Rouge Terre

VIII

Finalement, après encore une course du soleil dans le ciel, j'aperçus au loin un château. Je mis Azraël au galop et y arrivai avant la nuit. On m'y offrit le couvert et la maîtresse de maison, veuve elle aussi, voulut connaître la raison de ma présence:

"Dîtes-moi Bérenger, que nous vaut cette visite?

- Eh bien, répondis-je alors que mon visage s'assombrissait. Une mystérieuse jeune femme, travestie en homme, a tué mes parents sous mes yeux, avant d'embrasser la cuisinière et de prendre la fuite. Je cherche à venger mes géniteurs et à la punir de son... homosexualité!"

Je cracha le dernier mot avec une telle haine que le fils de mon hôtesse eut un mouvement de recul. 

"D'ailleurs, ne l'auriez-vous pas vue? Elle est grande, a des longs cheveux blonds et lisses, des yeux verts, des joues rondes, des lèvres pleines. Son cheval doit être sinon de trait, au moins lourd. "

Le jeune homme, Milon, me répondit:

"Une jeune femme correspondant à cette description a profité de notre hospitalité il y a deux jours. D'ailleurs son cheval s'était blessé aux glômes. Tu devrais le rattrapper dans deux jours voire demain soir.

-Merci beaucoup! Ça me soulage, de savoir que je suis dans la bonne direction. 

-D'ailleurs je t'accompagnerais, si tu veux bien. Ça fait bien longtemps que je ne suis pas sorti et je suis quelque peu en manque d'aventure! 

-En ce cas, il vaut mieux que vous alliez dormir, interrompit sa mère. Demain sera une longue journée. Bérenger, tu peux prendre un bain avant de dormir dans la chambre avec Milon."

Je commençai immédiatement à paniquer. J'allais être découverte! Je les remerciai rapidement et demandai à Milon des vêtements pour la nuit. Sa voix étonnée me répondit qu'il faisait bien assez chaud dans le château pour dormir nu, ce n'était pas comme si je dormais dehors. 

"Mais je suis frileux tu sais! 

-Si tu insistes, d'accord. Je t'en prêterais pour demain aussi, tes habits sont des loques. 

-Merci beaucoup! "

Je partis alors prendre un bain, prête à me cacher derrière un linge en cas d'intrusion. Mais Milon ne m'apporta pas de rechange. Je compris que je devais marcher nue jusqu'à la chambre et tremblai. C'en était fini de moi. Je drapai un tissu autour de mon corps frêle et marchai discrètement vers la chambre du jeune homme où il m'attendait, évidemment. 

Je lui tournai le dos et rougis violemment en sentant son regard sur moi, mais finalement, il ne comprit pas mon genre et je pus m'endormir presque tranquille.