Jarod
J'étais en colère pour de nombreuses raisons, mais j'avais choisi — du moins pour le moment — de diriger ma frustration envers Mademoiselle Parker. Elle affichait délibérément une attitude détestable qui me faisait sentir que j'étais confronté à une parfaite étrangère. Ce constat attisait ma colère, cette fois dirigée vers un autre adversaire tout désigné. Mais qu'était-il donc advenu de la petite fille joyeuse et insouciante qui me sortait de ma monotonie lorsque j'étais encore captif ? Où était-elle et aurais-je seulement « la chance » de la revoir un jour ? J'en venais à mépriser l'optimisme naturel qui se manifestait en moi. Comment pouvais-je croire en un retour possible ? La conversation que j'avais eue avec Kassandra n'avait aucun sens, tout comme les sentiments que j'éprouvais. C'est pourquoi (peut-être) je ressentais cette colère me consumer. J'étais vaincu et confronté à une réalité que j'avais soigneusement ignorée : la petite Mademoiselle Parker ne reviendrait plus. C'était ainsi et je devais l'accepter, me résigner à continuer de jouer le rôle insignifiant de la souris face au chat. C'était notre destin.
Mon estomac grognait, me rappelant que je n'avais rien avalé avant cette intervention, à part un café trop noir et un biscuit trop salé. J'aurais pu accepter le verre qui m'était proposé si je n'avais pas trouvé l'excuse du service pour m'en détourner. Étais-je toujours en service dans de telles circonstances ? Non, et il n'était pas nécessaire de répondre à cette question rhétorique, si ce n'est pour détourner l'attention de ma colère qui me poussait à entrer dans son jeu de provocation gratuite. Pourtant, tu es censé être intelligent et ne pas chercher à paraître impressionnant.
« — Oui, je sais boire, mais je ne peux prétendre rivaliser avec toi, évidemment. » Je n'étais pas de ce genre, pas celui qui attaque sans raison, qui laisse transparaître de l'hostilité dans ses paroles et dans son regard. Il était impossible d'être celui qu'elle avait connu, car elle me poussait dans mes retranchements. Et plus le temps passait, plus je ressentais une certaine aversion envers elle. Du moins, j'exécrais ce personnage qui me faisait face. J'en étais convaincu, elle exagérait et amplifiait les choses. Peut-être devrais-je faire de même pour être à armes égales.
Dehors, la tempête continuait à imposer son rythme, sans se soucier du nôtre. Je n'avais pas peur de la violence des éléments, mais je redoutais de ne pas avoir de porte de sortie cette fois-ci. Ma liberté était ce que j'avais de plus précieux, et je ne pouvais me résigner à la perdre aussi bêtement. Tandis que je réfléchissais, Parker se rendit compte que nous ne pourrions pas compter sur les locataires ni sur les vêtements qu'ils auraient pu laisser à notre disposition à la halte. Elle opta alors pour une approche différente pour se réchauffer. J'aurais dû le prévoir, mais je ne pus feindre ma surprise et ma gêne lorsque je la vis retirer un à un ses vêtements trempés par l'humidité. Je devais absolument allumer le feu pour détourner le regard. Cependant, le peu d'équipement que je portais encore, ainsi que les menottes, rendaient la tâche plus compliquée. Ajoute à cela la vision de Mademoiselle... Stop, Jarod ! J'essayais de me concentrer sur la cheminée, mais je ne pouvais ignorer les battements de mon cœur ni l'excitation que je ressentais face à une telle vision. Une excitation qui me sembla tout à coup mal placée.
« — J'ai déjà vu des femmes en sous-vêtements, tu sais. Ne t'inquiète pas. J'avais simplement oublié à quel point tu te fiches d'être pudique. » J'essayais de dissimuler mon trouble dans l'échange, afin de faire disparaître cette petite supériorité qui épuisait ma patience. Néanmoins, je me retrouvais confronté à la même problématique qu'elle. Mes vêtements étaient eux aussi trempés, malgré l'uniforme. Elle souffla presque immédiatement après que j'aie fait ma demande, puis me regarda de haut en bas avant de claquer sa langue acérée une fois de plus. Je devais me contenir, car nous avions encore plusieurs heures devant nous, et craquer aussi rapidement lui donnerait raison.
« — Tu penses vraiment que je vais essayer de m'enfuir par cette tempête ? Tu ne risques rien en me détachant les mains. Alors arrête de jouer à ton petit jeu, ça devient fatigant. Tu peux tromper les autres, mais avec moi, ça ne marche pas vraiment. » Je m'étonnais moi-même de paraître aussi calme et de sortir une réplique de ce genre. Alors que je pensais avoir un peu de répit, je la vis se lever tout en maintenant son plaid pour donner l'impression d'être habillée.
Sans ses talons, elle avait perdu quelques centimètres, et je dois admettre que cela la rendait tout à coup moins menaçante. En me faisant face, elle me retira mon casque et commença à ouvrir ma parka. Je restais silencieux, incapable de dire quoi que ce soit. Une fois de plus, mon cœur s'emballait, sûrement à cause d'une trop grande proximité. Mon regard, pendant un instant, se perdit dans le sien alors qu'elle attrapait déjà la clé sur la table basse pour libérer un des bracelets de la menotte et me permettre de retirer la lourde parka humide qui entravait la plupart de mes mouvements. Puis elle recula immédiatement. J'étais troublé par cette proximité aussi éphémère que soudaine.
Mon polo blanc collait à ma peau, mais je décidai de commencer par enlever mes bottes pour plus de confort. Une fois retirées, je pus m'occuper de mon polo, non sans difficulté. Il me restait encore mon débardeur de la même couleur, mais c'était gérable, suffisant pour le garder. Je devais toutefois retirer le pantalon noir imposant qui allait de pair avec l'uniforme. Heureusement, j'avais opté pour un caleçon court, ce qui me donnait l'impression de ne pas être complètement nu. « — Voilà ! Maintenant, nous sommes à égalité ! Comme lorsque tu m'as conduit dans le système d'aération avec Angelo et que nous nous sommes retrouvés près des Serres. Il pleuvait à verse ce jour-là. En quelques secondes à peine, nous étions trempés jusqu'aux os, mais tu voulais continuer et découvrir ce qui se cachait dans les serres. Tu t'en souviens ? »
VOUS LISEZ
En pleine tempête
FanfictionUne histoire captivante entre une tempête et des rencontres improbables. Ce récit est un petit cadeau pour les shippers, j'espère qu'il saura vous combler. J'ai inclus un résumé plus détaillé dans l'avant propos, accompagné de quelques notes. Cette...