Fin d'un siège

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Le centre d'Atoria était au bord de la reddition après de longs mois de siège. Akam se tenait face à la cité affamée. L'orage grondant des jours passés avait été semblable aux grognements de son estomac insatiable. Les nuages étaient venus de l'est, directement des Monts Tumultueux, ce n'était donc pas surprenant qu'ils aient été chargés de foudre. Les séides les avaient sûrement imprégnés eux-mêmes car les éclairs étaient d'une puissance rare et le tonnerre d'une violence magique. Des rumeurs selon lesquelles la terre aurait tremblé à l'impact circulaient et, au vu des trous qu'Akam apercevait parfois, elles semblaient fondées. Il était évident que les deux camps avaient été touchés.

Désormais, les maladies régnaient souveraines en ville comme à l'extérieur, seuls les plus chanceux avaient su les éviter, ou bien les plus gradés. Akam faisait partie de la première catégorie. Cela allait de soi, l'hygiène des siens était bien supérieure à celle des orcs situés de l'autre côté des murs, néanmoins, personne n'était à l'abri.

Les assiégeants marchant dans la boue nuit et jour avaient vu la fatigue et la maladie se répandre. La fièvre avait frappé des centaines d'orcs, et les chamans étaient, depuis, très occupés. Quelques elfes, eux aussi, entre les mains des médecins et des soigneurs connaissaient de graves contaminations. La vermine s'était répandue plus qu'à son habitude et de larges stocks de vivres avaient péri. Les ravages ne s'arrêtaient pas là, les lignes d'approvisionnement avaient été fortement ralenties, peu de potions et de rations étaient arrivées à destination ce qui entraînait toujours plus d'infections et des rationnements plus sévères. Le fleuve avait débordé avec envergure, inondant une bonne partie de la plaine. Il avait forcé les agresseurs à reculer en épuisant leur force pour sauver le peu de matériel qui pouvait l'être. Peu d'entre eux avait été touché par la foudre mais des morts étaient, tout de même, à déplorer.

À cela s'ajoutaient les dégradations calamiteuses subies par les engins de siège. Certains s'étaient enfoncés profondément dans la boue et d'autres avaient enduré des glissements de terrain ou l'inondation. Les réglages avaient donc été impossibles pendant ces quelques jours d'orage et même à présent, il fallait plusieurs heures et essais pour les régler à nouveau. Les précipitations avaient été si importantes que des machines éloignées de la rive avaient pris l'eau, quand elles n'avaient pas tout simplement été frappées par la colère du ciel. Il fallait donc en changer le cordage ou certaines pièces de bois, mais on ne pouvait rien faire pour les plus endommagées. En atelier, peut-être aurait-il été possible de réparer les structures déficientes ou de remplacer les balanciers détruits mais ici, parmi les tentes et les rats, c'était sans espoir. Lorsqu'on connaît le prix d'un engin de ce type, celui des artilleurs et le temps de travail nécessaire à pareil ouvrage, on visualise le drame et l'ampleur de la situation pour les assiégeants.

La pluie torrentielle avait également affecté les magies des assaillants. Les flammes et boules de feu des elfes voyaient leur efficacité diminuée avec l'humidité ambiante et les quelques sorciers orcs étaient bien trop occupés avec les malades pour avoir encore le mana nécessaire pour tenir la cadence. La magie de foudre était un risque que personne ne souhaitait prendre, son instabilité pouvant s'avérer fatale dans un environnement pareil.

Depuis ce temps désastreux, une atmosphère pesante entourait Garnun et circulait dans ses rues telle la famine, et une odeur persistante, répugnante flottait dans l'air, plus encore qu'auparavant. Le terrain à l'extérieur était difficile et s'y déplacer en courant était périlleux. Cela avantageait grandement les défenseurs qui pouvaient profiter de la hauteur de leurs murs. Cependant, il faisait si humide que les soldats et les civils grelottaient de froid en ce mois d'automne. On pouvait même observer l'eau suinter et perler de la pierre taillée. Ainsi, les peaux grises payaient un lourd tribut à cet orage mais, il était bien faible comparé à leurs ennemis.

Fin d'un siègeWhere stories live. Discover now