veux pas que tu te retrouves près de Beto ou pire, sur un site du Dark Net. Si ça ne tenait qu'à moi, je n'aurai pas fait ça, faut que tu me crois, faut que tu crois encore en ce que t'as vu en moi. » Parce que ça le faisait sincèrement tenir, quand il doutait sur la personne qu'il était, il repensait à Adriana et à ses mots doux. « Parce que ça m'aide à y croire. »

« Qu'est-ce que tu aurais fait alors ? »

« Ne faisons pas ça...Nous imaginer une autre vie. »

Une vie où ils seraient tombés amoureux au premier regard dans le restaurant, une vie on l'amour serait une priorité. À la place, leur vie n'était que sombre violence. Et si Adriana pouvait encore croire au mieux, c'était seulement grâce à sa mère. Mirko n'avait plus cette chance là, il semblait que personne ne pouvait lui donner de l'espoir dorénavant. S'il avait vu une lueur en la brune, c'était seulement sa propre lumière qu'il ne souhaitait pas étouffer par sa propre présence.

« Mirko, t'es encore là ? »

« Ouais. » Elle l'entendît inspirer profondément, sortent de sa rêverie. « Désolé, j'suis... pas dans ma tête ou trop dans ma tête. J'en sais rien. J'sais pas pourquoi je t'ai appelé. Je suis au hangar, en train de bosser, c'était pas vraiment le bon moment. » Mais pendant un millième de seconde, il l'avait vu entre les flammes, accroché au même endroit qu'il y a quelques semaines. Le traumatisme avait déclenché une torpeur telle qu'il était sortit et avait prit son téléphone pour l'appeler. Il connaissait le numéro par cœur tant il avait lu son dossier.

« Tu as peut être besoin de t'éloigner de tout ça, quelque temps. »

« C'est une invitation ? » Ils rirent tout deux légèrement devant l'absurdité de sa question. « Tu sais bien qu'il n'y a pas de vacances pour les Castellano. » La porte derrière lui s'ouvrit. Les hommes sortaient prendre l'air, l'odeur de brûler devenant insupportable à l'intérieur. « J'dois te laisser, j'dois... reprendre. »

« Est-ce que tu rappelleras ? »

Il regarda les alentours à la recherche d'une réponse mais seul l'angoisse le heurta de plein fouet. « J'aimerais pouvoir te dire oui. »

« Et si moi, je t'appelle, si j'ai besoin, tu répondras ? »

« Si tu as besoin, alors je suppose que oui. »

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