Chapitre 17

22 1 0
                                    

Théodora

Je restai encore quelques instants le dos contre cette porte, les yeux fermés. Comme si j'avais besoin de temps supplémentaire pour être prête à affronter les épreuves que j'allais devoir endurer. Mais rien, non rien, ne pourrait m'aider. Oh, Audrey, dis-moi que tu vas revenir et que tout va rentrer dans l'ordre ! J'inspirai longuement pour calmer les tremblements de ma lèvre inférieure. Les larmes menaçaient encore de réapparaître alors que j'en avais déjà versé des milliers. Tout autour de moi, le sol du couloir du deuxième étage était jonché de mouchoirs en papier usagés, et mes yeux devaient être aussi rouges que si j'avais abusé de la consommation de marijuana.

Les bruits s'étaient calmés dans l'appartement de mon trio préféré. J'étais devant leur porte depuis deux bonnes heures, depuis que Baz s'y était enfermé. Je n'osais pas entrer, de toute manière Paolo me l'avait interdit.

— Laisse d'abord sa rage redescendre Théo, m'avait-il avertie, avant de disparaître dans la nuit.

Comme à son habitude, notre second mentaliste avait fui. Il ne pouvait absorber la peine, l'inquiétude et la colère qui régnait dans l'immeuble. Comment lui en vouloir ? Subir ses propres émotions était déjà si difficile, alors rajoutez celle des autres... Les yeux pleins de larmes, il avait demandé en partant à Adrian de le tenir au courant de tout changement.

Adrian et Lorenzo s'étaient chargés de l'installation des nouvelles venues. Et une grosse partie du groupe était réuni avec elles dans mon appartement, percevant à travers les murs le son de la détresse de notre ami.

Je n'avais pas pu rester avec eux. Incapable de m'éloigner de Baz une seule seconde, je m'étais installée ici, à même le sol, contre sa porte d'entrée et j'avais écouté sa fureur : les fracas des meubles pulvérisés, les coups dans le placo, les éclats de verres brisés, les cris de rage et les pleurs. Tous ces sons m'avaient glacé le sang et plongée un peu plus dans une dépression aussi profonde que lors de la disparition des deux frères.

Tous deux s'étaient fortement inquiétés de mon état. Régulièrement, ils étaient sortis de mon appartement pour venir me voir, parfois à tour de rôle, parfois à deux. Ils m'avaient embrassée, serrée dans leurs bras ou quelques fois ils s'étaient juste assis en silence à mes côtés, simple présence réconfortante.

Lorenzo était ivre et avait les yeux rougis, même si je n'avais pas vu ses larmes. Le connaissant, il devait probablement se planquer pour pleurer, tel un chat qui se dissimulait dans le premier buisson venu pour lécher ses blessures. Tout comme Baz... songeai-je, amère.

Adrian était descendu au rez-de-chaussée dès son retour de la mission, et était revenu en nage et les jointures en sang d'avoir trop cogné dans le sac de frappes. Il avait refusé les soins de Johan. Je savais exactement pourquoi : la douleur l'aidait. Tout comme sa rage, qui l'envahissait à chaque minute et que je lisais dans ses yeux à chacune de ses visites dans le couloir. Il irradiait de colère parce qu'il souffrait autant de nous tous...

Depuis une dizaine de minutes, j'étais de nouveau seule dans ce couloir. J'attendais le bon moment. Était-il enfin arrivé ?

Audrey... Une larme coula sur ma joue et je secouai la tête pour stopper mes émotions. Hors de question de pleurer à nouveau ! Je ne devais pas penser à mon amie, ce n'était pas le moment. J'allais bientôt entrer, il fallait que je sois forte pour Baz. Il avait besoin de moi, c'était à mon tour d'être là pour lui, de le soutenir. Après toutes ces fois où il avait trouvé les mots, où il m'avait fait rire, sourire, où il m'avait prise dans ses bras. C'était à mon tour d'être son soutien, son amie.

La porte de mon appartement claqua et la petite souris s'approcha, le visage pâle, des cernes creusés sous ses yeux violets emplis de douceur.

— Tu es prête ? murmura-t-il, d'une voix douce.

LES AFFRANCHIS - T2 : L'équilibre. 🔞Où les histoires vivent. Découvrez maintenant