Marc n'était dans la voiture que depuis cinq minutes lorsque les ennuis commencèrent. Cinq minutes ça peut paraître long, mais lorsque l'on sait ce qui nous attend à la fin de ce délai, ça passe très, mais alors très vite.
-Mais qu'est-ce qui t'es passé par la tête Marc ?! As-tu un instant réfléchi à la conséquences de tes actes ?! Heureusement que ta sœur est arrivée au bon moment, une seconde de plus et... Tu sais bien quoi.
Le visage rieur que son père affichait tout à l'heure était maintenant déformé par la colère. Presque son état naturel. Quel bel acteur était-il quand même : il avait réussi à se faire passer pour un homme sympa et drôle. Oh la blague ! Sans mauvais jeu de mot.
-Oui, heureusement que je suis là, dit Léa de sa voix arrogante. Et puis qu'est-ce que tu lui trouves ? Elle est un peu simplette non ? Comment peux-tu éprouver quelque chose pour elle ? As-tu des sentiments ?
Elle insista sur ce dernier mot, et éclata de rire, visiblement fière de sa blague. Elle par contre n'avait pas fait d'effort. Elle était restée la même peste antipathique.
-Tu ne réponds pas ? Tu es bien silencieux.
Marc débloqua enfin son cerveau et répondit :
"Non, je n'éprouve rien pour elle. J'avais juste envie de voir ce que ça faisait. J'ai bien le droit non ?"
"C'est mal de jouer avec elle, Marc, tu ne sauras jamais ce que c'est que de souffrir parce que quelqu'un a joué avec nos sentiments."
La "voix" douce de Sandra résonna dans le cerveau de Marc. Il aimait profondément sa mère, elle se montrait toujours compréhensive envers lui et s'efforçait de le remettre dans le droit chemin quand il s'en écartait. Elle ressemblait finalement à son père. Ah ! Son grand-père, qu'aurait-il pensé s'il avait encore été là ?
"Donc tu me promets d'arrêter mon chéri ?"
Allez fais-le pour papy... "Oui, je te le promets Maman." Et la discussion fut close.
Lorsqu'il rentra chez lui, Marc s'isola dans sa chambre et bloqua son esprit de nouveau afin que personne ne le dérange et ne recommence à l'engueuler. Encore une chose que lui avait appris son grand-père. Et c'était bien pratique lorsque l'on voulait réfléchir et c'est justement ce qu'il comptait faire. Il voulait réfléchir à ce qui s'était passé. Il repensa au corps d'Emma près du sien, à ses lèvres pulpeuses tout près, à ses yeux gris si expressifs. Il avait senti son cœur battre plus vite que d'habitude, ce n'était pas normal. Il ne devait pas tomber amoureux d'elle, non, mieux, il ne pouvait pas ! Enfin, c'est ce qu'il pensait, jusqu'à présent.
Comment se faisait-il qu'il arrivait à éprouver des sentiments pour elle ? Mais, était-ce vraiment des sentiments ? Non ! C'était juste une simple poussée d'adrénaline. Tous les psychologues le disent, à l'adolescence, le corps lâche des hormones n'importe où, n'importe comment, et le pire n'importe quand. Il pensait qu'en tant qu'humain non-normal, il n'y aurait pas droit. Apparemment il s'était trompé. Etait-ce pareil pour les autres jeunes de sa race ? Il aimerait leur demander. Il ne voulait pas en parler à ses parents. Sa mère lui dirait gentiment que ce n'était rien, qu'il perdait la tête, et son père l'enverrait bouler. Et sa sœur, n'en parlons pas ! Non, ce n'était pas une bonne idée. Des fois il aimerait avoir des amis, comme lui, à qui il pourrait poser toutes ses questions, sans qu'il ait à se soucier de passer pour un extra-terrestre. En attendant, personne n'était là pour lui répondre et il devrait se débrouiller tout seul. Comme d'hab quoi !
Il partit se coucher soucieux mais aussi heureux de sa nouvelle "mission". Il adorait les défis, et Emma et les problèmes qui l'entouraient, en représentait un bien intéressant.
Le lendemain matin il surprit une conversation orale entres ses parents dans la cuisine. Il était tôt, ils ne pensaient pas que Marc se réveillerait de si bonne heure. A vrai dire, il n'avait pas réussi à dormir avec toutes les questions qui lui chauffaient l'esprit. Il avait donc préféré se lever et prendre un bon petit déjeuner. Autant se remplir l'estomac d'après son cours de SVT de l'année précédente. Le cerveau travaille mieux le ventre plein, et il avait besoins que ses capacités intellectuelles soient rechargées au complet. Il pensait déjà à une grosse pile de pancakes lorsque les voix de ses parents lui parvinrent depuis l'intérieur de la cuisine. Il s'arrêta en bas des escaliers, à cinq mètres de la porte fermée. "Pff, pensa-t-il, ils commencent tôt dis donc. Et s'ils pensent que la porte va stopper leur bruit..." Mais il est vrai qu'entre un échange oral à voix basse et un échange mental, la première option est plus discrète quand on fait partie d'une population télépathe. Leurs pensées pouvaient être perçues par n'importe qui, pour autant qu'il se trouve à moins d'un rayon de 100m environ. Après tout dépend des capacités de chacun. Des mots proférés à voix basse étaient donc plus difficiles à percevoir.
Il arrêta de réfléchir, conscient que si ses parents se concentraient sur autre choses que leur dialogue, il se ferait vite repérer. Il bloqua ses pensées et se pencha en avant afin de pouvoir saisir la totalité de l'échange.
"-...impossible.
-Je sais Sandra, mais écoute-moi. Hier durant tout le repas j'ai observé attentivement ses yeux, une lueur que je n'avais jamais vue chez lui brillait.
-C'est parce que tu ne prends jamais la peine de passer du temps et de t'intéresser à lui. Moi je l'ai vue de nombreuses fois.
-En même temps, que veux-tu que je fasse ? J'ai tout essayé, mais depuis la mort de ton père il s'est totalement fermé."
Marc fouilla dans sa mémoire. Il ne vit aucune des dites tentatives de son père. Au contraire, il avait tout fait pour faire souffrir son fils, en lui rappelant qu'il l'avait bien mérité. Que si Marc ne s'était pas mêlé de ce qui ne le regardait pas, rien de tout cela ne serait arrivé. A ce souvenir, des larmes perlèrent aux coins de ses yeux et il baissa la tête. Il les refoula rapidement. Il était fort. Cet évènement l'avait changé pour toujours. Jamais il ne se montrerait aussi faible. Il se redressa et se reconcentra, le regard dur, sans plus aucune trace de tristesse dans ses yeux verts.
"-Et puis n'essaye pas de changer de sujet ! Je te connais, tu le défendras quoiqu'il fasse. Vous êtes pareils, aussi faibles l'un que l'autre. Je l'ai su dès que je t'ai vu, malheureusement, je ne pouvais rien changer à la décision du Gouvernement."
En entendant ces mots, Marc sentit la haine grandir en lui. Il eut soudain assez d'entendre sa mère se faire insulter par son père. Il avait envie de lui casser la gueule comme auraient dit ses amis. Mais il préféra une autre technique, beaucoup moins violente, mais plus intelligente. Il entra dans la cuisine, l'air de rien. Il fit comme s'il avait surpris ses parents en pleine dispute. Il s'arrêta et dit :
"-Vous êtes encore en train de vous disputer ? C'est mieux que le café ou quoi ?" et il bailla longuement.
Son père, encore rouge de colère, se détendit et l'ambiance changea radicalement. Il s'avança pour saluer son fils d'une tape amicale dans le dos. Sandra, lisant dans les pensées de son fils, alla allumer la plaque et commença à chauffer une poêle pour les pancakes. Elle lui sourit et tous s'installèrent bientôt devant leur petit déjeuner en silence. A cet instant, la vie reprit son cours normal.
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UnLovers
RandomCela fait quatre ans qu'Emma est amoureuse de Marc et ce dernier ne semble pas partager ses sentiments. Mais est-ce parce qu'il ne veut pas ou parce qu'il ne peut pas ? Echec après échec, Emma se rend compte que quelque chose cloche chez lui et se m...