— Jenny ! cria Isaia en montant rapidement les marches.
Il était tellement furieux, qu'il ne prit même pas le temps d'observer les alentours, d'admirer toute la beauté du lieu. Il ouvrit successivement les nombreuses portes des chambres en appelant son ami d'enfance, quand soudainement, la porte de la chambre la plus loin s'ouvrit sur une petite Italienne, le regard interrogateur.
— Qu'est-ce qu'il y a Isou ? demanda-t-elle innocemment.
Isaia fonça sur elle, la colère sortait par tous les pores de sa peau? mais un sentiment, qui était jusque là discret, grimpa en flèche en lui : la peur. Il devait savoir ce que son ami d'enfance lui avait envoyé. Il tendit alors la main devant elle, les sourcils froncés et le regard sévère.
— Montre-moi ton téléphone !
Jenny sembla pâlir et, sûrement dans un geste inconscient, elle fit un pas en arrière et son regard se baissa au sol.
— Euh...
Au même moment, toute la petite bande sortit de la chambre, alertée par les voix des deux amis, surtout celle d'Isaia.
— Oh, qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Sélim en s'approchant.
Il partit directement près de son cousin, comme prêt à le défendre sans même connaître l'histoire.
— Jenny a envoyé une vidéo de moi à Ilyes !
Le rugbyman en écarquilla les yeux de surprise. Il regarda la jeune femme et, la voix plus dure, lui demanda :
— C'est vrai ?
— J'ai juste envoyé une vidéo mignonne que j'ai trouvé dans le téléphone d'Adriano, j'ai rien fait de mal ! s'exclama-t-elle, clamant son innocence.
Isaia pâlit. Si c'était Adriano qui l'avait, cela voulait dire que c'était un moment qui s'était passé en Italie... Il espérait du fond du cœur que ce soit une vidéo banale, mais il savait que ce serait trop simple.
— Jen', montre-nous cette vidéo, demanda Sélim plus calmement.
L'Italienne hésita quelques secondes avant de sortir son téléphone de sa poche, de le déverrouiller, de le mettre sur la vidéo et le leur tendit, toujours avec cette expression perdue.
— Merci, souffla son cousin qui réceptionna le smartphone.
Isaia se pencha et regarda attentivement la vidéo que Sélim avait lancé. Il crut s'évanouir en le voyant se trémousser contre Ilyes, filmé de loin, dans cette fête où une fille lui avait rappelé sa mère. Une soirée terminée par une crise d'angoisse. Il posa une main contre le mur à côté, sentant sa tête tourner.
— Oh mon dieu...
— Isaia, tu vas bien ? questionna Jihane, qui était au côté de Jenny.
C'était, apparemment, le seul à voir à quel point le châtain descendait marche par marche aux enfers. Tous les autres se mirent derrière Sélim pour visionner la dite vidéo. Étonnement, personne n'osait parler, comme si aucun ne réagissait face à un Isaia complètement dévergondé qui se frottait sensuellement au bassin de son ancien bourreau. Il ne pensait même pas aux faits qu'il était exposé aux yeux de tous ses amis et cousins, non, lui était obnubilé par le nouveau moyen de chantage d'Ilyes... Le brun avait sauté sur l'occasion lors des photos volées, il n'hésiterait sûrement pas à le faire chanter de nouveau avec cette vidéo !
— Mais espèce de boulet ! Tu te rends compte de ce que t'as fait ?! hurla Claire à Jenny en la pointant du doigts.
Aussitôt, Adriano s'interposa entre les deux jeunes femmes et Hugo posa une main sur l'épaule de Claire pour l'inciter à se calmer.
— J'ai rien fait de mal ! Ce n'est qu'une petite vidéo entre eux et on sait tous qu'ils s'aiment, je ne leur donne qu'un petit coup de pouce, c'est tout.
— Oh putain... Souffla Isaia, complètement dépité par ses paroles.
Il prit sa tête entre ses mains et espéra de tout son cœur que tout ceci était une énorme blague et qu'ils allaient sortir les caméras en riant de sa crédulité.
— Jenny, tu viens de mettre Isaia dans une merde profonde, soupira Sélim en lui rendant son téléphone.
L'Italienne ne comprenait pas, sa bouche s'ouvrait et se fermait successivement, assimilant peu à peu qu'elle avait peut-être fait une énorme bêtise.
— Quelle conne ! De quoi je me mêle ! Même s'ils étaient amoureux l'un de l'autre, ça ne regarde qu'eux et eux seulement ! continua Claire, gagnée par la colère et n'arrivant visiblement pas à se contenir.
— Claire calme toi... Demanda Hugo, qui ne savait pas comment adoucir sa belle.
Isaia entendait plusieurs voix se lever en même temps, rendant tout un coup la maison bruyante. Des menaces, des insultes, des excuses, des tentatives d'explications se faisaient entendre mais le châtain était trop dans ses pensées pour intervenir. Puis, une phrase lui fit relever la tête.
— Ilyes a volé des photos d'un shooting d'Isaia et l'a fait chanté avec ça il y a quelques mois, dévoila Sélim d'une traite, élevant la voix pour cesser leur dispute. Vous êtes content, maintenant ?
Son cousin pointa du doigt Jenny, qui était toujours cachée derrière son copain, celui-ci ayant peur que ça dérape mais ne disait rien.
— Et à cause de toi, tout va peut-être recommencer. J'espère que t'es fière de ce dans quoi tu as foutu Isaia.
Quand le châtain croisa le regard de son amie d'enfance, il y vit de la peur, de l'incompréhension, mais surtout, du remord. Elle venait de comprendre ce qu'elle avait fait et tout ce qui allait s'en découler.
— Isaia je...
— C'est bon, la coupa Isaia d'un ton las.
Il se retourna et entra dans la première chambre qu'il atteignit, refermant derrière lui. Son œil fit rapidement le tour de la chambre et constata que c'était pour une personne, bien, il dormirait ici cette nuit. Il en avait ras le bol de les entendre se chamailler, même s'il était conscient que ceux qui savaient étaient furieux contre l'acte inconscient de son amie. Est-ce qu'il pouvait lui en vouloir d'envoyer cette vidéo ? Elle ne connaissait rien de leur embrouille, mais en même temps, elle n'avait pas à s'immiscer entre eux, amoureux ou non.
Jenny souhaitait les rapprocher, mais elle venait de les éloigner.
Isaia s'assit par terre, le dos contre le lit et remonta ses jambes contre son torse. Sa tête partit en arrière, une forte envie de pleurer lui prenait les tripes mais il faisait tout pour ne pas craquer. Son esprit le poussait à sombrer mais sa conscience se battait avec hargne pour le sortir de ses mauvaises pensées. Au moment où il avouait avoir des sentiments pour lui, voilà que tout allait voler en éclats et le faire de nouveau souffrir...
Il tentait de relativiser, ce n'était qu'une vidéo... Une vidéo de lui complètement compromettante ! Si Ilyes décidait de la balancer à tout le monde, il était foutu.
Ce n'était pas possible... Quand tout commençait à enfin s'apaiser, il fallait qu'un de ses amis le replonge dans le chantage, dans la méchanceté, dans le mal.
C'est au moment où il décida de se lever que la porte s'ouvrit sur Sélim, tenant dans l'une de ses mains le téléphone de Jenny.
— Si tu viens pour me parler, tu as intérêt à avoir mon paquet de clopes sur toi ! lança Isaia.
