19. Auriane

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Sur le plateau que je portai, la tasse en porcelaine manquait de dégringoler à chacun de mes pas tant j'étais nerveuse. Le liquide ambrée de la tisane au miel et son odeur apaisante eurent pourtant raison de moi. Rien qu'en regardant la tasse, je repris confiance en moi et en notre plan.
-Tiens, mais c'est notre domestique ! lança une voix bien connu.
Je me tendis et la tasse sur un sursaut. Quelques gouttes tombèrent sur la soucoupe immaculée. Comme je ne me retournai pas, Mars vint se planter devant moi.
-Oh, mais on prépare une infusion pour son petit chéri à ce que je vois. Quel dommage que tu ne puisses pas la lui apporter, fit-il, faussement déçu.
Il empoigna la tasse et la vida d'un trait.
-Excellent ! Refais-en une pour moi !
Prenant un air terrorisé, je me ruai à la cuisine, cachant avec peine mon sourire. Alors que je préparai une seconde infusion, le plus rapidement possible, je commençai à compter. La potion durait cinq minutes par gouttes. J'avais un quart d'heure. Je retournai dans le salon où Mars m'attendait.
-Auriane ?
Un instant, je cru que c'était moi qu'il appelait. Mais Mars regardait dans le vide. Il la voyait, Elle. Auriane.
Quelle idiote ! En prenant un faux nom, j'avais choisi le seul prénom qu'il ne fallait pas. Celui qui lui rappelait douloureusement sa bien-aimée.
Magnus m'avait dit qu'elle était blonde comme les blés et qu'elle avait une peau diaphane. Elle ne me ressemblait donc pas du tout. Mais le seul prénom faisait que Mars me détestait.
-Non, c'est impossible, tu es morte !
Le chagrin dans la voix de Mars me fit tressaillir. Je haussai la voix et déclarai d'une voix douce.
-Mars, si tu savais comme tu me manques.
-Non, c'est faux ! Tu ne m'aimes plus !
On aurait dit un enfant. Un enfant perdu.
-Je n'ai jamais cessé de t'aimer, Mars. Je ne voulais pas que tu souffres c'est tout. Mais maintenant ta rancœur et ta haine m'empêche d'entrer dans la Cité blanche, et d'accéder au repos éternel.
Mars resta interdit un moment, les larmes roulant le long de ses joues.
-Que...que dois-je faire pour t'aider ?
-Pardonner.Il est toujours plus facile de haïr que de pardonner. Accorde ton pardon à tous. Ta mère. Ton frère. Ma maîtresse. Les filles que tu as détesté parce qu'elles me ressemblaient. Les garçons qui leur ont fait du charme. Pardonne-leur à tous. Et surtout pardonne-toi à toi-même. Et lorsque tu aura pardonné, je pourrais gagner la Cité blanche et t'attendre.
-Oui ! Je... je le ferai ! Je te le jure !
-Mars, promets-moi autre chose.
-Tout ce que tu veux.
-Je veux te voir sourire. Sourire et être heureux. Te marier. Avoir des enfants.
-Je...je ne peux te promettre ça.
-Promet-le moi, Mars. C'est le premier pas du pardon.
Mars baissa la tête, la douleur inscrit sur ses traits. Lorsqu'il la releva une détermination sans faille se peignit sur ses traits.
-Pour toi, Auriane, je le promets.
-Merci, Mars.
900. J'étais arrivée au bout des secondes. Auriane allait s'effacer. J'attrapai la tasse et continuai :
-Sois heureux. Je t'attends.
-Non, Auriane, ne pars pas !
Elle devait avoir disparue maintenant. Je touchai le bras de Mars doucement en prenant un expression de peur.
-Monsieur. Voici votre tisane. Je la pose sur la table.
Je déposa la tasse. Mars secoua la tête.
-Je...
Il me regarda. Je fis la révérence et tournai les talons.
-Auriane ! me rappela-t-il d'un ton incertain.
Je me retournai vers lui.
-Euh...merci.
Il prit la tasse et en bu une gorgée tandis que mon visage prenait une expression étonnée et suspicieuse.
J'allais repartir quand il me rappela.
-Je suis désolée. Pour ce que je t'ai fais subir. Je ne recommencerai plus. Je te le promets.
Je pris un air de stupéfaction teintée de soulagement sincère. Et sortit sans un mot. Il fallait que je parle à Magnus.

Le Mythe des Roses Blanches  ☆  Le Miroir sombre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant