Sur Des Bandes Dorées

Chapitre 15 : La soirée - Partie 2

La nuit était longue...beaucoup trop longue. Hortensia aurait voulu disparaître plutôt qu'entendre les horribles histoires des récolteuses. Ce n'était pas tant les atrocités dont elles étaient capables qui la choquaient, mais la manière dont elles en discutaient comme si c'étaient de bons souvenirs d'enfance. Elles n'avaient aucune gêne ni aucune moralité.

Son seul réconfort résidait dans le umeshu que ses frères avaient ramené du Japon. Consommé par shooter, il descendait doucement et agréablement. Cet alcool était traitre, mais un excellent et hypnotisant traitre.

— Au fait, Shia ! l'appela Eunbyul de manière amicale en ajustant une de ses mèches roses.

Le petit surnom dénonçait son ivresse, indiquant à Hortensia qu'il était temps de passer à l'interrogatoire.

— Oui ?

— Tu sais...au lycée...je pensais que tu...t'étais teint les cheveux. T'avais un foutu succès avec les mecs...grâce à ta tignasse...rousse. Mais t'étais trop sauvage...comme meuf. Pour ça, ils t'approchaient pas.

— Toujours dans ton coin, avec tes écouteurs et tes dessins, ajouta Miru.

— T'as déjà dessiné des corps nus ? s'emballa DoNah.

— Bah qu'est-ce tu crois ?! Elle a dû en voir des tas en France. Les français sont moins pudiques.

Un éclat de rire les prit et elles continuèrent à se saouler. Elles ne parlaient que d'hommes, sujet que Hortensia maîtrisait peu. Si elle leur confiait que deux hommes seulement avaient connu ses draps, les moqueries fuseraient comme des feux d'artifices. Elle n'avait pas leur incroyable palmarès.

— Les français sont pas mal, je dois l'avouer, fit-elle. Et oui, j'ai dessiné bon nombre de corps nus.

Cet aveu les fit réagir de façon dramatique et elles voulurent plus de détails croustillants.

— Ils sont meilleurs que les coréens ? s'intéressa l'une.

— Je n'en sais rien. Je n'ai aucune expérience avec les coréens, se livra-t-elle pour les mettre en confiance.

— T'es sérieuse ? T'as fait quoi ces 15 dernières années ? se moqua une autre.

— J'ai bossé. Au fait, maintenant qu'on parle de job... Vous faites quoi dans la vie ?

Elle se félicita intérieurement pour sa belle transition. Il était temps de délier les langues.

— On fait un peu de tout, répondit vaguement Miru en haussant les épaules. Mais on s'assure surtout que les gens soient réglos avec le parrain.

— Le parrain ?

— C'est le big boss ! cria EunByul avant que BoRa ne la force à baisser d'un ton. Il aide... plein d'idiots endettés... jusque là ! (Elle plaça une main sous son cou pour accompagner ses paroles). Nous...on ne fait que récolter la maille...qu'ils doivent rembourser.

—- Et s'ils ne remboursent pas ? s'inquiéta Hortensia.

Soudain BoRa et DoNah levèrent un verre pour trinquer. D'elles toutes, EunByul était la plus bavarde et celle qui tenait moins l'alcool. Malheureusement pour Hortensia, il fallait un second umeshu pour toutes les faire parler.

— Aux retrouvailles ! lança la première.

— Et à l'amitié ! ajouta la seconde.

Puis, les verres s'entrechoquèrent avant d'être vidés cul sec comme la tradition le voulait. Hortensia commençait à sentir les effets et heureusement, les chips de poissons lui permettaient de rester consciente. Après tout, elle était en mission.