Chapitre 4 ~ Menace

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Mes doutes furent confirmés lorsque les iris vert émeraude d'Aveleen apparurent à travers la fenêtre. L'arbre qui longeait le mur de pierre la soutenait pour qu'elle se rende à proximité de mon compartiment. Je remarquai qu'elle détenait en sa possession une sorte d'objet, j'arrivais à le distinguer avec difficulté, mais j'en déduis enfin qu'il s'agissait d'un lance-pierre.

— Était-ce réellement nécessaire de lancer des cailloux ?

Elle y répondit par un léger sourire.

— Ça fait mal, lui informai-je en me massant la joue continuellement.

— La précision du lancer, c'est mon fort. Je n'y peut rien.

Je lui fis une grimace.

— Maintenant, cesse de pleurnicher et ramène ton derrière de prince ici tout de suite ! m'ordonna-t-elle en me lançant un clin d'œil.

— Voilà une offre que je ne peux certainement pas refuser, et tu le sais bien.

— En effet, avoua-t-elle, toujours souriante.

Je la rejoignis en me projetant par dessus le rebord de la fenêtre et m'agrippai de toutes mes forces à l'arbre se situant devant, celui auquel elle était, elle aussi, accrochée.

Une fois que nous fûmes sortis de l'enceinte du château, la végétation qui peuplait les environs nous envahit tandis que nous entamions notre route vers sa demeure, qui était isolée au milieu des bois, loin de tous les villageois indiscrets. Le silence régnait, tandis que nous marchions sur la terre compacte que le chemin possédait. D'ailleurs, toute la flore qui peuplait celui-ci nous ralentissait. Néanmoins, il se libéra quand nous arrivâmes au sentier qui menait directement à la petite maisonnette de bois.

Lorsque nous quittâmes cet endroit verdoyant, les rayons du soleil percèrent l'ambiance intimidante. Nous avions l'habitude de nous promener ensemble plus souvent par ici, nous pouvions passer des heures en train de nous amuser et d'explorer cette terre qui m'était dorénavant si familière.

— Qu'avais-tu de si futile aujourd'hui ? De la littérature encore ?

— C'est cela, en effet. Comment as-tu su ?

— Tu n'as jamais été un grand lecteur à vrai dire, se moqua-t-elle en centrant sa vue sur moi.

Au moment même, elle s'écrasa contre une masse inconnue et tomba fesses premières au sol. Elle laissa un léger gémissement s'échapper de sa bouche en grimaçant. Je lui tendis la main pour qu'elle puisse se relever et je conclus que l'homme qu'elle avait percuté était en fait un membre d'une armée potentiellement connue dans tout le royaume comme La brigade d'émeraude, demeurée aux services de leur glorieux gouverneur jusqu'à présent. Cela était clair du à son uniforme qui en comportait l'insigne officielle.

— Que faites-vous dans ces bois sans l'autorisation requise ? questionna-t-il sévèrement.

— Puis-je me permettre de vous poser la même question ?

— Je ne vous dois aucune explication, nous sommes ici sous l'ordre de notre seigneur.

— Donc, si je comprends bien, il est de retour dans le royaume ?

— J'en ai suffisamment dit pour le moment, maintenant je vous prierai avec tout mon respect de retourner d'où vous êtes venus et de ne plus remettre les pieds dans les bois, du moins, pas jusqu'à ce que ce soit de nouveau sécuritaire, nous exigea-t-il.

— J'apprécierais savoir ce que mon père trame pour une fois !

Après m'avoir accordé un regard douteux et dévisagé de haut en bas avec plus d'attention cette fois-ci, il repris la parole.

— Cet endroit ne convient certainement pas à un prince, et je suis persuadé que notre gouverneur ne souhaiterait pas que vous vous aventuriez dans des endroits où vous pourriez courir de graves dangers.

— Mon bien être ne lui importe point, et puis ce n'est pas moi qui reçoit les ordres ici, soldat. Si vous vous croyez supérieur à moi uniquement parce que le roi v...

— Dites-nous quels sont ces risques que vous craignez tant ? demanda Aveleen avant même que je puisse terminer de réprimander ce vaurien.

Hésitant il décida enfin de révéler quelques informations.

— Vous êtes au courant du massacre qui s'est produit dernièrement dans ces bois, n'est-ce pas ?

— Certes, d'après les rumeurs qui circulent dans le village, des cadavres furent retrouvés, il y a quelques semaines, possédant des marques de griffes et de morsures. Est-ce vrai ? lança-t-elle.

Il hocha la tête et reprit un air concerné.

— Ce n'est pas la première fois que quelque chose de semblable ait lieu... Vous êtes conscients qu'il pourrait être question de bestioles nuisibles, prenons l'exemple des coyotes. Ce sont de féroces créatures qui pourraient très probablement être à l'origine de ces attaques, insistai-je sachant que mes explications n'étaient point convaincantes.

— Nous avons affaire à une menace bien plus grande. Contrairement à ce que vous croyez, nous craignons que la bête soit de retour. Des coyotes, bien qu'ils soient nombreux, n'auraient pu commettre de telles atrocités.

— Mais, vous n'avez aucune preuve de cela car jamais personne n'a revu le jour après cette rencontre indésirable afin de pouvoir vous informer plus au sujet de cette supposée bête, réclamai-je.

— C'est pourquoi notre gouverneur a pris la décision de recourir aux Chasseurs de nuit. Ils prendront en main ce cas.

Il ne manquait plus qu'eux, les légendaires Chasseurs de nuit. Ces assassins professionnels étaient réputés pour leurs techniques de traque, pour leurs stratégies d'attaque ainsi que pour la grande variété d'armes dont ils disposaient. J'avais de quoi me préoccuper, car ils me considéraient comme une menace. Certes, j'avais tué ces gens, car je n'avais pu la contrôler. La bête, et son envie d'assouvir sa soif... De plus, ils avaient assailli son territoire. Ce n'était pas entièrement par ma faute. Mais, je ne m'en sortais pas pour autant sans conséquences. Ils étaient à ma poursuite et désormais je devais prendre des précautions si je ne souhaitais pas être découvert. Tout serait tellement plus simple si Lune serait restée auprès de moi... J'ai eu tort de la repousser, peut-être si je l'aurais acceptée, nous n'en serions pas là. Peut-être si elle ne serait pas partie, elle aurait su comment me contrôler et je n'aurais peut-être pas après tout massacré tant de vies innocentes. Je ne pouvais rester dans ces bois maudits un instant de plus c'est pourquoi je m'adressai à Aveleen.

— Partons. Il a raison, nous ne sommes pas en sécurité ici.

Perplexe par ma réaction, elle pris un instant pour finalement acquiescer.

Esmeradia : Le cœur de LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant