La nuit avait été longue pour tout le monde. Les garçons dormaient et montaient la garde à tour de rôle, tandis que Madeline se reposait du mieux qu'elle pouvait sur le siège du conducteur et que je surveillais l'état de Délila en piquant un somme de temps en temps. Le froid était rude et la carcasse de la voiture qui tombait en ruine ne nous protégeait guère. L'hiver était à nos portes et je ne savais pas où nous en serions lorsque les premières chutes de neige s'abattront sur nous.
Roulée en boule sur le siège passager, je me retournais et scrutais le visage de la blessée. Elle semblait s'être calmée et je m'autorisais à dormir quelques minutes. Cependant, à peine avais-je fermé les yeux que la portière s'ouvrit et Dann glissa son buste à l'intérieur pour m'embrasser. Son haleine n'était pas très fraîche mais je me doutais bien que la mienne ne l'était pas non plus.
- Nous allons repartir dans quelques minutes, me dit-il en m'adressant un sourire.
J'acquiesçais et le grand blond s'en alla rejoindre Brian. Je dépliais mes jambes engourdies par le froid et la fatigue, me frottais les yeux et baillais à m'en décrocher la mâchoire. J'avais un mal de tête horrible et mes pensées étaient comme engluées dans du miel. Mon corps s'était mit en mode automatique. Je secouais doucement ma petite protégée qui s'éveilla en douceur. Je lui expliquais que nous allions repartir d'un moment à l'autre et ses yeux se remplirent de larmes. Je les regardais couler, complètement démunie.
- Je n'en peux plus de marcher, c'est trop dur ! s'exclama-t-elle en labourant le volant de ses petits poings.
Je passais ma main sur mon front. La nuit avait été assez dure pour que j'entende les jérémiades de la fillette à mon réveil. J'étais d'une humeur exécrable et m'apprêtais à la rabrouer en lui disant que Brian la portait la plupart et qu'elle n'avait donc pas à se plaindre mais ce dernier arriva avant que le premier mot franchisse mes lèvres. Il prit la gamine dans ses bras et elle posa sa tête sur son épaule avant de se rendormir instantanément. Je rêvais de faire comme elle mais il ne m'était pas donné de le faire. Je sortis du véhicule en titubant et clignais plusieurs fois des yeux, aveuglée par le soleil levant. Dann se précipita dans notre direction et entreprit de sortir Délila de la voiture mais celle-ci gémit et se contorsionna sans pour autant ouvrir les yeux. Je me mordis la lèvre inférieure, anxieuse.
- Il ne faudrait peut-être pas la bouger aujourd'hui...
Les garçons levèrent leurs visages vers moi et me dévisagèrent.
- Et tu veux qu'on fasse quoi, qu'on la laisse là ? me demanda Dann.
- Nous n'avons qu'à passer une journée de plus ici, après tout nous n'avons pas de timing.
Ils se concertèrent du regard et secouèrent négativement la tête ensemble.
- Il est hors de question que nous restions ici. Les zombies nous suivent peut-être et je n'ai pas envie qu'ils nous rattrapent.
Je cédais de mauvaise foi et le garçon plaça la jolie brune sur son dos le plus délicatement possible, ce qui ne l'empêcha ni de se crisper ni de se mettre à pleurer de douleur.
* * * * * * * * *
- J'ai faim ! chuchota Madeline à l'oreille de Brian tellement doucement que je l'entendis jusqu'ici, raté pour la discrétion.
Il y a cinq minutes, elle se plaignait qu'elle avait froid, puis qu'elle avait mal partout et maintenant, elle avait faim. Je ne savais pas pourquoi j'étais aussi à cran aujourd'hui mais j'espérais que ma mauvaise humeur passerait vite car je n'avais pas envie de plomber le moral de tout le monde. Moi aussi je mourrais de faim mais j'avais donné mais dernier morceau de pain rassit la veille au soir à Délila. Il ne me restait plus rien à présent, Brian n'ayant eu le temps d'emporter que le strict minimum. Ma bouche était sèche et mes lèvres calleuses. Il nous fallait boire où bien nous ne survivrions pas longtemps. Je me sentais bête d'avoir pris la fuite sans rien avoir emporté. Mourir tuée par un zombie ou bien mourir de faim et de soif, aucune de ses solutions n'était plus tentante l'une que l'autre.
- Je te promets que nous allons trouver de quoi te rassasier, la rassura Brian.
Cependant, je ne voyais pas comment il comptait tenir sa promesse. A perte de vue, je ne voyais que du goudron, du goudron traçant notre chemin vers... nulle part. Nous n'allions nulle part.
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L'armée du zénith
Science FictionLe monde n'est plus ce qu'il était. Du jour au lendemain, la vie de milliards d'humains a virée au cauchemar. Des créatures repoussantes ont envahi le monde, semant le chaos sur leur passage. Thelia est une rescapée. La jeune fille vit avec sa mère...