POV Alex
La nuit s'étire, dense et silencieuse, mais je n'arrive pas à trouver le sommeil. Mia est là, à quelques mètres de moi, et pourtant je ne peux pas me détacher de l'angoisse qui m'envahit. La pièce est trop calme, trop vide, et tout semble suspendu dans l'air, comme si le monde autour de nous attendait que quelque chose se brise.
Je l'observe dans la pénombre. Elle n'a pas dit grand-chose depuis que je suis entré dans la chambre. Elle est allongée sur le lit, le corps légèrement tourné vers le mur. Ses épaules sont tendues, comme si elle attendait quelque chose... ou quelqu'un. Elle a l'air d'une enfant perdue, un masque d'indifférence qui ne parvient pas à dissimuler l'angoisse sous-jacente. Elle est là, mais en même temps, elle n'est pas tout à fait là.
Je reste assis au bord du lit, mes yeux rivés sur elle, essayant de ne pas trop la troubler, essayant de respecter son espace, même si je sais que ça ne change rien à la souffrance qu'elle porte en elle. Je devrais partir. Je devrais lui laisser de l'espace, la laisser respirer. Mais chaque fibre de mon être me hurle de ne pas la quitter. Elle a besoin de moi, même si elle ne le sait pas. Même si elle ne veut pas l'admettre.
Le silence s'étend entre nous, mais c'est une sorte de silence lourd, oppressant, chargé de non-dits et de tensions non résolues. Je me sens comme un intrus dans sa douleur, et je ne peux m'empêcher de me demander si je fais bien d'être là. Peut-être qu'elle a besoin de plus que ça. Plus que ma simple présence.
Je me lève finalement, les pieds me brûlant presque au contact du sol froid. Je ne sais même pas si je veux vraiment partir. Si je suis honnête, je suis en train de fuir à ma manière. Parce que je sais que je ne peux pas réparer ce qui est brisé en elle. Pas ce soir. Pas tout de suite. Et ça me ronge, ça m'étouffe.
Je marche silencieusement vers la porte, la main posée sur le cadre. Un dernier regard furtif vers elle. Ses yeux sont fermés maintenant, mais je sais qu'elle ne dort pas. Elle attend, comme si elle cherchait à repousser l'inévitable.
Je sais ce que je dois faire. Je sais que je ne devrais pas la laisser seule, mais quelque chose m'en empêche. Peut-être une forme de respect pour son espace, peut-être une peur irrationnelle de trop m'impliquer. Parce que si je m'approche trop, si je vais trop loin, je ne pourrais plus revenir en arrière.
Je passe la porte. Elle reste dans la pénombre de la chambre, son visage à peine visible. Je ferme doucement derrière moi, me sentant terriblement coupable. La culpabilité se faufile dans ma poitrine, comme une chape de plomb. Mais je ne peux pas l'aider si je ne sais même pas comment faire face à mes propres démons.
Je descends les escaliers sans bruit, mes pensées un tourbillon. Mes pas me conduisent à l'extérieur du bâtiment, dans l'air frais de la nuit. La brise est glacée, m'attaquant au visage. Pourtant, c'est presque un soulagement. Je suis seul. Aucun regard, aucune question. Juste la solitude, cette vieille compagne à laquelle je me suis accoutumé.
Je m'assois sur un banc à l'extérieur du campus, les mains dans les poches, les yeux rivés sur les étoiles qui semblent me défier. Je suis déconnecté de tout, de cette réalité qui m'étouffe de plus en plus. J'ai l'impression de fuir encore et encore, mais je ne sais pas comment affronter ce qui se cache à l'intérieur de moi.
Je suis tellement loin de tout ce que je devrais être. Et Mia... Mia est là, enfermée dans un monde que je ne comprends pas, dans une souffrance que je ne peux même pas appréhender. Je ne sais pas comment l'aider, et ça me déchire.
L'écho d'une pensée résonne dans ma tête : Je ne suis pas la personne qu'elle pense que je suis .
~
POV Mia
Les jours passent, les cours défilent et, étrangement, je n'ai pas vu Alex depuis cette nuit-là. Ça ne me touche pas, du moins, je tente de m'en convaincre. Je n'ai pas besoin de lui. Ce n'est qu'un mec étrange, un peu trop mystérieux pour mon goût, et puis il est ami avec Hannah, pas avec moi. Alors pourquoi est-ce que je ressens ce vide étrange quand je pense à lui ? Pourquoi est-ce que mon esprit se retrouve à vagabonder vers ses yeux sombres, ce regard qu'il a posé sur moi, la nuit où je me suis laissée perdre un peu plus dans ma douleur ?
Je ferme les yeux un instant, et je me force à ignorer cette sensation, à me concentrer sur les cours. Mais l'absence d'Alex dans les couloirs du campus me ronge plus que je ne veux l'admettre. Il n'est pas là. Il ne m'a même pas répondu aux rares messages que je lui ai envoyés depuis ce soir-là. Et tout à coup, je me sens seule dans cette pièce, entourée de visages familiers mais sans repères.
Hannah m'observe du coin de l'œil. Ça fait quelques jours qu'elle semble plus préoccupée que d'habitude, ses sourcils froncés, ses pensées ailleurs. Elle me parle rarement de ce qui la tracasse, mais aujourd'hui, je la sens plus nerveuse encore. Elle me pose des questions sur mes journées, s'intéresse à mes cours comme si elle tentait de me détourner de ses propres préoccupations. Mais c'est évident. Elle s'inquiète. Et ce n'est pas pour moi.
– Mia, tu as vu Alex récemment ? Sa voix est douce, mais je perçois une certaine tension derrière les mots, comme si elle tentait de rester calme. Mais l'inquiétude dans ses yeux trahit son masque de tranquillité.
Je fronce les sourcils, surprise par la question. Alex ? Il ne m'a pas contactée. Je hoche la tête, feignant l'indifférence.
– Non, pas vraiment... Pourquoi ? Je hausse les épaules, comme si je n'en avais rien à faire. Pourquoi est-ce que ça m'embête autant ?
Hannah mordille sa lèvre inférieure, hésitant à poursuivre. Puis elle se décide finalement.
– Il a séché tous ses cours cette semaine, tu sais... Il ne répond pas à mes messages. Je trouve ça bizarre. Ça ne lui ressemble pas. Je m'inquiète pour lui. Elle parle vite, un peu nerveuse. Je peux voir l'anxiété dans son regard. Hannah est plus sensible qu'elle ne le laisse paraître. Elle ne veut pas en parler, mais je peux lire entre les lignes. Elle s'inquiète vraiment pour Alex, et pas juste comme une amie.
Je ne sais pas quoi répondre. Le silence s'étend entre nous, lourd. Une partie de moi, celle qui s'efforce de rester détachée, veut minimiser ça. Ce n'est pas mon problème. Ce n'est qu'un gars avec des comportements étranges, un peu trop ténébreux pour être sain. Il a sûrement ses propres raisons. Mais une autre partie de moi, plus sourde, plus inquiète, me dit que quelque chose ne va pas.
Alex ne m'a pas laissé son numéro. Il n'a pas montré d'intérêt particulier envers moi, à part cet air protecteur qu'il a parfois, ce qui m'a troublée plus d'une fois. Mais je suis habituée à ce genre de comportements. Les gens cachent toujours des choses. Je ne veux pas creuser, je ne veux pas m'impliquer dans des histoires que je ne comprends pas. Mais Hannah a raison. Il est bizarrement absent. Et tout ça commence à me faire sentir étrange.
Je laisse échapper un soupir, gênée par l'inquiétude que je ressens malgré moi.
– Tu as essayé de le contacter ? dis-je, tentant de paraître détachée tout en jetant un coup d'œil furtif à Hannah.
Elle hoche la tête, mais son regard trahit une frustration sourde. Elle secoue la tête comme pour chasser ses pensées, mais je vois bien que cela la ronge.
– Oui, je lui ai envoyé des messages, mais rien. Il n'a même pas ouvert mes textos. Hannah se pince les lèvres. Je ne sais pas... C'est bizarre. Il n'a jamais agi comme ça avant.
