Germe

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Accoudé à son balcon, Thomas observait le ciel s'assombrir depuis déjà quelques minutes. A n'en pas douter un orage se préparait dont les prémices se voyait au loin. Il s'annonçait violent. Jamais il n'avait vu un ciel aussi noir. Les imposants nuages glissaient rapidement tel une armée informe envahissant la ville. Dans quelques minutes, il ferait nuit, les ténèbres auront conquis les dernières poches de résistance où un ciel gris faisait encore miroiter fièrement sa lumière.

-Allo ? Putain Thomy répond gros !

Une voix sortait de son téléphone. Pendant un instant, Thomas s'était perdu dans ses pensées.

- Quoi ? Ha désolé j'étais ailleurs, on disait ?

- Dit-le si je te fait chier, toujours OK pour demain matin ?

- Heu ... pour le nouvel an ?

- Bah ... pour les courses quoi, j'vais pas me taper ça tout seul. Alors ramène toi, en plus y'aura ...

Il n'entendit pas la fin de la phrase, un puissant vent s'était levé et forcissait. Désormais, il faisait nuit, pourtant il n'était que 13 heure.

Les rues étaient noires en l'absence des éclairages publiques qui n'étaient pas programmés pour fonctionner à cette heure-ci et seules quelques maisons allumées les éclairaient. Les voitures ne circulaient plus, du moins il n'en apercevait aucune ; plus personne  n'était dehors en réalité ; cela, il l'espérait. Au-dessus de lui, le ciel grondait et s'illuminait de zébrures jaune rouge et bleu tintant le ciel de couleurs fugitive et inquiétante. Pourtant, il ne pleuvait toujours pas.

- Thomy ... ? Allooooooo c'est quand tu veux...

- Ouais désolé, bon quelle heure demain ?

- Bah bzzz...zzzz..crrr heure bzz...zzbz te va ?

- Quoi ? Je capte mal putain ! Ce téléphone de ...

- bzz..zz...crr..zz pas téléphone crr....rrr aussi zzzzcrr.... 10 heure chez ..bzzcrrrrr d'acc ?

- Chez qui ?

- ..rcrrrrbzzzz -oi ...

-Allo ?? Nico ? Nicoooo ?

La communication avait coupé.

Thomas claqua la porte fenêtre derrière lui en rentrant. Frustré, il lança avec force son téléphone sur le canapé puis, après avoir récupéré de quoi se faire un sandwich, monta à l'étage et s'enferma dans sa chambre.

D'une chorégraphie répétée des dizaines de fois, il alluma son ordinateur et sa lampe de bureau, s'installa dans sa chaise de bureau puis roula jusqu'à l'interrupteur afin d'éteindre la lumière ; il aimait jouer dans le noir. Il regarda alors qui de ses amis était connecté et lança League of Legends par habitude. Il eut à peine le temps de saisir qu'il n'y avait plus aucune connexion Wi-Fi, qu'un grand bruit assourdissant se fit entendre : la foudre s'était abattue derrière lui, sur l'arbre de la maison d'en face qui se mit à brûler. Tout le quartier se retrouva plongé dans le noir.

Thomas chercha à tâtons l'interrupteur de sa chambre puis l'actionna plusieurs fois sans effet. Il s'approcha alors de la fenêtre, l'incendie diffusait une lumière éclairant les alentours. Dehors, l'orage se déchaînait. A bien y réfléchir, celui-ci s'apparentait plus à une tempête, c'était le mot. Le vent soufflait arrachant des tuiles aux maisons, déplaçant poubelles et pots de fleurs et déracinant des arbres. La foudre avait redoublé d'intensité et frappait si souvent que le grondement en était continu. La pluie, elle, avait fini par tomber, elle s'abattait bruyamment sur les vitres, les fouettant dans une cacophonie qui s'ajoutait au vent et à la foudre. L'orchestre en était terrifiant, il régnait un tel chaos à l'extérieur, si rapidement...

Thomas sorti alors de sa chambre, et descendit lentement les escaliers. Il y retrouva sa belle-mère et son père assis sur des chaises contemplant dans un silence religieux la furie des éléments par la fenêtre. Dans l'autre coin du salon, son frère et sa sœur étaient occupés  par la même tache. Il brisa le silence en allumant la radio qui émit un grésillement insupportable. Tous se retournèrent vers lui.

- Tu m'a fait peur, dit son père

- Ouais ouais désolé j'voulais voir si y'avait encore du courant. T'as vu dehors ? C'est.... Terrifiant.

Son père ne répondit pas, il se contenta de tourner le regard vers l'extérieur. Les éclairs s'abattaient devant les fenêtres à un rythme étrangement régulier, ils semblaient même rester au sol. Au loin, Thomas cru apercevoir ses voisins d'en face, ceux dont l'arbre brûlait. Ils étaient bel et bien là, un vieux couple caché derrière la vitre et éclairé à la bougie.

Soudain, la foudre qui tombait à une dizaine de mètres du couple remonta le mur comme une traînée de poudre, brisa la fenêtre et percuta de plein fouet le vieil homme, la seconde d'après, le phénomène se répétait une seconde fois pour atteindre sa compagne qui s'évanouit dans un flash. Désormais, des dizaines d'éclairs couraient sur les murs. Tous furent saisis de panique et s'éloignèrent des fenêtres, courant vers l'escalier, Thomas en était le plus près. Il se retourna et couru, derrière lui le bruit du verre brisé se fit entendre et avec celui-ci un flash, il grimpa l'escalier le plus rapidement possible, dans son dos la lumière d'un second flash éclaira les murs, il arriva sur le palier en courant le plus rapidement possible vers sa chambre, sur le chemin il esquiva une caisse en bois révélée par la lumière d'un troisième flash, il ouvrit la porte, entra, et, avant de la refermer, aperçut le mur d'en face s'éclairer une dernière fois. Quatre flashs. Il appuya son dos sur la porte pour souffler, face à lui, le verre se brisa une nouvelle fois.

Cinq flashs

[FR] Autre-Monde (Partie 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant