24.

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Mes parents s'inquiètent. Hugo leur a raconté que j'ai pleuré. Ils se souviennent alors que cette année, je suis d'humeur plus morose qu'avant. Ils l'ont évoqué rapidement à voix basse, mais j'ai écourté la conservation. Leurs regards me dévisageant, en train de déceler n'importe quel indice qui pourrait les guider sur la raison de mon mal-être.

Les derniers jours où j'étais plus heureuse avec Enzo leurs ont échappés. Ils ne voient que par mon manque de joie de vivre. Je ne sais plus quoi faire par rapport à eux. Et puis, j'ai d'autres problèmes. Le plus important, il s'appelle Valentin.


Finalement, je n'ai pas pu le laisser ainsi. J'ai dit à mes parents que j'avais oublié mon portable chez Enzo, qu'il fallait que j'y reparte juste quelques minutes. Mes parents ont accepté, même s'il était dix-huit heures passées. Je n'en avais pas pour longtemps.

Je crois que je n'ai jamais couru aussi vite de ma vie. Le prof d'EPS m'aurait mis vingt à l'évaluation d'athlétisme avec ça. 

La fin de la journée se fait ressentir avec la fraîcheur qui l'accompagne. Je continue à courir, instinctivement. Il n'y a qu'un seul endroit où Valentin pourrait être maintenant.


J'arrive enfin devant l'imposant portail en fer qui garde le lieu. Un frisson me parcourt, je n'aime pas cet endroit, comme la plupart des personnes. Seul Valentin semble y retrouver du réconfort.

Les rayons orangés du soleil couchant m'éblouissent et éclairent le lieu d'une lumière douce. Je m'avance dans les allés, attentive à ce qui m'entoure. Le cimetière n'est pas bien grand, je sais que je trouverais Valentin rapidement.

Un silence imperturbable me stresse. J'ose difficilement respirer, de peur de tout gâcher sinon. Même si je ne connais aucune personne qui repose ici, la tristesse ne peut que se faire ressentir. Et cette dernière s'accentue quand je vois Valentin agenouillé devant une tombe de marbre blanc. 

Il détache son regard de l'épitaphe et des plaques mémorielles. Seulement un bouquet de fleurs bleues et blanches orne la tombe. Le nom gravé dessus me paraît évident.

Valentin tourne la tête vers moi, qui ose briser le silence du lieu par mes pas. Ses yeux sont noyés de larmes qui descendent abondamment sur ses joues. Tout en lui est composé d'une souffrance et d'une tristesse sans faille. Il ne réagit pas plus. Il pleure juste. C'est étrange de le voir, lui en apparence si fort, si détruit à l'intérieur. 

Je ne parle pas, je ne sais plus quoi dire. J'ai imaginé des tas de phrases en venant, mais tout s'est évaporé. Il ne reste que lui, anéanti par ma faute, perdu dans ce monde qui le brise chaque instant, et mon cœur serré en le voyant.

— Valentin, je suis infiniment désolée, finis-je par simplement annoncer, retenant un sanglot.

— Je me demande juste une chose, fait sa voix à peine audible. Pourquoi je perds tout sans le vouloir ? Pourquoi je l'ai perdue alors qu'elle était tout ce que j'avais ? Et toi, pourquoi je suis en train de perdre de plus en plus ?

Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi je le laisse me perdre. Parce que peut-être que j'ai fait les mauvais choix. Je suis coupable, mais je ne sais pas comment me faire pardonner pour l'instant, et c'est le pire.

— Pars Elsa. Il est là.

Je ne comprends pas sa phrase, mais ose tourner la tête vers l'endroit où ses yeux rouges sont fixés. Et je vois la silhouette d'Enzo s'avancer vers nous. Tout est en train d'empirer, je le sais. L'amour semble plus détruire que guérir.

J'aperçois les yeux menaçants de Valentin à la vue d'Enzo. Encore plus quand ce dernier prend ma main. Je le fais souffrir, mais j'ai l'impression que je n'ai pas le choix. Ou que l'unique choix que je fais le perdra incontestablement. Paradoxalement, je n'ai pas l'impression qu'il soit la plus grande erreur que j'aie pu faire. Mais cela reste une erreur. Si je rends Enzo heureux, je fais souffrir Valentin. Et inversement.

La théorie des montagnes russes - Tome 1.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant