Sujet du bac : Écrire un poème en prose racontant un moment privilégié en compagnie des autres. Votre poème commencera par "Enfin ! Réunis !".
Enfin ! Réunis ! Le silence est enfin comblé de rires et de cris. Durant quelques heures, la nuit nous appartient.
Enfin ! L'attente de cet instant, seule, était étouffant. Inquiétant.
Enfin ! La musique résonne, partout en nous, dans nos têtes, sur nos corps, dans nos cœurs.
Terrible solitude ! Triste solitude. J'observe les visages, vos visages ! Vos visages emplis de joie et d'insouciance. Effacés les tracas de la vie, la déception d'hier et la peur de demain. Plus de plus sur le front, plus de plaies sur le cœur. L'anesthésie d'un temps, que crée cette euphorie, vaut bien plus que l'argent, même bien plus que la vie.
Les peaux qui se frôlent, les poils qui se dressent, les yeux qui se croisent et les cœurs qui s'ouvrent. Les chuchotements tout bas, les membres qui se tendent, les ragots qui s'échangent et les sourires en coin.
Mais qui, en cet instant précis, pourrait bien désirer une autre destinée ? Et que de belles paroles que celui qui pourrait me démontrer que la solitude, l'horrible solitude, est bien plus attrayante, que ce moment passé, entouré d'êtres chers et comblé à jamais. Car rien ne parviendra jamais à égaler, ces douces nuits d'été où nous étions heureux.
Et je regarde vos gestes, et j'admire vos sourires, et je prie ! Oui je prie, je prie pour toujours rester avec vous, pour que vous ne m'abandonniez jamais. Je prie pour ne jamais être seule, pour toujours vivre entourée.
Vous dansez, vous mangez, vous riez. Rien de plus simple ? Et pourtant, c'est fascinant. Hypnotisant. Car chacun de nous a sa place, chacun empli son rôle. Une absence ne peut passer inaperçue, tout comme une nouvelle arrivée. Nous sommes les rouages de la vie et quelle utilité peut bien avoir un rouage seul, sans aucun autre pour le faire tourner et aucun autre à faire tourner ?
Ce sont les flots de paroles qui alimentent mes veines, ce sont les rires qui font battre mon cœur. Et cet air de la nuit rafraîchi mon visage, et mes lèvres s'incurvent, laissant voir mon sourire, et je m'en vais danser.
Enfin ! Réunis ! La fatigue nous gagne et chacun trouve à s'assoir. Seules nos ombres continuent de danser, se mêlant entre elles, le long des murs, jusqu'à ne plus se distinguer. La musique est éteinte et les rires diminuent, les voix deviennent murmures et les pas feutrés.
Et dans le silence de la nuit, cette nuit qui nous appartient, les corps s'affaissent, un à un, et les paupières tombent, deux à deux. Et pour une fois moi aussi, le sommeil me gagne, et Morphée m'emporte dans ses bras, comblée. Enfin.