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— On tire la langue.

L'enfant s'exécuta avec bonhomie comme s'il s'agissait d'un jeu et le pédiatre, Mr Kang, posa un petit bâton de bois avant de sourire.

— C'est très bien Minho, tu peux te lever.

La mère de l'enfant souriait gentiment et aida son fils, âgé de cinq ans, à remettre son pull. Je me contentais, moi, de rester dans un coin pour prendre des notes alors que Mr Kang poursuivait sa consultation, non sans remplir une ordonnance. Enfin, lorsque la mère et l'enfant sortirent il pivota sur son tabouret roulant dans ma direction.

— Alors, qu'en penses-tu ?

— La varicelle est bien guérie, il n'a plus de fièvre ni d'éruptions cutanées. Je suppose qu'il faudra vérifier dans une quinzaine de jours s'il n'y a pas de rechute.

— Bien, admit l'homme d'un air satisfait.

Mr Kang avait une soixantaine d'années, son visage paraissait aussi fatigué que celui de mon grand-père et il se massait régulièrement les épaules comme s'il souffrait de douleurs cervicales.

Mon stage avait débuté près d'un mois et demi plus tôt.

Même si ce n'était qu'un stage d'observation, Mr Kang me faisait toujours participer au diagnostic, me demandant parfois d'ausculter certains enfants.

Mes journées étaient longues et bien remplies, le travail d'un pédiatre ne semblait pas avoir de fin. Après une douzaine d'heures de travail dans la journée (parfois plus, parfois un peu moins) je rentrais chez moi, je mangeais et je dormais jusqu'au lendemain. Puis la même journée m'attendait jusqu'au dimanche, mon seul jour de repos.

Et encore. Parfois le Dr Kang me demandait de revenir quand il y avait une urgence. Le secteur pédiatrique de l'hôpital général de Séoul était un monde à part, fait et construit pour les enfants où tout était quasiment à leur taille, les chambres étaient plus colorées, les pièces collectives aussi, il y avait des animateurs spécifiques, des sages-femmes, des soignantes en tenues roses, des dessins recouvraient les murs, des animaux venaient rendre visite...

J'adorais ce monde, vraiment. Chaque fois que Mr Kang me libérait de mon travail d'observation pour une réunion avec les autres médecins des différents secteurs de l'hôpital, je rejoignais les animateurs et les soignantes.

Le secteur pédiatrique était un endroit où il y avait de la vie, des cris, des rires où ça courait, où ça jouait, faisant oublier parfois les murs stérilisés et le contexte même d'un hôpital.

Certains enfants étaient là temporairement, pour des bras, des jambes cassées par accident de skate, ou des grippes carabinées. D'autres, malheureusement, avaient une santé plus fragile et des maladies plus graves.

J'aimais les enfants, vraiment. Les voir me rendait heureux, jouer avec eux, prendre soin d'eux était plus qu'un passe-temps mais une véritable vocation. Être avec eux me libérait de toutes mes tensions internes et me rendait moins ennuyant, moins amorphe, plus empathique, comme si je me nourrissais de leur joie de vivre pour être un peu plus différent. À présent que mon stage était bien entamé, je savais que j'avais fait le bon choix.

Je n'avais plus aucun doute sur mon futur : je serai pédiatre.

Même si j'étais très fatigué et surchargé de travail, l'université et Mr Kang m'avaient demandé de faire un rapport de stage de plusieurs trentaines de pages composé de cas clinique, et je prenais un vrai plaisir à l'écrire.

Durant ces dernières semaines, j'avais croisé quelques fois Jin hyung dans le service de cardio et quand nous pouvions, nous déjeunions ensemble. Il était tout aussi débordé que moi et bien que peu sûr de son avenir, il semblait se plaire dans son stage.

Le VoyeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant