Péripéties d'un carabin à l'Hôpital 1

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A peine majeur, j'effectue pendant l'été mon stage infirmier qui est obligatoire pour passer en seconde année. N'ayant quasiment jamais mis les pieds dans un hôpital, je suis intimidé par ces grands couloirs, toutes ces portes alignées, et seul mon reflet dans la fenêtre à l'entrée du service me donne un peu de baume au cœur : je suis fier de porter pour la première fois ma longue blouse blanche.

Perdu au début, je trouve progressivement mes marques et commence à intégrer les subtilités du fonctionnement de la fourmilière hospitalière, que ce soit au niveau des soins apportés aux patients ou des relations entre les différents membres du personnel médical.

Par curiosité je demande l'autorisation exceptionnelle de faire mon service de nuit, l'expérience étant totalement différente. Le personnel est réduit, les lumières tamisées, les couloirs sont vides, et un silence presque inquiétant règne.

Ainsi nous sommes trois, une infirmière, une aide-soignante et moi le bleu.

Vers minuit, j'accompagne l'infirmière dans son tour des chambres, et elle me dit à l'entrée d'une d'entre elles :

- "Tiens remplace la poche et la tubulure du patient par celles-ci et n'allume pas la lumière pour ne pas le réveiller."

Je lui réponds : "Tu l'as purgée (évacuer l'air du tuyau) ?"

- "Oui oui vas-y."

Je m'avance vers le patient, commence à remplacer le matériel et je m'arrête, le doute s'immisçant sournoisement dans ma tête. Je sors de la chambre, regarde à la lumière grésillante la nouvelle tubulure et constate avec effroi une dizaine de centimètres d'air. Les bulles gazeuses dans la circulation sanguine n'explosent pas, elle bouchent les vaisseaux et peuvent entraîner de graves complications, et dans le pire des cas la mort. J'appelle l'infirmière, elle blêmit en constatant sa négligence, minimise les faits et me demande de continuer mon travail.

Plus tard dans la nuit vers trois heures du matin, nous buvons un café dans la salle de pause, et j'écoute passif, les yeux ensommeillés, les banalités qu'échangent mes deux collègues. Le signal d'alerte de la pièce sonne, il indique que la patiente de la chambre 4 a besoin de nous. La discussion entre les deux femmes continue, et elles ne prêtent aucune attention aux sonneries. Quand le bruit strident retentit pour la dixième fois, je me décide d'aller voir ce qu'il se passe. Je rentre dans la chambre, stoppe le bip mural et regarde la vieille dame. Elle est debout, pâle, en sueurs, visiblement mal en point. Voulant aller aux toilettes, je l'aide, mais elle éprouve des difficultés à se mouvoir, nous avançons à peine. Étant dépassé et sentant que quelque chose ne va pas, j'actionne à mon tour le bouton d'appel et essaye en attendant de l'aide, de déposer délicatement la malade devenue livide sur une chaise. Personne ne vient.

Je décide donc de la laisser et d'aller voir mes collègues. Je rentre dans la salle de pause et les vois rire à gorges déployées, j'explique la situation et elles se décident enfin à se lever. L'infirmière pénètre dans la chambre, voit l'état de la souffrante, panique, et lui assène un coup dans le thorax. Rapidement elle retrouve des couleurs et semble reprendre ses esprits.

La vieille femme faisait un arrêt respiratoire et avait failli mourir.

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⏰ Last updated: Feb 01, 2016 ⏰

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