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Prologue

« Admettez que tous vos changements de carrière ne se feront pas facilement. Mais ne regardez pas en arrière. » Andy Grove

Je marchais distraitement dans la rue, me préoccupant plus des bâtiments faits de briques rouges, que je ne pouvais cesser d'admirer, que du monde qui grouillait autour de moi. Newo, ville moderne et intimidante, elle demeurait inlassablement en mouvements. Ses habitants se hâtaient dans les cafés, sautaient dans des taxis ou disparaissaient à travers différentes bouches de métro et j'étais depuis plusieurs semaines devenue l'une des leurs. J'avais entendu à mon arrivée, dès le premier pas que j'avais fait sur le territoire, la voix de la détermination me répéter que c'était l'endroit parfait pour travailler. Cela ne faisait aucun doute que c'était l'unique raison pour laquelle je me trouvais dans cette ville. Celle-ci était surnommée la dame glacée pour la teinte brillante et féérique que prenaient ses hautes tours lorsque que le givre les recouvrait en hiver et également, pour le manteau de neige qui tapissait ses quartiers tous les ans. Je voulais pouvoir vivre aux côtés de cette dame, moi aussi. Je comptais bien m'y faire une place et laisser une trace indélébile sur ses ondes.
Le public connaissait mon visage à présent. Personne ne savait d'où je venais, ni ce que je représentais réellement pour Drew Bays, cette célèbre popstar qui s'était appropriée une place influente au sein de la famille des artistes de la chanson, mais on parlait de moi dans de nombreux journaux de presse people. Ce même public connaissait ma voix, des extraits de la chanson If I Were A Boy ayant circulé un peu partout sur internet. Je n'avais pu m'empêcher de fouiner sur les réseaux sociaux et sur les commentaires de la piste vocale en ligne pour savoir ce qu'en pensaient les auditeurs et, en particulier, les fans de Drew. Je fus surprise et rassurée de constater que les détracteurs étaient peu nombreux et que ceux qui avaient déjà été convaincus par Drew, l'étaient de la même façon par l'histoire de la chanson. Certains, bien que complètement inexpérimentés, utilisaient des termes techniques pour décrire la voix de cette inconnue qu'ils entendaient aux côtés de leur idole. Des adjectifs et des mots plus élogieux les uns que les autres m'avaient réchauffé le cœur. Ces avis m'avaient surtout confortée dans l'idée que c'était bien ce que je voulais faire de ma vie.
Je marchais lentement dans la rue. J'étais peu couverte ce jour là mais le temps était maussade malgré que le mois d'août touchait à sa fin. J'avançais, le pas lent, pour atteindre des endroits plus reclus de la ville. Je regardai autour de moi. La rue dans laquelle je me trouvais était bien moins bondée. On pouvait apercevoir quelques jeunes femmes profiter de leur pause pour s'asseoir à la table d'un restaurant, des touristes perdus cherchant les avenues les plus renommées de Newo ou encore des lycéens attendant le prochain bus pour atteindre leur futur établissement. Après avoir flâné dans les rues de mon nouveau lieu d'habitation, j'entrai dans le magasin que je recherchais, et qui était en réalité mon seul but de la matinée. Une pharmacie. L'endroit était frais, et je sentis des frissons parcourir mon corps alors qu'il faisait une vingtaine de degrés à l'extérieur. J'inspirai profondément l'odeur qui investissait les lieux. Elle était synonyme de santé et de propreté, et je m'y sentais à l'aise, comme insouciante des bactéries et de la pollution qui nous empoisonnait dehors. Je tournai dans les rayons, mes pensées vagabondant entre différents souvenirs, avant de m'apercevoir qu'une femme svelte et très grande, qui vraisemblablement travaillait ici, m'attendait depuis quelque temps déjà. Je m'excusai auprès d'elle, confuse d'être aussi distraite.

- Désolée de vous avoir fait attendre, j'ai des moments d'absence ces derniers temps, dis-je gênée en appuyant un doigt sur ma tempe.
- Oh, ce n'est rien. Il n'y a pas foule ici, me répondit-elle attendrie.

Elle me regarda fixement. J'étais tellement mal à l'aise que j'oubliai le temps d'un instant pourquoi je me trouvais là. Cette femme semblait venir d'une autre planète. Tout était allongé chez elle. Sa figure, son nez, son corps entier, avaient été créés sur le même schéma. Je devais lever la tête pour admirer ses magnifiques prunelles bleues qui étaient presque translucides. Son interminable chevelure blonde n'avait aucun volume et était plaquée contre son crâne. J'étais incapable de lui donner un âge. Malgré l'étrangeté de son physique, je la trouvai belle et fascinante. Une extrême douceur émanait d'elle.
Ce fut à son tour de se sentir gênée. Ses joues rosirent et elle détourna le regard. Je secouai la tête pour retrouver mes esprits, me maudissant d'avoir un comportement aussi marginal.

- Heu, je voulais savoir si vous aviez un médicament contre les nausées et vomissements ?
- C'est une gastro-entérite, une intoxication alimentaire, une allergie ou des effets secondaires à un autre médicament ?
- Je pense que c'est une intoxication, le resto d'hier était franchement limite niveau hygiène, mentis-je.
- J'ai ce qu'il vous faut.

Elle s'absenta quelques secondes avant de revenir, un carton de comprimés en main.

- Vous pouvez en prendre trois fois par jour, évitez toute activité après la prise de médicament, ça vaut pour la conduite aussi. Au mieux, restez allongée quelques heures car le médicament peut vous assommer.
- Noté.

Je réglai mon achat et pris le chemin de la sortie. Tout en marchant nonchalamment vers les portes automatiques, je lisais les instructions qui se trouvaient sur la boite. Je m'arrêtai soudainement en entendant la voix de la pharmacienne m'interpeler.

- Naomi !

Je me retournai, surprise de constater qu'elle connaissait mon nom. Je vis de là où je me trouvais ses joues s'enflammer en une couleur écarlate. J'eus d'abord peur de ne pas avoir reconnu une de mes connaissances avant de comprendre dans quelle situation inédite je me trouvais.

- Je-je ... je pourrais avoir un autographe ?