Les Etoiles Vagabondes

Chapitre 14

•Victoire•

Quand on pense avoir la vie qu'on rêve, il y a toujours un détail pour nous remettre les pieds sur terre. En l'occurrence ici, mon frère.

Une cinquantaine d'appels manqués et je ne compte même pas les sms envoyés.

-Tu devrais l'appeler Vic. Pour qu'il appelle autant de fois, c'est qu'il y a une raison.
-Je sais ! Reste avec moi le temps, on ne sait jamais si j'arrive à le tuer par la pensée.

Je m'assois au bord du lit en soupirant. C'est le grand moment.

J'attends les yeux figés sur mon téléphone, espérant secrètement qu'il ne réponde pas.

-Allo ? Victoire ?

Premier soupir de ma part.

-Qu'est-ce que tu me veux ?
-C'est maman, Victoire.
-Qu'est-ce que tu veux que ça me fasse ? Si je ne te réponds pas, c'est qu'il y a une raison.
-Maman a eu un accident de voiture, elle est à l'hôpital et te réclame.
-Dis-lui que je suis morte à ses côtés, ou avec papa, peu importe.
-Tu entends ce que tu dis ?! Elle demande à te voir ! Apparemment tu connais celui qui lui a foncé dedans.
-C'est beau de mentir pour me faire revenir. Je suis désolée Axel, mais c'est fini pour moi. Je vis ma vie sans elle, accident ou non, d'une personne que je connais ou non, je ne reviendrais pas. Je me porte bien mieux loin de la capitale.
-Arrête de dire des conneries ! Je te dis qu'une de tes connaissances a agressé maman et c'est ça que tu me réponds ?!
-Oui Axel, je veux vivre ma vie loin d'elle et je veux vivre de la musique.
-Lâche ton délire de chanter et rentre.
-Fait comme moi, cours le plus loin possible. Le plus loin de notre mère toxique. Tu devrais suivre mon conseil, faire ta valise et prendre le premier billet d'avion avec le plus de kilomètres entre vous.
-Victoire ! On ne peut pas tous quitter notre vie et partir loin de tout, dès qu'il y a un problème.
-J'ai fait mon choix Axel, et même si tu ne l'acceptes pas.
-Maman a besoin de toi Victoire. Son pseudo-agresseur, maman dit que tu le connaissais. Les policiers m'ont dit qu'il s'appelait Charli Garreau, ça te dit quelque chose ?

Je m'enferme à clé dans la salle de bain avant de continuer. Je ne veux pas que Ken entende ce qui va suivre, j'enlève le haut-parleur au même moment.

-Si tu avais suivi ma vie de plus près quand j'étais là, tu saurais que c'est le nom de mon ex qui était en prison pour agression, maltraitance physique et mentale. J'ai subi sans rien dire pendant plus de deux ans, j'ai porté plainte et subi un procès face à lui. Papa était là lui, à chaque étape et m'a soutenu, mais évidemment ni toi, ni maman n'était là pour voir ce qu'il se passait alors qu'on en parlait à la maison. Dis-je en essuyant une première larme avec mon avant-bras. Mais tout était tout rose, tout beau comme tu le disais. Je me faisais battre, ramollir mentalement, mes notes chutaient, mon poids descendait en flèche mais « oh Victoire tu dépenses toutes les thunes que tu trouves dans le maquillage » ! Pardon d'avoir voulu cacher les innombrables bleus que j'avais sur mon putain de corps ! Pardon d'essayer de survivre malgré tout.

Je criais ces dernières paroles sans aucune retenu.

-Alors oui, le fait que Charli est foncé et provoqué l'accident de maman est le cadet de mes soucis. Parce que mon dernier souhait depuis qu'il est sorti de prison, est de me retrouver face à l'homme qui m'a fait perdre confiance en moi. Elle savait tout ce qu'il se passait, papa m'avait forcé à lui dire parce que les choses allaient trop loin. Elle a juste haussé les sourcils et continuer sa vie comme si rien n'avait changé, Axel. Balance-moi ce que tu veux, mais une chose est sûre. Le fait que cet homme est foncé dans la voiture de maman n'est pas une coïncidence. Il pense peut-être que je vais revenir au chevet de ma mère, or ça me repousse encore plus mon billet retour.
-Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ? Je suis ton grand-frère !
-Tu rigolais en me faisant remarquer que je perdais du poids ! Fallait que je te dise quoi ? Merci Axel, moi aussi je me trouvais grosse et mon copain me frappe, du coup ça fonctionne comme du sport ! Soit réaliste de tout ce que tu as pu me dire, qui malheureusement m'enfonçait encore plus.