Episode 1 : Pourquoi perdons nous confiance en nous ?

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    Aujourd'hui, plus que jamais, nous sommes exposés aux autres, à leurs vies, à leurs corps, à leurs amours. En les voyant s'exposer franchement, il est sensé de se demander si leur vie est une norme que nous devrions également suivre et pourquoi lorsque nous les voyons, nous perdons confiance en nous ? Nous allons tenter de répondre à cette question en deux points. Point A, où nous allons évidemment parler des causes de la perte de confiance en soi, puis un point B où nous allons tenter de comprendre comment avoir plus confiance en nous. Pour cela, je vais m'aider de divers exemples, notamment les réseaux sociaux, l'apparence physique et les relations.

    Il me semble clair que les réseaux sociaux et le monde de l'influence agissent à double tranchant sur notre individualité. Quand certaines personnes perçoivent les influenceuses comme une source de motivation, la plupart y trouve un point de comparaison. Et là, la première cause de perte de confiance apparaît : la comparaison. Lorsque nous voyons quotidiennement une chose, on finit par l'intérioriser. Cette intériorisation conduit souvent à une normalisation, posant un problème ici. Nous utilisons souvent les réseaux sociaux pour montrer des aspects de nos vies, nous nous attendons à ce que des amis, des proches, voire des inconnus, consultent nos contenus. Pour ces raisons, lorsque nous publions sur les réseaux, nous mettons en avant des aspects favorables de nos vies, les choses plaisantes à voir, celles qui donnent envie. Pourquoi montrerions-nous au monde entier les choses dont nous sommes peu fiers, les choses déplaisantes ? C'est ainsi que, en consultant nos réseaux, nous percevons la "perfection" des utilisateurs, car seul le positif apparaît. Et c'est ce que nous intériorisons : les vies parfaites, les corps parfaits, les relations parfaites de ces personnes. Nous les normalisons au point où nous finissons par nous demander : mais pourquoi moi je n'ai rien de tout ça ? Qu'est-ce qui ne va pas bien chez moi ?
   Nous voyons un modèle que nous ne sommes pas capables de représenter tout en pensant que c'est quelque chose que nous devrions être capables de faire, et c'est ce qui crée la perte de confiance en nous. Or, cette chose que nous ne sommes pas capables de reproduire, les influenceurs ne le sont pas non plus. Ils ne vivent pas la vie parfaite que nos fils d'actualité nous montrent, mais parce que c'est le seul aspect qu'ils nous montrent, nous partons de ce principe de nous-mêmes.
Le truc avec la perte de confiance, c'est qu'elle ne vient pas seule, et d'ailleurs, elle ne vient pas seulement de nous mais également de l'autre. C'est parce que l'autre m'a fait comprendre que je devais avoir un certain style vestimentaire et que je ne l'ai pas, que je perds confiance. C'est parce que l'autre m'a fait comprendre que je devrais avoir un certain corps et que je ne l'ai pas, que je perds confiance. C'est parce que l'autre m'a fait comprendre que je devrais avoir expérimenté un certain nombre de choses dans ma vie et que ce n'est pas le cas, que je perds confiance. Sans l'intervention de cet "autre", la perte de confiance ne peut pas aboutir. Pour autant, l'autre n'est pas entièrement responsable de la perte de confiance, car c'est parce que j'ai décidé de prendre en compte ses remarques qu'elles ont un effet sur moi.
   Ici, l'autre n'est pas l'influenceuse en elle-même, mais un tiers compris entre les réseaux et nous. Un tiers qui glorifie les posts sur les réseaux sociaux et qui, en même temps, critique les personnes qui ne l'imitent pas.
Cette idée peut être plus parlante si nous l'imaginons dans la "vraie vie", par exemple au collège, qui est pour beaucoup un endroit douloureux car le corps change, nous voyons que nous ne sommes plus des petits enfants mais toujours pas des petits adultes non plus. C'est souvent à ces périodes que les jeunes filles ramassent leurs premières remarques blessantes ou désobligeantes. "Pourquoi tu t'habilles encore comme un enfant ?" "Pourquoi tu es toute plate ?" "Regarde elle, elle est jolie, elle a ça et ça, alors que toi non". Ce tiers réussit ensuite à créer un fossé entre l'individu A et B, l'une adulée et l'autre rejetée, simplement parce qu'elles existent.

   Alors, il est normal de se demander comment faire face à nos singularités dans un monde où nous sommes constamment forcés à entrer dans un moule ? Comment accepter nos différences quand elles sont la raison de notre exclusion ? Il est clair que c'est beaucoup plus simple à dire qu'à faire.
Premièrement, et cela me semble primordial, il faut se faire violence et accepter que le "tiers" ne peut pas avoir le dernier mot sur la perception de notre propre corps. On entend souvent dire "la beauté est dans celui qui regarde" ou encore "les goûts et les couleurs, cela ne se discute pas", mais plus que d'entendre ces phrases, il me semble important de les comprendre. D'abord, la beauté en règle générale est éphémère, elle ne dure jamais. De plus, les critères de beauté changent de pays en pays. Nous ne pouvons pas à la fois correspondre aux normes de beauté américaines où il est apprécié d'avoir une peau légèrement bronzée, des cheveux blond platine et des formes assez prononcées, aux critères coréens où il est apprécié d'avoir de longs cheveux noirs, une petite taille et un corps très maigre voire fébrile, et aux critères nigériens où il est préférable d'avoir des cheveux afro bien volumineux, une grande taille et des courbes voluptueuses. Tous ces critères se contredisent, il n'est donc pas possible d'y correspondre tous. De même, nous ne pouvons pas non plus correspondre aux attentes de l'individu A, B et C, qui ont également des critères différents pouvant potentiellement s'opposer.
   Ensuite, il faut se faire à l'idée que tout comme le fait que nous ne serons pas au "goût" de tous, il faut se faire à l'idée que ce n'est pas parce que l'on ne convient pas à une personne que l'on ne conviendra à personne. Nous sommes les seules personnes aptes à nous définir, mais j'en parlerai dans l'épisode deux : le regard des autres.
  Avoir remarqué que, contrairement à toutes nos amies, nous n'avions pas expérimenté des relations est une chose, mais partir du principe que ce n'est pas normal en est une autre. Parce que nous sommes tous différents, il faut accepter que chaque chose prendra une tournure différente en fonction de l'individu.
  
   Pour finir, si je devais définir avec mes propres mots ce qu'est la perte de confiance, je dirais que c'est la constatation de notre différence et le refus de cette dernière qui nous fait comprendre que nous ne correspondons pas à une norme. Généralement, cette constatation ne se fait pas d'elle-même ; au contraire, elle est le fruit de l'introduction d'un tiers. Lorsque nous perdons confiance en nous, nous voulons à tout prix ressembler à ces modèles mis en avant dans nos sociétés, chose qui, de nos jours, se fait souvent à travers les réseaux sociaux. Nous nous comparons donc et tentons d'effacer nos différences pour mieux nous mélanger. Pour sortir de cette perte de confiance, il faudrait donc accepter notre différence et le fait que nous ne conviendrons possiblement jamais à une norme instaurée par un tiers.

Avant de vous laisser, je voudrais vous présenter une œuvre qui illustre bien mon propos : le Cursed Princess Club ou en français, le "Club des princesses maudites". Il parle justement d'une jeune princesse, Gwendoline, ayant toujours vécu enfermée dans un château avec sa famille, sans contact avec l'extérieur. Un jour, alors qu'elle va rencontrer un prince avec qui elle a un mariage arrangé, elle va le surprendre dire à ses frères qu'il la trouve horrible (physiquement), fait accentué dans le dessin où Gwendoline est volontairement dessinée comme "moche" contrairement à ses frères et sœurs. Ainsi, Gwendoline, qui s'est toujours trouvée jolie car toujours considérée comme telle par sa famille, remet en question son apparence physique. Ici, la première réaction de beaucoup pourrait être "sa famille lui aurait-elle donc menti pour lui faire plaisir ?" Mais je pense sincèrement que sa famille pensait chaque joli mot qu'elle lui adressait. Tout comme elle, sa famille était enfermée dans le château et n'avait donc jamais vu d'autres personnes qu'eux-mêmes. La perception de la beauté de Gwendoline était donc faite à partir de leurs propres critères de beauté. Au final, la question n'est pas "est-ce que Gwendoline est jolie ou non", mais sur quoi est-ce que Gwendoline doit se reposer pour construire sa propre vision de sa personne, de sa beauté. Personne n'a tort ou raison vis-à-vis de son apparence physique, il y a juste des goûts et des couleurs différents.

Lien du webtoon Cused Princess Club : https://www.webtoons.com/fr/comedy/cursed-princess-club/list?title_no=1886

Pretty girls are overthinkersWhere stories live. Discover now